La nature de la phase externe, et par conséquent le type d’émulsion, peuvent être détectés par différentes techniques :
Par des expériences de dispersion d’un petit volume d’émulsion dans une phase aqueuse ou huileuse :
Par exemple, si l’échantillon prélevé est dispersible dans l’eau (respectivement dans l’huile) l’émulsion est de type H/E (respectivement E/H) [17].
En effet, dans la majorité des cas, l’eau, contrairement à l’huile, contient un électrolyte. La conductivité de la phase aqueuse est donc 100 à 1000 fois plus élevée que celle de l’huile. La valeur de la conductivité d’une émulsion dépendant de sa phase externe, il est donc relativement facile de déterminer si l’émulsion est de type E/H ou de type H/E. La conductivité d’une émulsion (κem) est directement liée à la conductivité de la phase externe (κext) et à sa fraction volumique (fW). Ainsi, en première approximation on peut utiliser la relation linéaire suivante : κem = fw.κext (Équation 2 : conductivité d’une émulsion)
La phase externe peut être aussi d’une importance capitale dans l’interprétation des phénomènes observés pour les émulsions, notamment pour détecter l’inversion de phase au cours d’un procédé d’émulsification [18].
Le principe de ces techniques repose sur la détermination de l’hydrosolubilité ou de la liposolubilité de l’émulsion formée via des colorants comme le bleu de méthylène et le rouge soudan.
Une des propriétés importantes des émulsions est la taille des gouttelettes, qui peut être déterminée par une méthode de mesure appelée « granulométrie ». La taille des gouttelettes est particulièrement représentative des conditions d’agitation et de formulation dans lesquelles l’émulsion a été élaborée. Dans la plupart des cas, une émulsion contient des gouttelettes de tailles différentes, notamment à cause du caractère partiellement ou totalement aléatoire des procédés d’agitation, donc une distribution de tailles de gouttelettes qui représente un inventaire statistique de la population présente dans l’émulsion. L’émulsion peut être caractérisée par une seule valeur de diamètre représentative d’une moyenne de l’ensemble de la population de gouttes [10].
Le comportement rhéologique d’une émulsion est souvent complexe en raison de l’influence de nombreux paramètres inhérents à la structure (tailles et organisation des gouttelettes) ou aux composés chimiques utilisés. De nombreux modèles qui existent dans la littérature relient la viscosité d’une émulsion à ses caractéristiques, mais ils sont pour la plupart de nature empirique (expérience) et limités à des cas bien précis. La viscosité d’une émulsion dépend de la viscosité de la phase externe qui s’exprime en général par la relation suivante : emext f (autresvar iables) (Équation 3 viscosité d’une émulsion)
où « em » et « ext » se réfèrent respectivement à l’émulsion et à la phase externe. F représente la contribution des effets des autres variables (tailles de gouttelettes etc…) et tend vers l’unité quand le contenu de la gouttelette tend vers zéro. On écrit souvent cette équation sous la forme : rem ext(Équation 4 : ηr est la viscosité relative).
Le comportement rhéologique d’une émulsion dépend alors souvent de la viscosité de sa phase externe [9].
Le pH joue un rôle très important dans la stabilité des émulsions. L’angle de contact, l’adsorption des particules à l’interface, le potentiel Zêta et d’autres facteurs sont des paramètres influencés par le pH.
La résistance de la structure de dispersion des particules est renforcée par l’augmentation du pH, de même leur comportement d’adsorption à l’interface huile/eau est contrôlé par le pH. Le potentiel zêta diminue avec l’augmentation du pH. L’angle de contact augmente également avec l’augmentation du pH mais la variation est faible. En somme la stabilité des émulsions augmente avec l’augmentation du pH [19].
Les particules peuvent former des structures diverses lorsqu’elles sont adsorbées sur une interface (Figure 1). L’adsorption des particules et leur structure à l’interface dépend de la compétition entre les forces de répulsion et d’attraction entre les particules, dues aux interactions de Van der Waals, électrostatiques ou capillaires. De plus, le mouvement Brownien contribue, pour les petites particules, à l’arrangement des particules à l’interface. La stabilisation des gouttelettes est due à des phénomènes dépendants de la configuration adoptée par les particules adsorbées et peut faire intervenir des processus très différents.
