Modèles de transmission des maladies vectorielles 

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L’invasion d’Aedes albopictus

Ae. albopictus, communément appelé «moustique tigre» , est une des espèces les plus invasives de l’histoire mondiale. Originaire d’Asie du Sud-Est, il est aujourd’hui présent dans de nombreuses zones tempérées et subtropicales du monde (Fig. 1.7). Une des différences majeurs avec Ae. aegypti est qu’il est capable de s’adapter à des températures plus froides. Si sa morphologie est très proche de celle d’Ae. aegypti, Ae. albopictus se différencie par une teinte générale plus sombre et une unique bande blanche dorsale longitudinale. L’extension d’Ae. albopictus et ses potentielles réper-cussions sur la santé publique ont été longtemps minimisées, de nombreux spécialistes considérant qu’il avait une faible capacité de transmission de maladies humaines [15]. Il a été démontré par la suite qu’Ae. albopictus est en fait capable de transmettre 26 virus humains, et joue un rôle important dans la transmission de la dengue et du chikungunya.

Écologie et avantages compétitifs

L’espèce a été décrite pour la première fois en 1894 par Frederick Arthur Askew Skuse dans le golfe du Bengale sous le nom de Culex albopictus avant d’être classée dans le genre Aedes (là encore, son nom est parfois suivi du nom de son découvreur, Skuse) [16]. De façon générale, Ae. albopictus est remarquable par sa plasticité. Il est ainsi capable de se reproduire et de survivre à des températures bien plus basses qu’Ae. aegypti, jusqu’à 10◦C au Japon et à la Réunion, et jusqu’à -5◦C aux États-Unis [15]. En dessous de ces limites, les œufs sont capables d’entrer en hibernation pour des périodes prolongées. Originellement sylvestre, Ae. albopictus s’est progressivement adapté aux modifications de l’environnement induites par les humains, mais, contrairement à la forme domestiquée d’Ae. aegypti, n’a pas développé de dépendance à la vie à proximité des humains. Son oviposition se fait préférentiellement dans des lieux naturels, mais il est aussi capable comme Ae. aegypti d’utiliser des récipients artificiels (Fig. 1.8). Ae. albopictus a aussi un comportement opportuniste vis à vis des hôtes et peut piquer aussi bien les humains, les autres mammifères, les oiseaux ou même certains reptiles et amphibiens. Il peut être retrouvé aussi bien dans les zones péri-urbaines que ru-rales ou forestières, mais n’est abondant que dans certaines centres urbains très boisés comme Singapour, Tokyo ou Rome [15]. Dans les zones où Ae. albopictus et Ae. aegypti cohabitent, on observe une compétition entre les deux espèces, qui tourne d’ailleurs généralement à l’avantage du premier. En effet, Ae. albopictus présente des carac-téristiques qui lui donnent un avantage compétitif sur d’autres espèces concurrentes sous certaines conditions. Les mécanismes en jeu sont principalement la compétition pour les ressources nécessaires au développement larvaire, mais d’autres ont été suggé-rés comme l’apport de parasites, les interférences chimiques (les déjections des larves d’Ae. albopictus limiteraient le développement ultérieur des larves d’Ae. aegypti), et les interférences d’accouplement (les mâles Ae. albopictus recherchant plus agressive-ment l’accouplement avec des femelles Ae. aegypti que l’inverse, causant une baisse de la fécondité) [17]. L’installation d’Ae. albopictus a ainsi été associée au déclin des populations d’Ae. aegypti en Amérique du Nord et au Brésil [15].

Émergences et réémergences

La population humaine ainsi que les échanges internationaux ont connu une crois-sance sans précédent au cours du XXème siècle. Alors que l’urbanisation est associée à l’augmentation des populations d’Ae. aegypti, l’augmentation des échanges a favo-risé l’extension des zones d’activité d’Ae. albopictus. Ces phénomènes ont entraîné une multiplication des contacts entre vecteurs et populations humaines, qui s’est traduite par la résurgence d’épidémies de maladies anciennes comme la dengue et la fièvre jaune, mais aussi par la dissémination de virus initialement circonscrits à des zones géographiques limitées, comme les virus du chikungunya ou du Zika. Dans cette par-tie, nous passerons en revue l’épidémiologie des principales maladies transmises par les moustiques du genre Aedes.

