Modélisation des transferts dans les milieux poreux

LA MODÉLISATION et la compréhension du couplage entre les transferts radiatifs, conductifs et convectifs est un sujet d’intérêt majeur dans de nombreuses applications. De nombreuses configurations peuvent rendre nécessaire la modélisation du couplage entre modes de transfert. Dans le cas de milieux homogènes, on rencontre notamment ces phénomènes dans des problèmes mettant en jeu des températures élevées (industrie verrière, feux de forêt, propulsion aéronautique, production d’énergie thermique, etc.). De nombreux domaines industriels font appel à la modélisation des transferts thermiques à haute température dans les milieux poreux. On citera à titre d’exemple la modélisation des transferts dans les brûleurs poreux (HOWELL et al., 1996 ; S. WOOD et HARRIS, 2008), dans les cœurs de réacteurs nucléaires (DUVAL, 2002 ; CHAHLAFI, 2011) ou dans certaines installations de production d’énergie solaire (DOMBROVSKY et al., 2009 ; MAAG et al., 2009). Cependant, selon S. WOOD et HARRIS (2008), les phénomènes de couplage des modes de transfert (auxquels s’ajoutent souvent des couplages supplémentaires avec des réactions chimiques et du transfert de masse et de quantité de mouvement) sont encore mal compris, peu d’études ayant été dédiées à leur compréhension dans les cas où les transferts radiatifs jouent un rôle important.

Modélisation des transferts dans les milieux poreux

Un milieu poreux comprend au moins deux phases et est caractérisé par deux échelles de longueur. La première, qui sera dite échelle locale dans la suite, correspond à la taille caractéristique des pores ou des particules composant le milieu. Cette échelle de longueur est aussi appelée échelle du pore dans la bibliographie. La seconde, dite échelle macroscopique dans la suite, correspond à la taille caractéristique du domaine sur lequel le problème physique considéré est résolu. Cette échelle de longueur est aussi appelée échelle du système ou échelle continue dans la bibliographie. Dans un milieu poreux, l’échelle locale est très petite devant l’échelle macroscopique : elles sont séparées. Si, lorsque la physique des milieux continus est valable à l’échelle du pore, les mécanismes de transport dans le milieu poreux sont les mêmes que dans les milieux homogènes, la séparation entre les échelles rend impossible l’utilisation des équations de conservation pour décrire les transferts dans tout le système : le coût en calcul serait prohibitif, car un maillage de bonne qualité sur l’ensemble du système macroscopique comprendrait un nombre de mailles trop grand. Il est donc nécessaire de recourir à des modèles de transfert qui vont substituer au milieu réel un milieu homogène équivalent. Ces modèles peuvent être élaborés de façon phénoménologique, ou à partir de la physique locale au moyen de méthodes de changement d’échelle que nous allons brièvement présenter dans cette section.

Rayonnement

Une difficulté que l’on rencontre dans l’homogénéisation des transferts radiatifs est la différence entre la nature réelle des phénomènes de transfert et leur représentation homogénéisée. Dans l’exemple du cas d’un milieu composé d’une phase opaque et d’une phase transparente, les rayons peuvent être réfléchis ou absorbés sur une surface. Cependant, dans le milieu homogénéisé, ces phénomènes sont traduits en termes d’absorption et de diffusion en volume. Le milieu homogénéisé est semi-transparent, tandis que la phase réelle de propagation du rayonnement est transparente. Dans le cas d’une phase semitransparente, les rayons peuvent, à l’échelle du pore, être absorbés et diffusés en volume ou réfléchis et transmis à l’interface avec une phase transparente ou semi-transparente ; la représentation homogénéisée de ces phases est semitransparente, mais elle a des propriétés radiatives différentes de la matière homogène qui les compose.

Les transferts sont souvent modélisés au moyen d’un modèle empirique beerien (c.-à-d. que l’extinction y suit une loi exponentielle en fonction de l’épaisseur optique). Les milieux semi-transparents beeriens sont caractérisés par des coefficients d’absorption (κν), de diffusion (σν) et d’extinction (βν), ainsi qu’une fonction de phase de diffusion (pν), qui dépend généralement seulement du cosinus de l’angle de diffusion . Les transferts radiatifs sont alors modélisés au moyen de l’équation de transfert du rayonnement (ETR). La revue détaillée de BAILLIS et SACADURA (2000) montre que les efforts se sont essentiellement portés sur l’amélioration de la détermination des propriétés effectives de transport jusqu’aux années 2000. Les études alors réalisées supposaient les milieux beeriens : l’extinction du rayonnement y était supposée exponentielle en fonction de l’épaisseur optique.

