Modélisation temporelle des signaux DRASC résonant et non-résonant

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DRASC double pompe (dual-pump)

Le développement parallèle depuis la fin des années 80 de la DRASC double pompe par Teets et par Lucht [66], a permis de sonder comme avec la DRASC double large bande, deux es-pèces simultanément. La configuration double pompe a été appliquée sur des mélanges N2/CO2, N2/CH4, O2/CO, N2/O2 et N2/H2. La technique consiste à utiliser deux lasers de pompe mono-chromatiques de fréquence ω1 et ω2, chacun étant dédié à une molécule particulière de manière à ce que leur différence de fréquence avec un troisième faisceau Stokes large bande, ω1 − ωs et ω2 − ωs permettent d’exciter les transitions des deux molécules. Chaque molécule ayant été excitée par un couple pompe/Stokes particulier, deux signaux DRASC sont émis à la même fréquence ω1 + ω2 − ωs et ω2 + ω1 − ωs (illustré en figure 1.11). De manière à pouvoir identifier les signaux provenant des deux molécules, la fréquence du second laser de pompe est délibéré-ment choisie proche de ω1 afin de pouvoir utiliser un système unique de collection spectrale des signaux.
De nombreuses combinaisons de molécules ont été mesurées simultanément par cette tech-nique comme N2-O2 [66], [30], N2-H2 [67], N2-CH4 [68], [69], [70], N2-C3H8 (propane) [66], N2-CH3OH (méthanol) et N2-CO2, ainsi que dans des flammes suitées [71] (figure 1.12). Il se trouve que dans le cas de ces mesures en flamme suitée, les transitions rotationnelles de H2 coïn-cident avec les spectres du N2 et O2, rendant possible la détection de ces trois espèces chimiques en plus de la température. Weikl et al. [72] ont réalisé la mesure simultanée de température et concentration sur trois molécules éthylène, oxygène, et azote en DRASC double pompe sur une flamme C2H4 partiellement pré-mélangée. La proximité des fréquences de transition de l’éthylène (1623 cm−1 et 1342 cm−1) et de l’oxygène (1556 cm−1) a permis d’utiliser le même laser de pompe pour ces deux molécules. Beyrau et al. ont également effectué ces mesures sur C2H5, O2 et N2, ainsi que sur N2-O2-CO toujours dans une flamme de méthane partiellement pré-mélangée [31].

DRASC à la résonance

Dans le cas où l’on cherche à déterminer les concentrations d’espèces chimiques à l’état de trace, la DRASC vibrationnelle ne permet pas de générer suffisamment de signal. Une solution pour augmenter la quantité de signal est de réaliser des résonances avec les états électroniques de la molécule à l’aide de faisceaux lasers monochromatiques dans l’UV. Attal et al. ont effectué la première démonstration de production de signal DRASC à la résonance sur des vapeurs de I2 [73]. Hanna et al. ont effectué des mesures sur NO [74].
Dans les parties précédentes, la description non-exhaustive des travaux effectués en régime d’impulsions nanosecondes a permis de démontrer que la DRASC ns est un diagnostic reconnu pour obtenir des précisions de mesures typiquement de l’ordre de 2% sur la gamme 800-2000K. Malgré cela, plusieurs inconvénients sont à noter. Premièrement, la présence d’interférences destructives entre le signal non-résonant et le signal DRASC résonant qui affectent la précision et la sensibilité des mesures. Deuxièmement, la nécessité de caractériser avec précision la com-position chimique du milieu et les transferts d’énergie par collisions. Enfin, la cadence limitée de la mesure (∼ 10 Hz) ne permet pas de réaliser des études sur la dynamique des phénomènes évoluant rapidement dans le temps. La récente possibilité de réaliser des mesures DRASC dans le domaine temporel à l’échelle femtoseconde (10−15 s) va permettre, comme cela va être décrit dans la partie suivante, de lever une partie des limitations associées au régime nanoseconde.

DRASC en régime d’impulsions femtosecondes

Les avancées technologiques des sources lasers impulsionnelles ont permis, depuis le début des années 2000, de développer des configurations expérimentales de mesure par diagnostic DRASC dans le régime d’impulsion femtosecondes (DRASC fs). La DRASC fs consiste à exciter le milieu par deux impulsions fs pompe et Stokes afin de créer une cohérence Raman. Les impulsions fs ayant une largeur de bande spectrale beaucoup plus importante qu’en régime ns, plusieurs paires de photons sont capables d’exciter la transition Raman de la molécule. La figure 1.13 illustre la différence entre les mécanismes d’excitation de la molécule d’azote en régime ns (a) et fs (b).
La transition vibrationnelle Raman (v00 = 0 → v0 = 1) du N2 étant de 2330 cm−1, la raie spectrale fine de l’impulsion ns à 532 nm ne permet d’obtenir qu’un seul écart en fréquence de 2330 cm−1 avec la seconde impulsion large bande (figure 1.13.a). Les autres transitions possibles à 2130 et 2403 cm−1 sont accessibles grâce à la largeur de l’impulsion large bande. En revanche, pour le cas de l’excitation en régime fs (figure 1.13.b), la largeur de bande spectrale des deux impulsions excitatrices permet de former plusieurs couples de photons dont la différence de fréquence correspond à 2330 cm−1. En effet, la largeur spectrale d’une impulsion de 100 fs correspond à 150 cm−1 pour une impulsion gaussienne et limitée par transformée de Fourier, soit environ 1000 fois plus que la largeur de raie des transitions de l’azote (∼0.1 cm−1) [76]. Par conséquent, la contribution de toutes les paires de photons permet de générer une cohérence Raman beaucoup plus forte qu’en régime ns, amplifiant ainsi très fortement la génération du signal DRASC.