Virus de la fièvre jaune

La fièvre jaune est causée par un virus à ARN du genre Flavivirus. Il s’agit d’une maladie très ancienne, originaire d’Afrique et introduite aux Amériques au XVIème ou au XVIIème siècle, probablement durant la traite des esclaves [12]. La maladie a été longtemps très redoutée à cause des épidémies dévastatrices qu’elle occasionnait dans les villes portuaires d’Afrique et des Amériques. Par ce fait, cette maladie a contribué à façonner l’extension coloniale des pays européens à cette période. La découverte du rôle d’Ae. aegypti dans la transmission de la fièvre jaune en 1900 a permis la mise en place de premières mesures de contrôle vectoriel, qui ont en particulier été appliquées lors du creusement du canal de Panama. Le développement par Max Theiler d’un vaccin vivant atténué très efficace en 1937 (le vaccin 17D, efficace à 99% et encore utilisé aujourd’hui) et sa large diffusion ont entraîné un franc déclin de la maladie, malgré la persistance de résurgences régulières dans certaines régions d’Afrique et d’Amérique centrale et du sud.
En 2015, une épidémie importante a eu lieu à Luanda, en Angola puis s’est étendue au reste du pays et à la République Démocratique du Congo, causant plus de 7000 cas rapportés et près de 400 décès [19]. L’exportation de cas dans de nombreux pays du monde a fortement inquiété les autorités sanitaires et épuisé les stocks de vaccins [20]. En 2016-2017, une épidémie d’ampleur inhabituelle a touché le Brésil, avec plus de 3500 cas rapportés et plusieurs centaines de décès [21]. Les raisons de ces résur-gences restent floues, les diminutions de couverture vaccinale ne permettant pas de les expliquer entièrement. Plusieurs explications ont été avancées, dont l’augmentation de la densité et de l’activité des vecteurs, et des modifications génétiques du virus [22]. La maladie reste ainsi très présente dans les zones d’activité historiques d’Afrique et d’Amérique centrale et du sud (Fig. 1.9) [23]. De façon surprenante, aucune transmission autochtone de fièvre jaune n’a jamais pu être observée sur le continent asiatique, et ce malgré la présence du vecteur Ae. aegypti, et l’importation de nombreux cas infectieux lors de l’épidémie angolaise de 2015-2016 [24].
Il existe deux formes de transmission, la première en lien avec un cycle sylvatique de la maladie comprenant des primates non-humains et des moustiques forestiers, at-teignant sporadiquement des humains à proximité (appelée en anglais «jungle yellow fever») ; la seconde consiste en une transmission inter-humaine plus intense due à Ae. aegypti appelée «urban yellow fever»[22]. Chez les humains, l’infection par le virus de la fièvre jaune se traduit par une fièvre intense accompagnée de nausées, de vomis-sements, de céphalées et myalgies, ce après une période d’incubation de 3 à 6 jours. Ces symptômes durent 3 à 4 jours. Dans environ 15% des cas, une seconde phase toxique apparaît ensuite, caractérisée par un ictère lié à une insuffisance hépatique, des hémorragies oculaires et gastro-intestinales, parfois compliquées d’insuffisance ré-nale et de syndrome de choc. Dans ce cas, le décès survient dans 20 à 60% des cas [22]. La mortalité est plus faible en Afrique qu’en Amérique du sud, ce qui pourrait s’expliquer par des adaptations génétiques («co-évolution») à cette maladie originaire du continent Africain. L’infection confère une immunité à vie.

