Modélisation des solutions aqueuses concentrées d’éléments-f par une approche multi-échelle

Le Commissaritat à l’Energie Atomique et aux Energies Alternatives (CEA) a pour mission de mener des recherches dans le domaine de l’énergie nucléaire. Ses applications sont principalement liées à la production d’électricité et au retraitement du combustible nucléaire usé. La séparation des ions métalliques est une étape cruciale pour le recyclage des métaux lanthanides et actinides. Le CEA Marcoule est au centre des recherches menées dans ce domaine, depuis les études fondamentales jusqu’à leur intégration dans les procédés industriels. L’Institut de Chimie Séparative de Marcoule (ICSM) est un institut international de recherche dédié à l’étude et au développement des nouveaux procédés de séparation pour l’énergie durable. De plus, la France a choisi le nucléaire comme pilier de la stratégie énergétique. Elle a souhaité devenir indépendante en matière électrique et ne pas dépendre de produits fossiles comme le charbon, le pétrole et le gaz dont ses ressources sont en diminution notable. L’énergie nucléaire est donc un pilier central dans le mix énergétique.

Le développement de l’énergie durable induit une gestion rigoureurse des matières qu’elle utilise tant pour la préservation des ressources naturelles que pour minimiser l’impact des déchets produits sur l’environnement. Ces déchets sont essentiellement des radionucléides issus du cycle du combustible, notamment les isotopes radioactifs des actinides à vie longue. La chimie séparative des actinides se situe au coeur des procédés permettant la récupération des matières valorisables du combustible usé et le conditionnement des déchets ultimes.

Traitement du combustible nucléaire usé

Le combustible nucléaire est dit usé lorsqu’il est incapable de maintenir la réaction en chaîne dans le cœur du réacteur nucléaire et lorsque son énergie de matière n’est plus performante. Il doit alors être sorti du cœur du réacteur pour être remplacé par du combustible neuf. Ce combustible neuf reste dans le cœur du réacteur pendant une durée d’environ 5 ans. Après d’utilisation dans le réacteur, une partie de l’uranium présent dans les assemblages combustibles est remplacé par des produits de fission. A la sortie du réacteur, les combustibles sont composés à 95% d’uranium..

Sa composition a été modifiée progressivement par les réactions de fission : 3% d’uranium fissile sont consommés, et se transforment en produits de fission, absorbant les neutrons utiles aux réactions en chaîne. Ce combustible usé est retiré, puis traité par voie chimique pour éliminer les 5% de déchets et pour récupérer les 95% de matière recyclable. Pour cela, le combustible usé va subir différentes étapes de traitement pour récupérer les matières présentes : le refroidissement , la dissolution, la séparation, et le conditionnement. La compréhension des propriétés structurales et thermodynamiques des solutions électrolytiques est une étape cruciale pour optimiser ces procédés industriels. Ce travail a pour but de décrire des solutions d’uranyle pour contrôler la procédure d’extraction liquideliquide du procédé de séparation. Ce procédé de séparation est utilisé pour traiter des combustibles nucléaires, après leur séjour dans les réacteurs et les piscines de refroidissement. Il permet de recupérer des matières valorisables comme l’uranium et le plutonium. Les informations détaillées sur ces solutions sont indispensables pour maintenir, pour optimiser le procédé utilisé et aussi développer des méthodes efficaces. Le procédé le plus utilisé en France pour le traitement du combustible usé est le procédé PUREX (Plutonium – Uranium Refining by Extraction) [1].

Procédé PUREX

Le procédé PUREX a été initialement developpé pendant les années 1940 aux EtatsUnis [1]. Il a été mis en service industriel pour la première fois en 1954 à l’usine de Savannah River (Caroline du Sud, États-Unis). Il a été ensuite adopté à Hanford en 1956, et à Windscale en 1964. Ce procédé a pour but de recycler des éléments importants des combustibles usés avec 5% de déchets et 95% de matière recyclable. L’objectif de l’extraction chimique est de séparer les deux principales composantes du combustible irradié, uranium et plutonium, d’un résidu de produits de fission et d’actinides mineurs considérés comme des déchets. Ce recyclage réduit fortement le volume des déchets et leur radioactivité, et permet de les stocker plus facilement. Le procédé PUREX est une procédure d’extraction liquide-liquide reposant sur un transfert sélectif d’une phase aqueuse à une phase organique des actinides majeurs. Le Tributyl Phosphate (TBP) est l’extractant dilué dans une coupe pétrolière. Après refroidissement du combustible usé, celui-ci est dissous dans une solution d’acide nitrique aqueuse concentrée qui est ensuite contactée avec une solution organique (kérosène, dodécane. . . ) contenant le TBP.

