Modélisation du comportement biomécanique du disque intervertébral

Les disques intervertébraux sont des articulations qui lient des corps vertébraux adjacents tout en permettant d’assurer leur mobilité relative. Ils jouent également un important rôle d’amortisseurs mécanique pour le rachis car ils supportent et redistribuent les chargements appliqués sur les vertèbres. Les disques intervertébraux sains se développent jusqu’à l’age d’environ 20 ans puis entament un long processus naturel de dégénérescence qui se prolonge tout au long de la vie : c’est la dégénérescence discale (DD). Si cette dernière évolue en principe lentement, elle peut sous l’influence de divers facteurs s’accélérer brutalement et devenir alors pathologique et remettre non seulement en cause l’intégrité du disque mais également sa fonctionnalité et ainsi engendrer des lombalgies importantes. Selon la Caisse Nationale d’Assurance Maladie française, la lombalgie est la première cause d’invalidité avant l’âge de 45 ans. Elle coûte environ 2,3 milliards d’euros aux autorités de santé chaque année. Les chiffres de l’Institut de Santé et de Sécurité au Travail de Tunisie indiquent que la prévalence annuelle de la lombalgie dépasse 50%, celle de la lombalgie chronique étant d’environ 12.8%.

Ces chiffres importants et préoccupants soulignent l’importance que revêt une détection précoce de la DD pathologique. A ce stade de la maladie il est possible de mettre en place avec un certain succès des protocoles cliniques permettant de ralentir voire de stopper la progression de la pathologie. Lorsque le diagnostic de DD avancée est constaté une intervention chirurgicale est par contre, malheureusement, très souvent rendue nécessaire. Plusieurs modalités d’examen radiologiques ou d’IRM permettent à ce jour d’effectuer un diagnostic indirect de la DD en évaluant l’état des structures et tissus adjacents. Le diagnostic est donc souvent indirect et l’étiologie des diagnostics effectués à l’aide de ces méthodes est toujours un sujet de recherche et de controverses. Mettre en place un diagnostic fiable et performant de la viabilité discale est donc un enjeu majeur et l’un des objectifs de ce travail de thèse consiste précisément à évaluer l’efficacité du couplage entre des outils de modélisation numérique et l’IRM quantitative pour effectuer ce diagnostic. Le disque intervertébral est un organe singulier dans le corps humain : c’est un fibrocartilage, riche en eau, sans vascularisation, et, pour ces deux raisons, possédant une très faible densité cellulaire. Ces particularités en font un organe dont le fonctionnement est très sensible aux variations de son contenu hydrique. C’est en effet dans l’eau que sont transportés les nutriments nécessaires aux cellules discales, et de faibles variations entraînent des diminutions drastiques de l’efficacité des mécanismes de transport. Un modèle du comportement biomécanique du disque a été élaboré durant cette thèse. Le modèle tient compte de l’anisotropie et de l’hétérogénéité du disque, des effets du couplage mécano-électro-osmotique et permet également de simuler une voie métabolique de la nutrition cellulaire. Nous montrons dans le présent manuscrit qu’à l’aide, d’une part, des données recueillies par imagerie et, d’autre part, des résultats de simulations numériques basées sur le modèle biomécanique il est possible d’identifier plusieurs paramètres mécaniques du disque comme sa porosité ou sa perméabilité. Ces paramètres permettent de renseigner l’état de viabilité discale et d’établir à terme un diagnostic objectif de la fonction discale.

Anatomie et biomécanique du disque intervertébral 

Rachis humain

Rôles et architecture
Le rachis humain est la principale structure du squelette. C’est l’axe central du corps humain, il est limité par l’arrière du crâne et par le bassin. Le rachis a essentiellement trois fonctions : supporter le poids du corps par la distribution et la transmission des charges appliquées, assurer le mouvement du tronc et du crâne grâce à sa structure et protéger le système nerveux en abritant la moelle épinière.

Composants du rachis

Les vertèbres Les vertèbres sont des structures osseuses distribuées le long du rachis. Les forme des vertèbres diffèrent d’une partie du rachis à l’autre mais elles sont toutes caractérisées par deux zones appelées corps vertébral et arc neural. Les deux zones sont composées d’un os trabéculaire au centre et d’un os compact périphérique (Cramer & Darby, 1995). Le corps vertébral est la partie volumineuse de la vertèbre. Il est cylindrique avec une forme un peu concave en arrière (Ricard, 2011). Les faces supérieures et inférieures des corps vertébraux sont les zones où les disques intervertébraux sont attachés. Ces faces sont plates mais non parallèles. L’arc neural est composé d’une paire de lames verticales, d’une paire de pédicules et de 7 processus : quatre articulaires, deux transverses et un épineux (Fig. 1.2). Entre l’arc neural et le corps vertébral se situe un espace vide appelé foramen vertébral. La succession des foramens vertébraux le long du rachis constitue le canal vertébral dans lequel passe la moelle épinière.