Des méthodes populaires de caractérisation (ARGENTO et BOUVARD, 1996 ; BAILLIS, ARDUINI-SCHUSTER et al., 2002 ; COQUARD et BAILLIS, 2004 ; HENDRICKS et HOWELL, 1996 ; LORETZ et al., 2008 ; YANG et al., 1983) consistent à optimiser un ensemble de grandeurs déterminant complètement les propriétés radiatives du milieu homogène équivalent à partir de données expérimentales. Il peut s’agir, par exemple, de la réflectivité (directionnelle ou hémisphérique, spectrale ou totale) et de la transmittivité d’une colonne. Ces grandeurs sont globales et n’apportent pas d’information sur le comportement du milieu sur des distances de l’ordre de la taille du pore. Les données numériques sont, quant à elles, calculées en résolvant l’ETR associée au milieu semi-transparent équivalent par diverses méthodes (ordonnées discrètes (BAILLIS, ARDUINI-SCHUSTER et al., 2002 ; HENDRICKS et HOWELL, 1996 ; LORETZ et al., 2008), lancer de rayons ou Monte Carlo (ARGENTO et BOUVARD, 1996 ; COQUARD et BAILLIS, 2004 ; YANG et al., 1983)). Dans cette approche, l’incertitude sur les résultats expérimentaux, l’approximation beerienne, la précision des méthodes de résolution numérique et d’identification se cumulent et peuvent finalement compromettre la qualité des résultats finaux. D’autres études ont été menées avec pour objectif la détermination ab initio des propriétés effectives des matériaux. Les propriétés radiatives de milieux supposés beeriens et composés d’assemblées de particules ont été étudiées. Les propriétés du milieu homogénéisé sont déterminées à partir des propriétés radiatives d’une particule seule. Lorsque la diffusion est indépendante, la détermination des propriétés effectives est relativement simple (KAVIANY, 1995) ; elle est en revanche plus complexe lorsque la diffusion est dépendante, et il est alors nécessaire de modéliser les interactions entre le rayonnement diffusé par des particules voisines. Une nouvelle voie de caractérisation des milieux été ouverte par TANCREZ et TAINE (2004). Ces auteurs ont proposé une méthode générale de caractérisation à partir des fonctions de distribution radiatives, appelée identification des fonctions de distribution radiatives et évoquée de façon plus détaillée dans le chapitre 2. Elle repose sur la détermination des fonctions de distribution radiatives à partir de la géométrie du milieu et des propriétés radiatives des phases non-homogénéisées à l’échelle locale, puis la détermination des paramètres effectifs en identifiant les fonctions de distribution radiatives du milieu réel et de sa représentation homogénéisée. Cette méthode est générale et peut être appliquée à des phases de propagation transparentes ou semi transparentes (BELLET et al., 2009 ; TANCREZ et TAINE, 2004 ; ZEGHONDY et al., 2006a). Diverses études menées dans les années 2000 ont également porté sur la modélisation des transferts. Deux approches se sont différenciées : on distingue une approche statistique et une approche basée sur la prise de moyenne volumique. CONSALVI et al. (2002) posent les bases d’une modélisation des transferts radiatifs basée sur l’application de la méthode de prise de moyenne volumique (WHITAKER, 1999) à l’ETR. Cette approche est par la suite approfondie par LIPINSKI ´ , KEENE et al. (2010) ; LIPINSKI ´ , PETRASCH et al. (2010). GUSAROV (2008) propose une méthode également fondée sur la prise de moyenne volumique, appliquée cette fois au champ de luminance, et démontre la nécessité d’utiliser une équation de transfert propre à chaque phase mise en jeu. Dans tous les cas, l’équation de transfert obtenue est beerienne et une proposition d’une méthode de détermination des propriétés radiatives effectives est faite.

Une méthode plus générale d’homogénéisation statistique des transferts (TAINE, BELLET et al., 2010) fait l’objet d’un développement plus tardif et prolonge la logique de l’identification des fonctions de distribution. Elle consiste à construire une équation de transfert généralisée à partir des propriétés radiatives que sont les fonctions de distribution radiatives, de la même façon que l’on construit l’ETR. L’équation de transfert du rayonnement généralisée obtenue tient compte de l’éventuel caractère non-beerien du milieu.