La première configuration des particules adsorbées décrite est la suivante : les particules individuelles forment une mono ou une multicouche recouvrant complètement l’interface [20]. L’utilisation de sel (NaCl entre 10-5 et 10-2M) permet de modifier la quantité de particules adsorbées, passant d’une couche incomplète à une monocouche dense ou une multicouche, qui devient rigide si l’on dépasse la concentration critique de coagulation des particules. Dans certains cas, les particules forment une multicouche qui se répand dans la phase externe en formant un réseau tridimensionnel [2].
Mécanismes de stabilisation
La stabilisation des gouttelettes peut être assurée de plusieurs façons :
Pour des gouttelettes recouvertes complètement de particules, la stabilisation est assurée grâce à la formation d’une barrière mécanique qui empêche la coalescence. Cette barrière a des propriétés viscoélastiques ; la composante élastique croît quand la concentration en particules augmente. La formation d’une barrière rigide permet aussi d’obtenir des gouttelettes déformées, par exemple ellipsoïdales, et stables [24, 25].
Si deux couches de particules en contact fusionnent en une seule couche, des gouttelettes peuvent rester intactes. Ce phénomène s’appelle pontage [26-28]
Pour des mono et multicouches, le mouvement des particules de l’interface vers le volume et à l’interface peut être empêché stériquement ;
La stabilité du film de phase continue entre les gouttelettes peut aussi empêcher la coalescence. Le film peut être stabilisé par des forces capillaires et/ou les propriétés rhéologiques de l’interface elle-même [29-31].
Le mécanisme de la stabilisation dans le cas des interfaces non complètement recouvertes est peu compris. Vignati et ses collaborateurs ont montré que la formation de ponts par des particules entre des gouttelettes améliore la stabilité des émulsions [24]. De même, Arditty et ses collaborateurs ont prouvé que des gouttelettes non complètement recouvertes par des particules subissent la coalescence, jusqu’à ce que l’interface soit complètement recouverte [32]. Leunissen et ses collaborateurs ont également souligné que la stabilisation provenant uniquement des effets électrostatiques entre des particules est possible, même si des particules sont complètement hydrophobes [23].
Mouillage des particules et positionnement à l’interface
Afin que les particules s’adsorbent à l’interface, il est nécessaire qu’elles soient partiellement mouillées par les deux phases en présence. Le mouillage obtenu est caractérisé par l’angle de contact θ entre la phase aqueuse, la phase huileuse et le solide, mesuré du côté de la phase aqueuse [5]. La valeur de l’angle de contact peut être déterminée expérimentalement sur la surface plane d’un solide (Figure 3). La valeur de l’angle de contact est liée aux énergies interfaciales du solide et des deux liquides par la loi de Young : où θ est l’angle de contact de la particule défini dans la phase aqueuse, γS-H est l’énergie de surface solide / huile, γS-E est l’énergie de surface solide / eau et γH-E est la tension interfaciale huile / eau [3].
γH-E est l’énergie de surface huile/eau, γS-E est l’énergie de surface solide/eau, et γS-H est l’énergie de surface solide/huile [5].
Dans le cas où les forces de gravité sont négligeables devant les forces capillaires, ce qui est généralement le cas pour des particules de petites tailles, l’angle de contact détermine le positionnement de la particule sur l’interface, comme l’illustre la Figure 4 [33]. Les particules présentant un angle de contact inférieur à 90°c sont habituellement appelées hydrophiles, alors que celles dont l’angle de contact est supérieur à 90°c sont dites hydrophobes.
Le type d’émulsion (direct ou inverse) préférentiellement stabilisé par les particules dépend fortement de la valeur de leur angle de contact. Les particules solides, comme les tensioactifs moléculaires, suivent généralement la règle de Bancroft : la phase continue est celle pour laquelle les particules ont le plus d’affinité. Plusieurs modèles ont été proposés pour expliquer cette règle phénoménologique. L’un d’eux repose sur l’idée que la courbure spontanée de l’interface, donc des gouttelettes formées, dépend de l’angle de contact des particules adsorbées, comme l’illustre la Figure 5 [34].
Un autre modèle est fondé sur l’idée que l’émulsion qui perdure est celle qui offre la meilleure résistance vis-à-vis de la coalescence [35]. Le phénomène de coalescence est initié par la nucléation d’un canal dans le film liquide séparant les gouttelettes. Si ce canal atteint une taille critique, il devient instable et croît jusqu’à la fusion complète des gouttelettes. Le bord du canal étant une zone très fortement courbée, l’énergie élastique de courbure de la monocouche de tensioactif ou de particules détermine l’énergie d’activation du processus.
