La fusion par confinement inertiel (FCI)
La réaction de fusion thermonucléaire
Le considérable potentiel de libération d’énergie ayant lieu lors de la réaction de fusion de deux noyaux légers, qui existe au sein des étoiles comme notre soleil, est connu depuis longtemps. Depuis les années 50, la possibilité de remplacer la fission par la fusion pour produire une source d’énergie alternative a été envisagée. L’intérêt scientifique de reproduire le fonctionnement des étoiles en laboratoire s’est aussi imposé de luimême. La principale difficulté dans la reproduction de la fusion en laboratoire est la nécessité d’apporter aux noyaux une grande quantité d’énergie cinétique pour lutter contre la répulsion Coulombienne existant entre particules de même signe. Une fois suffisamment rapprochés, c’est à dire pour des distances inférieures au Fermi (10−15m), les deux noyaux subissent les forces d’attraction nucléaires. Cette barrière de potentielpeut néanmoins être franchie par effet tunnel, prédit par la théorie quantique, avec une énergie plus faible.
L’énergie libérée au cours de cette réaction l’est sous forme d’énergie cinétique et se de manière inversement proportionnelle à leurs masses. L’un des grands avantages de la fusion réside justement dans les combustibles utilisés. Le deutérium se trouve en abondance dans la nature (en particulier dans l’eau de mer) et le tritium peut être produit directement à travers la réaction de fusion par fission entre les neutrons et du lithium introduit dans la réaction. L’autre avantage de la fusion, par rapport à la fission, est la considérable diminution des déchets radioactifs lors de la production d’énergie .
Deux voies existent pour reproduire la fusion en laboratoire, la fusion par confinement magnétique et la fusion par confinement inertiel. La première, qui fut développée dans les années 50, repose sur le confinement d’un plasma de densité relativement faible (n ≈ 10¹⁴cm−3 ) par un champ magnétique intense sur une durée de confinement suffisamment longue (τ ≈ 1s) pour permettre la fusion. L’avènement dans les années 60 du laser a permis d’envisager son utilisation pour réaliser la fusion par une autre voie : la fusion par confinement inertiel (FCI).
L’attaque directe et indirecte
L’attaque directe consiste à comprimer la cible directement par une multitude de faisceaux laser[1] provoquant ainsi la compression du coeur de celle-ci par effet fusée. Bien que plus efficace, ce schéma présente l’inconvénient majeur de devoir utiliser un nombre très important de faisceaux pour assurer l’uniformité de l’éclairement. Cette approche est choisie, entre autres, sur les installations du Laser Ω à Rochester (EU), Gekko à Osaka (Japon) et LULI (Laboratoire pour l’Utilisation des Lasers Intenses) à l’Ecole Polytechnique (Palaiseau-France).
Dans l’attaque indirecte, approche retenue dans le cadre du projet du laser Mégajoule (Bordeaux-France) et le NIF (EU), la cible est placée dans une cavité cylindrique (d’environ 1cm3 ) de Z élevé (en général de l’or) appelée hohlraum[2, 3]. Les faisceaux lasers (240 pour le Mégajoule), pénètrent alors dans la cavité et irradient les parois du hohlraum. Un rayonnement X est alors émis qui va provoquer la compression du combustible. Cette méthode permet de rendre l’éclairement plus uniforme et d’assurer une réduction des instabilités hydrodynamiques qui peuvent se développer lors de la compression du micro-ballon. Afin de ralentir l’expansion du plasma d’or, un gaz léger (un mélange d’hélium et d’hydrogène) est introduit dans la cavité. Le laser va donc traverser, dès son entrée dans le hohlraum, un plasma sous dense (dont la densité est inférieure à la densité critique nc et d’environ nc/10, où la densité critique est la densité maximale au-dessus de laquelle le laser ne peut plus se propager dans le plasma) homogène en densité et d’un grand volume. Il est très important pour assurer une bonne compression de la cible, que le maximum de l’énergie entrante soit déposée dans l’or. Malheureusement, au cours de la propagation du laser dans le plasma sous-dense ainsi que dans le plasma d’or en expansion, il existe une compétition entre une absorption normale de l’énergie (absorption collisionnelle) et des processus non-linéaires d’interaction laser-plasma. En effet, au cours de la propagation de champs électromagnétiques intenses, des couplages non-linéaires avec les fluctuations de densités électroniques et ioniques, présentes dans le plasma, vont conduire à des processus qui s’opposent au bon transfert de l’énergie : les instabilités paramétriques. Ces instabilités pourront conduire soit à une perte d’énergie par diffusion du rayonnement incident (instabilités de rétrodiffusion Brillouin et Raman) soit à une perte d’uniformité de l’éclairement (instabilité de filamentation et d’autofocalisation), soit à la création d’électrons suprathermiques et à une absorption anormale (autrement qu’en transférant l’énergie lumineuse en énergie thermique) de l’onde laser (instabilité deux plasmons). Sous l’action d’une onde électromagnétique de grande intensité, telle qu’une onde laser, les oscillations au sein de cette onde peuvent donner lieu à l’excitation progressive d’ondes secondaires, pompant l’énergie de l’onde de grande amplitude. Ce couplage est un couplage résonnant entre l’onde laser incidente, une onde électrostatique qui peut être de deux natures différentes dans un milieu totalement ionisé : ionique (basse-fréquence) ou électronique (haute-fréquence) et une ou deux ondes électromagnétiques.
