Dans le calcul sismique des structures, l’excitation est définie par un ou plusieurs enregistrements d’accélérations souvent mesurées à la surface du sol en l’absence de toute construction. Ces enregistrements donnent les accélérogrammes en champs libre. En présence d’un bâtiment ou d’une quelconque autre construction, les mouvements au voisinage des fondations peuvent différer de ceux existant en champ libre. En effet, les forces au contact entre la structure et sa fondation perturbent le mouvement du sol, et le moment d’encastrement à la base provoque la rotation de celle-ci. Ce phénomène est désigné par « Interaction Sol – Structure » ou « ISS ». Ce chapitre de nature bibliographique est destiné à synthétiser les différentes méthodologies utilisées pour modéliser l’ISS, développées généralement avec pour objectif le calcul sismique des bâtiments. Une application au calcul sismique de barrage poids est proposée en fin de chapitre, permettant la comparaison de différentes méthodes entre elles.
L’interaction entre le sol et la structure peut être mise en évidence à l’aide d’un modèle simple dans lequel la structure est représentée par une poutre console de raideur correspondant aux voiles ou poteaux sollicités en cisaillement contenant des masses correspondant principalement à celle des planchers. Ce système a donc plusieurs degrés de liberté. L’interaction avec le sol peut être représentée par des ressorts agissant à la translation ou à la rotation reliés à une base mobile se déplaçant suivant le mouvement sismique imposé.
Le mouvement de la base mobile est celui qui est défini en champ libre par un accélérogramme, tandis que le mouvement de la fondation du bâtiment, dépend de la masse de la structure et de la raideur des ressorts qui représentent le sol. Ces deux mouvements diffèrent donc, leur écart étant d’autant plus accentué que le sol est plus déformable. En général, dans les études des structures courantes, les propriétés du sol ne sont pas prises en compte. Le modèle le plus utilisé comporte un encastrement parfait à la base à laquelle on impose directement le mouvement. Cela entraîne évidemment une approximation dans le calcul de la réponse. Les erreurs ainsi introduites peuvent être importantes dans le cas d’un sol très déformable : La période du premier mode est sous-estimée et il en résulte une erreur par excès ou par défaut sur la valeur de l’accélération selon la zone où l’on se situe sur le spectre de calcul. On est par conséquent amené à concevoir des modèles dans lesquels le sol est représenté soit par des ressorts soit par des éléments finis ou par d’autres types de modélisation permettant de reproduire son comportement.
En fonction de ces aspects et des hypothèses retenues pour les deux milieux sol et structure, les modèles et les méthodes proposés pour la prise en compte de l’interaction sol-structure sont trèsdiverses. Parmi elles, on peut distinguer les méthodes globales, qui résolvent en bloc le problème couplé sans tenir compte de la forme particulière du système matriciel correspondant, et les méthodes par sous structure qui s’appuient sur une décomposition du système en deux ou trois parties ou sous systèmes selon que l’on tienne compte ou non de la fondation et du sol proche.
Modélisation à l’aide de l’impédance de fondation
La manière la plus simple de prendre en compte le sol dans les modèles de calcul des structures est de le représenter par des ressorts reliant un ou plusieurs noeuds à une base rigide à laquelle on impose le mouvement. Dans le cas d’un modèle plan par exemple et d’une fondation de surface, l’interaction avec une semelle isolée peut être représentée par deux ressorts agissant en translation et un ressort en rotation. Dans le cas d’une fondation rigide, si le mouvement est quelconque, la fondation peut être représentée par la relation entre le torseur des efforts appliqués (trois composantes de réaction et trois composantes de moments) et les composantes des déplacements de corps rigide de la fondation. Dans le cas d’un comportement du sol linéaire (élastique ou viscoélastique), cette relation est caractérisée par une matrice 6×6 dite « impédance de la fondation ». Cette impédance est complexe en raison de l’amortissement radiatif et matériel et dépend généralement de la fréquence.
Sous une semelle filante ou un radier, il également possible de modéliser le sol par une série de ressorts et d’amortisseurs horizontaux et verticaux placés en un ensemble de noeuds constituant les points de calcul ou de discrétisation. La raideur de ces ressorts est généralement calculée de façon de façon à reproduire l’impédance de la fondation lorsque celle ci se comporte de façon rigide. Les propriétés dynamiques du sol étant en général mal connues, on emploie souvent des hypothèses simplificatrices pour évaluer les impédances de la fondation à partir des données expérimentales. On peut ainsi assimiler le sol à un milieu visco-élastique infini caractérisé par un module d’élasticité E et un coefficient de Poisson ν, et la construction à un disque rigide de rayon R. Les expressions des coefficients de raideur repris dans le tableau 2.1 sont disponible dans la plus part des ouvrages de dynamiques des sols et des structures, comme par exemple : [31, 34, 50, 57, 103, 129]). Ces expressions permettent d’estimer la limite « basse fréquence » de certains termes de l’impédance de fondation. A ces termes, il convient d’ajouter la partie imaginaire de l’impédance de fondation caractérisant l’amortissement (combinaison de l’amortissement radiatif produit par la radiation des ondes élastiques à partir de la fondation et de l’amortissement intrinsèque du sol) ainsi qu’une variation de la partie réelle en fonction de la fréquence.
Dans ces expressions G = ½E/(1 + ν) désigne le module de cisaillement du sol. Les raideurs dépendent de ce module qui lui même varie en fonction du taux de déformation de glissement.