Considérons un film d’eau séparant deux gouttelettes d’huile, stabilisé par des particules préférentiellement solubles dans l’eau. La courbure spontanée de la monocouche est négative. Si un canal nucléé se forme dans le film, la monocouche qui le recouvre est courbée dans le sens opposé à la courbure spontanée.
L’énergie élastique associée à la formation du canal est élevée et la probabilité de nucléation est faible [35].
En revanche, si les particules sont préférentiellement solubles dans l’huile, la courbure spontanée est positive. Alors la barrière énergétique à franchir sera alors faible, et la probabilité de nucléé un canal de rayon critique sera élevé. Une émulsion de type huile dans eau sera donc stable si les particules sont solubles dans l’eau, conformément à la règle empirique de Bancroft (Figure 6) [5]. L’angle de contact n’est pas le seul critère influençant le type d’émulsion obtenue. La phase dans laquelle sont d’abord introduites les particules, la concentration de particules, les volumes respectifs des deux phases en présence ou encore la façon de générer les gouttelettes influence également le type d’émulsion [5].
Mesure de l’angle de contact
Plusieurs auteurs décrivent des méthodes permettant la mesure, directe ou indirecte, de l’angle de contact de particules. La plus naturelle de ces méthodes est l’observation directe des particules, comme l’ont fait Horvolgyi et ses collaborateurs par microscopie optique sur des particules attachées à l’interface eau / air ou eau / huile. Cette technique est néanmoins limitée à l’étude de particules de taille supérieure à 20 µm et présentant un angle de contact compris entre 30 et 150°c [36, 37].
Plus récemment, Dyab et Paunov ont observé des particules de tailles comprises entre 0,5 et 2,2 µm, adsorbées à la surface de gouttelettes d’émulsion, par WETSEM, technique pouvant permettre de mesurer les angles de contact de ces particules [38].
D’autres méthodes, plus indirectes, ont été développées pour estimer l’angle de contact des particules. La méthode de Washburn-Rideal repose sur la mesure de la vitesse de pénétration d’un liquide dans un lit de particules compressées. Cette technique nécessite cependant une quantité importante de matériau, qui n’est pas toujours disponible, et présente des incertitudes liées
à la polydispersité et aux éventuelles hétérogénéités de compression des particules [39].
Aspect énergétique
La simple présence des particules solides n’est pas suffisante pour la formation d’émulsions. Ces dernières sont formées par apport d’énergie, correspondant à l’énergie nécessaire pour créer une aire interfaciale plus grande [40 ; 41].
L’énergie de l’attachement d’une particule à l’interface d’un fluide est liée non seulement à l’angle, mais aussi à la tension interfaciale. Cette énergie détermine donc la stabilité de l’émulsion et elle augmente à mesure que l’angle de contact est proche de 90° [40].
Les particules colloïdales sont souvent adsorbées de manière irréversible à l’interface eau/ huile. En faisant l’hypothèse qu’une particule solide sphérique est de petite taille (submicronique) de sorte que l’effet de la gravité soit négligeable, l’énergie E nécessaire pour déplacer une particule de rayon r de l’interface huile /eau vers une des phases volumiques est donnée par l’équation suivante : E r2 he(11Cos he )2 (Équation 5 : énergie de l’attachement)
ΔE = énergie
r = rayon des gouttelettes
γhe = tension interfaciale
Cosθ = angle de contact
Le signe positif dans l’équation correspond à l’extraction vers la phase huileuse et le signe négatif à l’extraction vers la phase aqueuse [7 ; 42- 44].
Cette équation montre qu’en fonction de l’angle de contact, l’adsorption d’une particule à la surface peut être élevé ou faible (10KBT). Elle est faible pour des angles de contact compris entre 0 et 20° ou 160° et 180° et maximale pour des angles proches de 90°c. Pour l’angle de contact proche de 90° l’énergie nécessaire pour enlever une particule de l’interface est de l’ordre de quelque mille KBT [45, 46]. Une conséquence de la très haute énergie d’attachement des particules à l’interface par rapport à l’énergie thermique KBT est que les particules, une fois à l’interface, peuvent être comme irréversiblement adsorbée à l’interface [3].