DRASC fs résolue temporellement

Contrairement à la DRASC ns où l’analyse de la cohérence se déroule dans le domaine fréquentiel, la DRASC fs résolue en temps procède à une analyse temporelle. Cela est explicité formellement dans le chapitre 2. Suite à l’excitation initiale, une troisième onde fs vient sonder la décroissance de la cohérence à différents instants. La figure 1.16a présente le schéma clas-sique d’excitation-sonde fréquentiel en DRASC fs, et en figure 1.16b le diagramme temporel du processus DRASC fs résolue temporellement.
La courbe de la figure 1.14c représente un exemple de l’évolution temporelle de la dé-croissance observée pour la molécule d’azote à différentes températures [75]. L’évolution de la cohérence, représentative de l’état de polarisation du milieu, est ici reproduite par l’enregistre-ment successif du signal DRASC à chaque retard temporel τ de l’impulsion sonde. Sur cette (a) Schéma énergétique du proces-(b) Diagramme temporel du pro-(c) Décroissance de la cohérence Raman sus DRASC fs cessus DRASC fs résolue temporel-en DRASC fs résolue temporellement [75] lement figure 1.14c, apparaît clairement dans les premiers instants un pic intense représentatif de la superposition des contributions résonantes et non-résonantes du signal DRASC. Au cours du temps, la cohérence décroît en raison du déphasage des différentes fréquences Raman excitées. Cette méthode DRASC fs résolue en temps donne accès à des informations spectroscopiques par analyse des tout premiers instants qui suivent l’excitation initiale. L’analyse de la courbe de décroissance permet également d’extraire l’information de température, mais ne permet pas en revanche d’effectuer de mesures instantanées. Des mesures de températures ont été réalisées par DRASC fs résolue temporellement sur la molécule d’azote [77], [78], [79]. La figure 1.15 issue de [78], représente avec la molécule d’hydrogène un bon exemple pour la compréhension de l’évolution temporelle de la cohérence à différentes températures. À 100 K, le peuplement des niveaux étant moins important, le signal apparaît comme un battement régulier. En re-vanche à plus forte température, le peuplement de nombreux niveaux implique une multitude de fréquences de transitions qui résulte en un signal beaucoup plus complexe piques comme l’élargissement de raies à haute pression. L’étude de ces structures de battement du signal DRASC résolu en temps a permis d’extraire pour différentes molécules, les données spectroscopiques dès lors accessibles aux échelles de temps fs. En phase gazeuse, la première démonstration d’excitation par impulsions fs a été réalisée par Hayden et Chandler [80] pour étudier la forme de la décroissance de la cohérence due au déphasage des différentes contribu-tions dans le cas basse pression (limitant ainsi les collisions) du benzène et du 1,3,5 hexatriène. Ces molécules de taille importante possèdent une grande section efficace Raman, permettant de générer des signaux très intenses. L’intérêt de l’étude du 1,3,5 hexatriène, outre sa forte non-linéarité optique, réside dans le fait que c’est un des constituants du polyacétylène très utilisé en biologie photochimique. La décroissance observée de la cohérence sur v 10ps pour le benzène est attribuée à la partie isotrope de la polarisabilité (notée α dans la partie théorique), alors que la décroissance plus rapide pour la seconde molécule due aux nombreuses transitions des branches O,P,R,S impliquées, renseigne sur la partie anisotrope de la polarisabilité.
L’analyse des structures du signal DRASC fs a permis à Lang et Motzkus de déterminer les constantes d’énergie rotationnelle et vibrationnelle de plusieurs molécules [78]. Pour obtenir des mesures précises, les signaux ont été enregistrés dans un faisceau de molécules (environnement non-collisionel) afin d’analyser les fréquences de battement sur un temps plus long sans être impacté par la décroissance due aux collisions. Les constantes rotationnelles du CO2 ont été mesurées par mélange à quatre ondes dégénéré (DFWM) grâce à la relation directe entre les battements des transitions Raman observées et la constante de rotation Be. Toujours dans cette étude, la DRASC fs a permis de réviser les constantes d’anharmonicité rotationnelles αe de l’acétylène et celles de plus haut termes βe de l’hydrogène avec une excellente précision. La constante de vibration du N2 a également été mesurée par DRASC fs dans une flamme méthane/air à pression atmosphérique.