Méthode globale
La méthode globale (ou méthode directe) traite le problème d’interaction sol-structure en un tout : le modèle numérique se base sur la discrétisation spatiale de la structure et du sol. L’analyse du système complet s’effectue en une seule étape [104, 127]. Cette méthode permet d’inclure en principe tout comportement non linéaire du sol ou de la structure et toute hétérogénéité présente dans le sol. Il est aussi possible de traiter avec ce genre de méthode, les conditions de contact à l’interface sol-structure et la condition de radiation et de dissipation d’énergie dans la partie infinie du sol non borné. Les principales techniques utilisées pour traiter cette condition sont : l’utilisation de frontières absorbantes, le couplage éléments finis – éléments de frontière et le couplage éléments finis – éléments infinis ainsi que d’autres techniques.
Méthode à déconvolution du mouvement sismique
Cette méthode, esquissée dans les sections précédentes, est reprise ici en détail. La problématique de la résolution du problème d’interaction sol-structure par une méthode globale par déconvolution est constituée des deux étapes :
1) Le mouvement sismique de dimensionnement connu et donné à la surface du sol, en champ libre permet d’obtenir l’accélération à la base du modèle numérique. Cette base est choisie à une profondeur suffisante pour que la présence d’une structure en surface n’affecte pas le mouvement. Cette étape connue sous le nom de déconvolution du mouvement sismique se ramène au problème de résolution de la propagation d’onde dans le sol, en général dans le domaine fréquentiel . Par ailleurs, Rajasankar et al. [108] proposent une nouvelle méthode de déconvolution dans le domaine temporel.
2) Ensuite le mouvement déconvolué est imposé uniformément à la base du système sol-structure et la réponse est calculée par résolution du système d’équations d’écrivant le problème entier.
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Table des matières
Introduction générale
I : Elastodynamique et interaction sol-structure
1 Modélisation de la réponse sismique de la structure et du sol
1.1 Introduction
1.2 Equations du mouvement pour la structure
1.3 Conditions aux limites
1.4 Forme variationnelle des équations du mouvement
1.5 Discrétisation des équations du mouvement en éléments finis
1.6 Equations de mouvement du sol – Equations d’ondes
1.7 Equation de propagation d’onde unidimensionnelle dans un matériau viscoélastique
1.7.1 Résolution dans le domaine fréquentiel
1.8 Taille des éléments finis et pas d’intégration temporelle
1.9 Amortissement du mouvement dynamique
1.9.1 Amortissement matériel
1.9.2 Amortissement radiatif – Frontières absorbantes
1.10 Conclusion
2 Interaction sol-structure
2.1 Introduction
2.2 Modélisation à l’aide de l’impédance de fondation
2.3 Méthode globale
2.3.1 Méthode à déconvolution du mouvement sismique
2.3.2 Méthode de déplacement uniforme ajouté
2.3.3 Méthode de réduction de domaine
2.4 Méthode de sous structuration
2.5 Application
2.6 Conclusion
II : Pressions hydrodynamiques
3 Modélisation du fluide en éléments finis
3.1 Introduction
3.2 Equations du mouvement
3.2.1 Formulation en pression
3.2.2 Formulation mixte en pression – potentiel des déplacements
3.3 Conditions aux limites
3.3.1 Contour complet
3.3.2 Condition à l’interface fluide – structure
3.3.3 Condition à la surface libre
3.3.4 Condition sur la surface en fond de réservoir
3.3.5 Condition à la limite sur la surface de troncature
3.4 Solutions analytiques simplifiées pour le cas des réservoirs de barrages
3.5 Condition de radiation
3.6 Discrétisation en éléments finis
3.6.1 Discrétisation de la formulation en pression
3.6.2 Discrétisation de la formulation mixte
3.7 Traitement de la troncature géométrique avec les éléments infinis
3.8 Validation
3.9 Conclusion
4 Nouvelle formulation du fluide en éléments de frontières
4.1 Formulation en équations intégrales de frontière
4.1.1 Solutions fondamentales et dérivées
4.2 Nouvelle formulation symétrique des équations intégrales de frontière
4.2.1 Potentiel de simple couche
4.2.2 Fonction d’énergie potentielle de frontière
4.2.3 Symétrie de l’opérateur d’énergie
4.2.4 Discrétisation en éléments de frontière de la formulation symétrique
4.2.5 Calcul des intégrales élémentaires
4.3 Validation de la formulation symétrique
4.4 Conclusion
III : Couplage hydroélastique
5 Couplage fluide – structure
5.1 Introduction
5.2 Système couplé fluide-structure
5.3 Symétrisation du problème des vibrations libres de la formulation en pression
5.3.1 Technique utilisant l’inversion des matrices fluides
5.3.2 Technique utilisant l’inversion de la matrice raideur fluide
5.3.3 Technique utilisant l’inversion de la matrice de rigidité de la structure
5.3.4 Technique utilisant l’inversion de la matrice de masse du fluide
5.3.5 Technique utilisant l’inversion de la matrice de masse de la structure
5.4 Etude d’un cas de système couplé barrage – réservoir
5.4.1 Modèles numériques utilisés
5.4.2 Analyse modale
5.4.3 Analyse de la réponse fréquentielle
5.4.4 Réponse temporelle
5.4.5 Effet de la compressibilité
5.4.6 Performances des méthodes de symétrisation
5.5 Conclusion
6 Couplage fluide – sol – structure
6.1 Introduction
6.2 Système matriciel couplé
6.3 Effet de la flexibilité du sol sur la réponse du système barrage-réservoir
6.4 Etude du cas du barrage de Oued Fodda
6.5 Conclusion
Conclusion générale