Interactions entre particules à l’interface
Les interactions de Van der Waals regroupent toutes les interactions moléculaires d’origine dipolaire. On distingue les interactions dites de Keesom, qui s’exercent entre dipôles permanents, et les interactions de Debye qui apparaissent entre le dipôle induit d’une molécule non polaire et un dipôle permanent. Une troisième contribution, dite de London, correspond à l’interaction dipôle induit / dipôle induit. Elle est toujours présente et due au fait qu’un moment dipolaire spontané, lié aux fluctuations de position du nuage électronique autour des noyaux peut apparaître à tout instant. Ce dipôle induit alors la formation d’un autre dipôle au sein d’une molécule voisine, et l’interaction entre ces dipôles est à l’origine de forces attractives [47]. Pour l’interaction entre deux particules sphérique, la somme de ces contributions s’écrit ainsi : U (d )A r 12(d 2r)(Équation 6 : moment dipolaire ; interaction entre deux particules sphérique)
Où
d : la distance séparant les particules
U : moment dipolaire
r : leur rayon,
A : la constante de Hamaker qui dépend des propriétés moléculaires du matériau.
Type et stabilité des émulsions de Pickering
Les facteurs expérimentaux influençant le type d’émulsion
Plusieurs facteurs expérimentaux influencent la position des particules à l’interface, et par conséquent la stabilité des émulsions.
La mouillabilité des particules
Les propriétés physico-chimiques de surface des particules déterminent leur mouillabilité par des liquides. En effet, Schulman et Leja ont publié la première étude portant sur une variation de la mouillabilité des particules de sulfate de baryum et l’influence de l’angle de contact sur la stabilisation des émulsions. Ils ont observé que le type d’émulsion obtenu dépend directement de la valeur de l’angle de contact entre solide, phase huileuse et aqueuse [49].
Le traitement chimique de surface peut modifier la mouillabilité des particules. Par exemple, dans le cas de particules de silice, le greffage de chaînes hydrocarbonées à la surface les rend hydrophobes. Selon le taux de greffage, il est possible d’obtenir toute une gamme de silices hydrophiles, partiellement hydrophobes ou totalement hydrophobes, ce qui peut être exprimé par la quantité de groupements hydroxyles libres résiduels à la surface. De telles particules, sans être amphiphiles, présentent une affinité pour les interfaces eau / huile [50].
De plus la modification de la surface des particules peut avoir lieu in situ. Les oxydes ou les métaux sont modifiés chimiquement par l’adsorption d’acides carboxyliques à chaîne courte ou des amines à leur surface. Il est également possible de transformer certaines particules hydrophobes en particules hydrophiles, ou réciproquement, par changement du pH [51-53]. Binks et Lumsdon ont montré que les mêmes particules de silice peuvent stabiliser des émulsions eau dans huile à pH inférieur à 9 et des émulsions H/E à pH supérieur à 12,5. Cette inversion de phase est due au changement de la distribution des particules de silice entre la phase aqueuse et huileuse. A pH élevé, les groupements silanol SiOH se dissocient en SiO-, ce qui augmente légèrement le mouillage de particules par l’eau et favorise la formation d’émulsions huile dans eau [34].
Dans le cas d’un mélange de particules hydrophobes et hydrophiles stabilisant une émulsion de rapport huile / eau fixé, l’augmentation de la fraction de l’un des types de particules peut conduire à une inversion transitionnelle des phases. Par exemple, dans une émulsion eau dans huile stabilisée par la silice hydrophobe, l’ajout de la silice hydrophile conduit à l’obtention d’une émulsion huile dans eau [54]. Ce phénomène est similaire à celui observé dans le cas des émulsions stabilisées par les tensioactifs où l’ajout d’un co-émulsifiant hydrophobe en présence d’un émulsifiant hydrophile provoque l’inversion de l’émulsion [5].
Localisation initiale des particules
Une explication possible de l’influence de la localisation initiale des particules est la différence du caractère hydrophobe pour des particules mouillées par l’eau et par l’huile. Pour des particules qui s’adsorbent à l’interface en entrant du côté de l’eau, l’angle de contact effectif est l’angle de contact au recul (dans l’eau). Au contraire, il s’agit de l’angle à l’avancée (dans l’eau) quand des particules sont adsorbées à partir de l’huile. Puisque les angles au recul sont plus petits que les angles à l’avancée, les mêmes particules se comportent comme si elles étaient plus hydrophiles, donc avec une préférence pour la stabilisation des émulsions de type H/E. La situation inverse est observée pour des particules avec un angle à l’avancée : elles sont plus hydrophobes, donc avec une préférence pour des émulsions E/H. La stabilité optimale peut donc être obtenue par un simple changement de la localisation initiale des particules [5, 55].
Cependant, la valeur de l’angle de contact seule ne détermine pas le type de l’émulsion obtenue, notamment, les particules présentant un angle de contact proche de 90°c peuvent stabiliser les deux types d’émulsion. Les interactions entre les deux phases de l’émulsion et les particules stabilisantes jouent un rôle important lors de l’introduction de la deuxième phase de l’émulsion.
