Les développements scientifiques sur les services écosystémiques
Les études fondatrices du concept de service écosystémique ont débuté avant le MEA. Comme l’indique la terminologie, ce concept a été principalement développé par des économistes de l’environnement et a donné lieu à des évaluations monétaires (Hawkins, 2003) dans le but de favoriser la protection d’espèces ou d’espaces « utiles ». Par exemple, la valeur des services écosystémiques à l’échelle mondiale avait été évaluée à 30 000 milliards de dollars en 1997 (Costanza et al., 1997), le marché des médicaments issus des plantes représentait 36 milliards de dollars par an aux Etats Unis en 1998 (Pimentel, 1998), ou encore, les organismes pollinisateurs procuraient un service estimé de 4,1 à 6,7 milliards par an en 1997 (Nabhan and Buchmann, 1997). Bien que ces approches soulignent l’intérêt d’une gestion durable des écosystèmes, les informations qui en sont issues sont limitées et ne prennent pas en compte l’incertitude et les phénomènes d’irréversibilité (Chee, 2004). La valeur monétaire donnée à un élément naturel, une espèce ou un processus issu d’interactions entre un ensemble d’espèces et avec leur environnement biophysique, ne peut être absolue (Daily, 1997). Les évaluations ont un caractère relatif dépendant de la méthode d’évaluation mais aussi de la conjoncture économique au moment de l’évaluation ou des hypothèses sous jacentes aux modèles de prévision de la demande. Hormis les critiques que des économistes ont pu faire sur l’aspect méthodologique (e.g. Serafy, 1998), cette démarche soulève un problème éthique concernant l’utilisation de tels calculs dans des décisions politiques (Toman, 1998; Nunes and van den Bergh, 2001). La réduction des entités naturelles à une valeur unidimensionnelle et atemporelle ouvre la possibilité les intégrer dans des logiques marchandes, ou de les soumettre à des analyses coûts-bénéfices basées sur des évaluations partielles et contextuelles de leurs valeurs (Meral, 2011). De plus, on peut noter que les économistes ont reclassé les services écosystémiques, sans prendre en compte les services de support, difficiles à évaluer économiquement (Meral, 2011). En écologie, le concept de service écosystémique apporte une dimension nécessaire à la compréhension des mécanismes naturels (i.e. pollinisation, eutrophisation…), sans pour autant modifier en profondeur les méthodes de travail puisque l’étude des propriétés des systèmes naturels, des attributs, des fonctions des écosystèmes et des interactions entre espèces sont les bases de la recherche. Les nouveaux défis sont générés par la grille de lecture en termes de services, par exemple l’identification des entités productrices de service, les facteurs qui peuvent les influencer et les échelles temporelles et spatiales auxquelles ils sont associés (Luck et al., 2003; Kremen, 2005), la recherche de proxis plus pertinents pour représenter la relation entre la productivité d’un service et la biodiversité (Reiss et al., 2009). Cependant, les dimensions sociales et économiques sont souvent simplifiées, les humains sont encore souvent considérés simplement comme des sources exogènes d’impact sur les systèmes étudiés (Armsworth et al., 2007). Des études plus interdisciplinaires examinent la conciliation possible entre des systèmes économiques et écologiques (Farber et al., 2006; Egoh et al., 2007; Tallis et al., 2008). Lorsqu’elles sont plus ancrées dans la discipline économique, elles peuvent par exemple concerner la recherche de mesures standards afin de produire un indicateur quantitatif des services écosystémiques, équivalent au PIB par exemple (Boyd and Banzhaf, 2007). Un tel indicateur permettrait de comparer les performances de mesures environnementales dans différents endroits et de réduire les budgets de collectes de données. Mais de la même manière que pour les évaluations monétaires, l’indicateur devrait perdre en informations sur la qualité des services écosystémiques. Le cadre d’analyse des services écosystémiques du MEA se distingue nettement des évaluations monétaires, d’une part parce qu’il étend les bénéfices à des aspects autres que celui exclusivement monétaire et, d’autre part parce qu’il apporte une perspective plus écologique et holistique en mettant en évidence les processus écosystémiques sous jacents aux services procurés. En cela il rejoint l’ingénierie écologique. Cette discipline est née dans les années 1960 avec les travaux de Howard T. Odum. Il s’agissait pour lui de manipulations environnementales faite par l’homme en utilisant une faible quantité d’énergie supplémentaire pour contrôler des systèmes dans lesquels les forces énergétiques principales proviennent de sources naturelles (Odum, 1962). Mitsch et Jorgens en ont ensuite défini l’ingénierie