La fiabilité des réseaux de transports et de distribution de l’énergie électrique passe par une chaîne d’isolateurs qui assure la fonction d’isolement. Ces éléments de chaînes d’isolateurs considérés, à juste titre , comme maillon faible de toute cette structure , ne représente qu’une faible proportion ( estimé à moins de 10% ) du coût kilométrique d’une ligne aérienne . Mais la maintenance de ces isolateurs représente 60% du coût total de la maintenance du réseau électrique sans oublier qu’ils sont à l’origine de plus de 70% des incidents sur le réseau de transport et de distribution de l’énergie électrique. Dans la gamme des très hautes tensions, le dimensionnement de l’isolation externe est déterminé principalement par les surtensions de manœuvre. Dans ces conditions, la tenue à la tension nominale à 50 Hz des isolateurs propres et secs est excellente. Généralement elle est également suffisante pour supporter les surtensions temporaires. Cependant, en l’absence de surtensions de foudre ou de manœuvre, de nombreux défauts sont enregistrés sur les lignes aériennes, particulièrement par temps humide (rosée, brouillard, pluie fine). Ces défauts sont dus à la pollution des isolateurs. Dans les ouvrages (lignes ou postes) installés en bordure de mer, les embruns portés par le vent déposent progressivement sur les isolateurs une couche de sel qui, à plus ou moins longue échéance, recouvre toute la surface de l’isolant y compris les parties les mieux protégées. Cette couche de sel, humidifiée par les embruns eux-mêmes, par un brouillard ou simplement par condensation, devient conductrice. Un courant de fuite s’établit alors à travers la couche superficielle et des arcs peuvent prendre naissance dans certaines conditions, et se développer jusqu’à provoquer le contournement total de l’isolateur. Au voisinage des usines métallurgiques, chimiques ou même abords des centrales thermiques, les isolateurs se recouvrent de poussières faiblement conductrices, mais hygroscopiques. Dans des conditions de forte humidité (brouillard, pluie, condensation matinale, etc.) la dissolution des sels contenus dans cette poussière provoque la formation d’un électrolyte. Les gaz présents dans les fumées, absorbés par la couche liquide, en augmentent encore la conductivité. Comme dans le cas de la pollution marine un courant de fuite circule alors dans la couche superficielle et le contournement peut parfois survenir. Si la pollution marine et la pollution industrielle constituent deux cas typiques de pollution ou la contamination des surfaces isolantes est poussée à l’extrême il serait erroné de penser que les autres régions son exemptes de pollution. La pollution domestique (appareils de chauffage des habitations, véhicules automobiles) et la pollution agricole (pollen, insectes, engrais) sont des réalités qui donnent au phénomène un caractère tout à fait général. A cet égard, on notera que les régions désertiques sont caractérisées par un type de pollution extrêmement sévère. Comme on le voit, la nature et les caractéristiques des agents contaminants sont très variées. Généralement ils ne provoquent pas des dégradations de la rigidité diélectrique lorsqu’ils sont secs, cependant, l’humidification d’un dépôt solide – quelle que soit sa nature- accumulé progressivement à la surface des isolateurs provoque la formation d’une couche électrolytique caractéristique du phénomène de pollution.
MODELISATION STATIQUE DU SYSTEME DECHARGE POLLUTION
La bibliographie sur le comportement des isolateurs pollués présentée par IEEE et couvrant la période de 1903 à 1976, ne comptait pas moins de 900 références (1). Plus récemment, Rizk (2) a fait une analyse critique des principaux modèles mathématiques élaborés au cours des vingt-cinq dernières années pour décrire le phénomène de contournement des isolateurs sous atmosphère polluée. Parmi ceux–ci, l’étude des décharges qui s’établissent à la surface d’un électrolyte matérialisant la pollution humide, fait l’objet d’une attention spéciale justifiée par la possibilité de confronter les résultats du calcul aux mesures relevées sur un modèle de laboratoire simple à réaliser.
Présentation du modèle
On doit à Obenaus (3) l’un des travaux les plus importants sur les premières bases quantitatives des phénomènes du contournement. Il a considéré le système simple d’une décharge qui se propage au-dessus de la surface d’un électrolyte dont la résistance représente dans le circuit équivalent la zone polluée. Ce modèle schématise l’état électrique statique du phénomène du contournement. La décharge, de longueur X, peut s’allonger, mais le modèle ne décrit pas ces modifications de longueur en fonction du temps.
Circuit électrique équivalent
Pour une décharge de type intermédiaire entre la luminescence et l’arc, la différence de potentiel à ses bornes peut s’écrire.