Yan et coll. ont démontré que les particules doivent résider dans la phase externe d’émulsion avant l’émulsification pour stabiliser des émulsions. Si les particules hydrophobes sont dispersées dans l’eau avant l’émulsification, elles ont peu de probabilité de passer la barrière de l’interface et d’entrer dans la phase huileuse. Un apport d’énergie important serait nécessaire pour forcer ces particules à traverser l’interface [56, 57].
Les facteurs expérimentaux influençant la stabilité
Taille et forme des particules
La taille des particules détermine leur potentiel à rester en suspension et leur adsorption à l’interface. Expérimentalement, il a été montré qu’une diminution de la taille des particules, au moins jusqu’à un certain point, augmente la stabilité des émulsions car diminue la taille des gouttelettes formées jusqu’à une taille minimale [25]. A ce jour, il n’y a pas d’étude systématique dans la littérature sur l’influence de la polydispersité des nanoparticules sur la stabilisation des émulsions de Pickering.
La forme et la rugosité de la surface des particules ont une influence sur leur mouillabilité. Ces deux valeurs impactent également l’hystérèse de la valeur de l’angle de contact. Afin de simplifier les calculs et l’analyse, les modèles de stabilisation d’émulsions de Pickering considèrent généralement des particules sphériques. Cependant, en pratique, les particules stabilisantes sont souvent anisotropes ou rugueuses. Ainsi, les particules d’argile ont une forme de disque, et les particules de silice pyrogénées largement utilisées pour la formation d’émulsion de Pickering forment des agrégats tridimensionnels stables, composés de particules sphériques [56 -58]. Il n’y a pour le moment pas d’étude systématique sur le rôle de la forme des particules dans la stabilisation des émulsions de Pickering. C’est sans doute l’un des facteurs les moins bien compris.
Etat de dispersion des particules
Le pouvoir dispersant des particules peut être défini comme leurs propriétés de pouvoir maintenir des particules solides en suspension dans un liquide [59].
Les particules agrégées s’adsorbent plus fortement à l’interface. Des études ont montré qu’une légère floculation des particules par ajout de sel ou variation du pH conduit à des émulsions stables mais une forte floculation conduit à des résultats négatifs [41]. Pour des émulsions de type huile/eau cette floculation est obtenue par ajout d’électrolytes. L’ajout d’électrolytes comme le NaCl lors de la formulation entraine une diminution du potentiel zêta avec augmentation du pH conduisant à l’agrégation des particules LDH en flocons plus grands. La résistance de la structure des dispersions LDH est renforcée par l’augmentation du pH et la concentration de particules. Une légère variation de l’angle de contact a aussi été observée [19]. Il est rapporté que les dispersions floculées sont plus efficaces dans la stabilisation des émulsions car les particules qui ne sont pas floculées ont plus de mobilité à l’interface que des particules floculées entrainant facilement la coalescence [1 ; 60].
Concentration des particules
La taille des gouttelettes de l’émulsion diminue quand la quantité de particules augmente par rapport à la quantité constante de phase dispersée. Cela a lieu jusqu’à une taille limite minimale des gouttelettes et l’excès de particules apparait dans la phase externe [25 ; 61].
La concentration importante en particules ne signifie pas un recouvrement dense de l’interface. Les équipes de Yan et Levine ont observé que des particules sont dans la phase extérieure d’émulsion, même quand la surface des gouttelettes n’est pas entièrement recouverte [62, 63]. Mais pour une concentration trop faible en particules, la taille moyenne des gouttelettes augmente dans le temps. L’ajout des particules dans la phase externe après préparation d’émulsion provoque la gélification de la phase externe et ne provoque pas de diminution de la taille [32 ; 34]. La formation d’un réseau tridimensionnel de particules floculées dans la phase externe autour des gouttelettes a été observée quand la quantité de particules est suffisante. Cela améliore la stabilité en gênant le contact mutuel des gouttelettes. Par exemple, des particules d’argile forment un réseau dans l’eau et entourent les gouttelettes d’huile [64, 65].
Phénomène d’instabilité
Une émulsion est instable thermodynamiquement. La stabilité des émulsions ne peut être atteinte que si le formulateur est capable de ralentir ou d’inhiber les mécanismes physiques qui conduisent normalement à la démixtion des phases non miscibles [66]. Ces mécanismes sont explicites ci-dessous.