écologique comme la conception d’écosystèmes durables, intégrant la société humaine et son environnement et dont les bénéfices sont perçus par ces deux entités (Mitsch and Jorgensen, 1989) Par exemple, les forêts et leurs fonctions de protection contre les chutes de pierres : une bonne gestion des forêts permet d’éviter des catastrophes humaines et de minimiser les coûts causés par des dégâts tels que les glissements de terrain. L’ingénierie écologique consiste d’une part, à restaurer les écosystèmes perturbés par l’activité humaine, et d’autre part, à développer de nouveaux écosystèmes qui ont une valeur économique et écologique. Cette discipline a ré-émergée avec le concept de développement durable (Gosselin, 2008). L’approche « globale » du MEA permet de souligner les interdépendances qui existent entre les processus et par conséquent entre les services. Par exemple, les activités humaines responsables de l’augmentation des services d’approvisionnement ont pour effet la réduction de bénéfices provenant d’autres services écosystémiques (Carpenter et al., 2009). Plusieurs études initiées par le MEA relèvent de la prospective et sont basées sur des scénarios concernant par exemple l’évolution de la démographie humaine, les types d’échanges économiques (M.E.A., 2005; Carpenter et al., 2006). Des modèles développés afin d’anticiper l’évolution dynamique des services écosytémiques en réponse aux variations de telles composantes anthropiques ou climatiques (Schroter et al., 2005; Alcamo et al., 2005; Carpenter et al., 2009; Nelson et al., 2009; Pereira et al., 2010) permettent de générer leurs tendances à des échelles globales. La biodiversité devrait continuer à décliner durant le 21ème siècle (Pereira et al., 2010). Cependant, les résultats des simulations ne permettent pas facilement d’élaborer des recommandations précises pour la conservation et la préservation des services écosystémiques (Armsworth et al., 2007). Les connaissances mobilisées pour représenter les dynamiques écologiques et socio-économiques ainsi que leurs interactions sont limitées (Carpenter et al., 2006; Tallis et al., 2008) ; par exemple, la plupart des données utilisées sont contextuelles et pourtant projetées à une échelle mondiale (Naidoo et al., 2008). Enfin, les résultats comportent un grande part d’incertitude puisque les modèles comportent souvent un seul élément moteur de changement de la biodiversité (i.e. le climat) alors qu’ils sont multiples et devraient être intégrés dans des modèles de type mécanistes (Pereira et al., 2010). D’un argumentaire purement économique basé sur les évaluations monétaires, l’importance de la préservation de l’environnement passe, dans l’approche proposée par le MEA, par la réaffirmation des liens entre les processus écosystémiques et les besoins nécessaires à la vie humaine. Il est supposé qu’en plaçant le bien-être humain comme objectif central (Balvanera et al., 2001; Kremen, 2005), la préservation des services écosystémiques serait traduite par des opérations efficaces de conservation (Knight et al., 2006) puisque leur importance devrait être reconnue au niveau sociétal (Egoh et al., 2007). Pourtant, en 2007, le concept de service écosystémique est encore peu intégré dans les travaux émettant des recommandations pour la conservation (Egoh et al., 2007). Bien que les services écosystémiques soient cartographiés, la concordance entre les zones à forte biodiversité susceptible de bénéficier de programmes de conservation et celles où des services écosystémiques sont produits n’avait pas encore été étudiée en 2008 (Naidoo et al., 2008). Selon Daily et al. (2009), rendre opérationnels les services écosystémiques pour la conservation nécessite de les prendre en compte systématiquement et explicitement dans les décisions individuelles, ainsi que dans celles des entreprises et des gouvernements. Le rôle de la communauté scientifique est d’apporter les connaissances et les outils nécessaires pour prévoir et quantifier les rendements des services (Daily et al., 2009). Cette brève présentation montre que les productions scientifiques à propos des services écosystémiques sont issues de disciplines variées, qui donnent forme à ce concept selon leurs propres problématiques, formalisations et outils. L’approche des services écosystémique du MEA devrait être fructueuse pour la conservation des espèces et des espaces. Le service écosystémique auquel nous allons nous intéresser est rendu par des rapaces nécrophages et il est devenu un argument pour leur conservation. Avant d’aborder les spécificités de notre cas d’étude et l’approche méthodologique de ce travail, une présentation des services rendus par les vautours et de leur état de conservation dans le monde permettra de replacer notre cas d’étude dans un cadre général.
Le Vautour fauve : cycle de vie, comportement et démographie
Le genre Gyps comprend cinq espèces de l’Ancien Monde dont le Vautour fauve (Gyps Fulvus), le Vautour du Cap (Gyps Coprotheres), le Vautour de Rüppell (Gyps rueppelli), le Vautour de l’Himalaya (Gyps himalayensis) et le Vautour indien (Gyps indicus). Ces espèces sont longévives ; un Vautour fauve maintenu en captivité peut vivre au moins 37 ans (Newton, 1979). Les vautours fauves sont les plus nombreux en France. Pour cette espèce particulière qui est notre modèle d’étude, les individus atteignent la maturité sexuelle à 4 ans (Terrasse, 1977; Mendelssohn and Leshem, 1983; Sarrazin et al., 1996). Le cycle de reproduction dure 9 mois, de décembre à août (Elosegui, 1989). Le sex ratio est équilibré (Bosè and Sarrazin, 2007) et les couples produisent un œuf unique entre janvier et février. L’incubation dure environ 54 jours, durant lesquels une ponte de remplacement peut avoir lieu. Le poussin reste au nid de 110 à 140 jours, au cours desquels il peut atteindre sa taille adulte, soit 240 à 280 cm d’envergure pour un poids compris entre 7 et 12 kg (Cramp and Simmons, 1980). L’envol des juvéniles a lieu entre juin et août. Ce rapace présente des adaptations morphologiques et métaboliques au régime alimentaire à la consommation de charognes (Mundy et al., 1992). Il peut jeûner plusieurs jours (Mundy et al., 1992). Il consomme notamment les parties molles (organes, viscères) de cadavres d’ongulés. Ses besoins alimentaires ont été estimés à 0,5 kg/jour (Friedman and Mundy, 1984) et à 0,750 kg/jour en période de reproduction (Hiraldo, 1984; Chassagne, 1998). Sa capacité d’ingestion maximum est de 1,5 kg (Mendelssohn and Leshem, 1983). Le Vautour fauve est grégaire, et dès la maturité sexuelle, il est généralement sédentaire. Il niche en falaise et utilise majoritairement le vol à voile pour se déplacer avec les thermiques. Ce rapace diurne peut parcourir de longues distances (Houston, 1974; Mundy et al., 1992; Donázar, 1993), avec une vitesse moyenne de vol d’environ 40 km/h (Pennycuick, 1972). Chez les animaux sédentaires, occupant donc un domaine vital, les déplacements de longue distance sont généralement limités à la dispersion post natale (Mueller and Fagan, 2008) ; les individus juvéniles partent de leur site de naissance de manière définitive. Pour le Vautour fauve, les déplacements en vue de l’approvisionnement consistent généralement à partir et revenir au site de nidification (Carrete, 2005). Contrairement aux vautours du Nouveau Monde qui repèrent leurs ressources grâce à l’odorat, ceux du genre Gyps les détectent grâce à la vision (Houston, 1974). Leurs bulbes olfactifs sont peu développés (Bang and Cobb, 1968) tandis que leur acuité visuelle serait exceptionnelle (Gensbol, 1984). Lorsqu’un individu a repéré des ressources alimentaires, il exécute de larges cercles en diminuant progressivement son altitude. Ceci peut alors constituer une information pour les congénères qui le repèrent. Ce phénomène est appelé recrutement local (« local enhancement » (Turner, 1964; Houston, 1974; Pöysä, 1992). Par exemple, pour le Vautour de