Définitions du concept et théories
L’estime de soi est un paramètre qui nous semble vital à l’étude d’un public en difficulté scolaire. Comme nous l’avons précisé ci-dessus, les élèves de cursus spécialisés comme la SEGPA ont souvent une image dévalorisée d’eux-mêmes et manquent de confiance en leurs compétences intellectuelles et/ou scolaires (Tali, 2012). Nous avons donc cherché à savoir comment l’estime de soi se construit et de quelle manière elle évolue avec l’âge. Il faut tout d’abord être très vigilant en ce qui concerne la terminologie. En effet, la perception de soi, l’image de soi, la conscience de soi et l’estime de soi ne sont pas des termes interchangeables. Ainsi, la perception de soi à une valeur descriptive alors que l’estime de soi à une valeur évaluative et ne se développe qu’à partir de 7 ou 8 ans (Harter, 1990). En termes de développement, un bébé a seulement une conscience de soi alors qu’un enfant est capable d’élaborer une image de soi. De l’adolescence à l’âge adulte, c’est l’étape de construction d’une représentation de soi qui amène à une sensation d’identité (Nader-Grosbois & Fiasse, 2016, p.24). À l’instar de nombreux concepts, la perception et l’estime de soi sont des notions complexes à définir. La perception de soi peut être considérée comme une « variable » influençant le « développement global, [l’] apprentissage et [la] santé mentale » d’un individu (NaderGrosbois & Fiasse, 2016, p.17). Le concept de soi ou estime de soi représente quant à lui un ensemble d’étiquettes auto-descriptives qu’une personne attribue à ses caractéristiques physiques, ses comportements, ses habilités ou ses performances (Cadieux, 2003 en se basant sur Harter, 2003, 2006). Cette notion implique donc une polarité se situant sur un continuum allant du positif au négatif et peut être réaliste ou irréaliste, en fonction de la correspondance entre auto-description et hétéro-description. Le concept de soi joue un rôle d’interface entre la connaissance de soi et le Moi idéal, la proximité ou au contraire la divergence entre de ces deux représentations influe sur l’estime de soi (Duclos, 2004, p.32-33, figure 1). En effet, plus le décalage est important entre connaissance de soi et Moi idéal, plus l’estime de soi sera faible. Cette dynamique n’est pas sans rappeler la théorie fondatrice de James en 1890 qui dans une approche psychosociale calcule le niveau d’estime de soi en fonction de la différence entre aspirations et réussites d’un individu. Il existe différentes dimensions de la perception de soi :
– le soi cognitif ou soi scolaire qui correspond à la perception que se fait un enfant de ses compétences à apprendre les comportements scolaires ;
– le soi physique qui est lié à l’apparence et aux compétences sportives, évaluées en comparaison avec les pairs ;
– le soi social qui est déterminé en fonction de la façon dont l’individu se perçoit socialement, c’est-à-dire s’il se sent accepté ou non par ses pairs ;
– le soi comportemental qui correspond à la perception que se fait un individu de ses comportements et conduites ou autrement dit le respect des normes sociales (Nader-Grosbois & Fiasse, 2016, p.40-44).
Nous pouvons donc constater que l’interaction avec « l’autre » est indispensable et indissociable de la construction de soi (Rodriguez-Tomé, 1972 cité dans Nader-Grosbois & Fiasse, 2016). De plus, toutes ces dimensions interviennent à part entière dans la construction d’une représentation de soi, nous retiendrons donc un modèle hiérarchique multidimensionnel du concept de soi qui intègre à la fois une vision globale et une vision spécifique de l’estime de soi. Nous avons donc décidé d’utiliser le modèle de Marsh représenté ci dessous par la Figure 2.