Les produits de fission et les autres transuraniens restent dans la phase aqueuse. On sépare le plutonium et l’uranium, l’un de l’autre par réduction du plutonium. La purification de ces éléments est perfectionée en utilisant plusieurs cycles. L’uranium sous forme de nitrate d’uranyle est épuré par extraction liquide-liquide en plusieurs étapes pour éliminer les résidus de produits de fission. Le plutonium est lui aussi purifié, par extraction, concentré, puis précipité sous forme d’oxalate (Pu(C2O4)2.6H2O). La solution résiduelle contenant les produits de fission et les actinides est ensuite calcinée pour être vitrifiée.

Bibliographie

La famille des actinides (An), de l’actinium (Z = 89) au lawrencium (Z = 103), fait partie comme la famille des éléments lanthanides, des éléments-f. Ainsi, pour un même degrés d’oxydation généralement An3+, leurs propriétés physico-chimiques sont souvent comparées. Cependant, du point de vue de leur comportement chimique, si la famille des lanthanides est relativement homogène, il n’en est pas de même pour celle des actinides. En effet, les premiers éléments légers ressemblent aux métaux de transition avec des degrés d’oxydation élevés et variables. Par contre, des éléments lourds forment des ions trivalents qui ont des propriétés voisines des lanthanides.

Les propriétés structurales des lanthanides ont été étudiées expérimentalement [2–4] et aussi par simulations numériques [2, 4–10]. Leurs propriétés thermodynamiques ont été calculées comme la constante d’association [11] et les coefficients osmotiques [12, 13] en utilisant des simulations Monte-Carlo (MC) [12] et l’approche BIMSA (Binding Mean Spherical Approximation) [13]. La compréhension des propriétés structurales et thermodynamiques de la série des actinides est le premier pas pour optimiser les procédés actuels de production et de traitement des combustibles nucléaires. Donc, la compréhension de l’hydratation de ces ions est cruciale pour la compréhension de la chimie en solution aqueuse des actinides ainsi que la chimie de coordination de ces ions.

Les éléments U, Pu et Np peuvent former des cations actinyle AnO₂ⁿ⁺ . Cette propriété remarquable des actinides du début de la série, par rapport à la série des lanthanides, est leur aptitude à former des entités oxocations de forme linéaire pour les éléments au degré d’oxydation +V ou +VI. Pour caractériser ces ions en solution, plusieurs outils sont classiquement utilisés : les spectroscopies EXAFS (Extended X-ray Absorption Fine Structure) ou HEXS (High-energy X-ray scattering) ou XANES (X-ray Absorption Near Edge Structure) [20–37], la résonance magnétique nucléaire (NMR) [28, 32, 33, 38–41], la diffraction de rayon X (XRD) [38, 42–45] et de neutron (ND) [46], la spectroscopie de fluorescence (XRF) ou les techniques de spectroscopie vibrationnelle comme l’utravioletvisible (UV-vis) [23, 30, 41, 47, 48], l’infrarouge (IR) ou la spectroscopie Raman [49–52], les techniques d’ionisation douce couplée à la spectrométrie de masse (ESI-MS) [53–55]. Ces études nous donnent les informations importantes sur l’environnement proche du cation étudié, et plus précisément sur sa première sphère de coordination.

