Un champ de recherche en plein essor
L’atmosphère terrestre étant opaque aux rayons X, l’observation astronomique d’objets célestes requiert l’utilisation de télescopes spatiaux. Depuis maintenant plusieurs décennies, les satellites en orbite avec des télescopes X embarqués permettent d’accéder à ce monde encore mal connu. Dès 1951, des fusées ont permis d’observer le soleil et de constater qu’il était, du fait de sa grande proximité à la Terre, une source de rayons X importante (voir à ce sujet la revue de Charles & Seward, 1995). Les télescopes en orbite qui se sont succédés par la suite , repoussant chaque fois les limites de détection et les résolutions (spatiales ou spectrales), ont ouvert d’autres champs d’investigation. En particulier, Giacconi et al. (1962) ont pour la première fois détecté un fond diffus cosmique dans les longueurs d’onde X. Dès lors, les observations de galaxies, d’amas de galaxies et de sources ponctuelles galactiques brillantes se sont multipliées. Les observatoires modernes tels que CHANDRA ou XMM permettent aujourd’hui, grâce à leur grande sensibilité et à leur grand pouvoir de résolution (spatial et spectral), d’observer en détail toutes sortes d’objets galactiques, des plus lumineux aux plus faibles. L’observation de galaxies proches aux longueurs d’onde X fournit alors des données quantitatives sur les sources de rayons X qu’elles contiennent. En particulier, on peut aujourd’hui dénombrer avec précision les sources ponctuelles les plus lumineuses dans les galaxies proches (restes de supernovae, binaires X, etc.) et caractériser leurs spectres X (voir par exemple Kaaret, 2002, pour la galaxie M31).
Par ailleurs, l’étude quantitative du fond diffus est devenue possible. Elle permet de comprendre quelles sont les principales sources de rayons X cosmiques, et de mesurer, directement ou indirectement, leurs spectres et leur évolution. En particulier, il est maintenant clair qu’une très grande majorité (sinon la totalité) du fond « diffus » est en réalité composée de sources discrètes : les noyaux actifs de galaxies. Ces dernières années, de nombreux efforts ont été déployés pour contraindre les modèles de formation et d’évolution de ces noyaux actifs, en essayant d’ajuster au mieux la forme spectrale du fond diffus, et les comptages de sources ponctuelles. Grâce à ces efforts pour mieux comprendre la physique des noyaux actifs, et grâce à des temps d’observation très longs, il devient aujourd’hui possible d’atteindre des niveaux de sensibilité élevés et de mesurer les luminosités X de galaxies normales (dont une partie sont les hôtes de noyaux actifs) à grand décalage spectral. Ces observations sont précieuses pour comprendre les processus de formation des galaxies et leur histoire de formation d’étoiles. Noustâcherons dans ce chapitre de caractériser lesspectres des différentessources de rayons X rencontrées dans les galaxies. Après un bref inventaire des différents processus physiques mis en jeu, nous nous attacherons à modéliser les spectres des restes de supernovae, de binaires X de faibles et de grandes masses, ainsi que le gaz chaud présent en quantité dans les galaxies elliptiques. Une étude de l’absorption des rayons X par le gaz froid interstellaire sera également faite, en essayant d’estimer quelles sont les plus grandes sources d’incertitude
Avertissement
Une attention particulière doit être portée à l’analyse des observations brutes et à leur interprétation en termes de luminosité et de spectre. En effet, les données brutes sont le résultat de la convolution d’un spectre de photons incidents par la réponse instrumentale du détecteur. Mais leur inversion, c’est-à-dire la détermination du spectre incident correspondant, n’est malheureusement pas unique. La méthode classique d’inversion est modèle-dépendante : elle suppose que l’observateur a des informations a priori sur la forme du spectre. Ceci est possible avec certaines sources pour lesquelles des modèles d’émission existent, mais reste très délicat quand des composantes spectrales particulières apparaissent. Par exemple, deux raies d’émission proches peuvent être confondues avec une seule raie si le modèle d’analyse ne prévoit qu’une raie. Pour les sources dont aucun modèle n’est préféré à d’autres et pour lesquelles on n’a pas de connaissance a priori sur le spectre incident, l’analyse se fait généralement en ajustant le spectre observé avec divers modèles d’émission. L’un d’eux se distingue parfois par une statistique convenable (un χ 2 proche de l’unité par exemple), mais l’inversion reste le plus souvent dégénérée. Les luminosités qu’on peut déduire des ajustements dans d’autres bandes spectrales que celles des données brutes dépendent alors généralement du modèle choisi.
