Modifications physiologiques chez le sujet âgé et implications anesthésiques et thérapeutiques

Le sujet âgé est défini selon l’organisation mondiale de la santé (OMS) par un sujet dont l’âge civil est supérieur à 65 ans. Age chronologique et âge biologique peuvent différer mais « 65 ans » constitue un tournant pour la plupart des auteurs [58], tournant marqué par l’importance des modifications anatomiques et physiologiques et des pathologies associées à ce terrain particulièrement fragile. Les fractures de l’extrémité supérieure du fémur, souvent regroupées sous le terme de « fracture du col du fémur », constituent une pathologie fréquente chez le sujet âgé. Le nombre de fractures augmente exponentiellement avec l’âge, le maximum étant observé entre 80 et 89 ans [131]. La fracture du col du fémur chez le sujet âgé constitue un problème majeur de santé publique. En France, elle concernait entre 40 000 et 50000 personnes en 1990. Tous les pays sont concernés et l’organisation mondiale de la santé estime que le nombre total de fractures du col du fémur dans le monde passera à 6,3 millions en 2050 contre 1,7 million par an en 1990 [111, 203]. Cette pathologie est associée à une mortalité très élevée, qui avoisine 0,8 à 7,2% dans la semaine de l’admission hospitalière et s’élève à 20 à 35% dans l’année qui suit [93]. Cette pathologie traumatologique au retentissement général (véritable « maladie du col du fémur ») est la conséquence parfois d’une « misère » physiologique établie, presque toujours tournant évolutif de l’avenir d’une personne âgée jusqu’alors bien portante [71]. L’accident qui provoque la fracture ne devient alors qu’anecdotique et elle représente en fait un tournant évolutif de la vie de ces patients, stigmate d’une altération profonde de leur état physiologique [169]. 40 Le traitement nécessite le plus souvent une prise en charge chirurgical, ce qui représente un défi médical puisqu’il s’agit de prendre en charge des patients âgés porteurs de multiples co morbidités (pathologies cardiovasculaires, respiratoires, neurologiques). Le rôle de l’anesthésiste -réanimateur devient alors déterminant à tous les niveaux de la prise en charge de ces patients allant du contrôle de la douleur, de la surveillance des traitements préopératoires, du choix de la technique anesthésique à la prévention et la prise en charge des complications postopératoires. Malgré les progrès de la chirurgie et de l’anesthésie, la mortalité de la fracture du col du fémur n’a pas évolué ces deux dernières décennies et reste élevée chez le sujet âgé.

MODIFICATIONS PHYSIOLOGIQUES CHEZ LE SUJET AGE ET IMPLICATIONS ANESTHESIQUES ET THERAPEUTIQUES 

Modifications physiologiques 

Les processus normaux de la sénescence définissent le « vieillard sain » : tous les organes sont atteints d’une involution fonctionnelle progressive [78]. Le vieillissement physiologique se caractérise alors par une altération des réserves fonctionnelles des organes. Ceux-ci ne peuvent plus faire face à une augmentation brutale des besoins [97].

Le système nerveux central

C’est le principal organe cible de l’anesthésie [133]. La proportion de substance grise ainsi que l’index cranio-cérébral, qui est un indicateur grossier de la quantité de tissu cérébral dans la boîte crânienne, diminue avec l’âge [200]. On a donc une baisse de la masse du cerveau et une augmentation du liquide céphalo-rachidien (LCR). Au plan microscopique, la quantité de neurones et de synapses diminue considérablement en plusieurs régions (cortex occipital, thalamus antérieur, locus ceruleus, hippocampe) [97]. La diminution du volume tissulaire reflète en fait la perte de neurones et non l’atrophie du tissu glial qui représente normalement presque la moitié du poids total du cerveau. Au plan biochimique les concentrations locales de neurotransmetteurs sont plus faibles chez le vieillard que chez le sujet jeune ; il en est de même pour la quantité et l’activité de plusieurs récepteurs. Cette tendance à une diminution globale de la quantité et de l’efficacité des neurotransmetteurs va de pair avec une augmentation des concentrations tissulaires d’enzymes comme la mono amine oxydase, connues pour activer l’action de certains neurotransmetteurs. Des modifications similaires ont été mises en évidence dans la moelle épinière [133]. Cependant les mécanismes qui permettent le couplage entre l’activité cérébrale électrique, le métabolisme et le débit sanguin restent intacts chez le sujet âgé [125].