Vd = x.E a + Ue I.3
Ue représentant la chute de tension cumulée aux deux électrodes et comprenant la partie cathodique UK et la partie anodique Ua. Dans l’expression (I.3) apparaît le champ électrique de la colonne positive de la décharge que l’on peut écrire sous la forme suivante:
Ea = A i⁻ⁿ I.4
Où A et n sont deux constantes définies par les conditions expérimentales. Nous verrons par la suite que le graphe E (i) peut aussi être représenté par une expression différente de l’équation (I.4), mais qui conserve la même allure à la variation E(i) déterminée expérimentalement; dans la gamme des courants intéressant cette étude, lorsque le courant augmente, E diminue et Ue reste sensiblement constante .
L’équation complète du circuit devient alors:
U = x A i⁻ⁿ + (L-x) ri + Ue I.5
Ce schéma équivalent suppose une couche conductrice unidimensionnelle de longueur L- x uniforme sur la ligne de fuite de l’isolateur. On considère que les paramètres A et n sont des constantes dépendant essentiellement du milieu dans lequel brûle la décharge. Dans notre système, la gamme des courants correspondant au phénomène s’étend entre 5mA et 1A. Comme nous travaillons à la pression atmosphérique normale, nous en concluons que les décharges impliquées sont du type intermédiaire entre la luminescence et l’arc.
Application à la détermination de la tension de contournement
La décharge ne peut s’allonger jusqu’au contournement que si l’équation (I.1) est valable quel que se soit X∈[ XO, L ], XO étant la longueur initiale de la décharge après son amorçage. La plus petite valeur de la tension U appliquée au système qui permet de remplir cette condition sera choisie comme tension de contournement. Nous exposerons brièvement les principaux travaux (5), (8) qui ont mis en évidence les conditions électriques critiques du modèle: ce sont les valeurs limites qui, permettant le contournement, n’assurent plus au système sa stabilité.
Influence de la forme et de la position des isolateurs
Influence de la forme des isolateurs
La longueur de fuite est un important paramètre de la tenue des isolateurs sous pollution. Pour augmenter les performances d’un isolateur, on pourrait donc être tenté d’augmenter la longueur de fuite. Ce raisonnement n’est pas fondamentalement faux mais des restrictions doivent être apportées.
En effet, considérons deux isolateurs type support a et b, l’un de profil simple (a) et l’autre (b) comportant des nervures de profil dit « anti-pollution ».
Lorsque les isolateurs sont identiquement pollués, en admettant une couche uniformément répartie, et soumis à une même contrainte par unité de longueur de ligne de fuite, des arcs se développent. Si les arcs en développent restent en contact avec la surface isolante, la ligne de fuite est complètement utilisé figure (I-4a) et l’isolateur suit la loi générale de performances des isolateurs. Si par contre, les arcs en se développant ne restent pas parfaitement en contact avec l’isolant mais adoptent un trajet court comme le montre la figure (I-4b) en amorçant dans l’air, une partie de la ligne de fuite n’est pas utilisée. Il est clair que la tension de contournement de l’isolateur B sera inférieure à celle de l’isolateur A. Il n’est pas possible à l’heure actuelle de déterminer d’une manière sûre les points le long de la ligne de fuite entre lesquels des amorçages dans l’air risquent de se produire, mais de toute évidence, pour un isolateur dont la distance c entre les ailettes est trop faible figure (I-4c) des claquages entre ailettes risquent de se produire en particulier sous pluie. Actuellement il semble raisonnable de poser c >50mm. Pour les isolateurs respectant cette condition il n’en reste pas vrai que deux paramètres non indépendants entrent en ligne de compte; d’une part là ou les distances critiques dans l’air entre deux points le long du profil telles que l’arc soit susceptible d’amorcer d’une part, la conductivité de la couche polluante.
On peut admettre que lorsque la couche de pollution est très conductrice l’arc adopte un trajet préférentiel de la ligne de fuite. En revanche, une mauvaise conductivité de la couche polluante favorise le claquage dans l’air entre nervures par exemple, par rapport au trajet sur la surface isolante. L’approche théorique ne permettant pas de prendre en compte cet effet, on a été amené à rechercher un critère empirique appelé «facteur de profil» ou FP.
