Monographie historique du patim-kibo et du patim-kandiaye (1903-1960)

Toute domination, pour quโ€™elle puisse perdurer, nรฉcessite obligatoirement une bonne organisation dont le corollaire serait la mise en place dโ€™unitรฉs spatiales telles que les provinces, les cantons etc. Ce qui permettrait de faciliter la gestion politique, administrative, sociale, รฉconomiqueโ€ฆ dโ€™un grand ensemble complexe comme le royaume, la subdivision, le cercle ou encore la colonie. Ainsi, en Haute Casamance, les Bainounk, peuple reconnu comme รฉtant le premier ร  sโ€™installer dans le milieu, รฉrigรจrent une forteresse ร  Mampatim qui deviendra plus tard leur capitale. Par consรฉquent, il fut donnรฉ le nom de Patim ร  toutes les terres mitoyennes ร  celle-ci. Le Patim devint, dรจs lors, le centre politique du vaste royaume des Bainounk car abritant ร  la fois la capitale et la rรฉsidence du roi. Cโ€™est pourquoi, la conquรชte des Mandingues en Haute Casamance, dirigรฉe par Tiramaghan, eut comme point de dรฉpart le Patim. Mais cette conquรชte nโ€™a pas conduit ร  une destruction dรฉfinitive du Patim, au contraire, elle a permis dโ€™agrandir le pays avec la fondation du Patim-Kibo par Tiramaghan .

Ainsi, le Patim se constituera en province directement administrรฉe par le souverain de Mampatim. Cette province, du fait de son climat favorable aux activitรฉs agricoles et pastorales, avait connu trรจs tรดt une infiltration des Peulhs, peuples รฉleveurs par excellence. Venus de lโ€™Est cโ€™est-ร -dire du Xaaso, du Macina, du Boundou, ils bรขtirent leur premier village dans le Patim entre Kanja et Banenkuru . Cette population peule sโ€™accroissait dans la rรฉgion dโ€™annรฉe en annรฉe si bien quโ€™elle nโ€™hรฉsitรขt pas ร  se rรฉvolter, en 1867, face aux vexations et brimades que les Mandingues lui infligeaient. Cette rรฉvolte consacre la fin du pouvoir mandingue et le dรฉbut de lโ€™hรฉgรฉmonie peule dans la rรฉgion. Cependant, la domination rรฉelle des Peuls sur la rรฉgion fut de courte durรฉe en ce sens que dรจs 1883, le roi du Fuladu, Muusa Moolo, signa un traitรฉ qui place sous la suzerainetรฉ de la France lโ€™ensemble des pays sur lesquels il rรฉgnait et sโ€™engageait ร  nโ€™en jamais cรฉder aucune parcelle sans le consentement du Gouvernement franรงais . Dรจs lors, le Patim fut contrรดlรฉ politiquement et รฉconomiquement par lโ€™administration coloniale franรงaise au profit de la colonie ou mieux encore de la mรฉtropole.

Cโ€™est ainsi que les Franรงais, pour mieux administrer la rรฉgion, la divisรจrent dโ€™abord en trois cantons, Patim-kandiaye, Patim-kibo et Bissabor, puis en deux cantons, Patim- kandiaye et Patim-kibo, ร  la suite du rattachement du Bissabor au Patim kandiaye . Le manque de cohรฉsion sociale des peuples de la rรฉgion, la volontรฉ de domination de celle-ci et les difficultรฉs liรฉes au contrรดle effectif des populations poussรจrent lโ€™administration coloniale ร  faire appel ร  la classe politique locale pour lโ€™exercice du pouvoir dans les deux cantons (Patim-kandiaye et Patim-kibo). Vu la trajectoire historique de la rรฉgion en Haute Casamance, il est donc รฉvident que la connaissance de lโ€™histoire du royaume du Fuladu devrait passer par la maitrise de celle du Patim.

Espace gรฉographique et convoitises colonialesย 

Le Sud du Sรฉnรฉgal communรฉment appelรฉ la Casamance se divise en trois sousensembles que sont la Basse, la Moyenne et la Haute-Casamance. Cette derniรจre est une zone relativement vaste. Elle englobait plusieurs cantons dont le Patim-Kibo et le Patim-Kandiaye. Situรฉs au Nord-est du Fuladu, ces deux cantons ยซ affectent vaguement la forme dโ€™un quadrilatรจre assez irrรฉgulier compris entre les 13ยฐ40โ€™ et 15ยฐ10โ€™ longitude Ouest Greenwich et les 12ยฐ40โ€™ et 13ยฐ20โ€™ latitude ยป . Ces coordonnรฉes gรฉographiques correspondent dans le Sรฉnรฉgal au domaine soudanien qui est assez bien arrosรฉ. Les prรฉcipitations annuelles varient entre 700, 1300 et peuvent mรชme atteindre 1500mm . En dรฉpit de ces prรฉcipitations abondantes, les deux cantons sont presque permanemment chauds. Cette chaleur quasipermanente de la rรฉgion est ร  assimiler au climat nettement continental oรน les variations thermiques entre le jour et la nuit sont assez grandes . De surcroรฎt, ce type de climat impose, dans la zone, lโ€™alternance de deux saisons bien distinctes :