Fonction respiratoire 

Le vieillissement normal du système respiratoire se traduit par une diminution progressive de toutes les fonctions mesurables [133]. Trois mécanismes concourent à l’altération de la mécanique ventilatoire :
– réduction de la force de la pompe ventilatoire par baisse de la force des muscles respiratoires,
– augmentation de la rigidité de la cage thoracique (calcification des articulations chondro-costales, pincements des espaces intervertébraux et cyphose),
– altération des propriétés élastiques du poumon [41]. Ces trois éléments, associés à des altérations des rapports ventilationperfusion [194] et de la capacité de diffusion alvéolaire [61], expliquent que l’hypoxémie soit plus fréquente chez le sujet âgé [191]. De plus les réponses ventilatoires à l’hypoxémie et à l’hypercapnie diminuent chez le sujet âgé avec en plus une baisse des réflexes laryngés et un risque élevé d’inhalation [144, 146].

Fonction cardiovasculaire et rhéologie sanguine 

Au plan cardiovasculaire 

Le vieillissement normal s’accompagne d’une altération progressive du système circulatoire : réduction de l’élasticité artérielle, réduction du nombre de myocytes, diminution de la réactivité aux stimuli betaadrénergiques, hypertrophie ventriculaire et baisse du nombre de cellules des voies de conduction [193, 123]. La diminution du tissu élastique des artères est responsable d’une augmentation des résistances au flux sanguin, d’une hypertension artérielle (HTA) systolique et d’une hypertrophie ventriculaire gauche (HVG) [78]. La réduction de la compliance ventriculaire liée à l’hypertrophie myocardique rend le débit cardiaque très dépendant du retour veineux [97]. Le rythme cardiaque diminue pour atteindre 60 battements/minute vers environ 70-75 ans. La tachycardie maximale au cours de l’exercice est aux alentours de 140 contre 180/mn chez un adulte jeune. Le volume systolique diminue lui aussi, non du fait de la pression de remplissage insuffisante mais à cause d’une baisse de la compliance myocardique et d’une augmentation de la post-charge. Fréquence et volume systolique diminués expliquent l’abaissement du débit cardiaque du vieillard par rapport à l’adulte (de 35% environ à 70 ans), abaissement plus important que ne le voudrait la diminution de la consommation d’oxygène [78].

Le débit cardiaque diminue de 1% par an au delà de 30 ans. Il existe une rigidité des valves cardiaques avec des calcifications responsables à la longue d’un dysfonctionnement ventriculaire [78]. Les troubles de la conduction et du rythme sont également fréquents [74].

Au plan rhéologique 

Stase veineuse

Les veines subissent des changements avec l’âge : il se produit une diminution significative du diamètre de la veine fémorale commune (VFC) et une baisse significative de la vélocité au repos de la VFC chez les sujets de plus de 60 ans. Ces modifications concourent à une réduction significative du flux dans cette VFC chez les sujets âgés, facteur prédisposant pour les thromboses veineuses profondes. La réduction de mobilité et l’alitement favorisent la dilatation veineuse et la stase sanguine. L’efficacité de la fonction pompe des muscles du mollet diminue avec l’âge, d’où une réduction du retour veineux chez les sujets âgés.

Modifications des facteurs de la coagulation

Les taux de facteur VIII s’élèvent et cette élévation est associée à un risque accru de thrombose veineuse. Les taux de facteur IX augmentent avec l’âge mais pas le facteur X ni la prothrombine. La concentration de facteur XII, qui se lie de manière covalente à la fibrine et stabilise le caillot, évolue également avec l’âge.

Marqueurs prothrombiques

La synthèse de thrombine, enzyme clé de la thrombose, augmente avec l’âge. Les taux de complexe plasmine-anti plasmine(PAP) s’élèvent avec l’âge et sont corrélés avec la génération de thromboses et d’athéroscléroses infra cliniques.