Rüppell (Gyps rueppellii), Houston (1974) estime que, par ce phénomène, les individus peuvent être attirés depuis une distance d’au moins 35 km de la ressource. Ainsi, sa bonne acuité visuelle et le phénomène de recrutement local confèrent au Vautour fauve des atouts pour une recherche efficace de nourriture. La dynamique d’une population, soit l’évolution des effectifs la constituant, résulte des disponibilités en ressources (alimentaires, sites de reproduction..) et des interactions intra et interspécifiques (compétition pour les ressources, coopération, prédation, …). Le Vautour fauve a peu de prédateurs. Lorsque la capacité d’un lieu, en terme de sites de nidification, n’est pas atteinte, la disponibilité alimentaire apparait être le principal facteur influençant la dynamique de population (Sarrazin, ; Fernandez et al., 1998). Il a été montré que le nombre de couple reproducteurs de vautours peut être positivement corrélé avec des changements d’abondance dans les cheptels (Parra and Telleria, 2004). La compétition pour les ressources alimentaires est un important facteur de régulation de population (Newton, 1998; Lewis et al., 2001). Si en Afrique, les grands carnivores ont souvent la priorité sur les carcasses (Mundy et al., 1992), en Europe, les compétiteurs les plus fréquents des vautours fauves sont les autres espèces de vautours, d’autres rapaces, des corvidés et des renards (Bosè, 2006 ). Dans le cas de la compétition entre des vautours de différentes espèces, « la taille semble jouer un rôle important dans la détermination d’une hiérarchie ; en général les espèces les plus grandes sont dominantes sur les plus petites (König, 1983; Hiraldo et al., 1991). Il existe aussi une compétition de type intraspécifique. Lors de la prise de nourriture, appelée curée pour les vautours, ces derniers peuvent se compter par centaines (Houston, 1974; Fernandez, 1988; Mundy et al., 1992). Les vautours fauves juvéniles semblent désavantagés vis-à-vis des individus plus âgés et subissent une compétition intra-spécifique par exploitation et interférence (Bosè and Sarrazin, 2007). La compétition par exploitation signifie que la ressource utilisée (ici consommée) par des individus n’est plus disponible pour d’autres individus. La compétition par interférence a lieu lorsque l’accès aux ressources encore non consommées pour des individus est empêché par d’autres individus. Contrairement à la première, il y a une action directe entre les individus. Ce pattern de compétition entre les juvéniles et les individus plus âgés est en accord avec la stabilité de la survie adulte chez les populations longévives (Bosè, 2006) ; il est possible chez une telle espèce longévive de prédire qu’un phénomène de densité-dépendance pour l’accès aux ressources alimentaires affecterait d’abord les juvéniles, en réduisant leur taux de survie (Gault, 2006). Une diminution du taux de survie juvénile a été mise en évidence lors du programme DIVA 1, pour la population de vautours des Grands Causses (Sarrazin et al., 2006 ; Mihoub et al. In prep).
La réglementation sanitaire et l’équarrissage sanitaire : le cas d’une crise d’épizootie.