La résolution temporelle accessible grâce aux impulsions fs permet de sonder les molécules avant apparition des premiers effets de collisions. L’intervalle de temps entre deux collisions est d’environ 110 ps à 1 bar et 300 K pour N2. Pour la molécule d’azote, Knopp et al. reportent l’insensibilité du signal DRASC à ces effets de collisions en dessous de 25 ps [81]. Au-delà, les collisions inter-moléculaires qui peuvent être provoquées par une augmentation de la pression accentuent fortement la décroissance, mènent à l’apparition de recouvrements de raies, ce qui complexifie le travail de modélisation. L’étude de ce comportement a permis à Knopp et al. [81] de valider les modèles de transfert d’énergie rotationnels (RET) des molécules N2 et C2H2 à haute pression.
Les premières études en flamme réalisées en 2001 par Beaud et al. [77] ont permis une mesure de température sur une flamme méthane/air à pression atmosphérique en sondant les branches Q (ΔJ = 0) du N2. L’information de température est extraite du taux de décroissance de la cohérence Raman durant les premières ps suivant l’excitation, durant lesquelles les effets de collisions sont négligeables jusqu’à 1 MPa (figure 1.16.a) [82]. Cette méthode a également été utilisée par Roy et al. pour mesurer la température de l’azote par DRASC fs dans une flamme H2/air issue d’un brûleur Hencken avec une précision estimée entre ±40 K and ±50 K [82]. La variation de la richesse de flamme entre 0,5 et 1 a permis d’après la figure 1.16.b d’observer une décroissance plus forte du signal DRASC avec l’augmentation de la richesse. L’ensemble de ces publications a montré que l’intérêt d’avoir une excitation courte permet de s’affranchir des effets de collisions, et qu’une faible superposition temporelle avec la sonde implique une diminution drastique du fond non-résonant.
L’utilisation d’impulsions fs a également permis de développer d’autres techniques comme la DRASC électroniquement hors résonance, la RIPS, DFWM et la Rotational Coherence Spec-troscopy (RCS) qui est la forme la plus simple de DRASC non-résonante dans le cas dégénéré (ω1 = ω2 = ω3). Dans ce cas, uniquement les transitions rotationnelles de la molécule sont impliquées et le signal temporel issue de la RCS présente des fréquences de battement propor- (a) Signaux DRASC fs résolus en temps sur N2 (b) Signaux DRASC fs résolus en temps pour pour différentes pressions [75]. différentes richesses (Φ) sur une flamme de H2/air à pression atmosphérique [82] Pour résumer, la DRASC fs offre deux principaux avantages par rapport au régime ns, à savoir : (1) un affranchissement des effets des collisions entre molécules, dû à la réduction du temps de mesure, inférieur (5 − 10 ps) au temps caractéristique de collisions. Les premiers instants de la décroissance ne dépendant que de la température ; (2) Une réduction, voire une élimination du signal DRASC non-résonant, rendant l’interprétation du signal moins complexe. Un troisième avantage à l’utilisation des sources fs concerne la cadence de répétition des im-pulsions offrant la possibilité d’augmenter la résolution temporelle de la mesure. Auparavant limités à la dizaine de Hz en régime ns et ps, les systèmes fs permettent désormais d’accéder à des cadences de l’ordre de la dizaine de kHz, voir au-delà. Comme cela a été décrit, la technique DRASC fs résolue temporellement a permis d’accéder à des données spectroscopiques précises et d’effectuer des mesures de température en milieux réactifs. En revanche, l’inconvénient majeur de cette technique réside dans le temps d’acquisition de la mesure (plusieurs minutes) qui sup-pose un milieu stable. Les mesures présentées ci-dessus ne peuvent donc pas être menées dans des conditions réelles de chambre de combustion. Il a donc fallu développer d’autres techniques et d’autres mises en oeuvre de ces lasers fs, afin d’exploiter la mesure haute cadence de ces sources laser et accéder à des mesures instantanées jusqu’au kHz dans des milieux fluctuants.
Deux techniques utilisant des impulsions fs ont été développées depuis une dizaine d’an-nées pour contourner la limitation de la durée d’acquisition de la méthode DRASC fs résolue en temps. Les méthodes « chirped-probe-pulse » (CPP) et « hybride femtoseconde/picoseconde » (fs/ps) consistent à exciter rapidement le milieu via deux impulsions fs (100 fs), puis à sonder la cohérence Raman sur un temps plus long à l’aide d’une impulsion de durée ps. La différence entre ces deux approches réside dans la manière de générer ce troisième faisceau sonde ps à partir de la source fs.