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Table des matières

INTRODUCTION
1- Modifications physiologiques chez le sujet âgé et implications anesthésiques et thérapeutiques
1-1- Modifications physiologiques
1.1.1 : le système nerveux central
1.1.2: Fonction respiratoire
1.1.3: Fonction cardiovasculaire et rhéologie sanguine
1.1.3.1 : Au plan cardiovasculaire
1.1.3.2 : Au plan rhéologique
1.1.3.2.1 : Stase veineuse
1.1.3.2.2 : Modifications des facteurs de la coagulation
1.1.3.2.3 : Marqueurs prothrombiques
1.1.3.2.4 : Altération des protéines anticoagulantes
1.1.4: Fonction hépatique
1.1.5: Fonction rénale
1.1.6: Compartiments de l’organisme
1.2 : implications anesthésiques et thérapeutiques
1.2.1 : implications des modifications cardiovasculaires
1.2.2 : implications des modifications ventilatoires
1.2.3 : implications des modifications pharmacocinétiques
1.2.4 : implications des modifications du SNC
1.2.4.1 : au plan anesthésique
1.2.4.2 : Troubles cognitifs postopératoires
1.2.5 : interactions médicamenteuses
1.2.6 : Prise en charge de la douleur chez le sujet âgé
1.2.6.1 : Evaluation de la douleur chez le sujet âgé
1.2.6.2 : Moyens thérapeutiques
1.2.6.2.1 : Opiacés
1.2.6.2.2 : Autres médicaments antalgiques
1.2.6.2.2.1 : Anti-inflammatoires non stéroïdiens
1.2.6.2.2.3 : Paracétamol
1.2.6.2.2.2 : Néfopam
1.2.6.2.2.4 : Tramadol
1.2.6.2.3 : Analgésie locorégionale
1.2.6.3 : Intérêt de la prise en charge de la douleur chez le sujet âgé
1.2.7 : La maladie veineuse thromboembolique
1.2.7.1 : Thrombose veineuses et sujet âgé
1.2.7.2 : Prévention
2. Fractures de l’extrémité supérieure du fémur
2.1 : Définition
2.2 : Epidémiologie
2.3 : Anatomie de l’extrémité supérieure du fémur
2.4 : Diagnostic
2.4.1 : Clinique
2.4.1.1 : Interrogatoire
2.4.1.2 : Signes physiques
2.4.2 : Radiologie
2.4.3 :Classifications
2.4.3.1 : Fractures trochantériennes
2.4.3.2 : Fractures cervicales
2.4.3.3 : Fractures céphaliques et luxation de hanche
2.4.3.4 : Fractures isolées des trochanters
2.5 : Traitement
2.5.1 : Traitements des fractures trochantériennes
2.5.1.1 : méthodes
2.5.1.2 : Indications
2.5.2 : Traitements des fractures cervicales
2.5.2.1 : Méthodes
2.5.2.1.1 : Ostéosynthèse
2.5.2.1.3 : Arthroplastie
2.5.2.2 : Indications
2.5.3 : Cas particulier des fractures pathologiques
2.6 : Evolution
2.6.1 : Evolution favorable
2.6.1.1 : Fractures pertrochantériennes
2.6.1.2 : Fractures cervicales
2.6.2 : Complications précoces
2.6.2.1 : Complications de décubitus
2.6.2.2 : Complications non spécifiques de la chirurgie et de l’anesthésie
2.6.2.3 : Complications spécifiques
2.6.3 : Complications tardives
2.6.3.1 : Ostéonécrose de la tête fémorale
2.6.3.2 : Pseudarthrose du col fémoral
2.6.3.3 : Cals vicieux
3. Anesthésie pour fracture de l’extrémité supérieure du fémur chez le sujet âgé
3.1 : Evaluation préopératoire
3.1.1 : Interrogatoire
3.1.2 : Examen physique
3.1.3 : Examens complémentaires
3.2 : Mise en condition préopératoire
3.2.1 : Analgésie
3.2.2 : Correction des perturbations biologiques
3.2.2.1 : Correction des désordres hydroélectrolytiques
3.2.2.2 : Correction de l’anémie
3.2.2.3 : Prophylaxie thromboembolique
3.2.3 : Modifications thérapeutiques préopératoires
3.2.3.1 : Les anti-vitamines K
3.2.3.2 : Les antiagrégants plaquettaires
3.3 : Anesthésie générale
3.4 : Anesthésie locorégionale péri médullaire
3.3.1 : Rachianesthésie standard
3.3.2 : Rachianesthésie continue
3.3.3 : Rachianesthésie unilatérale
3.3.4 : Rachianesthésie et péridurale combinées
3.5 : Blocs périphériques
3.6 : AG ou ALR pour fracture de l’ESF chez le sujet âgé ?
CONCLUSION

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