Modifications physiologiques liées à la grossesse
Modifications métaboliques
Pendant la grossesse, on observe une élévation progressive de la consommation en oxygène, secondaire aux besoins métaboliques croissants de la mère et du fœtus, mais également au développement utéro placentaire.
Modifications hémodynamiques
Le volume sanguin s’élève à l’approche du terme. L’élévation de la volémie plasmatique est supérieure à celle de la volémie globulaire responsable d’une hémodilution physiologique. La numération des globules rouges diminue avec l’hémodilution, de même que le taux d’hématocrite et d’hémoglobine. Le taux de polynucléaires neutrophiles augmente à l’inverse, le nombre de lymphocytes n’est pas modifié au cours de la grossesse, mais leurs fonctions immunitaires sont diminuées. Le débit cardiaque augmente lors de la grossesse grâce à l’élévation de la fréquence cardiaque, mais surtout à l’élévation du volume d’éjection systolique, secondaire à l’élévation de la volémie et à une diminution des résistances artérielles systémiques. En décubitus dorsal, on observe une baisse du débit cardiaque par compression de la veine cave inférieure par l’utérus gravide, entraînant une diminution du retour veineux. Une gêne au retour veineux associée à une diminution de la pression oncotique par hémodilution peut avoir pour conséquence la formation d’œdèmes des membres inférieurs. Secondairement à l’augmentation du débit cardiaque et de la volémie, un souffle précordial d’éjection systolique asymptomatique, est souvent mis en évidence à l’auscultation, ainsi qu’un dédoublement de B1 ou B2.
Modifications respiratoires
La femme enceinte présente classiquement une rétention hydro-sodée, se traduisant en particulier par un œdème des voies aériennes supérieures. Au fur et à mesure de l’évolution de la grossesse, la respiration devient plus thoracique qu’abdominale. Le volume courant augmente au détriment du volume résiduel et du volume de réserve expiratoire qui, eux diminuent progressivement, en partie du fait de l’élévation diaphragmatique. Cette baisse du volume résiduel et du volume de réserve expiratoire est responsable d’une diminution de la capacité résiduelle fonctionnelle, ce qui explique la survenue plus rapide d’hypoxémie pendant la phase d’apnée lors de l’induction de l’anesthésie générale. L’augmentation de la consommation en oxygène entraîne celle de la ventilation-minute de la femme enceinte principalement par élévation du volume courant, mais aussi de la fréquence respiratoire. Elle se traduit par une hypocapnie physiologique. L’alcalose respiratoire est compensée par une excrétion accrue de bicarbonates et la valeur du pH artériel en fin de grossesse se situe autour de 7,44.
Modifications de la coagulation
La grossesse normale est caractérisée par un état d’hypercoagulabilité associée à une baisse des capacités de fibrinolyse. On observe ainsi une élévation des facteurs VII, VIII, IX, X et XII. La capacité de formation de thrombine est nettement accrue. Le taux de fibrinogène plasmatique augmente progressivement. Cette augmentation des différents facteurs semble être d’origine multifactorielle : hormonale, placentaire et réactionnelle à la consommation ou à la destruction des facteurs. La baisse de la fibrinolyse, observée chez la femme enceinte, est principalement secondaire à une élévation du taux des inhibiteurs de l’activateur tissulaire du plasminogène et de tous les inhibiteurs de la formation de la plasmine. Enfin, en post-partum, l’hypercoagulabilité persiste durant 4 à 6 semaines. Le nombre de plaquettes reste relativement stable durant la grossesse, sauf à l’approche du terme où l’on peut observer une légère baisse, secondaire à l’hémodilution physiologique, et parfois à la formation d’agrégats circulants plaquettaires.
Modifications de la fonction digestive
La grossesse représente un état à haut risque d’inhalation du contenu gastrique pour plusieurs raisons : tout d’abord, il existe durant la grossesse, une augmentation progressive du volume et de l’acidité de la sécrétion gastrique, secondaire à la production de gastrine par le placenta. D’autre part, le tonus du sphincter inférieur de l’œsophage et le péristaltisme œsophagien diminuent, l’angle cardiotubérositaire s’ouvre du fait du refoulement de l’estomac par l’utérus. Ces phénomènes ayant pour conséquence une augmentation de la fréquence du reflux gastro-œsophagien. Enfin, la vidange gastrique diminue de manière certaine lors du travail en conséquence de l’anxiété ressentie, de la douleur, et parfois suite à l’administration de morphiniques.
Modifications du système nerveux central
Il a été mis en évidence chez la femme enceinte une hypersensibilité des fibres nerveuses aux anesthésiques locaux. Celle-ci serait secondaire à l’imprégnation en progestérone et aux modifications acido-basiques et protéiques du liquide céphalorachidien. La progestérone et les endorphines sécrétées potentialisent les effets sur le système nerveux central des agents volatils halogénés, la concentration alvéolaire minimale étant ainsi diminuée pour tous les agents halogénés.