Sources cosmiques de rayons X
Il est probable que la plupart des objets célestes émettent des rayons X, dans des rapports de luminosité très différents les uns des autres. Dans cette section, nous passons en revue les sources les plus brillantes ou les plus fréquentes en nombre, c’est-à-dire celles qui contribuent de façon a priori non négligeable au rayonnement X global de l’univers. Nous verrons par la suite, en nous intéressant plus particulièrement aux galaxies, que certaines de ces sources sont en réalité trop faibles ou trop peu nombreuses (ou les deux) pour contribuer de façon significative au bilan énergétique X des galaxies. Lesrayons X cosmiques proviennent de plusieurs catégories de sources. Certainessont ponctuelles, non résolues spatialement, même avec les meilleurs observatoires X. Ce sont principalement des étoiles jeunes (T-Tauri), des étoiles de la séquence principale, des restes de supernovae, des binaires X, ou des trous noirs entourés de disques d’accrétion. Une autre origine des rayons X est un milieu diffus, un gaz très chaud (plusieurs dizaines de millions de Kelvin) totalement ou partiellement ionisé. Ce type de plasma est aussi bien présent dans le voisinage d’objets compacts (des supernovae par exemple), que dans le disque ou le halo des galaxies, ou encore à l’intérieur d’amas de galaxies (gaz intra-amas). Nous présentons ici brièvement ces sources, en les classant selon les processus d’émission qu’elles font intervenir, reprenant ainsi la revue de Holt & McCray (1982). Certains de ces processus sont thermiques (dans des milieux optiquement minces ou optiquement épais aux longueurs d’onde X), alors que d’autres sont non thermiques. Nous mentionnerons également les processus modifiant le spectre X émis par les sources (absorption par le gaz froid, effet Compton, etc.).
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Table des matières
1 Introduction
2 Modélisation des sources X galactiques discrètes et diffuses
2.1 Introduction
2.2 Sources cosmiques de rayons X
2.3 Vue d’ensemble des sources X Galactiques
2.4 Restes de supernovae
2.5 Binaires X de faible et grande masses
2.6 Emission par le gaz chaud
2.7 Noyaux actifs
2.8 Autres émetteurs X
2.9 Absorption par le milieu interstellaire
2.10 Conclusion
3 Modéliser l’évolution des galaxies
3.1 Populations stellaires
3.2 Le code d’évolution PÉGASE
3.3 Scénarios d’évolution
3.4 Couleurs optiques
3.5 Synthèse spectrale inverse & redshifts photométriques
4 Résultats : synthèse évolutive X-optique de galaxies
4.1 Évolution des quantités d’émetteurs X
4.2 Atlas de spectres X-optiques de galaxies
4.3 Comptages X de galaxies – Relevés profonds
4.4 Conclusion
5 Effets de métallicité
5.1 Évolution de la métallicité
5.2 Signatures de métallicité dans les spectres
6 Évolution à haute résolution spectrale : PÉGASE-HR
6.1 ÉLODIE
6.2 Insertion d’ÉLODIE dans PÉGASE
6.3 Indices spectraux de métallicité et d’âge
6.4 Application à des échantillons de galaxies
6.5 Perspectives
6.6 Article soumis à Astronomy&Astrophysics
7 Conclusion
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