Estime de soi et adaptation scolaire
Selon Bressoux (2003), l’estime de soi scolaire diminue progressivement au fur et à mesure que le niveau scolaire des élèves diminue. Il existerait cependant un seuil à cette dévalorisation liée à l’échec scolaire au-de là duquel la survie psychique de l’apprenant deviendrait intolérable. Afin de se protéger contre un environnement scolaire hostile, les élèves développent des stratégies dites stratégies autohandicapantes. Ces stratégies représentent des mécanismes psychosociaux de défense mis en place par les apprenants dans le but de faire face à un espace de dévalorisation perpétuelle (Martinot, 2004). Une première stratégie autohandicapante est celle de la diminution des efforts fournis par l’apprenant. Ainsi, en cas d’échec, celui-ci ne peut pas l’attribuer à un manque de compétences. Cette stratégie renforce à long terme les difficultés de l’élève et devient donc un moyen systématique d’aborder les tâches. De plus, si l’apprenant décide par la suite de fournir un effort sans obtenir de résultats immédiats, il pourrait être amené à penser qu’il n’est pas intelligent et à abandonner. Une seconde stratégie autohandicapante, plus influente encore que celle précédente sur l’individu, consiste à un désengagement de la part de celui-ci. L’apprenant n’accorde plus d’importance à une tâche ou à un domaine. De ce fait, il ne se définit plus à travers ce domaine, qui ne contribue donc plus à son estime de lui-même. Cependant, la disparation de motivation à l’encontre de la tâche entraine une baisse des performances ainsi qu’un fort risque d’absentéisme de la part de l’élève désengagé. Si l’on va même plus loin, il se peut que l’apprenant dans le but de protéger son estime de lui-même d’un environnement scolaire hostile, décide de redéfinir ses critères identitaires avec des normes antiscolaires et par conséquent, « avoir une mauvaise note devient un critère de réussite sociale » (Tajfel et Turner, 1986). En résumé, les stratégies autohandicapante préserve l’estime de soi tout en garantissant des résultats affectifs positifs mais en provoquant également des résultats cognitifs négatifs. Une autre facette de l’adaptation scolaire liée à l’estime de soi est celle des buts poursuivis par les apprenants en allant à l’école. Selon Cosnefroy (2004), il en existe trois types :
1) Les buts d’apprentissage : dans ce cas l’apprenant perçoit l’école comme un moyen d’augmenter ses performances, de comprendre et de maitriser de nouvelles compétences. Ce type d’élève cherche à se dépasser et conçoit le parcours scolaire comme une progression personnelle.
2) Les buts de performance : ils sont basés sur la valorisation de soi et la comparaison sociale.
L’objectif de l’élève est d’obtenir des évaluations positives sur sa performance scolaire mais aussi sur sa personne afin d’augmenter l’estime de soi. En cas d’échec, cette posture représente un risque sur le plan de la valorisation personnelle. Contrairement aux buts d’apprentissage, les buts de performance ne permettent pas un traitement approfondi des connaissances mais plutôt un traitement superficiel et accumulatif mettant en avant l’aspect compétitif de cette attitude face à l’école.
3) Les buts d’évitement : aujourd’hui considérés comme des buts à part entière, ils font référence à des réactions défensives déclenchées par la crainte de l’échec, pour la protection de l’estime de soi et pour éviter des expériences émotionnelles négatives (Covington, 1999). Ces buts sont associés aux stratégies autohandicapantes vues précédemment qu’ils transforment en objectifs scolaires. L’estime de soi admet 6 domaines principaux qui la construise, l’école n’est qu’un d’entre eux. L’adolescent bâtît une connaissance de soi qui conduira à terme à une notion d’identité. Le scolaire représente une grande partie de la vie d’un adolescent et participe donc grandement à l’élaboration d’une estime de soi. Lorsque celle-ci est compromise, l’apprenant développe des stratégies de protection. L’estime de soi est étroitement liée à un autre concept, celui de la motivation.