Comme nous l’avons vu, l’équarrissage naturel en France a été reconnu et rendu possible suite à l’arrêté ministériel de 1998 (point 1.3). En amendant les dispositions du Code Rural, cet arrêté a permis la mise en place du système de placette individuelle d’alimentation. En 2002, soit quatre ans après, un nouveau règlement européen (CE n°1774/2002) apporte une réponse aux crises d’épizooties (répercussion de la crise de la vache folle). Ce texte permet à la Commission Européenne de garantir un niveau de sécurité sanitaire élevé dans l’ensemble de la chaîne de production et de distribution «de la ferme à la table», avec un niveau de traçabilité élevé pour les consommateurs. Il offre également l’avantage de garantir la compétitivité des filières d’élevages Européens afin de préserver les échanges commerciaux intra et extra communautaires. Enfin, pour autoriser l’équarrissage par un animal, il prévoit des dérogations permettant d’assurer le nourrissage, dans leurs habitats naturels, des oiseaux nécrophages protégés. La décision de la Commission européenne du 12 mai 2003 (2003/322/CE) définit de nouvelles règles pour la Grèce, l’Espagne, l’Italie, la France et le Portugal concernant l’alimentation des oiseaux nécrophages : elle impose un dépistage systématique des Encéphalopathies Spongiformes Transmissibles (EST) pour les bovins de plus de 24 mois et les ovins et caprins de plus de 18 mois. Ces nouvelles règles compliquent voire rendent irréalisables l’approvisionnement des charniers. En effet, avant de pouvoir déposer des carcasses sur les charniers, les têtes doivent être envoyées en laboratoire pour être soumises à un dépistage, tandis que le reste des carcasses doivent être stockées par les éleveurs, ou les gestionnaires collectant des carcasses à destination des vautours, dans l’attente d’une réponse. Psychologiquement peu confortable et nécessitant un aménagement logistique pour la conservation des carcasses (i.e. des containers frigorifiques), ce système se révèle trop contraignant tant pour les éleveurs que les gestionnaires. Un argumentaire minimisant les risques de transmission des EST est alors présenté par des membres du Groupe Vautour France à la Direction Générale de la Santé du Consommateur et à l’Agence Française de Sécurité Sanitaires des Aliments. Parallèlement, une motion de censure est déposée à la Commission Européenne. Par ailleurs, une action est entreprise auprès du Ministère de l’Ecologie, de l’Energie, du développement durable et de la Mer pour qu’il s’oppose à la signature de l’arrêté de transposition en droit français de la décision européenne. Cette dernière action permet finalement l’obtention de l’amendement 2005/830/(CE). Il fixe un quota de dépistage de 4 % sur les cadavres de petits ruminants, tout en conservant le dépistage systématique des bovins de plus de 24 mois abrogeant ainsi la décision 2003/332/CE.
Les techniques d’élevage, les filières de production et la mortalité des bêtes
La production laitière est prédominante dans les Grands Causses (Lhuillier and Osty, 2009). Elle impose une conduite de troupeau spécifique : deux traites journalières, selon une période et un nombre de jours imposés, la mise à l’herbage. L’accouplement a lieu en juillet et, en conséquence, l’agnelage a lieu en hiver (entre janvier et février). Cette période correspond à l’ouverture de la campagne laitière, qui est la même depuis un siècle (Puech, 1929). Or, la mortalité qui affecte les adultes du troupeau survient surtout lors de l’agnelage (un tiers des évènements de mortalité environ), et de manière plus épisodique par des pathologies (pour les deux tiers restants) (Bertin et al., 2005). Chez les agneaux, 60% environ de la mortalité se manifeste dans les 5 jours suivant leur naissance (Bertin et al., 2005). Lorsque l’on examine les variations de la mortalité au cours de l’année, le pic de mortalité est trouvé en hiver (Morio, 2006). Cela peut être expliqué par la principale cause de mortalité, la conduite de troupeau en vue de la production de lait, et la prédominance de cette filière. Selon le type de production et la filière de commercialisation choisis, le nombre et les périodes de mise-bas sont fixées à des périodes différentes. En vue d’augmenter la production de lait, certains éleveurs font faire trois agnelages en deux ans au même troupeau. Les producteurs de lait qui travaillent en coopérative, échelonnent les agnelages de leurs brebis afin de proposer des produits tout au long de l’année. De la même manière, ceux qui produisent de la viande et l’écoulent en vente directe, fixent différentes périodes d’agnelage en vue de pouvoir proposer des produits toute l’année. En revanche, pour les producteurs qui élèvent les agneaux de manière extensive afin de bénéficier de labels de qualité (i.e. Agneaux de parcours mis en place par le PNC), les agnelages ont majoritairement lieu en juillet, au moment de la pousse de l’herbe. Cette stratégie permet également d’éviter de se trouver en compétition avec les producteurs de lait qui vendent les agneaux nés durant l’hiver, période pendant laquelle « le marché est inondé » (éleveur, causse Noir, comm. pers. 2008). Une taille de cheptel importante et un faible nombre de salariés sur l’exploitation peuvent conduire à des agnelages multiples. Par exemple, un éleveur (causse Noir, comm. pers. 2008) explique que son troupeau de 600 brebis mères est divisé de manière à ce qu’une partie des brebis mettent bas en janvier, une autre en octobre et la dernière en juillet. Comptetenu du travail que cela représente, un agnelage au même moment ne serait pas envisageable. Ainsi, la période de mortalité la plus importante est l’hiver, et elle dépend des types de productions et des filières de commercialisation. Reste donc à examiner les différentes possibilités que les éleveurs ont pour gérer la mort animale. La réglementation oblige les éleveurs à faire appel à un équarrisseur. Les éleveurs ont le choix entre des dispositifs d’équarrissage impliquant des acteurs différents.
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Table des matières
I. INTRODUCTION
1. LA GESTION DE LA NATURE POUR LE BIEN-ETRE HUMAIN
2. LES DEVELOPPEMENTS SCIENTIFIQUES SUR LES SERVICES ECOSYSTEMIQUES
3. LES VAUTOURS, DES PRODUCTEURS DE SERVICES EN DECLIN DANS LE MONDE
3.1. Les services rendus par les vautours
3.2. Le déclin des vautours
4. LA PROBLEMATIQUE ET LA METHODOLOGIE
4.1. La problématique
4.2. L’angle d’approche et la méthodologie générale
4.3. Les choix méthodologiques
4.3.1. La modélisation multi-agents
4.3.2. Des entretiens semi-directifs
5. LA STRUCTURE DE LA THESE
II. L’EQUARRISSAGE EN FRANCE: DES VAUTOURS ET DES ENTREPRISES
1. L’EMERGENCE DE L’EQUARRISSAGE NATUREL
1.1. Le Vautour fauve : cycle de vie, comportement et démographie
1.2. Le déclin et les réintroductions des populations de vautours fauves
1.3. Les dispositifs d’équarrissage naturel
2. L’HISTORIQUE ET L’EVOLUTION DE L’EQUARRISSAGE CLASSIQUE
2.1. Les débuts de l’équarrissage
2.2. Les réformes financières
2.3. Les réformes financières et l’équarrissage naturel
2.4. Vers la valorisation économique des carcasses
2.5. La réglementation sanitaire et l’équarrissage sanitaire : le cas d’une crise d’épizootie
2.6. Un nouveau texte réglementaire
2.7. Des conséquences de la décision européenne du 12 mai 2003
III. PRATIQUES D’ELEVAGE ET D’EQUARRISSAGE DANS LES GRANDS CAUSSES
1. LES PRATIQUES PASTORALES CAUSSENARDES
1.1. La diversité des exploitations
1.2. Les techniques d’élevage, les filières de production et la mortalité des bêtes
2. L’IMPLICATION D’ACTEURS LOCAUX DANS LA GESTION DE L’EQUARRISSAGE
2.1. Les entreprises d’équarrissage
2.2. Le Parc National des Cévennes (PNC) et la Ligue de Protection des Oiseaux (LPO)
2.3. Les directions départementales des services vétérinaires et de l’agriculture
3. LES MODALITES DES CHOIX DE DISPOSITIFS D’EQUARRISSAGE PAR LES ELEVEURS
3.1. Des critères de choix partagés par les éleveurs: l’assurance et la rapidité de l’élimination des carcasses
3.2. La perception des vautours comme critère de choix
3.3. Un critère de choix historique : le poids de la tradition
3.4. La Contribution Volontaire Obligatoire : un nouveau critère de choix ?
3.5. Les dommages sur le bétail causés par les vautours, un nouveau critère de choix ?
3.6. Les dispositifs d’équarrissage : entre continuité et changement
IV. LA MODELISATION MULTI-AGENTS DU SYSTEME ETUDIE
1. LES OBJECTIFS DE LA MODELISATION
2. LES AGENTS : VARIABLES D’ETAT ET ECHELLES
3. LES PROCESSUS ET LEUR ENCHAINEMENT
4. LES ELEMENTS CONCEPTUALISES DANS LE MODELE
5. LA SPATIALISATION ET L’INITIALISATION
6. LES PRATIQUES D’EQUARRISSAGE
7. LES COMPORTEMENTS D’ALIMENTATION DES VAUTOURS ET LA DYNAMIQUE DE LA POPULATION
V. LA GESTION DE L’EQUARRISSAGE NATUREL, ENTRE PRATIQUES HUMAINES ET COMPORTEMENTS D’ALIMENTATION DES RAPACES NECROPHAGES