Virus de la dengue

Le virus de la dengue (généralement abrégé en DENV) est un virus à ARN ap-partenant au genre Flavivirus et qui comprend cinq sérotypes différents (le dernier, DENV-5, ayant été identifié en 2013). Il semble que les différents sérotypes de dengue aient divergé il y a environ mille ans, mais n’aient établi de transmission endémique chez l’humain que depuis quelques centaines d’années [25]. Auparavant, une forme sylvatique du virus circulait dans les populations de primates non-humains d’Afrique et d’Asie. Les premières épidémies de maladies cliniquement semblables à la dengue ont été décrites vers la fin du XVIIIème siècle en Asie et aux Amériques. A la fin du XIXème siècle, la dengue était présente dans de nombreuses zones tropicales et subtro-picales, et le virus a pu être isolé pour la première fois au Japon en 1943 (DENV-1) et à Hawaï en 1945 (DENV-2). Par la suite, la maladie est devenue endémique dans les pays d’Asie du sud et du sud-est et d’Amérique centrale du sud (Fig. 1.10), avec une augmentation importante du nombre global de cas rapportés à partir des années 1990 pour atteindre 60 millions d’infections symptomatiques et 10 000 décès par an en 2013 (Fig. 1.11) [26, 27, 28].
L’infection par DENV est asymptomatique dans 75 à 90% des cas, mais peut aussi se traduire après une période d’incubation de trois à sept jours par une période symptomatique en trois phases [29]. Une première phase est dominée par une fièvre indifférenciée ≥38.5◦C, parfois accompagnée de myalgies, d’arthralgies et d’éruptions cutanées. Ces symptômes durent pendant trois à sept jours. Vers la fin de cette période, l’infection peut dans certains cas causer un syndrome de fièvre hémorragique, carac-térisé par une hémoconcentration avec thrombocytopénie, une hypoprotéinémie, des épanchements pleuraux et péritonéaux, et parfois des manifestations hémorragiques. L’hypotension signe la complication en syndrome de choc, qui doit être recherché activement, et constitue le principal danger de la maladie, qui est fatale dans moins de 1% des cas. Ces troubles, liés à une altération de la perméabilité vasculaire, sont générale-ment spontanément résolutifs en deux ou trois jours sous traitement symptomatique. Un asthénie peut persister pendant plusieurs semaines.
L’infection par un sérotype donné confère une immunité temporaire contre tous les sérotypes, et une immunité à long terme contre ce sérotype seulement. La survenue de cas graves est plus fréquente si le sujet a été infecté par un autre sérotype dans le passé, en particulier chez les enfants, un phénomène appelé antibody-dependent enhan-cement [30]. Cette caractéristique a fortement compliqué la mise au point d’un vaccin, par crainte qu’il ne favorise l’apparition de formes graves. Un premier vaccin nommé Dengvaxia a été mis sur le marché en 2016. Une campagne de vaccination de masse dans les écoles, lancée aux Philippines, a toutefois du être suspendue fin 2017 après des suspicions de décès en lien avec des formes sévères de la dengue après vaccination [31].

Les virus émergents du futur

Ces émergences de maladies transmises par les moustiques du genre Aedes sont les conséquences de processus complexes, où toutefois un schéma général se dessine. On retrouve un virus circulant originellement dans un cycle enzootique, souvent en milieu forestier, impliquant des moustiques spécifiques et un réservoir animal (des primates non-humains pour chacun des virus décrits précédemment). Dans un tel cycle, des cas humains surviennent sporadiquement dans les communautés humaines vivant à proximité à l’occasion de piqûres par ces moustiques forestiers, dans un phénomène appelé effet spillover. Toutefois, ces infections sont généralement sans suite, les mous-tiques concernés ne piquant les humains que de façon occasionnelle, et les moustiques plus spécifiques des humains n’ayant pas de compétence vectorielle pour ces virus. Ce type de schéma, existant depuis des temps reculés pour la fièvre jaune en Afrique par exemple, mène à l’observation de cas sporadiques dans des populations rurales sur de longues durées (Fig. 1.15C et D). La situation est modifiée par la présence de fortes densités de moustiques adaptés à la vie à proximité des habitats humains, en particu-lier Ae. aegypti et Ae. albopictus. La multiplication des contacts entre ces vecteurs et des humains transitoirement infectés par des virus crée une pression de sélection, favo-risant l’adaptation génétique des virus «sauvages» à la transmission par les moustiques «domestiques», et in fine à l’apparition d’une transmission inter-humaine efficace et donc à des épidémies (Fig. 1.15B). L’extension géographique de la maladie nouvelle est alors fonction des échanges internationaux et de la présence ou non du vecteur com-pétent. Cette suite d’événements semble s’être produite anciennement pour la fièvre jaune et la dengue, beaucoup plus récemment et rapidement pour le Zika et le chi-kungunya. Elle a pu être mise en évidence plus formellement pour la souche IOL de chikungunya [42] et pour le Zika [52].