– Une saison sรจche de 6 ร  7 mois pendant laquelle la zone est soumise sous lโ€™influence dโ€™un vent chaud et sec (lโ€™harmattan) ;

– Une saison pluvieuse qui dure cinq (5) ร  six (6) mois. Cette saison est la pรฉriode pendant laquelle se dรฉroulent principalement les activitรฉs agricoles dans les deux cantons.

Quant au relief, il est relativement plat dans son ensemble. Et une รฉtude pรฉdologique de la zone laisse apparaรฎtre des sols appartenant en grande majoritรฉ ร  la famille des sols ferrugineux tropicaux, riches en fer . Ainsi dans cette famille de sols ferrugineux tropicaux, nous distinguons :
– Les sols Dior qui sont dโ€™une texture sableuse et pauvres en matiรจres organiques. Ils supportent la culture de lโ€™arachide, du mil, du maรฏs, du niรฉbรฉ, de la pastรจque. Ayant une faible capacitรฉ de rรฉtention dโ€™eau, ces sols sont, en effet, fortement exposรฉs ร  lโ€™รฉrosion รฉolienne. Ils couvrent la majeure partie de la superficie du Patim-Kibo et du Patim-Kandiaye.
– Les sols latรฉritiques se caractรฉrisent, eux, par leur texture et leur composition chimique (hydroxyde dโ€™aluminium et de fer). Ces types de sols sont, en fait, localisรฉs dans la zone frontaliรจre de la Gambie, qui dโ€™ailleurs est plus รฉlevรฉe que le reste du territoire . Cโ€™est la raison pour laquelle, cette partie du Patim-Kandiaye est inculte.

Dรจs lors, lโ€™on comprend que les conditions du milieu ont un rapport รฉtroit avec les systรจmes de production dominante, en lโ€™occurrence lโ€™agriculture et lโ€™รฉlevage.

A lโ€™รฉpoque coloniale, les limites administrativesย  du Patim-Kibo et du PatimKandiaye sโ€™observaient par rapport aux autres cantons du Fuladu. Ainsi, le Patim-Kibo et le Patim-Kandiaye sont limitรฉs ร  lโ€™Est par les cantons du Kantora et du Pakane, ร  lโ€™Ouest par ceux du Kamako et du Djimara, au Sud par les cantons du Mamboua, Niampaio Koudoura et du Pathiana, au Nord par la Gambie anglaise. Cette limite nord a รฉtรฉ adoptรฉe aprรจs la confรฉrence de Berlin . Car lโ€™une des rรฉsolutions majeures de cette confรฉrence รฉtait que toute puissance รฉtablie sur un lieu pouvait pousser ses conquรชtes dans lโ€™hinterland africain jusquโ€™ร  la rencontre dโ€™une autre puissance coloniale. Dans le cas qui nous concerne, la rencontre sโ€™est effectuรฉe entre le village de Badiara (au Patim-Kandiaye) du cรดtรฉ franรงais, et celui de Sabi (en Gambie) du cรดtรฉ anglais. Cโ€™est ainsi que le 10 Aoรปt 1889, la frontiรจre entre le PatimKandiaye et la Gambie fut scellรฉe officiellement ร  la suite dโ€™une convention de dรฉlimitation de possession signรฉe entre les Franรงais et les Anglais. Dรจs lors, ยซ les contours de la future Gambie se stabilisent avec le dรฉbut des dรฉlimitations, en 1891, de la frontiรจre entre les possessions franรงaises et anglaises, pour freiner les visรฉes expansionnistes de ces derniers vers la rive mรฉridionale de la Gambie ยป .

