Présentation des lampes fluorescentes compactes
Les lampes fluorescentes compactes (LFC) sont constituées de deux parties principales : un culot et un tube en verre. Le tube est rempli d’un gaz fait d’un mélange de vapeur de mercure à basse pression et d’argon. Le culot de la lampe contient quant à lui un ballast électronique qui permet de fournir la haute tension nécessaire à l’allumage du tube, puis une fois allumé, de limiter le courant le traversant, évitant ainsi une dégradation rapide de la lampe. La cathode est portée à une température suffisante pour provoquer l’émission d’électrons. Ces électrons ionisent l’argon qui excite ainsi le mercure. En se désexcitant, le mercure produit un rayonnement ultra-violet avec deux raies principales, l’une à 185 nm et l’autre à 254 nm. Ces rayons ultra-violets sont convertis ensuite en lumière visible grâce à la couche de grains déposée sur la paroi interne du tube. Cette couche est constituée d’un mélange de grains de taille micronique de trois types de luminophores qui émettent dans le bleu, le vert et le rouge. Un mélange contrôlé de ces trois couleurs permet alors de produire de la lumière blanche.
Morphologie des grains après recuit simple
Une poudre de LAP est calcinée à une température de 870◦C, avec une montée en température de 5◦C par minute, pendant 6 heures. La figure 1.5 reprend deux images de microscopie à balayage des grains de LAP, la première est une image des grains avant recuit (a.) et la seconde après recuit (b.).Sur l’image MEB avant recuit, on retrouve des particules élémentaires (∼ 50 nm)assemblées en grappe (∼ 500 nm) pour former des agglomérats (1−10 µm). Après recuit, on observe des particules d’environ 500 nm assemblés en agglomérats de plusieurs microns. Les particules élémentaires sont agrégées les unes aux autres, elles ont fusionné, éliminant ainsi la porosité la plus petite. Les deux autres échelles de porosités (entre les grappes et entre les agglomérats) sont toujours présentes. De plus, il apparaît que les grains traités par recuit simple ne sont pas lisses, ils sont toujours formés d’agglomérats de cristallites. Dans les sections précédentes, nous avons décrit les buts du traitement thermique. Le lissage des grains et l’amélioration de la cristallinité en font partie. Le recuit simple n’est donc pas satisfaisant. Il est probable que les grains de LAP seraient lissés par un recuit plus long. Cependant, augmenter le temps de recuit augmente le coût de production mais peut également entraîner des problèmes de coalescence de particules, ce qui augmente les tailles moyennes des phosphores et entraine une inhomogénéité de taille. Or, il est indispensable que les agglomérats gardent une taille uniforme, en particulier pour le dépôt du slurry.
Morphologie des grains après recuit assisté de liquide
Avant de décrire la morphologie des grains après recuit avec fondant, nous décrirons en quelques mots la morphologie du fondant avant recuit. A température ambiante, le fondant est sous forme de grains solides. Ce n’est que pendant le recuit qu’il fond. Des images de microscopie du fondant utilisé dans le cas du recuit du LAP ont été fournies par nos collaborateurs industriels de la société Rhodia. Nous précisons d’ailleurs que toutes les images de microscopie de ce chapitre ont également été fournies par la société Rhodia. La figure 1.6 représente deux images de microscopie à balayage d’une poudre du fondant utilisé pour le recuit du LAP. Les grains de fondant sont de formes très inhomogènes. La taille des cristaux de fondant varie de quelques microns à plusieurs centaines de microns. La température de fusion de ce fondant est de 550◦C. La poudre de fondant et la poudre de grains sont mélangées avant d’être déposé dans le four. Compte-tenu de la diversité des formes et des tailles de cristaux de LAP, il est probable que ce mélange ne soit pas tout à fait homogène. Toutefois, pour palier ce problème, le mélange est passé dans un turbula pendant 45 minutes. Le mélange de grains de LAP et de grains de fondant est ensuite placé dans un moule puis chauffé. La montée en température est de 5◦C par minute, jusqu’à une température de 870◦C. Le décompte du temps de recuit démarre lorsque la température de recuit est atteinte. A partir de ce moment, le recuit des grains de LAP avec ce fondant dure six heures.
Méthodes à capture d’interface et méthodes à suivi d’interfaces
Comme nous l’avons vu au chapitre précédent, les phénomènes mis en jeu au cours du recuit de synthèse impliquent l’évolution dans le temps de frontières entre différents domaines. Il existe deux grandes familles de méthodes pour traiter numériquement ces problèmes à frontières libres, qui se distinguent par la technique utilisée pour localiser l’interface. Il s’agit des méthodes à capture d’interface et des méthodes à suivi d’interface. Dans l’approche dite à suivi d’interface, les interfaces séparant les domaines de compositions ou de structures différentes sont assimilées à des surfaces mathématiques sans épaisseur. Numériquement, ces surfaces sont représentées par des points discrets dont la position évolue avec le temps. Le principal avantage de ce genre de méthode est qu’elle permet une prise en compte directe des conditions aux limites. Cependant, les algorithmes numériques nécessaires à leur mise en oeuvre sont très compliqués, particulièrement en trois dimensions. En effet, pour suivre l’évolution de l’interface, il faut suivre pas à pas les points du maillage de la frontière et les relier, et ce à chaque pas de temps. Or, dans certaines géométries, relier les points entre eux n’est pas évident, comme par exemple lors de la formation de ramifications ou de la séparation d’objets (figure 2.1).
Modélisation des processus de recuit
Comme nous l’avons présenté dans le chapitre précédent, nous nous intéressons au recuit des grains solides à l’aide d’une phase liquide. Le recuit simple fait référence au traitement thermique de poudres, à une température inférieure à la température de fusion des poudres. Ce type de recuit est utilisé depuis toujours dans le procédé de fabrication des céramiques. Il est utilisé dans le but de densifier une poudre et d’en faire une matériau massique solide. On entend par densification l’augmentation de la densité du matériau massif, et la diminution du volume poreux [7]. De manière générale, le recuit permet l’apparition de liaisons entre les particules, à l’aide de chaleur. A l’echelle microscopique, le processus de recuit est le résultat du mouvement des surfaces et des interfaces entre les grains. A l’echelle macroscopique, le recuit est simplement décrit par la densification du matériau. En utilisant une approche de diffusion de lacunes pour modéliser le mécanisme atomique pour la redistribution de matière qui a lieu lors du recuit, Asp et al. [8] considèrent la coalescence de deux grains dans un milieu gazeux. Ils utilisent deux phases thermodynamiques différentes, en considérant une phase avec peu de lacunes (solide) et une phase composée essentiellement de lacunes (gaz-vapeur). Il s’agit de modélisation de frittage solide-solide. Ces travaux sont d’ailleurs à rapprocher de ceux de Kumar et al. [9] qui étudient l’évolution d’un joint de grain entre deux grains solides de tailles très différentes. Au cours du recuit assisté par liquide, le mélange de deux poudres est porté à une température comprise entre la température de fusion des grains de fondant et des grains de luminophores. Dans ce cas, un solide fond, formant une phase liquide. Ce liquide fondu est en général favorable au recuit [10], en accélerant nettement les différents processus. Les propriétés importantes des composants sont la solubilité du solide dans le liquide fondu et les conditions de mouillabilité entre le liquide et le solide. Des travaux théoriques sur la densification durant le recuit avec liquide sont présentés dans [11]. Les auteurs proposent une expression de la densification en fonction du temps, de la taille des particules et de la température. Ils considèrent le cas d’une phase solide majoritaire recuite à l’aide d’un liquide, dans lequel le solide est partiellement soluble. Si ce n’est pas le cas, le transfert de matière dans un matériau poreux compact (à l’état initial) qui évolue vers une structure sans pore à l’aide des énergies de surface est similaire au transport de matière rencontré dans le recuit simple. Cependant, ces travaux ne prennent en compte que le cas où le solide est complètement mouillé par le liquide et les effets de la mouillabilité et des angles de contact ne sont pas étudiés. Anestiev et al [12] ont modélisé la première étape du recuit, c’est à dire le réarrangement. Ils montrent que ce processus est très sensible au mouillage et à l’angle de contact. En effet, la force capillaire attractive est proportionnelle au sinus de l’angle de contact. Les auteurs montrent également que le réarrangement optimal n’est pas obtenu pour un liquide mouillant parfait (angle de contat nul). En effet, dans ce cas, il est énergétiquement plus favorable pour le liquide de former une couche le long des grains, et non pas des ponts. Or, nous savons que ce sont ces ponts de liquide entre les particules qui sont utiles dans le tansport de matière. Les auteurs montrent que d’après leurs travaux de modélisation, le réarrangement optimal est obtenu pour des angles de contact d’environ 10-20 degrés. Dans les phénomènes de densification, on observe un rapprochement des particules entre elles et donc une diminution du volume poreux. Cette diminution du volume poreux est en partie dûe aux forces capillaires existant entre les particules solides. La formation d’une phase liquide et en particulier la présence de ponts de liquide entre les particules sont à l’origine de ces forces attractives. Les forces capillaires entre particules, au cours du recuit avec liquide, ont été analysées par Heady and Cahn [13]. Les auteurs expriment la force entre deux grains sphériques connectés par un pont de liquide avec deux composantes : la tension de surface et la différence de pression induite par la courbure de la surface. Le phénomène de rapprochement des grains entre eux impliquent le mouvement des particules. Dans le cas du recuit avec liquide qui nous intéresse, la densification totale du matériau n’est pas le but, au contraire. Il est vrai qu’une certaine diminution du volume totale est observée dans la figure 1.14 du chapitre précédent. Mais ici, le traitement thermique n’a pour objectif que de lisser les surfaces et de densifier la première échelle de cristallites constituant les grains de quelques microns. A l’étape que nous choisissons de modéliser, la première échelle de porosité a déjà disparue et les cristallites sont densifiées. Par conséquent, nous ne prendrons pas en compte le mouvement des grains, contrairement à certains modèles comme celui de Wang et al. [14].
Développement d’un modèle de multi-champ de phase pour modéliser le recuit avec liquide
Notre but est de développer un modèle qui décrit l’évolution dans le temps de la morphologie de grains de luminophores au cours du recuit assisté par liquide. Comme nous l’avons vu au chapitre 1, le recuit avec fondant fait intervenir du liquide (le fondant), de la vapeur (les pores) et des domaines solides (grains) ayant des orientations cristallines différentes. Le modèle présenté précédemment permet de décrire l’évolution de joints de grains. Dans le système modélisé par N. Moelans et al., tous les domaines sont des solides et la seule chose qui les différencie est leur orientation cristallographique. Le problème qui nous intéresse est celui de la reconfiguration de surface des grains solides, au cours du recuit en présence de liquide. Notre système comporte des domaines solides, pouvant avoir des orientations cristallographiques différentes mais également des domaines de liquide et de vapeur. Étant données les similitudes avec notre problème et l’efficacité du modèle de N. Moelans, ce dernier sert de base à l’élaboration de notre modèle. Cependant, notre système est différent et plus complexe que celui présenté précédemment. C’est pourquoi, nous l’avons adapté à notre problème. Dans la suite cette partie, nous détaillerons la construction de notre modèle. Il s’agit d’un modèle multi-champ de phase. Il comporte un nombre p de domaines différents. Chaque domaine est représenté par une variable champ de phase non conservée φi(r, t) qui varie entre 0 et 1. Dans les notations utilisées, φ0 représente les domaines vapeur, φ1 les domaines liquide et φ(i>1) représente les domaines solides ayant des orientations cristallographiques différentes. Dans les équations, la phase vapeur, notée φV , vaut φV = φ0. De la même manière, la phase liquide notée φL est égale à φ1. La phase notée φS dans les équations est la somme des différentes champs de phase représentant du solide, ainsi φS =Xpi>1φi. Il est à noter que φL et φV sont nécessairement comprises entre 0 et 1 tandis que φS peut légèrement dépasser 1 dans les joints de grains et dans les points triples où plusieurs champs de phase solides sont différents de 0. D’autre part, deux potentiels chimiques adimensionnés uA(r, t) et uB(r, t) sont utilisés. Ces derniers contrôlent d’une part l’équilibre entre les différentes phases thermodynamiques et d’autre part le flux de matière. Leur définition sera détaillée ultérieurement. La fonctionnelle d’énergie libre (éq.2.23), utilisée pour décrire le problème, est composée de trois parties.
Effet Gibbs-Thomson
Le but final de notre modèle est de modéliser les reconfigurations de surface des grains lors du recuit avec fondant. Cependant, avant d’utiliser notre modèle sur des systèmes de grandes tailles, il convient de vérifier qu’il reproduit des propriétés simples, notamment l’effet Gibbs-Thomson (voir annexe A pour plus de détails). Pour cela, nous modélisons un domaine circulaire, représenté par une variable champ de phase φi , inclus dans une matrice, représentée par la variable champ de phase φj. Comme nous l’avons vu au cours du chapitre précédent, l’équilibre entre un domaine solide et un domaine vapeur dépend de la variable uA. L’équilibre entre un domaine liquide et un domaine vapeur dépend de la variable uB et l’équilibre entre un domaine liquide et un domaine solide dépend d’une combinaison linéaire de ces deux variables. Trois configurations différentes ayant la même géométrie sont testées. Leur état initial est reporté dans la figure 3.2. Dans la première géométrie (3.2.a.), un domaine sphérique liquide est inclus dans de la vapeur. La deuxième géométrie (3.2.b.) est constitué d’un domaine sphérique solide inclus dans de la vapeur. Enfin, dans le troisième cas (3.2.c.), un domaine sphérique solide est inclus dans du liquide. Dans un premier temps, les trois tensions de surface sont égales. Les simulations sont faites dans des boîtes de 50 × 50 pendant t = 3500. Le rayon du disque vaut rayon de R = 10. Le temps est exprimé en unité de τ (temps de relaxation du champ de phase) et les longueurs en unité de ℓ (largeur d’interface).
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Table des matières
Introduction
1 Présentation des grains de luminophores
1.1 Présentation des lampes fluorescentes compactes
1.2 Description des luminophores utilisés dans les lampes fluocompactes
1.3 Luminescence de matériaux à base de terres rares
1.4 Présentation des étapes de fabrication
1.5 Recuit de synthèse
1.5.1 Morphologie des grains avant recuit
1.5.2 Morphologie des grains après recuit simple
1.5.3 Morphologie des grains après recuit assisté de liquide
1.6 Mécanismes de diffusion
1.6.1 Diffusion à travers les pores
1.6.2 Diffusion de volume
1.6.3 Diffusion de surface
1.6.4 Diffusion à travers le liquide
1.7 Etapes du recuit assisté par du liquide
1.7.1 Chauffe et fonte
1.7.2 Dissolution et re-précipitation
1.7.3 Dilatation des microstructures
2 Développement du modèle de champ de phase
2.1 Méthode du champ de phase
2.1.1 Méthodes à capture d’interface et méthodes à suivi d’interfaces
2.1.2 Principes de base de la méthode du champ de phase
2.1.3 Cinétique du champ de phase
2.1.4 Multi-champ de phase
2.2 Modélisation des processus de recuit
2.3 Modèle d’évolution de polycristaux
2.4 Développement d’un modèle de multi-champ de phase pour modéliser le recuit avec liquide
2.4.1 Equilibre entre les phases et transport de matière
2.4.2 Incorporation des mécanismes de transport de masse
2.5 Présentation du modèle complet
2.6 Méthodes des frontières diffuses
2.7 Résolution numérique
2.7.1 Conditions aux bords périodiques
3 Application du modèle pour le recuit avec liquide
3.1 Effet Gibbs-Thomson
3.2 Points triples symétriques
3.3 Développement d’une méthode pour mesurer les angles
3.4 Relation entre tension de surface et angle point triple
3.5 Importance de l’approche variationnelle
3.6 Validation de l’utilisation du terme ternaire
3.7 Méthode des frontières diffuses
3.8 Discussion sur le transport
3.9 Résultats préliminaires sur des géométries plus grandes
4 Mise en place d’un système modèle optique
4.1 Quelques méthodes décrivant la diffusion de la lumière sur une particule
4.1.1 L’approximation optique physique
4.1.2 La méthode eikonale
4.1.3 La méthode du tracé de rayons
4.1.4 Les méthodes numériques
4.1.5 Choix de la méthode de simulation
4.2 Description de la boîte de simulation
4.3 Description de la source de rayons UV utilisée
4.4 Description du matériau utilisé
4.4.1 Données numériques
4.5 Description du type de propagation utilisée
5 Efficacité de conversion optique
5.1 Étude des paramètres géométriques de la couche de grains
5.1.1 Influence de la compacité
5.1.2 Influence de l’épaisseur de la couche
5.2 Etude des paramètres géométriques des grains
5.2.1 Influence de la taille des grains
5.2.2 Influence de la forme des grains
5.3 Étude de l’effet du désordre
5.3.1 Désordre des positions des grains
5.3.2 Distribution en taille des particules
5.3.3 Distribution en angle pour les ellipsoïdes
5.4 Etude des propriétés du matériau des grains
5.4.1 Taux d’absorption interne
5.4.2 Taux de conversion interne
5.4.3 Libre parcours moyen
5.4.4 Indice de réfraction de la matrice
5.5 Étude de l’efficacité de la lampe à partir des études sur la couche
Conclusion
Annexe A
Annexe B
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