Ross, Macdonald et le développement des modèles de transmission du paludisme

Au cœur de la révolution microbiologique, Patrick Manson isole en 1877 le pa-thogène responsable de la filariose lymphatique dans des moustiques ayant piqué des malades en Chine, mettant en lumière le rôle possible d’invertébrés en tant que vec-teurs de maladies humaines. A la suite d’Alphonse Laveran, qui décrit ses observations du parasite du paludisme, l’hypothèse de la transmission de ce pathogène par les mous-tiques est formulée à plusieurs reprises dès les années 1880 [88]. En 1887, Ronald Ross démontre que cette maladie est transmise par les anophèles femelles [89]. Ross est le premier à faire le lien entre l’épidémiologie du paludisme dans les populations hu-maines et les relations complexes entre parasites, hôtes et vecteurs, et entreprend de synthétiser ces relations en utilisant des outils mathématiques. Dès 1908, il conçoit un premier modèle de transmission du paludisme [90]. Ce modèle initial est réexprimé par Alfred James Lotka sous la forme d’une suite récurrente reliant le nombre d’humains infectés au temps t + 1, noté It+1, au nombre d’infectés au temps t selon It+1 = V N ˆ It (N − It) − rIt (2.1). où N est le nombre total d’humains, r le taux de guérison et V est une mesure similaire à la capacité vectorielle, qui résume à la fois le nombre et l’activité des moustiques [91]. Ce modèle met en évidence la relation non-linéaire qui existe entre le nombre de vecteurs et l’intensité de la transmission. Ross suggère ainsi qu’il n’est pas nécessaire d’éliminer tous les moustiques pour contrôler la maladie, mais qu’il existe une popu-lation limite en dessous de laquelle la transmission soutenue du paludisme n’est plus possible, ce qui a des conséquences importantes pour les stratégies de lutte antivecto-rielles qui commencent à se développer à cette époque. Les travaux de Ross furent vite reconnus, et ont largement contribué au développement de l’épidémiologie quantita-tive, notamment influençant directement William Kermack et Anderson Mackendrick qui publient en 1927 leur théorie mathématique des épidémies, qui mènera au modèle.
Ces recherches furent poursuivies dans les années 1950 par George Macdonald, dans le contexte du lancement du programme d’éradication globale du paludisme par l’Organisation Mondiale de la Santé. S’appuyant sur les travaux de Ross, Macdonald aboutit à la formulation d’un modèle reflétant directement le cycle biologique du pa-rasite [93, 94]. Considérons d’abord la transmission du parasite des vecteurs vers les hôtes : si chaque anophèle femelle pique un humain a fois par jour, et qu’il existe une densité de m anophèles femelles par humain, chaque humain est piqué ma fois par jour (les notations de l’ensemble des équations du chapitre sont résumées dans le tableau 2.1). Si le parasite est présent dans les glandes salivaires d’une fraction z des vecteurs, et que chaque piqûre a une probabilité b de transmettre le parasite, on exprime le nombre de piqûres infectieuses par hôte et par jour par mabz. Si, enfin, on fait l’hypo-thèse qu’une infection ne peut se produire que chez un hôte non-encore infecté, et que la proportion d’hôtes infectés au temps t est w(t), alors w(t) augmente chaque jour de mabz(t)(1 − w(t)). D’autre part, une fois infectés, les humains guérissent à un taux r, c’est à dire que la durée moyenne de l’infection est de 1/r jours. La variation de la proportion d’infectés parmi les hôtes dans le temps peut être exprimée par l’équation
différentielle : dw(t) = mabz(t)[1 − w(t)] − rw(t) (2.2).
Considérons maintenant la transmission du parasite des hôtes vers les vecteurs. La population des vecteurs peut être divisée en deux catégories : y(t) la proportion de vecteurs infectés mais latents au temps t, c’est à dire chez qui le parasite n’a pas encore atteint les glandes salivaires et z(t) la proportion de vecteurs dont les glandes salivaires sont infectées par le parasite. Suivant un raisonnement similaire, les mous-tiques susceptibles piquent chacun a hôtes par jour, une proportion w de ces hôtes sont porteurs du parasite, et une proportion c des piqûres potentiellement infectieuses causent effectivement une infection, ce qui fait que la proportion de vecteurs latents y(t) augmente chaque jour de acw(t)[1−y(t)−z(t)]. Ces vecteurs nouvellement infectés deviennent à leur tour infectieux en une durée v, le temps que le parasite complète son cycle et atteigne les glandes salivaires (aussi nommée durée d’incubation extrinsèque), s’ils survivent jusque là. Si g est la mortalité des moustiques, alors une proportion e−vg des moustiques latents survivent assez longtemps pour devenir infectieux. On prend aussi en compte la mortalité des moustiques aux stades latents et infectieux. Les va-riations de y(t) et de z(t) dans le temps peuvent donc être résumées par les équations suivantes : dy(t) = acw(t)[1 − y(t) − z(t)] − acw(t − v)[1 − y(t − v) − z(t − v)]e−vg − gy(t) dt (2.3).
dz(t) = acw(t − v)[1 − y(t − v) − z(t − v)]e−vg − gz(t) (2.4).
Ce système de trois équations différentielles (2.2), (2.3) et (2.4) permet une description assez complète des dynamiques du paludisme en population, incluant la transmission d’hôte à vecteur et de vecteur à hôte, l’incubation du parasite chez le moustique, la mortalité des vecteurs et la récupération des hôtes.