Cependant, il convient de signaler que ces mesures conventionnelles nโ€™ont pu stopper les vellรฉitรฉs britanniques de grignoter le Nord du Patim-Kandiaye. Lโ€™objectif des autoritรฉs coloniales anglaises รฉtait dโ€™agrandir lโ€™espace gambien vers le Sud, notamment sa partie qui est juxtaposรฉe au canton du Patim-kandiaye. Car du village de Badiara (zone frontaliรจre) jusquโ€™au fleuve Gambie, la distance nโ€™est que de 13km. Pour remรฉdier ร  lโ€™รฉtroitesse de cet espace, les Anglais sโ€™affairaient aux dรฉplacements incessants des bornes ร  la frontiรจre. Dโ€™ailleurs dans un tรฉlรฉgramme lettre en date du 21 Aoรปt 1946 adressรฉ au gouverneur gรฉnรฉral, le chef du Cercle de Ziguinchor, Claude Michel, รฉcrit : ยซ jโ€™ignore si le Commissionerย  est intervenu dans cette affaire et ai priรฉ le chef de Subdivision de Vรฉlingara de se mettre en relations personnellement et officieusement avec lui pour รชtre renseignรฉ. Il parait, en effet, surprenant que des dรฉplacements de bornes aient pu รชtre opรฉrรฉs sans prendre notre attache. ยป .

Il fallait donc pour lโ€™administration coloniale franรงaise stabiliser dรฉfinitivement les limites de la frontiรจre avec la Gambie anglaise dans cette partie Nord du Fuladu. Cโ€™est ainsi quโ€™elle a fait construire deux postes de douanes sur la frontiรจre et en y affectant trois gardes cerclesย  . Ces derniers devaient surveiller en permanence les mouvements ร  la frontiรจre et veiller ร  ce que les bornes ne soient pas dรฉplacรฉes. Mais, toujours est-il que, les populations gambiennes, elles-mรชmes, tentaient de gagner de lโ€™espace du cรดtรฉ franรงais malgrรฉ la vigilance des douaniers. Leur mรฉthode tient ร  la pratique de lโ€™agriculture et de lโ€™รฉlevage en sol franรงais (Patim-Kandiaye). Et au bout de quelques mois, elles occupaient leurs anciens emplacements de champs ou de troupeaux. Cโ€™est la raison pour laquelle ces populations รฉtaient chassรฉes sur les lieux et les plus rรฉcalcitrantes sont rรฉprimรฉes par les douaniers. Dans une note datรฉe de 1947 et adressรฉe au chef de Subdivision de Vรฉlingara, le Commissioner Upper River Division/Bassรฉ รฉcrit ce qui suit : ยซ jโ€™ai reรงu lโ€™information du village de Gambissara que deux douaniers sont venus dans les champs et leur ont dรฉfendu de cultiver leur arachide sur territoire franรงais. Ces douaniers armรฉs ont poursuivi les indigรจnes et brรปlรฉ leur abri. Ensuite huit douaniers armรฉs ont confisquรฉ 160 vaches propriรฉtรฉs du village de Gambissara et les ont emmenรฉes. Ce bรฉtail รฉtait sur pรขturage en territoire franรงais (coutume aussi ancienneย  que le village) ยป . Cette situation avait sapรฉ les relations franco-anglaises sur cet espace, durant lโ€™รฉpoque coloniale, et allait constituer un obstacle aux mouvements des populations autochtones.

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Table des matiรจres

Introduction gรฉnรฉrale
Premiรจre partie : Milieu physique et รฉlรฉments culturels
Chapitre I : Prรฉsentation du cadre dโ€™รฉtude
A- Espace gรฉographique et convoitises coloniales
B- Le Patim : de lโ€™รฉtat provincial au statut cantonal
Chapitre II : Le patrimoine culturel
A- Les mล“urs et coutumes des peuples
1ยฐ) Les Mandingues
2ยฐ) Les Peuls
3ยฐ) Les minoritรฉs ethniques
Bยฐ) Les folklores locaux
1ยฐ) Les Mandingues
2ยฐ) Les Peuls
3ยฐ) Les minoritรฉs ethniques
Deuxiรจme partie : Les fondements รฉconomiques
Chapitre I : Lโ€™agriculture
A- Les cultures de plateau
B- La riziculture
Chapitre II : Lโ€™รฉlevage
A- Les espรจces รฉlevรฉes
B- Lโ€™importance de lโ€™รฉlevage
Chapitre III : Le commerce
A- Les diffรฉrents produits commercialisรฉs
B- Les acteurs du commerce
Chapitre IV : La chasse et la cueillette
A- La chasse
B- La cueillette
Troisiรจme partie : Pouvoir temporel et croyances religieuses
Chapitre I : La question administrative
A- La chefferie indigรจne
B- Les relations entre lโ€™administration coloniale et les chefs coutumiers
Chapitre II : Rรดle et place des diffรฉrentes religions dans les cantons du Patim-Kibo et du Patim-Kandiaye
A- Lโ€™islam
B- La religion traditionnelle
Conclusion gรฉnรฉrale
Annexes documentaires
Bibliographie

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