Motivation et valeur accordée à la tâche
Raby et Narcy-Combes (2009) traitent de la motivation en relation avec l’apprentissage d’une L2. De ce fait, il s’agit d’étudier à la fois le travail des chercheurs en didactique, ainsi que celui des chercheurs en psychologie cognitive. Depuis les années 80, ces deux domaines ont connus des changements de perspectives. Les didacticiens ont rajouté la question du « pourquoi » à celle du « comment » on apprend une langue, ils se focalisent ainsi sur ce qui motive les élèves à s’investir ou non dans l’apprentissage d’une langue en contexte scolaire. Pour ce qui est de la psychologie cognitive, jusqu’alors considérée comme une cognition « froide », elle se penche sur l’affect et les émotions. Il s’agit maintenant de comprendre comment l’on construit un savoir et quel est le rôle de nos croyances et de nos affects face à ce savoir. Les émotions tiennent un rôle important dans le déclenchement et le maintien de la motivation, la tristesse par exemple fait partie des difficultés de la motivation comme le démontre Vianin (2006). Raby et Narcy-Combes (2009) associent trois questions simples à la recherche sur la motivation :
1) Qu’est-ce que la motivation ?
2) Comment sait-on qu’un individu est motivé ?
3) Quels sont les facteurs qui agissent sur la motivation et comment ?
Il nous semble que notre sujet de recherche s’inscrit plus particulièrement dans le domaine du pourquoi de la troisième question. Cependant pour trouver des réponses à notre recherche il faudra forcément que nous définissions la motivation et que nous puissions l’identifier en pratique. Dörnyei, quant à lui, considère que la motivation est responsable de deux facteurs : le choix d’une action spécifique et le déploiement d’efforts pour parvenir à l’action et y persévérer. La motivation explique pourquoi les individus décident d’entreprendre quelque chose, jusqu’à quel niveau de difficulté ils sont prêts à aller et pour combien de temps (why, how hard, how long12). Dörnyei (2001) perçoit la motivation comme un élément déterminant du succès ou de l’échec d’un élève, sans motivation il est impossible de réussir. Il fait ainsi le lien avec l’apprentissage d’une L2 en argumentant qu’un élève suffisamment motivé sera en capacité d’acquérir un savoir efficace de langue, cela sans prendre en compte son aptitude pour les langues ou toute autre caractéristique cognitive. On peut donc en conclure que c’est la motivation qui est l’élément moteur de la réussite et non les capacités intellectuelles. Il apparait alors judicieux de mettre en avant cette vision de la motivation auprès des élèves et plus spécifiquement auprès d’élèves en difficultés scolaires qui ont tendance à se considérer comme moins compétents. Selon la théorie de l’expectancy-value d’Eccles et al (1983), citée par Starkey-Perret (2012), la motivation de l’apprenant dépend de la réponse aux questions, « pourquoi devrais-je effectuer cette tâche ? » qui correspond à la valeur accordée à la tâche, et « suis-je capable d’effectuer cette tâche ? » liée à l’expectative vis-à-vis de la tâche (Schunk, Pintrich & Meece, 2008, p. 50). Ainsi, ces deux composantes conditionnent des attitudes telles que la volonté de s’investir dans la tâche, la production d’efforts et le maintien de ceux-ci tout au long de la tâche et enfin la production réelle sur la tâche (Wigfield & Eccles, 2000). Tous ces comportements peuvent être lus comme des indicateurs de la motivation de l’individu et donc de sa mise au travail dans le cas où l’individu perçoit la tâche de manière positive. La valeur accordée à la tâche et les croyances quant à la possible réussite de celle-ci sont des facteurs eux-mêmes influencés par les représentations construites sur la tâche par l’apprenant, à savoir, sa capacité à accomplir la tâche, la difficulté perçue par l’individu par rapport à la tâche, ses objectifs personnels à court et long terme ainsi que sa représentation de soi (estime et concept de soi). De plus, les représentations construites précédemment par l’apprenant sur ces capacités intellectuelles et donc, son estime de soi scolaire, ont une répercussion sur les représentations de réussite ou d’échec à l’encontre de la tâche. Ainsi, la valeur accordée à la matière, ici l’anglais, ou à certaines activités sont parfois biaisées car teintées par de précédentes expériences qui peuvent être positives ou négatives (Wigfield & Eccles, 2000).