1. LA SENSIBILITE DES INDICATEURS A LA QUANTITE ET A LA REPARTITION SPATIALE DES RESSOURCES
1.1. Les scénarios
1.2. L’efficacité d’équarrissage pour les utilisateurs de placette
1.3. L’effectif de la population de vautours
2. LA SENSIBILITE DES INDICATEURS A LA REPARTITION TEMPORELLE DES RESSOURCES
2.1. Les scénarios
2.2. L’efficacité d’équarrissage pour les utilisateurs de placette
2.3. L’effectif et la structure de population de vautours
3. LA SENSIBILITE DES INDICATEURS AUX COMPORTEMENTS DES RAPACES NECROPHAGES
3.1. Les scénarios
3.2. L’efficacité d’équarrissage
3.2.1. Les effets du comportement de prospection
3.2.2. L’effet de l’intensité de la compétition intra-spécifique subie par les juvéniles
3.3. L’effectif et la structure de la population de vautours
4. DISCUSSION
4.1. La modélisation de l’équarrissage par les vautours
4.2. La gestion de l’équarrissage naturel et de population de vautours
4.2.1. De l’utilisation des dispositifs d’équarrissage
4.2.2. L’élevage et l’équarrissage naturel.
VI. LES CONSEQUENCES DES DECISIONS, PREFERENCES ET STRATEGIES D’EQUARRISSAGE SUR LES INDICATEURS ENVIRONNEMENTAUX ET ECONOMIQUES
1. LES CONSEQUENCES DE CONTEXTES D’EQUARRISSAGE SUR LES INDICATEURS
1.1. La constitution des scénarios
1.1.1. Les scénarios de contexte d’équarrissage
1.1.2. Les profils et pratiques d’équarrissage des éleveurs
1.1.3. Les pratiques d’équarrissage selon les contextes
1.1.4. La constitution de populations d’éleveurs
1.1.5. Les indicateurs donnés par le modèle
1.2. Résultats
1.2.1. L’effectif de vautours
1.2.2. L’efficacité d’équarrissage
1.2.3. L’insatisfaction ou les carcasses « détruites » par les éleveurs
1.2.4. Les émissions de carbone dues aux collectes
1.2.5. Les coûts des collectes
1.2.6. Récapitulatif des résultats
1.2.7. Les conséquences de l’arrêt de l’utilisation des placettes officieuses
2. LES CONSEQUENCES DE STRATEGIES D’EQUARRISSAGE BASEES SUR DES CRITERES DE PREFERENCE
2.1. Les scénarios de stratégie d’équarrissage
2.2. Les résultats
2.2.1. Les conséquences des stratégies « types »
2.2.2. Les conséquences selon les profils « omniscients »
3. L’EQUARRISSAGE NATUREL SELON DES STRATEGIES BASEES SUR LA MOBILISATION D’INFORMATIONS
3.1. Les scénarios
3.2. Les conséquences selon le nombre d’éleveurs utilisant l’équarrissage naturel
3.3. Les conséquences de la transmission d’informations entre les éleveurs
3.3.1. La transmission de l’information élémentaire
3.3.2. La transmission de l’information composée
4. DISCUSSION
4.1. Les hypothèses de modélisation
4.1.1. Les implications des hypothèses sur les résultats