Les articulations Les vertèbres sont liées entre elles par des articulations permettant les mouvements nécessaires pour le tronc et le cou. Au niveau des arcs neuraux, les vertèbres sont articulées à travers les processus (ou bien apophyses) articulaires. Les deux apophyses articulaires inférieures de chaque vertèbre sont en contact avec les deux apophyses supérieures de la vertèbre voisine. Au niveau des corps vertébraux, ce sont les disques intervertébraux qui assurent cette articulation. Les disques intervertébraux sont nommés selon les deux vertèbres qui les limitent, par exemple entre les vertèbres T6 et T7 on trouve le disque T6-T7. Dans la suite une étude détaillée des disques intervertébraux sera présentée.

Les ligaments Le système ligamentaire du rachis comporte 5 ligaments qui ont un rôle essentiellement protectif (Fig.1.3). Deux ligaments appelés ligaments longitudinaux antérieur et postérieur entourent les corps vertébraux et les disques qui les relient. Un ligament appelé ligament jaune est présent sur la face antérieure des lames. Ces trois ligaments ont un comportement viscoélastique et sont très résistants aux forces de traction grâce à l’orientation de leurs fibres de collagène parallèle à l’axe du rachis (Rannou et al., 2004). Les ligaments inter-épineux et supra-épineux lient les vertèbres adjacentes à travers leur processus épineux. Ils ont une faible résistance. Les ligaments les moins résistants sont les ligaments supra épineux, ils sont lâches et pauvres en collagène (Rannou et al., 2004).

Le disque intervertébral (DIV) 

Les disques intervertébraux sont des articulations fibro-cartilagineuses qui occupent environ 25% de la hauteur totale du rachis et qui lient les vertèbres au niveau des corps vertébraux. Les DIVs sont des structures hétérogènes très résistantes aux contraintes mécaniques.

Anatomie du DIV

Trois différentes parties peuvent être distinguées dans le DIV (Fig. 1.4) :
— Le noyau pulpeux ou Nucleus Pulposus (NP) : au centre du DIV avec un petit décalage postérieur.
— L’anneau fibreux ou Annulus Fibrosus (AF) : sur la partie périphérique, entourant le nucleus.
— Les plateaux vertébraux (PCV) : qui constituent les limites supérieure et inférieure du DIV et le lient aux vertèbres adjacentes.

a/ Le nucleus pulposus Le noyau pulpeux occupe environ 50% du volume discal (Rannou et al., 2004). C’est une structure gélatineuse très déformable. Le NP se distingue par sa forte hydratation.
b/ L’annulus fibrosus L’anneau est formé par 7 à 15 lamelles concentriques. Les lamelles sont liées entre elles d’une façon lâche afin de permettre leur mouvement relatif. L’AF est une structure ferme et élastique, elle permet de garder le NP dans les limites discales et empêche son expulsion. Deux zones dans l’anneau se distinguent par certaines propriétés : l’anneau interne (AFI) qui est en contact avec le noyau sans limite macroscopique nette et l’anneau externe (AFE) périphérique et fortement lié au corps vertébral. L’AFE est alimenté par des capillaires sanguins périphériques (Bibby et al., 2001).
c/ Les plateaux vertébraux Appelés aussi plaques cartilagineuses vertébrales. Les PCV sont des structures osseuses formées de cartilage hyalin. Elles séparent le noyau et l’AFI du corps vertébral. L’épaisseur des plateaux est minimale au centre et croît vers la périphérie. La partie centrale est plus perméable aux nutriments cellulaires et aux ions (Moore, 2000). Dans les premières années de la vie, des petits vaisseaux sanguins traversent les PCV et disparaissent avec la maturation squelettique (l’arrêt de croissance) .

