Moins de grossesses non désirées et d’abandons de la contraception
Étude des démarches en cas d’oubli
Sur les 75 patientes ayant eu des oublis de pilule de plus de 12 heures, 19 n’ont pas eu de rapport sexuel dans la semaine suivante, 23 ont eu des rapports protégés et 33 ont eu des rapports non protégés. 41,07% des patientes ont utilisé des préservatifs après un oubli lorsqu’elles avaient des rapports sexuels (RS) dans les 7 jours suivants. La population qui s’est le moins protégée après un oubli, c’est-à-dire qui utilise le moins le préservatif quand elle a des RS dans les 7 jours après l’oubli, sont les 16-17 ans avec 70% de RS non protégés (14/20). Sur les 117 oublis de pilule où les patientes ont eu des rapports sexuels non protégés lors des 5 jours précédant l’oubli, 34 contraceptions d’urgences ont été utilisées, soit 29,06% d’utilisation. La population qui a le plus utilisé la contraception d’urgence sont les 26-30 ans avec une moyenne de 0, 375 comprimé par patiente utilisé sur une année. La population qui a le moins utilisé la contraception d’urgence sont les jeunes femmes de 14-15 ans qui n’ont pas eu de rapports sexuels dans les 5 jours avant l’oubli et qui n’ont donc pas eu à utiliser de contraception d’urgence. Sur 75 patientes ayant eu des oublis, 35 ont toujours eu une bonne gestion de l’oubli contre 40 ayant eu au moins une fois un non-respect de la conduite à tenir lors d’un de leurs oublis. En d’autres termes, 46,67% des patientes ont eu la bonne conduite à tenir après chaque oubli. La population qui suit le moins souvent les recommandations de la HAS en cas d’oubli sont les 31-35 ans avec 75 % de mauvaise conduite observée après un échec d’utilisation de la contraception orale.
Points faibles de l’étude Il existe des limites à la généralisation des résultats de cette étude car il s’agissait d’une étude monocentrique réalisée au CPEF de Laval. La population du CPEF de Laval n’est pas représentative de la population cible car elle est très jeune (moyenne d’âge de 21 ans) comparativement à l’ensemble des femmes utilisant une contraception orale en France. De plus, les données recueillies ne sont que le reflet d’une année d’utilisation de la contraception par les patientes. Par ailleurs, la population jeune n’est-elle pas plus tentée d’omettre de déclarer des oublis afin d’éviter un certain « jugement » de la part du professionnel de santé ? Il s’agit d’un biais de sélection de la population source. Au contraire, ce jeune âge peut aussi témoigner d’une plus grande honnêteté d’autant plus que les consultations étaient réalisées par les mêmes professionnels, ce qui a pu permettre une relation de confiance entre le professionnel et la patiente. Le biais de mémoire des patientes doit lui aussi être pris en compte. Un oubli peut être omis ou minimisé et ainsi fausser les résultats. Les données sont issues des dossiers complétés par différents professionnels, quatre sages-femmes et un médecin. Même si un schéma identique est respecté, chaque professionnel de santé mène sa consultation de manière particulière et possède une façon personnelle d’interroger les patientes ce qui représente un biais de recueil des données.
Analyse des résultats de l’étude et comparaison à la littérature 2.1. Meilleure observance de la contraception orale Les résultats de cette étude semblent montrer l’importance de l’application de la méthode BERCER pour améliorer l’observance des patientes utilisant une contraception orale. En effet, selon l’étude Coraliance, 92 % des femmes oubliaient entre une et cinq fois de prendre leur pilule au cours des six mois précédant le sondage (20). Concernant les patientes de notre étude, elles sont 34,24% à avoir oublié de prendre entre une et cinq fois leur pilule sur une période d’un an. D’après l’enquête « Pourquoi les femmes oublient leur pilule ? » menée par la société pharmaceutique Bayer, ce sont 80% des Françaises qui ont oublié au moins une fois leur contraception sur une année complète contre 40,76% de la population source de notre étude (13). De tels écarts peuvent s’expliquer par un défaut de connaissance des femmes n’ayant pas bénéficié de la même qualité d’information et du même suivi contraceptif qu’au CPEF de Laval.
Enfin, le projet Optimège « Que faire en cas d’oubli de pilule ? » évalue les connaissances et les démarches des patientes utilisant une pilule. Ce projet s’est déroulé en deux étapes (21). Lors de la première phase, les patientes répondaient à un questionnaire sans information préalable. La deuxième étape consistait à distribuer un autre questionnaire aux patientes 3 mois après avoir bénéficié de la carte INPES intitulée « Que faire en cas d’oubli de pilule ? ». Cette étude met en évidence le lien entre la qualité de l’information délivrée aux patientes et l’observance de celles-ci. En effet, 26,3% des patientes interrogées avant de bénéficier de la carte INPES avaient oublié une fois leur contraception orale par an contre 13% (n=24) des femmes de notre population qui ont bénéficié du suivi au CPEF de Laval. A noter que 55,6% des patientes de l’étude Optimège n’ont jamais été interrogées sur le nombre d’oubli lors d’un renouvellement chez leur médecin généraliste et 15,3% des patientes n’ont jamais reçu d’information concernant les démarches à faire en cas d’oubli contrairement au CPEF de Laval où cela est systématique.