Modifications anatomiques
L’augmentation du volume et du poids utérins constitue un facteur compressif lors du décubitus dorsal strict. La compression peut être veineuse cave avec pour conséquence une diminution immédiate de la précharge et par voie de fait, du débit cardiaque avec hypotension. Elle peut être aussi aortique (effet Poseiro) sans conséquence hémodynamique maternelle directe mais avec une hypoperfusion utéro-placentaire immédiate, source d’une souffrance fœtale. L’hypoprotidémie favorise la constitution d’œdèmes notamment au niveau de la sphère ORL avec une diminution de calibre de la filière pharyngo-laryngée, exposant aux difficultés d’intubation et favorisant le risque de lésions locales hémorragiques. Un certain degré de macroglossie modifie également les conditions normales d’intubation, majorant le score de Mallampati de 1 à 2 grades par rapport à la situation pré gestationnelle. La vascularisation utérine se modifie en cours de gestation avec un allongement et une augmentation de calibre des artères des trois pédicules à destinée utérine (artères ovariennes, utérines et des ligaments ronds). Lors de la délivrance, en cas de rétraction insuffisante de l’utérus, le débit de ces artères, multiplié par 4 en moyenne par rapport à la situation avant grossesse, produit un saignement massif pouvant atteindre 800 mL·min-1 .
Modifications pharmacologiques
L’hémodilution et l’hypoprotidémie induite augmentent la fraction libre des agents pharmacologiques administrés comme les anesthésiques, les morphiniques ou les anesthésiques locaux, majorant de ce fait leur efficacité sur leurs récepteurs respectifs. Le risque de surdosage est permanent et doit être anticipé dans le calcul des doses nécessaires. La toxicité myocardique de la bupivacaïne est plus élevée pendant la grossesse. La concentration alvéolaire minimale efficace est diminuée pour les halogénés.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE
I. RAPPELS PHYSIOLOGIQUES
I.1. Modifications physiologiques liées à la grossesse
I.1.1. Modifications métaboliques
I.1.2. Modifications hémodynamiques
I.1.3. Modifications respiratoires
I.1.4. Modifications de la coagulation
I.1.5. Modifications de la fonction digestive
I.1.6. Modifications du système nerveux central
I.2. Modifications anatomiques
I.3. Modifications pharmacologiques
I.4. Impact de ces modifications sur la prise en charge anesthésique
II. INDICATIONS DE CESARIENNE EN URGENCE
II.1. Urgences absolues
II.1.1. Urgences fœtales
II.1.2. Urgences maternelles
II.2. Urgences relatives
III. ANESTHESIE POUR CESARIENNE EN URGENCE
III.1. Période pré opératoire
III.1.1. La consultation pré anesthésique
III.1.2. Choix de la technique anesthésique
III.1.3. Préparation de la patiente
III.1.4. Prémedication et jeun
III.2. Période per opératoire
III.2.1.Préparation de la salle
III.2.2. Accueil, mise en condition et monitorage
III.2.3. Techniques anesthésiques
III.2.4. Temps forts opératoires
III.2.5. Complications per opératoires
III.3.Période post opératoire
III.3.1.Prescription post opératoire
III.3.2.Surveillance post opératoire
III.3.3.Complications post opératoires
DEUXIEME PARTIE
I. CADRE DE L’ETUDE
I.1. Présentation de la région de Kaolack
I.2. La Structure
I.3. La Maternité
I.4. Le personnel de la maternité
I.5. L’Organisation des soins
I.6. Le Service de Réanimation
II. PATIENTES ET METHODE
II. 1. Type et période d’étude
II. 2. Critères d’inclusion
II.3. Méthodologie et Protocoles d’anesthésie
II.4. Paramètres étudiés
II.5. Traitement des données
III. RESULTATS
III.1. Caractéristiques des patientes césarisées en urgence
III.1.1. Age
III.1.2. Parité
III.1.3. Provenance
III.1.4. Délai d’admission à la maternité
III.1.5. Consultation prénatale
III.1.6. Antécédents
III.2. Les indications des césariennes
III.3. Examen clinique et biologique avant césarienne
III.3.1. Etat de conscience
III.3.2. Coloration des muqueuses
III.3.3. Les constantes avant l’installation
III.3.4. Score de Mallampati
III.3.5. La Biologie
III.3.6. Classification ASA
III.4. Délai entre décision de césarienne et installation au bloc
III.5. Techniques d’anesthésie
III.5.1. Type d’anesthésie
III.5.2. Hypnotiques utilisés
III.5.3. Durée de réalisation de l’anesthésie
III.6. Période per opératoire
III.6.1. Remplissage vasculaire
III.6.2. Perte sanguine et transfusion per opératoire
III.6.3. Incidents et accidents per opératoire
III.7. Extraction et état des nouveau-nés
III.7.1. Délai entre installation de la patiente et extraction du nouveau-né
III.7.2. Etat des nouveau-nés
III.7.3. Transfert en pédiatrie
III.8. Période post opératoire
III.8.1. Transferts en réanimation
III.8.2. Evolution en réanimation
III.8.3. Complications post opératoires
III.8.4. Mode de sortie des patientes
III.9. Morbidité et mortalité liées à l’anesthésie
DISCUSSION
I. LA FREQUENCE DES CESARIENNES EN URGENCE
II. CARACTERISTIQUES DES PATIENTES
III. LES INDICATIONS DES CESARIENNES
IV. DELAI DECISION D’EXTRACTION- ADMISSION AU BLOC OPERATOIRE
V. TECHNIQUES ANESTHESIQUES UTILISEES
VI. MORTALITE ET MORBIDITE MATERNELLES
VII. MORTALITE ET MORBIDITE FŒTALES
CONCLUSION