Conduction et convection 

La modélisation des phénomènes de transport (hors rayonnement) dans les milieux poreux a fait l’objet de nombreuses études. On citera l’œuvre de DARCY (1856), dans laquelle un premier modèle phénoménologique des écoulements à bas nombre de Reynolds était proposé et étayé par des résultats expérimentaux. Il aura cependant fallu attendre plus d’un siècle pour que les premières démonstrations théoriques de la loi de Darcy soient développées (IRMAY, 1958 ; MATHERON, 1965 ; WHITAKER, 1966 ; MARLE, 1967 ; SLATTERY, 1967). Les autres phénomènes de transport ont également fait l’objet d’études qui ont permis d’établir des équations macroscopiques de transport à partir des lois physiques valables à l’échelle du pore. Les méthodes de changement d’échelle permettent de démontrer les lois physiques et de prédire les propriétés effectives de transport. Entre ces méthodes, l’homogénéisation périodique et la prise de moyenne volumique sont parmi les plus populaires (KAVIANY, 1995). La méthode d’homogénéisation périodique (AURIAULT, 1991 ; AURIAULT et ENE, 1994; MOYNE et al., 2000) est fondée sur l’analyse du comportementasymptotique de solutions périodiques pour les équations de conservation lorsque le rapport des échelles locale et macroscopique tend vers zéro. Cette méthode a été appliquée à une grande variété de configurations et de physiques. On peut citer, par exemple, l’établissement de la loi de Darcy (TARTAR, 1980) ou l’homogénéisation du bilan d’énergie dans des cas incluant la convection (ENE et POLISEVSKI, 1987 ; MOYNE et al., 2000). La méthode de prise de moyenne volumique (WHITAKER, 1999) est fondée sur l’application d’un opérateur de prise de moyenne volumique aux bilans locaux. Ceci a pour effet de filtrer les variations spatiales des différentes grandeurs physiques mises en jeu : on élimine les fluctuations à l’échelle locale (hautes fréquences spatiales) pour ne conserver que celles à l’échelle macroscopique (basses fréquences spatiales). Elle permet l’établissement des équations macroscopiques de transport et la prédiction de propriétés effectives au moyen de problèmes de fermeture. Elle a été appliquée à diverses configurations et pour différentes physiques. On citera notamment l’établissement de la loi de Darcy (WHITAKER, 1986), des développements sur la correction de Forchheimer (WHITAKER, 1996), l’établissement de modèles macroscopiques de conduction (CARBONELL et WHITAKER, 1984 ; QUINTARD et WHITAKER, 1993a, 1995), le traitement de problèmes incluant les effets de la dispersion thermique (QUINTARD, KAVIANY et al., 1997) et de termes sources homogènes ou hétérogènes dans le bilan d’énergie (QUINTARD et WHITAKER, 2000). Dans ces travaux, les modèles résultants sont soumis à des contraintes (fluide incompressible, solide indéformable, propriétés thermo-physiques variables à grande échelle seulement, fermeture quasi-stationnaire, milieu macroscopiquement uniforme, etc.) qui doivent être relaxées dans certaines applications. Cela conduit au développement de nombreux modèles adaptés aux spécificités de différents problèmes physiques.

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Table des matières

1 Introduction
1.1 Modélisation des transferts dans les milieux poreux
1.2 Traitement des problèmes de transferts couplés
1.3 Définition du problème
1.4 Objectifs et structure de la thèse
2 Homogénéisation statistique du rayonnement
2.1 Caractérisation des milieux
2.2 Modélisation des transferts radiatifs : GRTE
2.3 Limite d’un milieu optiquement épais
2.4 Exemple d’application : caractérisation d’un milieu
2.5 Conclusion : particularités du modèle
3 Méthode de changement d’échelle couplé
3.1 Équations de base
3.2 Compatibilité des échelles de longueur
3.3 Construction d’un modèle couplé à l’échelle locale
3.4 Changement d’échelle
3.5 Méthode de résolution
3.6 Cas d’une phase semi-transparente
3.7 Conclusion
4 Résolution d’un problème macroscopique de transferts couplés
4.1 Définition du problème
4.2 Modèle de transferts
4.3 Caractérisation du milieu
4.4 Résolution numérique du problème macroscopique
4.5 Conclusion
5 Conclusion

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