DRASC fs à sonde à dérive de fréquence (CPP)

La sonde à dérive de fréquence (CPP : Chirped Probe Pulse) obtenue à partir d’une im-pulsion fs, consiste à « étaler » temporellement les fréquences du spectre large de l’impulsion fs par passage dans un élément dispersif comme un barreau de verre. La figure 1.17.a présente en haut le signal DRASC fs tel qu’il a été présenté en figure 1.14c de la section précédente. Le schéma en regard illustre le principe de la technique CPP : l’excitation par deux impulsions au temps 0 et un sondage par une sonde longue de 2 à 3 ps, permet d’interroger le milieu durant les premiers instants de décroissance de la cohérence. Chaque fréquence de l’impulsion sonde vient sonder à différents instants l’évolution temporelle de la cohérence, ainsi l’information sur la décroissance de la cohérence est acquise en un seul tir laser.
La figure 1.17.b présente un exemple numérique, dans le domaine temporel de la signature de N2 par DRASC fs CPP. Pour pouvoir enregistrer expérimentalement ce signal, il faudrait disposer de capteurs dont la résolution temporelle serait de l’ordre de la fs. La technologie actuelle sur le marché ne permet pas d’obtenir une telle résolution. Pour cette raison, l’analyse du signal DRASC fs CPP est réalisée dans le domaine spectral. La forme du signal représenté en figure 1.17.c est alors exploitable pour effectuer un post-traitement numérique afin de déterminer la température correspondante à ce spectre. Il est important de souligner que contrairement aux spectres obtenus en régime ns, la forme du spectre CPP ne représente pas directement les transitions Raman de la molécule, car le signal résulte ici d’interférences entre les signaux crées pour chaque fréquence de la sonde (voir chapitre 2).
Historiquement, la DRASC fs CPP a été la première technique utilisée en régime fs pour effectuer des mesures instantanées. Mise en place en 2002 par Lang et Motzkus, la première configuration DRASC fs CPP a permis de mesurer la température dans une cuve d’hydrogène à P = 500 mbar [79]. La molécule d’hydrogène n’étant pas présente en grande quantité dans les écoulements réactifs, Roy et al. [83] ont appliqué la DRASC fs CPP sur la molécule N2 plus abondante dans les flammes. Les mesures sur N2 ont tout d’abord été réalisées dans un écoulement d’air chauffé à 900 K, puis sur une flamme stabilisée H2/air à pression atmosphérique en comparant le spectre expérimental avec un modèle théorique. Richardson et al. ont utilisé avec succès la thermométrie DRASC fs CPP dans des environnements fluctuants comme sur un brûleur Hencken H2/air avec un taux de fluctuation à 10 Hz maîtrisé par un écoulement d’air puis sur une flamme turbulente méthane/air [84]. Dans ces études sur N2, le sondage s’effectue systématiquement dans une zone temporelle très proche de l’excitation initiale, à savoir entre 1 et 2 ps après l’excitation. Le front montant de la sonde (2 à 3 ps de largeur à mi-hauteur) possède encore pour ce délai une zone de recouvrement temporel avec l’excitation. De ce fait, le spectre DRASC résultant est issu d’interférences entre les signaux résonant et non-résonant. Afin de s’affranchir de la contribution non résonante, Richardson et al. ont mis en place une configuration particulière de la polarisation des trois faisceaux incidents pour supprimer le signal non-résonant du spectre DRASC fs CPP enregistré à 5 kHz dans une flamme stabilisée H2/air à pression atmosphérique [85] (voir chapitre 2). L’analyse de ces résultats ne présente en revanche aucune amélioration significative sur la précision de la mesure. La technique DRASC fs CPP a également été utilisée pour mesurer des concentrations d’espèces chimiques en mélange binaire