Influence de la position des isolateurs
Les résultats précédents sont relatifs à des isolateurs en position verticale. Lorsqu’ ils sont utilisés en position horizontale ou inclinée (cas des chaînes d’ancrage et des chaînes en V des lignes aériennes) les isolateurs présentent généralement une meilleure tenue à la pollution. Compte tenu de la dispersion des résultats il est difficile de chiffrer cette amélioration de façon précise; 10% est un ordre de grandeur indicatif. Ajoutons que, même en position verticale, les isolateurs peuvent présenter des variations de tenue selon qu’ils sont posés ou suspendus. Le phénomène pourrait provenir de l’effet combiné du ruissellement et de la réparation de tension le long de l’isolateur. D’une part le ruissellement est plus fort en bas de chaîne, d’autre part, la partie de l’isolateur supportant la plus forte contrainte est l’extrémité sollicitée par la tension (le bas pour une isolation suspendue, le haut pour une isolation posée). Ainsi, lorsque ruissellement important et contrainte renforcée coïncident (isolateurs suspendus) une légère diminution de tenue est observée.
|
Table des matières
Introduction générale
Chapitre 1
I- MODELISATION STATIQUE DU SYSTEME DECHARGE POLLUTION
I -1. Introduction
I -2. Présentation du modèle
I-3. Application a la détermination de la tension de contournement
I-3-1.Conditions électriques critiques du modèle
I.4 .Influence de la forme et de la position des isolateurs
I.4.-1.Influence de la forme des isolateurs
I-4-2.Influence de la position des isolateurs
I-5. Le contournement des isolateurs sous pollution
I- 5-1. Approche qualitative
I-5-2. Approche théorique
a) Equations générales
b) Contournement sous tension continue
c) Contournement sous tension alternative
I-6.Conclusion
Chapitre II
II- ANALYSE DES SURTENSIONS
II-1. Introduction
II-2. Surtensions internes temporaires
II-2-1. Surtension à l’extrémité d’une ligne ouverte (effet Ferranti)
a)Modèle (Matlab/ Simulink) pour l’étude du comportement d’une ligne à paramètres distribuées lors de son à enclenchement à vide
b) Analyse du comportement d’une ligne pour différents niveaux de tension
c) Analyse des résultats de la simulation
II-2-2. Défaut monophasé à la terre
II-2-3. Perte de charge
II-2-4. Ferrorésonance
II-3.Surtensions internes transitoires de manœuvre
II- 4. Surtensions externes transitoires de foudre
II-4-1. Généralités
a)Formation des nuages
b) Formation des charges électriques
II-4-2Caractéristiques électriques de la foudre
II-4-3.Forme et amplitude des impulsions (décharges partielles) des coups de foudre
a) Forme des décharges négatives
b) Forme des charges positives
II-4-4 Contraintes appliquées a une ligne touchée par un coup de foudre
a- Coup de foudre sur conducteur de phase
b -Coup de foudre sur un pylône ou sur un câble de garde
II.4.5 Simulation de l’onde de choc de la surtension transitoire de foudre
II-5.Conclusion
Chapitre III
III-CONTRAINTES DIELECTRIQUES
III-1. Généralités
III-2. Résistivité diélectrique
III-3. Permittivité
III- 4. Rigidité diélectrique
III- 5. Les pertes diélectriques
III-5-1. Identification des paramètres des schémas équivalents
III-6. Claquage diélectrique
III-6-1. Claquage électrique
III-6-2. Claquage électrochimique
III-6-3. Claquage thermique
Chapitre IV
IV-EFFET COURONNE
IV-1. Définition
IV-2. Présentation et origines des pertes par effet couronne
IV-3. Perturbations radio – électriques
IV- 4.Phenomenes d’ionisation dans les gaz
IV-4.1. Excitation atomique
IV-4-2.Ionisation par collision électronique
IV-4-3.Photo-ionisation
IV-4-4. Détachement
IV-4-5. La recombinaison
IV-4-6. Attachement
IV-4-7-Mouvement dans le champ électrique
IV-5. Les décharges électriques dans les gaz
IV-5-1.Caractéristique courant – tension des décharges dans les gaz
IV-5-2. Décharge couronne
IV-5-3.Décharges négatives « Avalanche de Townsend
IV-5-4. Décharges positives « Front de photo – ionisation »
IV-6. Différents types d’émission des charges en effet couronne
I V- 6-1. Petites aigrettes négatives (impulsions de Triche)
IV-6-2. Zone de conductivité continue (Zone d’Hermstein)
IV-6-3. Grandes aigrettes positives (Pre-breakdown Streamers)
IV-7. Loi de Peek : seuil critique de l’effet couronne
IV-7-1. Définition
IV-7 -2. Obtention de la loi de Peek
Conclusion générale