Composition du DIV

Le DIV est un milieu poreux saturé composé d’une matrice extracellulaire (MEC), d’eau et de cellules. La MEC est un réseau formé par plusieurs types de protéines fibreuses glycolisées (fibronactine, laminine) ou non glycolisées (élastine) enrobées dans un gel de protéoglycane. Les collagènes sont la famille protéinique la plus importante dans la matrice extracellulaire. La distribution de ces composants varie d’une zone à l’autre à l’intérieur du disque, et elle se modifie avec l’age. Cette distribution influe sur les caractéristiques mécaniques du disque.

a/ L’eau La phase fluide occupe 65% à 90% du volume du DIV (Rannou et al., 2004; Jongeneelen, 2006). La teneur en eau varie selon la zone du DIV : le noyau présente la zone la plus hydratée avec une fraction massique qui peut atteindre 85%. Les plateaux sont les moins hydratés avec environ 60% d’eau en masse. la quantité d’eau diminue également lorsqu’on s’éloigne du noyau vers l’anneau externe. L’eau joue un rôle important dans le comportement du DIV, elle permet de répartir de manière optimale les chargements appliqués et assure le transport des nutriments cellulaires et des ions indispensables au fonctionnement discal.

b/ Les protéoglycanes (PG) Les protéoglycanes sont des macromolécules composées d’une protéine centrale sur laquelle sont attachés des agrégats de haute densité de charges négatives : les glycosaminoglycanes (GAG) (Fig. 1.5). Les GAG sont des longues chaînes de polymère non ramifiées qui jouent un rôle important dans la conservation des caractéristiques mécaniques du DIV.

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Table des matières

INTRODUCTION
I Etude bibliographique
1 Contexte général et problématique clinique
1.1 Anatomie et biomécanique du disque intervertébral
1.1.1 Rachis humain
1.1.2 Le disque intervertébral (DIV)
1.1.3 Biomécanique du disque intervertébral
1.2 Dégénérescence discale et problématique clinique
1.2.1 Changements morphologiques et structurels et leurs effets sur la mécanique du DIV
1.2.2 Facteurs de la dégénérescences discale
1.2.3 Classification de la dégénérescence discale
1.3 Phénomènes électrochimiques présents dans le DIV
1.3.1 Transfert diffusif
1.3.2 Transfert convectif
1.3.3 Migration électrique
1.3.4 Application des phénomènes électrochimiques au cas du DIV
2 État de l’art : modèles in-vivo, in-vitro et in-silico
2.1 Études expérimentales
2.1.1 Études mécaniques
2.1.2 Transport métabolique et profil des concentrations des nutriments
2.1.3 Contribution de l’imagerie médicale
2.2 Théories et modèles descriptifs du milieu poreux vivant
2.2.1 Introduction
2.2.2 Les modèles multiphasiques
2.2.3 Propriétés mécaniques
2.2.4 Modélisation de la nutrition cellulaire
II Développement du modéle biomécanique
3 Description du modèle et formulation
3.1 Modèle Mécanique
3.1.1 Définitions et hypothèses
3.1.2 Cinématique
3.1.3 Équations de conservation
3.1.4 Porohyperélasticité
3.2 Modèle de nutrition cellulaire
3.2.1 Les équations de diffusion
3.2.2 Relations de Bibby et al. (2005)
3.3 Déformations finies et bilan final
3.3.1 Déformations finies et changement de configuration
3.3.2 Bilan final
4 Construction et mise en œuvre du modèle
4.1 Données expérimentales
4.1.1 Description des essais expérimentaux
4.1.2 Séquences IRM
4.1.3 Évolution de la contrainte au cours de l’essai de compression
4.2 Exploitation des séquences IRM
4.2.1 Reconstruction des géométries
4.2.2 Détermination des champs de porosité initiaux
4.2.3 Délimitation des composants du DIV
4.2.4 Récapitulatif
4.3 Résolution du modèle
4.3.1 Propriétés physiques affectées
4.3.2 Maillages
III Résultats et Discussion
5 Validation du modèle mécanique
5.1 Procédure d’identification des paramètres
5.1.1 Algorithme d’optimisation
5.1.2 Paramètres et intervalles d’optimisation pour le modèle isotrope
5.1.3 Paramètres et intervalles d’optimisation pour le modèle anisotrope
5.2 Optimisation sur un seul chargement
5.2.1 Paramètres identifiés
5.2.2 Courbes de relaxation
5.3 Optimisation sur deux chargements
5.3.1 Paramètres identifiés
5.3.2 Courbes de relaxation
5.4 Résumé des résultats d’optimisation
5.5 Validation du modèle
5.5.1 Porosité globale, volume et gonflement
5.5.2 Distribution de la porosité
5.6 Discussion
CONCLUSION

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