La spectroscopie d’absorption de rayons X est une technique très performante permet- tant de décrire les propriétés structurales d’hydratation des cations métalliques, et plus particulièrement l’environnement proche d’une espèce donnée en solution. Les analyses plus détaillées des spectres EXAFS, qui fait intervenir plusieurs sphères de coordination, donnent accès aux distances métal-anion. Les études menées par Allen et al. montrent une chimie de coordination dite du plan équatorial dans lequel cinq molécules d’eau complètent la sphère de coordination de l’oxocation, avec une valeur moyenne de distance UR–OW de 2,41 Å [20]. A la concentration saturée de chlorure, on observe l’entrée de cet anion dans la première sphère d’hydratation de l’uranyle. L’étude de Gaillard et al. dans la phase organique présente une distance UR–OW très proche (2,42 Å) que celle d’Allen et al. avec une distance de coordination de l’azote des nitrates UR–Nn de 2,92 Å [21]. Les recherches menées par Hennig et al. ont confirmé l’entrée du chlorure dans la première sphère de coordination du cation à la concentration saturée de chlorure ([UO2+2 ] :[Cl−] = 300-900) [22]. Ikeda et al. ont montré que le nitrate préfère s’associer de façon bidentate dans la première sphère du cation plutôt que monodentate dans une solution d’acétonitrile [23]. L’étude de Servaes et al., effectuée dans les liquides ioniques, propose une distance UR–OW de 2,49 Å et UR–Nn de 2,92 Å [24]. Les mesures EXAFS de Wahlgren et al. ont démontré que le perchlorate n’était pas présent dans la première sphère de coordination de l’uranyle, et que ses cinq molécules d’eau se situent à une distance UR–OW de 2,42 Å [25]. De plus, les spectres EXAFS ont été présentés dans d’autres publications [26–33]. La spectroscopie HEXS [34–37] a eu des résultats intéressants comme l’étude de Hennig et al. dans la solution de sulfate avec une distance UR–S de 3,11 Å [34]. L’étude menées par Neuefeind et al. sur la structure d’hydratation d’uranyle dans la solution de perchlorate a confirmé cinq molécules d’eau dans son plan équatorial [35]. La distance entre l’uranyle et les molécules d’eau de sa deuxième sphère de coordination est de 4,5 Å selon la mesure de Soderholm et al. [36, 37]. L’interaction entre des uranyles a été étudiée par les mesures expérimentales [27, 30] et ont mis évidence une distance UR–UR de 3,82-3,90 Å. Les études de Taylor et al. par diffraction de neutrons (ND) donne une distance UR–OW d’environ 2,50 Å [46].

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

1 Introduction
1.1 Traitement du combustible nucléaire usé
1.2 Procédé PUREX
1.3 Bibliographie
1.4 Méthodologie
2 Méthode
2.1 Thermodynamique statistique
2.1.1 Les ensembles thermodynamiques
2.1.2 Fonction de distribution
2.1.3 Les fonctions thermodynamiques
2.1.4 Les fonctions intégrales
2.2 Thermodynamiques des Electrolytes
2.2.1 Propriétés thermodynamiques
2.2.2 Modèle chimique : Debye-Hückel et association
2.2.3 La théorie McMillan-Mayer
2.3 Simulations moléculaires
2.3.1 Dynamique moléculaire
2.3.2 Potentiel de force moyenne ion – ion
2.3.3 Potentiels d’interaction
2.3.4 Conditions périodiques aux limites
2.3.5 Rayon de coupure
2.3.6 Les sommes d’Ewald
2.3.7 Simulations Monte-Carlo
3 Modélisation multi-échelle des solutions de UO2Cl2
3.1 Introduction
3.2 Simulations de dynamique moléculaire
3.2.1 Modèles
3.2.2 Détails des simulations
3.3 Propriétés structurales des ions en solution
3.3.1 Propriétés d’hydratation de l’uranyle UO2+2
3.3.2 Propriétés d’hydratation du chlorure Cl−
3.3.3 Interactions entre les ions
3.4 Vers un modèle macroscopique
3.5 Conclusion
4 Modélisation multi-échelle des solutions de UO2(ClO4)2 et UO2(NO3)2
4.1 Introduction
4.2 Simulations de dynamique moléculaire
4.2.1 Modèles
4.2.2 Détails des simulations
4.3 Propriétés structurales des ions en solution
4.3.1 Propriétés d’hydratation de l’uranyle UO2+2
4.3.2 Propriétés d’hydratation du perchlorate ClO−4
4.3.3 Propriétés d’hydratation du nitrate NO−3
4.3.4 Interactions entre les ions
4.4 Vers un modèle macroscopique
4.5 Conclusion
5 Dépendance angulaire des interactions entre ions en solution
5.1 Introduction
5.2 Chlorure d’uranyle
5.3 Perchlorate d’uranyle
5.4 Nitrate d’uranyle
5.5 Conclusion
6 Conclusions

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *