Modélisation de l’ablation des composites C/C dans les tuyères

La propulsion solide est utilisée pour les moteurs-fusées les plus puissants comme les accélérateurs d’Ariane V ou les missiles stratégiques. Durant les dernières décennies le développement des nouvelles générations de propergols solides a conduit à une augmentation constante de la température des gaz de combustion. Celle-ci dépasse maintenant les 3500 K. A de tels niveaux de sollicitation, peu de matériaux conservent leur état solide. A cette température élevée, s’ajoutent des contraintes chimiques par la présence d’espèces oxydantes. Dans de telles conditions d’utilisation le choix des matériaux s’avère très restreint. Parmi les quelques concurrents restants, les composites thermostructuraux carbonecarbone présentent plusieurs avantages relatifs Borie et al. (1990) :

– Bon rapport tenue mécanique à haute température sur densité ;
– Faible coefficient de dilatation ;
– Industriabilité de pièces de grande taille et de forte épaisseur.

Malgré ces atouts, l’ensemble des contraintes thermo-chimiques entraîne une altération récessive des pièces de col ou ablation. Cette récession crée un couplage fort entre l’évolution du solide et l’écoulement des fluides au dessus de lui, ainsi que dans les échanges thermiques entre ces deux milieux. L’ablation de la paroi intervient à l’échelle de la pièce et vient donc modifier la géométrie de la tuyère elle-même. La récession intervient aussi sur l’état de surface microscopique des pièces de col.

Transferts dans la tuyère et composites C/C

Écoulement et transferts en tuyère

Caractéristiques globales de l’écoulement

La tuyère est la partie terminale du propulseur. Elle relie la chambre de combustion à l’atmosphère. Elle permet l’accélération des produits de combustion du propergol solide et contribue ainsi à la poussée. Bien que la composition et le comportement du fluide soient complexes, des modèles simples permettent de dégager les grandes lois de l’écoulement en tuyère pour la propulsion solide. La tuyère permet la conversion de l’énergie thermique de la combustion en énergie cinétique. La conversion optimale est obtenue lorsque la transformation est assimilable à la détente isentropique du mélange gazeux. Cette transformation est celle qui offre le meilleur rendement thermodynamique puisqu’elle ne comporte aucune dissipation thermique ou visqueuse. La tuyère est parcourue par un mélange gazeux s’écoulant à grande vitesse. Nous décrivons ici la composition de ce mélange et l’impact de sa vitesse élevée sur les caractéristiques de l’écoulement.

Composition
Le mélange gazeux obtenu en sortie de la chambre de combustion est le siège de réactions en phase homogène entre ces différents composants. Le mélange étant très chaud, nous pouvons faire l’hypothèse que les réactions sont très rapides vis-à-vis de la vitesse macroscopique du gaz. Le mélange obtenu est alors celui correspondant à l’équilibre chimique local en fonction de la température et de la pression.

Le but de la tuyère est d’offrir la poussée maximale i.e. le flux de quantité de mouvement maximal. Pour augmenter la poussée, nous montrerons par la suite qu’il faut augmenter la température des produits de combustion. Pour cela , une certaine proportion d’aluminium est introduite dans le propergol. Celui-ci est transformé par une combustion fortement exothermique en alumine Al2O3. Cette alumine forme un nuage de gouttelettes qui sont emportées par l’écoulement des gaz. La masse de l’alumine liquide représente jusqu’à un tiers de la masse totale expulsée. Dans les tuyères étudiées l’alumine reste au cœur de la veine. Le mélange des gaz et de l’alumine sera traité comme un fluide équivalent.

Écoulement au cœur de la tuyère

Dans la veine, le nombre de Reynolds est suffisamment grand pour que les gaz soient assimilés à un gaz parfait simple. Il peut alors être représenté par un écoulement Aubrun (2003) par tranches homogènes. Ainsi, les propriétés du fluide ne dépendent que d’une coordonnée, s , l’abscisse suivant l’axe de la tuyère. Ce modèle permet d’effectuer une étude simple mais riche en informations, de l’écoulement au cœur de la tuyère. On considère ici le régime stationnaire du fonctionnement du moteur-fusée. L’indice G note les grandeurs se reportant au fluide dans la chambre de combustion. Ces grandeurs sont appelées propriétés génératrices de l’écoulementChassaing (2000).

Transferts pariétaux

Proche de la paroi, la vitesse décroît, le comportement du fluide est complexe et est le siège d’échanges entre le fluide et le composite. Nous étudions ici les caractéristiques des échanges de quantité de mouvement, de masse et de chaleur.

Quantité de mouvement 

Le mélange des produits de combustion est visqueux (µ = 10⁻⁴ P a.s). Sa vitesse à la paroi est donc nulle. Il existe ainsi une zone proche de la paroi où la vitesse de l’écoulement est trop faible pour rendre les effets visqueux totalement négligeables. Dans cette couche limite les gradients sont importants. La couche limite de vitesse est définie par convention Chassaing (2000) comme le lieu des points où la vitesse est inférieure à 99 % de la vitesse attribuée au cœur de la veine à la même abscisse.

Transfert de masse 

La paroi est le siège de plusieurs réactions qui amènent à la gazéification du solide. L’identification des cinétiques et des mécanismes d’oxydation n’était pas un des objectifs de cette étude. Les données utilisées sont donc issues des travaux déjà réalisés sur le sujet. A l’échelle supérieure du matériau les études sont nombreuses, on citera notamment : Cairo et al. (2003); Chen et al. (1999); Gao et al. (2004); Glime and Cawley (1995); Han et al. (1995); Jacobson et al. (1999); Jiqiao et al. (2002); Luo et al. (2002); Nagle and Strickland-Constable (1962); Vix Guterl et al. (2003). Une attention sera portée plus particulièrement sur les études portant sur l’oxydation en tuyère : Golovina (1980); Borie et al. (1990); Kuo and Keswani (1986); Chelliah et al. (1996); Milos and Chen (1997). Ces études permettent dans un premier temps d’identifier les espèces responsables de la gazéification du carbone dans les tuyères. Elles fournissent de plus des jeux de vitesse de recul en fonction de la pression partielle en oxydant qui nous permettent d’obtenir les cinétiques des réactions. Il y a un accord importantBorie et al. (1990); Kuo and Keswani (1986); Milos and Chen (1997) sur les hypothèses selon lesquelles :
– La perte de masse est très majoritairement due à l’oxydation du carbone par H2O et CO2 ;
– L’érosion mécanique par l’impact d’alumine est négligeable dans les tuyères modernes.
– La sublimation du carbone est, elle aussi, négligeable. La température atteinte par le matériau n’est pas suffisante pour les pressions considérées.

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Table des matières

Introduction Générale
I Phénoménologie et Modèles
1 Transferts dans la tuyère et composites C/C
1.1 Écoulement et transferts en tuyère
1.1.1 Caractéristiques globales de l’écoulement
1.1.2 Écoulement au cœur de la tuyère
1.1.3 Transferts pariétaux
1.2 Composites C/C Ablatifs
1.2.1 Organisation Multi-échelle du carbone
1.2.2 Observation microscopique
1.3 Conclusion
2 Définition de la stratégie de modélisation
2.1 Description globale du processus
2.1.1 Conservation des espèces
2.1.2 Conservation de la quantité de mouvement
2.2 Échelles et couplages
2.2.1 Échelles spatiales
2.2.2 Paramètres caractéristiques de l’étude
2.2.3 Échelles temporelles
2.3 Modèles d’ablation
2.3.1 Modèles de transfert et de récession
2.3.2 Modèle pour la géométrie du composite
2.4 Changements d’échelle : objectifs et outils
2.4.1 Notion de milieu effectif
2.4.2 Surface effective pour les composites C/C des cols de tuyères
2.4.3 Approches de changement d’échelle
2.5 Plan d’étude
II Modélisation de surfaces réactives hétérogènes
3 Modélisation de surfaces non-récessives
3.1 Surface lisse
3.1.1 Modèle étudié
3.1.2 Construction théorique de la réactivité effective
3.1.3 Mise en œuvre numérique
3.1.4 Résultats
3.1.5 Discussion
3.2 Surface rugueuse
3.2.1 Condition effective pour le champ de vitesse
3.2.2 Réactivité effective
3.2.3 Comparaison simulation directe-milieu effectif
3.3 Conclusion
4 Étude analytique de surfaces récessives
4.1 Régime réactif
4.1.1 Évolution morphologique
4.1.2 Vitesse stationnaire et réactivité effective
4.1.3 Régime Transitoire
4.1.4 Optimisation des fils et baguettes en régime réactif
4.2 Ablation sous flux 1D
4.2.1 Équation d’évolution de la surface
4.2.2 Surface homogène
4.2.3 Surface hétérogène
4.3 Conclusion
5 Étude numérique de surfaces récessives
5.1 Code de simulation numérique
5.1.1 Méthode numérique
5.1.2 Validation
5.2 Expérimentation numérique
5.2.1 Comportement instationnaire
5.2.2 Réactivité effective stationnaire
5.2.3 Autres géométries
5.3 Conclusion
III Applications aux composites C/C
6 Identification des réactivités élémentaires
6.1 Position du problème inverse
6.2 Identification des paramètres morphologiques
6.3 Calcul de la réactivité effective
6.4 Simulations
6.5 Conclusion
7 Application à l’échelle mésoscopique
7.1 Matériau 4D atypique
7.1.1 Matrice effective
7.1.2 Comportement du composite
7.2 Comparaison d’architectures tissées
7.2.1 Comparaison des composites
7.2.2 Comportement ablatif
7.3 Conclusion
Conclusion Générale

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