Lien entre la nature de la tâche, valeur accordée et contrôle perçu
Nos deux premiers questionnements reposent sur l’influence que peut avoir la nature de l’activité proposée aux apprenants, orale ou écrite, sur la valeur qu’ils lui accordent et sur le contrôle qu’ils perçoivent avoir sur celle-ci. Afin d’apporter des éléments de réponses à ces questions, nous allons notamment nous appuyer sur la théorie du contrôle et de la valeur des émotions d’accomplissement de Pekrun et al (2007) que nous avons explicité précédemment au sein du cadre théorique. Cet appui théorique va nous permettre de mettre en corrélation les émotions ressenties par les répondants du questionnaire avec les deux éléments de notre question. Pour commencer, nous allons étudier la phase d’anticipation d’une activité orale, première section du questionnaire. Dans cette partie, les apprenants ont majoritairement exclu les émotions négatives, à savoir la colère, l’anxiété et le désespoir. Selon Pekrun et al (2007), ces résultats indiquent que les élèves accordent une valeur positive à l’oral et envisagent donc un succès en amont de la tâche. Cependant, il nous faut temporiser cette affirmation car, même si la majorité des élèves affirment ne pas être influencée par ces sentiments négatifs, une minorité d’entre eux est concernée par ceux-ci. Ainsi, l’enseignant doit tâcher d’être vigilant vis-à-vis de ces apprenants susceptibles de décrocher avant même d’avoir commencé l’activité. Cette minorité s’exprime, par exemple, à travers l’émotion du désespoir où 15,3% des répondants, soit 4 élèves sur 26, s’accordent à dire qu’ils se sentent désespérés à l’idée d’entreprendre la tâche orale. Selon Pekrun et al (2007), ces apprenants peuvent accorder une valeur positive à l’oral malgré tout mais ils perçoivent leur contrôle sur la tâche comme faible. La phase d’anticipation de l’activité doit donc être envisagée par l’enseignant comme une stratégie d’aide, comme nous avons pu le voir lors de notre première observation de classe, afin d’expliquer, de rassurer et donc de faciliter la mise en activité. Il pourra passer par ce qui est définit par Bandura (2003) comme la persuasion verbale afin de convaincre l’apprenant qu’il a les capacités de réussir. Dans un deuxième temps, lors de la phase de réalisation de la tâche, les apprenants expriment leur motivation en faisant appel, à 76,9%, à l’émotion du plaisir. Ces élèves qui donnent à l’activité une valeur positive (Pekrun et al, 2007) et éprouvent du plaisir seront plus à même de développer un sentiment d’efficacité personnelle, et seront également plus motivés à répéter celle-ci à l’avenir (Bandura, 2003). Cette motivation pendant la tâche fut tangible lors de notre phase d’observation de classes, où nous avons pu constater beaucoup de volontaires, de respect et d’écoute ce qui témoigne d’une forte adhésion de la part des élèves. Cependant, deux émotions de notre questionnaire semblent contredire ce que nous venons d’énoncer. En effet, la honte et l’anxiété sont des sentiments omniprésents pour beaucoup d’apprenants, 42,3% disent être anxieux et 38,4% se sentent honteux pendant une tâche orale. Ceux-ci perçoivent l’oral comme ayant une valeur négative et jugent leur contrôle sur l’activité comme moyen (Pekrun et al, 2007). Ces résultats pourraient être expliqués par la nature même de l’activité car elle implique d’avoir une audience devant laquelle les apprenants doivent parler en L2 mais également s’exprimer sur des sujets de la sphère personnelle. Ainsi, en cas d’échec l’impact sur l’estime de soi et sur la motivation à l’avenir risque d’être important. L’enseignant doit donc veiller à construire un environnement de confiance et de bienveillance au sein de la classe afin de minimiser l’effet de la honte et de l’anxiété sur les élèves. Enfin, le désespoir reste minoritairement présent pendant la tâche orale avec 23,1% mais il est crucial de mettre en place des stratégies afin de prévenir les phénomènes de résignation ou d’amotivation et les stratégies autohandicapantes qui