Etat de l’art sur la modélisation des instabilités paramétriques
Une partie des recherches menées dans le domaine de l’interaction laser-plasma depuis plusieurs années et visant à optimiser le couplage entre le laser et la cible a été centrée sur la compréhension de ces instabilités paramétriques. Néanmoins, malgré les efforts conjugués entre théoriciens et expérimentateurs , on ne parvient toujours pas à expliquer les différences observées dans les réflectivités dues aux instabilités paramétriques entre les prédictions théoriques et les résultats expérimentaux. En effet, même si le développement linéaire de ces instabilités est connu, les mécanismes de saturation non-linéaires et les couplages entre ces différentes instabilités sont assez peu connus. La principale difficulté pouvant expliquer les origines de cette incapacité à prédire et à reproduire par des simulations numériques les taux d’énergie rétrodiffusée est due au fait qu’au cours de l’interaction de nombreux mécanismes intervenant sur des échelles temporelles et spatiales différentes vont intervenir : les modifications hydrodynamiques du plasma (température et densité) sur des échelles de l’ordre de la nanoseconde et de plusieurs millimètres, l’évolution non-linéaire de l’onde sonore (pour l’instabilité de diffusion Brillouin stimulée) sur des échelles spatiales de quelques micromètres et temporelles de l’ordre de la picoseconde, alors que des effets cinétiques (conduisant à une modification de la fonction de distribution des particules) interviennent sur des échelles spatiales de quelques micromètres et temporelles de la picoseconde voire du femtoseconde. Modéliser l’ensemble de ces mécanismes en même temps, semble donc extrêmement complexe.
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Table des matières
1. Introduction
1.1. La fusion par confinement inertiel (FCI)
1.1.1. La réaction de fusion thermonucléaire
1.1.2. L’attaque directe et indirecte
1.2. Etat de l’art sur la modélisation des instabilités paramétriques
1.3. Plan et objectifs de la thèse
2. Présentation du modèle théorique étudié
2.1. Relation de dispersion générale du couplage entre les ondes sonores et une onde électromagnétique
2.2. Diffusion Brillouin stimulée SBS
2.2.1. Relation de dispersion de l’instabilité et constante de couplage
2.2.2. Instabilité absolue et convective dans un plasma de longueur finie
2.2.3. Evolution de l’instabilité en présence d’inhomogénéité du plasma
2.3. Autofocalisation et filamentation – éléments théoriques
2.3.1. Filamentation pondéromotrice
2.3.2. Filamentation thermique
2.4. Description hydrodynamique de l’instabilité de diffusion Brillouin stimulée et de la filamentation
2.5. Modèle de Décomposition en harmoniques
2.5.1. Approximation de l’équation de Poisson
2.5.2. Equations du modèle de décomposition en harmoniques
2.5.3. Conservation de l’ensemble des corrections à la dispersion
3. Validation du modèle de décomposition en harmoniques
3.1. Validation de la méthode de décomposition en harmoniques en 1D
3.1.1. Conditions de simulations en 1D et premières observations
3.1.2. Variation de la densité n0/nc
3.1.3. Variation de l’intensité Iλ20
3.1.4. Écart à la quasi-neutralité : Modèle perturbatif de Poisson et corrections dues à la dispersion
3.1.5. Influence de l’amortissement et corrections thermiques
3.2. Comparaison avec un modèle Korteweg-de-Vries/Maxwell non-paraxial
3.2.1. Description de la non-linéarité par une équation de Korteweg-deVries/Maxwell Non-paraxial
3.2.2. Comparaison des modèles
3.3. Validation de la méthode décomposition en harmoniques en 2D
3.3.1. Conditions de simulations : faisceau gaussien et autofocalisation
3.3.2. Validation de la méthode
3.3.3. Loi d’échelle
3.4. Etude numérique de la convergence du code complet
3.5. Conclusion
4. Conclusion
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