dans une cuve chauffée à pression atmosphérique [86]. Les concentrations de mélange air/argon ont été mesurées à partir de la proportion de signal résonant/non-résonant (ratio β/α) trouvée par leur programme d’ajustement numérique. La concentration d’argon a été déterminée avec une erreur absolue de l’ordre de 2,5% sur la gamme 10-98% d’argon lorsque la température reste fixée à 300 K et pour un retard temporel de sonde égal à 1 ps. À 900 K, la meilleure précision de mesure a été observée pour un délai de sonde de 2ps, pour lequel une précision de 2% a été relevée sur la gamme de concentration d’argon 10-75%. L’étude numérique et expérimentale de l’influence de ce paramètre de délai pour nos cas d’étude fait l’objet d’une partie (chapitre 4) de ce manuscrit. Cette étude s’est également intéressée au mélange CO-N2 à 300 K et 900 K en raison de l’importance du CO pour les processus de combustion et profitant de la proximité des fréquences de transition Raman du CO et du N2 (respectivement 2140 et 2330 cm−1). Pour ce mélange à 300 K, des mesures ont été effectuées en supprimant le signal non-résonant par des techniques de polarisation sans que cela n’apporte de précision supplémentaire au cas incluant la partie non-résonante dans le signal DRASC. Lorsque la mesure de température instantanée est réalisée en milieu turbulent, l’intensité des signaux générés peut être très variable selon la température du point mesuré. Entre 300 K et 2400 K, l’intensité du signal chute de trois ordres de grandeur. De ce fait, le réglage du gain de la caméra de détection n’est pas toujours adapté et peut provoquer des phénomènes de saturation. Alors qu’en régime ns, une solution pour contourner cette problématique proposée par Kearney et al. [87] est de séparer le capteur CCD de son système de détection en 8 zones indépendantes, la haute cadence des mesures DRASC fs CPP ne permet pas de créer des zones de lecture indépendantes avec le matériel actuellement disponible. La solution proposée par Dennis et al. consiste à utiliser deux chaînes d’acquisition séparées d’un ratio 10-90% avec des réglages correspondant l’un à haute et l’autre à basse température [88]. Les mesures effectuées sur une flamme hydrogène/air à 5 kHz avec le système de détection à deux voies ont permis une meilleure résolution des mesures, en améliorant la qualité des enregistrements de spectres à basse température. Dennis et al. ont par la suite effectué des mesures DRASC fs CPP à 5 kHz en milieu hautement turbulent dans une turbine à gaz [89]. Deux conditions d’instabilités thermo-acoustiques ont été générées lors de la mesure localisée à plusieurs endroits de la flamme pour résoudre sa structure. Le haut niveau de turbulence de cette étude pouvait laisser craindre que des variations d’indice viendraient perturber le recouvrement spatio-temporel des impulsions, ce qui n’a pas été observé par les auteurs. Un étalonnage préalable a été effectué sur un brûleur Hencken H2/air stationnaire afin de fixer les paramètres liés au laser, inclus dans le modèle théorique développé au sein des laboratoires Sandia. Pour cela, le programme d’ajustement théorie/expérience a comparé des séries de spectres moyens à différentes richesses issus de 2000 spectres instantanés. Parmi les problématiques rencontrées, la diffusion de l’onde pompe sur les hublots vient perturber l’enregistrement du signal DRASC. Pour y remédier, une solution proposée serait de changer la longueur d’onde sortante de l’OPA pour une longueur d’onde qui ne perturberait pas l’enregistrement. Les efficacités de conversion de l’OPA n’étant pas équivalentes selon la longueur d’onde, cette solution se ferait au prix d’une énergie plus faible après conversion.