4.1.2. La modélisation des représentations
4.2. Les implications des résultats pour la gestion de l’équarrissage
4.2.1. Les populations d’éleveurs
4.2.2. Les conséquences des contextes
4.2.3. Les conséquences des critères de préférences et de la mobilisation de l’information
VII. L’ADAPTATION DU MODELE GENERIQUE A LA SITUATION DES GRANDS CAUSSES
1. L’ADAPTATION DU MODELE A LA SITUATION CAUSSENARDE
1.1. La zone représentée dans le modèle
1.2. Les gestionnaires et les entreprises d’équarrissage
1.3. Les exploitations
1.4. Les pratiques d’équarrissage
1.5. La zone de nidification des vautours
1.6. Les indicateurs donnés par le modèle
1.7. Les scénarios
2. RESULTATS
2.1. L’incertitude sur le nombre d’ovins présents dans la zone étudiée
2.2. L’incertitude sur l’intensité de la compétition intra-spécifique pour les juvéniles
2.3. Les aspects spatiaux
2.4. Scénario sur les pratiques d’équarrissage
2.4.1. L’arrêt des collectes par la LPO et le PNC
2.4.2. L’arrêt d’utilisation de placettes officieuses
2.4.3. La promotion de l’utilisation de la placette
3. DISCUSSION
3.1. Les effets d’éléments spatialisés
3.2. La population de vautours, estimations et données empiriques
3.3. Implication des résultats pour la gestion
VIII. DISCUSSION GENERALE
1. LA PLACE DES SCIENCES SOCIALES DANS LES APPROCHES DE MODELISATION DE SYSTEMES SOCIOECOLOGIQUES
1.1. Les simplifications nécessaires à la modélisation
1.2. Des informations déterminantes mais irréductibles à la modélisation
1.3. Conclusion sur la méthodologie et complémentarité des approches modèle-entretiens
2. SERVICE D’EQUARRISSAGE NATUREL ET GESTION DURABLE DES POPULATIONS DE VAUTOURS
2.1. Le concept de service pour la conservation des vautours : aspects théoriques
2.1.1. L’aspect utilitaire ou des bénéfices pour la conservation des vautours
2.1.2. La gestion du service en tenant compte de sa dimension écologique
2.2. Les vautours comme producteurs de service, aspects pratiques
2.2.1. Le service rendu par les entreprises, le service rendu par les vautours
2.2.2. Les arguments portés par les associations de protection de la nature
2.2.3. Un argument nécessaire mais peut-être insuffisant
2.2.4. Des arguments relatifs ?
3. LES SERVICES ECOSYSTEMIQUES AU SERVICE DE LA CONSERVATION
3.1. Une perspective utilitariste, un chemin vers la conservation ?
3.2. La réintégration de l’écologie dans le concept de SE, un chemin vers la conservation ?
3.3. La conservation et les mécanismes de préservation des services écosystémiques
3.4. Une question de rapport à la nature ?
PERSPECTIVES
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