s’ensuivent, décrites par Alcorta (2008). Pour ce faire, l’enseignant doit, par exemple, s’efforcer de mettre en place un système de différenciation qui permettra à chaque apprenant d’être en contrôle et donc capable de réaliser la tâche. Comme le souligne Bandura (2003), il s’agit de concevoir des objectifs dans la zone proximale de développement de l’élève, qui soient rapidement atteignables par celui-ci afin de le motiver. En effet, nous avons observé en classe un désengagement des apprenants à mesure que la tâche se complexifie et dure dans le temps, il faut donc veiller à adapter les activités. La seconde question du questionnaire porte sur les activités écrites. Les résultats obtenus pour la phase en amont de la tâche à réaliser sont similaires à ceux décrits précédemment pour l’oral. Les apprenants se sentent de nouveau peu concernés par la colère et l’anxiété qu’ils écartent avec plus de 50% pour le degré 1. Le désespoir demeure une émotion peu tranchée qui admet 19,2% pour le degré 4 seul. Ce chiffre est plus élevé qu’il ne l’était pour l’écrit ce qui peut traduire un plus grand fatalisme des apprenants face à l’écrit. En effet, l’estime de soi scolaire des élèves de SEGPA a tendance à être marquée par des difficultés à l’écrit que nous avons pu noter lors de nos observations de classe. La maîtrise de l’écriture semble être un obstacle qui impacte la vitesse d’exécution ainsi que la motivation chez certains élèves qui se découragent, souvent parce qu’ils ont pris du retard sur une tâche écrite précédente. Ainsi, si les apprenants accordent une valeur négative à l’activité écrite de façon récurrente, ils risquent de développer des stratégies d’évitement face à celle-ci pour faire face à un environnement de dévalorisation perpétuelle (Martinot, 2004). Il pourra par exemple diminuer les efforts qu’il fournit lors de la réalisation afin de protéger son estime de soi scolaire en cas d’échec (Alcorta, 2008). Lors de l’une de nos observations, nous avons constaté ce type de recours à l’évitement, notamment face à une tâche de compréhension écrite où les élèves ont décidé de contourner la tâche en découpant le premier élément au choix pour ne pas avoir à lire les autres. Ici, le choix qui pouvait être considéré comme un élément motivationnel par l’enseignant qui tâche d’inclure l’apprenant dans la conception de l’activité comme le suggère Bandura (2003) se retrouve avec l’effet inverse. L’autre enseignante observée a choisi de passer par une phase d’anticipation plus longue où le déroulement de l’activité dans sa globalité fut expliqué aux apprenants. Une « pré-tâche » a suivi l’explicitation des consignes et a permis de décomplexifier la tâche en groupe classe. Cette stratégie a semblé porter ses fruits puisque tous les élèves se sont impliqués dans l’activité de compréhension écrite suivante. Lors de la réalisation de l’activité écrite comme de l’activité orale, l’émotion du plaisir est majoritairement exprimée par les répondants avec 69,2%. Ce chiffre bien qu’élevé, reste légèrement inférieur à celui de l’oral ce qui nous amène à penser que les apprenants sont plus motivés par l’oral que par l’écrit. Encore une fois, l’enseignant devra chercher à motiver le tiers restant de la classe afin de permettre à l’intégralité des élèves de travailler dans de bonnes conditions. Cependant, l’ennui en relation avec l’écrit est significativement moins important (57,7% pour les degrés 1 et 2) que lorsqu’il est associé à une activité orale (30,8% pour les degrés 1 et 2). On peut supposer que l’oral implique deux dimensions, la première où l’apprenant parle et la seconde où il écoute dans le cas de production orale en interaction par exemple. Ainsi, il est possible que les élèves soient moins impliqués dans les activités de réception. Ce questionnement pourrait faire l’objet d’une recherche annexe. En comparaison avec la réalisation de la tâche orale, les apprenants apparaissent plus confiants pendant l’activité écrite avec 46,1% de répondants qui ressentent de l’espoir. Il en va de même pour le