DRASC hybride femtoseconde/picoseconde (fs/ps)

La seconde technique instantanée développée en DRASC fs propose de supprimer une partie du spectre large bande de l’impulsion fs afin d’obtenir une impulsion de durée plus longue. La figure 1.18 présente deux exemples pour réaliser cette découpe spectrale, une première possibilité est de disperser spatialement le spectre et d’en sélectionner une partie par passage dans une fente au centre d’un montage 4f (a), ou encore par passage au travers d’un filtre (b). La figure 1.18(c) présente les formes temporelles résultantes de ces deux approches, avec une forme asymétrique caractéristique dans le cas du filtre lorentzien. Contrairement à la technique CPP, la finesse spectrale de la sonde issue d’un dispositif hybride fs/ps permet alors une interprétation plus simple du spectre DRASC, au détriment d’une perte d’énergie due à la suppression des autres fréquences. Le spectre DRASC recueilli possède alors un aspect plus proche d’un spectre DRASC en régime ns où les raies de transitions sont visibles.
La première démonstration de DRASC hybride fs/ps a été réalisée en 2006 par Prince et al. [90] pour visualiser l’évolution des modes de vibration Raman du toluène, de la rhodamine et du chloroforme. La configuration expérimentale mise en place utilise un montage 4f comme présenté sur la figure 1.18.a. L’ouverture réglable de la fente permet d’ajuster de façon continue la largeur spectrale de l’impulsion de 15 cm−1 jusqu’à la largeur initiale du pulse fs de 350 cm−1. L’application de cette technique pour la thermométrie en flamme fluctuante a été réalisée sur N2 par Miller et al. [91]. Les mesures à 500 Hz ont confirmé le potentiel de cette méthode de mesure de température par des précisions inférieures à 2,2% jusqu’à 2400 K. Comme en DRASC ns, la mesure de température par excitation des niveaux vibrationnels est beaucoup moins précise en dessous de v 1200K, température en deçà de laquelle la technique rotationnelle est plus précise. La démonstration de la technique hybride fs/ps a donc également été effectuée par excitation des transitions purement rotationnelles du N2 par Miller et al. [92] sur la gamme de température 300-800 K. Un montage 4f comme présenté en figure 1.18.a. a permis de générer une impulsion sonde de largeur spectrale v 2, 1cm− 1 suffisante pour résoudre les transitions rotationnelles de la molécule d’azote pour laquelle la séparation moyenne entre chaque raie est de v 8cm−1. La sonde a été retardée de 13,5 ps par rapport à l’excitation initiale pour supprimer totalement le signal non-résonant du spectre DRASC et minimiser les effets de collisions. La figure 1.19 représente l’intensité des signaux DRASC non-résonant (argon) et résonant (azote) en fonction du délai de sonde. Alors que la présence de fond non-résonant disparaît rapidement avec l’augmentation du délai de sonde (courbe noire), les effets de collisions apparaissent causant la lente décroissance du signal.
La haute résolution à la fois spectrale et temporelle de la mesure DRASC rotationnelle hy-bride fs/ps a permis de comparer les populations de niveaux rotationnels en fonction du délai de sonde. La décroissance des populations étant liée aux transferts d’énergie collisionnel, il a été observé que ces effets n’ont pas besoin d’être pris en compte dans le calcul du spectre théorique à pression atmosphérique si le délai de sonde ne dépasse pas 30 ps [92]. La dégradation des tran-sitions visibles sur le spectre DRASC hybride fs/ps par la présence du fond non-résonant rend la recherche de sa minimisation plus intéressante qu’en régime CPP pour lequel ces transitions ne sont de toute façon pas visibles. Une étude sur la forme temporelle des impulsions sondes générées par trois méthodes de découpe spectrale a été menée par Miller et al. dans une flamme H2/air stabilisée [93]. Le but étant de placer la sonde suffisamment proche de l’excitation initiale pour garder une quantité de signal importante tout en évitant de subir les effets collisionnels. Cette étude a permis de montrer l’avantage d’utiliser une forme d’impulsion temporellement asymétrique comme représentée sur la figure 1.18.c générée par le passage de l’impulsion fs large bande à travers un filtre Lorentzien. Le bénéfice apporté par cette forme temporelle consiste à réduire au maximum la génération de signal non-résonant par la forte pente ascendante malgré la proximité avec l’excitation. Ce type d’impulsion a permis pour un délai pompe/sonde opti-mal de 310 fs de réduire la quantité de signal non-résonant d’un facteur 250 tout en générant 44,6% du signal résonant maximal émis lorsque les trois impulsions sont synchronisées. Pour comparaison, les impulsions symétriques issues du montage 4f avec une ouverture de 400 m et 800 m minimisent la quantité de signal non-résonant à un délai pompe/sonde respectivement de 5,5 ps et 2,77 ps permettant de générer une intensité de signal DRASC de 11,7% et 19,4% du signal maximal. La forme temporelle de la sonde asymétrique résultant de la transformée de Fourier d’une forme spectrale Lorentzienne a été exploitée par Stauffer et al. [94] dans le cas rotationnel sur l’azote à relative basse température (540 K). Contrairement à Miller et al., la sonde asymétrique a été formée à l’aide d’un étalon Fabry-Pérot de manière à former une bande spectrale de v 5,6 cm−1. Le fait d’utiliser un étalon Fabry-Pérot génère plusieurs modes de fréquences, limitant ainsi la zone spectrale à l’intervalle spectral libre (ISL). Plus récem-ment, Schermann et al. [95] ont proposé d’utiliser un réseau de Bragg en volume pour réaliser une impulsion sonde asymétrique de largeur spectrale très étroite (0,7 cm−1) afin d’observer les transitions de la molécule d’azote dans l’air ambiant et en flamme méthane/air avec une très bonne résolution spectrale. Un exemple des spectres obtenus dans l’air ambiant et en flamme est donné en figure 1.20. Dans le second cas, il est possible de distinguer très clairement les trois bandes de vibrations incluant les structures rotationnelles visibles à haute température.
Une autre approche pour générer une impulsion ps à spectre étroit a été utilisée par Kearney et Scoglietti [96] utilisant la compression par seconde harmonique (SHBC : Second Harmonic Bandwidth Compression) et permettant d’obtenir des énergies de sonde plus élevées qu’avec le filtre Lorentzien ou l’étalon Fabry-Pérot. Le principe illustré en figure 1.21 consiste à séparer l’impulsion fs initiale en deux répliques identiques pour leur appliquer à chacune une dérive de fréquence opposée. La somme de fréquence de ces deux impulsions est alors obtenue par passage dans un cristal non-linéaire, ayant pour conséquence de réduire considérablement la bande spectrale initiale. Kearney passe ainsi d’une impulsion fs de 180 cm−1 avec une énergie de 2,8 mJ à une impulsion ps de 3,5 cm−1 à 1,1 mJ.