Amélioration des attitudes en cas d’oubli Il existe peu d’études analysant les démarches des patientes après un oubli de pilule. Cependant, les études existantes semblent montrer elles aussi une amélioration des attitudes en cas d’oubli pour les patientes ayant bénéficié du schéma d’entretien et de prescription du CPEF de Laval correspondant à la méthode BERCER. D’après l’enquête du Baromètre santé de l’INPES de 2010, 90% des femmes n’utilisaient pas de contraception d’urgence après un rapport sexuel à risque contre 47,8% de la population de notre étude (16). En effet, l’exhaustivité des informations délivrées aux patientes du CPEF de Laval s’avère indispensable pour améliorer les attitudes des patientes après un oubli et notamment pour accroître l’utilisation de la contraception d’urgence et ainsi diminuer le nombre de grossesses non désirées. Selon la thèse sur L’évaluation des connaissances des femmes utilisatrices d’oestroprogestatifs oraux combinés, seulement 4 % des femmes connaissaient toutes les recommandations en cas d’oubli (20). 27.3% des patientes de l’étude Optimège avaient une attitude conforme aux recommandations de l’HAS après un oubli lors de la première phase de l’étude contre 63.6% lors de la deuxième phase de l’étude c’est-à-dire après avoir bénéficié de la carte INPES (21). Comparativement, 46,67% des patientes de notre étude ont une bonne gestion des oublis. Cette proportion est supérieure aux 27,3% de bonne conduite observée lors de l’étude Optimège pour les patientes avant la distribution de la carte. Toutefois, elle est inférieure aux 63,6% observés en fin d’étude. Cela peut s’expliquer par une différence au niveau de la méthode d’acquisition des données (questionnaires vs entretien médical), et par la durée sur laquelle repose d’étude (3 mois vs 12 mois). Malgré tout, il apparaît que cette carte, expliquant les démarches à respecter en cas d’oubli, constitue un outil simple, efficace et indispensable afin d’améliorer la gestion des échecs d’utilisation de la pilule.
Le fait que les résultats concernant les oublis et la conduite à tenir observés au CPEF de Laval soient généralement meilleurs que ceux relevés dans d’autres études peut s’expliquer par l’efficacité du premier entretien et du suivi contraceptif appliqués de façon systématique au CPEF de Laval. L’entretien réalisé au CPEF de Laval, lorsque qu’une patiente consulte pour la première fois pour la prescription d’une contraception, est la mise en application de la méthode BERCER préconisée par la HAS. La qualité de l’accueil de la patiente est essentielle pour faciliter la mise en place d’une relation de confiance et une communication adéquate entre le professionnel de santé et la patiente. D’autre part, l’entretien est indispensable pour tenir compte des souhaits et des besoins de la patiente. En outre, la phase de renseignement est d’une importance capitale puisqu’elle consiste à informer de manière claire et complète la patiente et à s’assurer de la compréhension de toutes les méthodes possibles. Ensuite l’étape du choix concerne la décision finale. En effet, la patiente choisit sa contraception tout en ayant conscience de l’importance de l’observance et des risques en cas d’échec d’utilisation.
En étant décisionnaire du choix de sa méthode contraceptive, la patiente est responsabilisée. La phase explicative quant à elle consiste à informer la patiente des effets secondaires, des rattrapages à effectuer en cas d’échec d’utilisation et à délivrer l’étui de rangement de plaquettes édité par le conseil Départemental de la Mayenne « Réagir vite en cas d’oubli ». Enfin, la dernière étape est celle du retour, c’est-à-dire du suivi contraceptif de la patiente. Chaque consultation de renouvellement de la contraception fait l’objet d’une réévaluation de la satisfaction, de la tolérance et du nombre d’oubli de pilules ainsi que de leurs gestions. Au CPEF de Laval, les femmes sont interrogées sur leurs connaissances des conduites de rattrapages et de l’observance de la contraception après chaque renouvellement. Par ailleurs, depuis plusieurs années, il existe des applications sur smartphones permettant de diminuer les échecs d’utilisation de la pilule. Ces applications ont permis de diminuer le nombre d’oubli de pilule par un système d’alarme et d’apporter des informations d’utilisation de la pilule et de conduite à tenir après un oubli. Au CPEF de Laval, les professionnels de santé sensibilisent les patientes aux avantages qu’apportent ces outils. Les résultats du CPEF de Laval sont positifs et tendent à prouver l’intérêt de l’ensemble de ces pratiques.
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Table des matières
INTRODUCTION
MATERIEL ET METHODE
1. Schéma d’étude
2. Matériel
2.1. Critères d’inclusion
2.2. Critères de non inclusion
2.3. Critères d’exclusion
3. Méthodes
3.1. Le recueil de données
3.2. Les variables recueillies
3.3. Les méthodes statistiques
RESULTATS
1. Caractéristiques de la population
2. Étude du nombre d’oublis de la contraception orale
3. Étude des démarches en cas d’oubli
4. Changement et abandon de l’utilisation de la contraception orale
DISCUSSION
1. Les forces, les biais et les limites de l’étude :
1.1. Points forts de l’étude
1.2. Points faibles de l’étude
2. Analyse des résultats de l’étude et comparaison à la littérature
2.1. Meilleure observance de la contraception orale
2.2. Amélioration des attitudes en cas d’oubli
2.3. Moins de grossesses non désirées et d’abandons de la contraception
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
TABLE DES FIGURES
TABLE DES TABLEAUX
ANNEXES
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