désespoir où les disparités entre les degrés sont plus marquées qu’elles ne l’étaient à l’oral. En effet, 57,7% de élèves déclarent ne pas être affecté par cette émotion à l’écrit. De ce fait, les apprenants semblent plus en contrôle de la tâche écrite que la tâche orale. Les émotions d’espoir et de désespoir, bien que contraire, peuvent toutes deux indiquer une valeur positive accordée à la tâche mais démontrent cependant un niveau de contrôle perçu par les apprenants différent (Pekrun et al, 2007). Dans les deux cas, 19% des élèves sont en contradiction avec la majorité, ce qui implique qu’ils ne sont pas confiants ni fatalistes quant au dénouement de l’activité. Ainsi, contrairement aux autres, ces apprenants perçoivent leur degré de contrôle sur l’écrit comme faible. Comme nous l’avons évoqué précédemment, l’enseignant peut avoir recours à la persuasion verbale afin d’encourager et de rassurer les éléments susceptibles d’être désengagés de la tâche (Bandura, 2003). Ici encore, la différenciation permettrait de donner aux élèves un degré de contrôle sur la tâche plus élevé, en adaptant les objectifs et en les rendant accessibles (Bandura, 2003). D’autres stratégies d’aide peuvent être mise en place comme nous avons pu l’observer en classe. Pendant notre phase d’observation, l’une des enseignantes a choisi de proposer aux apprenants un exercice de compréhension écrite du même type que celui fait en classe entière au cours de la semaine mais à réaliser cette fois-ci en individuel. Elle a commencé par leur rappeler qu’ils avaient déjà mené ce genre d’activité et qu’ils étaient tous capable d’y arriver. Cette réappropriation individuelle de la tâche permet de favoriser les expériences de maîtrise qui permettent aux élèves de se sentir capable et développer un sentiment d’efficacité personnelle (Bandura, 2003). Pour finir, les émotions de l’anxiété et de la honte qui étaient omniprésentes à l’oral, ne le sont pas à l’écrit. L’anxiété est rejetée à 73,1% par les répondants et à 69,3% pour la honte. Cette différence majeure entre les deux types d’activités est sans doute liée à la nature de celles-ci, l’écrit l’apprenant est moins exposé au regard des autres et donc à l’erreur ce qui impacte ces deux sentiments négatifs. Bien sûr, l’enseignant devra quand même veiller à dédramatiser l’erreur et à faire preuve de bienveillance pour obtenir l’adhésion de tous. En conclusion, bien que plus motivés par les activités orales, les apprenants se sentent moins en contrôle de celles-ci. Ils perçoivent également leur degré de contrôle sur la tâche comme plus faible à l’oral qu’à l’écrit où ils sont moins exposés. Néanmoins, certains élèves sont plus fatalistes face à l’écrit.
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Table des matières
1.Introduction
2. Contexte et public cible : la SEGPA
2.1. Présentation et histoire de la structure
2.2. Le public cible : les élèves de SEGPA
3. Estime de soi : fonctionnement et développement à l’adolescence
3.1. Définitions du concept et théories
3.2. L’estime de soi en contexte scolaire sur un public préadolescent et adolescent
3.3. Estime de soi et adaptation scolaire
4. La motivation et ses composantes
4.1. Définitions et théories : la motivation scolaire
4.2. Motivation et valeur accordée à la tâche
4.3. Le phénomène d’amotivation ou de résignation
4.4. Le sentiment d’efficacité personnelle
5. Questions et objectifs de recherche
6. Cadre méthodologique
6.1. Contexte de recherche
6.2. Observation de classe
6.3. Questionnaire sur les représentations des élèves de SEGPA sur les activités proposées
7. Analyse des données
7.1. Résultats et analyse des données recueillies lors de l’observation en classe
7.2. Résultats et analyse des données recueillies à partir du questionnaire
8. Discussion
8.1. Lien entre la nature de la tâche, valeur accordée et contrôle perçu
8.2 Lien entre la modalité de la tâche et le contrôle perçu par l’apprenant
9. Conclusion
10. Bibliographie
11. Annexes
12. 4e de couverture
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