Modélisation temporelle des signaux DRASC réso-nant et non-résonant
Afin de procéder au calcul d’un spectre DRASC fs CPP, il est aisé de travailler dans le do-maine temporel. Une fois que les étapes de calcul auront été réalisées, le retour dans l’espace des fréquences par une transformée de Fourier, nous permettra de reproduire les spectres DRASC fs CPP observés expérimentalement. La réponse temporelle de la molécule aux faisceaux la-sers incidents comporte une partie non-résonante résultante de l’interaction des faisceaux entre eux mais également avec les autres molécules constituant le milieu d’étude. La partie réso-nante est uniquement liée à l’interaction des champs électriques des impulsions pompe Ep et Stokes ESt avec la molécule d’étude. La partie non-résonante s’exprime avec α un coefficient arbitraire [120] :
Pnres(t) = αEp(t)ESt(t) (2.46)
La partie résonante pondérée par un facteur β est donnée par [120] : Pres(t) = β Z Ep(t0)ESt(t0)dt0 × i (ΔNi   dΩ!i cos (ωit + φ) exp (− it)) (2.47)
Cette dernière expression comporte un terme regroupant la somme sur toutes les transitions d’une équation regroupant les termes spectroscopiques de la molécule comme la différence de distribution de population ΔNi, la section efficace Raman , les fréquences de transitions Raman ωi , et la largeur de raie i, sommés sur toutes les transitions i. Le déphasage entre les contributions résonante et non-résonante est exprimé par le terme Φ. Comme cela a été évoqué dans la partie bibliographique, le paramètre du taux de décroissance de la cohérence i due aux effets de collisions est à considérer au delà de ∼ 15ps après l’excitation Raman initiale lorsque la pression n’excède pas 20bar [75]. Développons le terme de section efficace Raman qui représente l’intensité de diffusion d’une raie Raman, c’est-à-dire une quantité par unité d’angle solide. La section efficace dépend des invariants du tenseur susceptibilité décrit auparavant : dΩ! i = 16π2c4 02dσ(ωpr + ωi)4  (αzz)2 (2.48).

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Table des matières

Introduction
1 Etat de l’art 
1.1 Diagnostics laser en combustion
1.2 Diffusion Raman anti-Stokes Cohérente (DRASC)
1.2.1 DRASC multiplex (Stokes large bande)
1.2.2 DRASC double large bande (dual-broadband)
1.2.3 DRASC double pompe (dual-pump)
1.2.4 DRASC à la résonance
1.3 DRASC en régime d’impulsions femtosecondes
1.3.1 DRASC fs résolue temporellement
1.3.2 DRASC fs à sonde à dérive de fréquence (CPP)
1.3.3 DRASC hybride femtoseconde/picoseconde (fs/ps)
1.3.4 Montages expérimentaux
2 Théorie de la DRASC en régime femtoseconde 
2.1 Interaction laser/matière
2.1.1 Propagation non-linéaire
2.1.2 Susceptibilité non-linéaire
2.2 Modélisation temporelle des signaux DRASC résonant et non-résonant
2.2.1 Organisation du programme DRASC
2.2.2 Exploitation des spectres théoriques
2.2.3 Effet de la polarisation
2.3 Méthode de détermination de la température
2.3.1 Algorithme « Differential Evolution »
2.3.2 Choix de la fonction objectif
3 Dispositif expérimental et paramètres associés 
3.1 Description du montage DRASC fs CPP
3.1.1 Réalisation de l’accord de phase
3.1.2 Ajustement de l’énergie des faisceaux
3.1.3 Mesure des durées d’impulsion
3.1.4 Sensibilité à l’environnement
3.2 Milieux de mesure
3.2.1 Flux d’air et d’argon à température modérée
3.2.2 Flamme de prémélange méthane / air
3.3 Optimisation du signal DRASC
13.3.1 Temps de chauffe du dispositif
3.3.2 Dépendance du signal DRASC fs CPP à l’énergie de faisceaux incidents
3.3.3 Précision de la longueur d’onde des faisceaux incidents
4 Résultats expérimentaux 
4.1 Mesures de température
4.1.1 Description de la méthodologie
4.1.2 Prise en compte d’informations expérimentales
4.1.3 Convergence de l’algorithme
4.1.4 Mesures à température modérée (300-600 K)
4.1.5 Mesures en flamme
4.2 Analyse expérimentale et numérique des paramètres d’influence
4.2.1 Etude numérique
4.2.2 Délai pompe/sonde
4.2.3 Exploration de l’influence du paramètre β/α
Conclusions et perspectives 
Annexes 
A Éléments du montage DRASC fs 
A.1 Système laser femtoseconde
A.1.1 Oscillateur
A.1.2 Amplification
A.2 Amplificateur Paramétrique Optique (OPA)
A.2.1 OPA Light Conversion TOPAS Prime Plus
A.3 Système de collection
A.4 Cristaux non-linéaires
A.5 Mesures d’impulsions ultracourtes
Références

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