Applications des modèles de Ross-Macdonald aux maladies transmises par les moustiques du genre Aedes

Les théories attachées aux modèles de Ross-Macdonald furent progressivement ap-pliquées à d’autres maladies que le paludisme (Fig. 2.3) [97]. Sur le sujet des maladies transmises par les moustiques du genre Aedes, une première tentative d’adaptation du modèle de Ross-Macdonald à la transmission d’un seul sérotype de dengue fut proposée par Bailey [98, 99]. La formulation de ce modèle reste proche, la principale adaptation consistant en la prise en compte d’une immunité acquise à long terme chez l’hôte après infection, qui n’existe pas pour le paludisme. On observe aussi des différences liées à l’influence des modèles de type SIR développés pour les maladies transmises directement d’hôte à hôte. On considère le nombre d’hôtes ou de vecteurs dans chaque compartiment plutôt que la proportion : la population d’hôtes de taille N est divisée en trois compartiments (nombre de susceptibles S, d’infectieux I et d’im-munisés ou résistants R) et la population de vecteurs de taille M est divisée en deux compartiments (nombre de susceptibles X et d’infectieux Z). De ce fait, plutôt que le taux d’augmentation de la proportion d’hôtes infectés mabz(1 − w) apparaissant dans l’équation (2.2), on considère le taux d’augmentation du nombre d’hôtes infectés, qui peut être reformulé selon : M Z I SZ mabz(1 − w)N = ab (1 − )N = ab . (2.21). On peut remarquer que cette formule n’est pas sans rappeler le terme β SIN intervenant dans la formulation dépendante de la densité du modèle SIR. Le modèle de Bailey est décrit par le système suivant :N − ab − f S (2.22) où f désigne à la fois le taux de mortalité et de natalité des hôtes, et A le taux (constant) de recrutement de nouveaux moustiques adultes (voir Table 2.1 pour la signification des autres symboles). Ce modèle fut utilisé pour étudier l’efficacité des pulvérisations d’insecticides dans l’air en « ultra-bas volume»à l’aide de simulations informatiques.
Le modèle de Bailey a à son tour été la base d’un certain nombre de modèles de transmission de la dengue et d’autres maladies transmises par les moustiques du genre Aedes, dont le chikungunya et le Zika qui nous intéressent ici. Concernant le chikungu-nya, les premiers travaux de modélisation inspirés de Bailey ont été publiés à la suite
à l’épidémie en deux vagues de la Réunion en 2005 et 2006. Bacaër (2007) propose une première analyse de l’épidémie de la Réunion en utilisant un modèle proche de celui de Bailey, apportant deux principales adaptations : prise en compte des périodes d’in-cubation extrinsèque et intrinsèque, et introduction d’un cycle saisonnal du nombre total de vecteurs par une fonction sinusoïdale [100]. Il obtient une estimation de R0 de 3,4. Dumont et coll. (2008) utilise un modèle différent, prenant en compte le stade aquatique du vecteur, introduisant ainsi la notion de capacité porteuse, c’est à dire la taille maximale de la population de vecteurs pouvant être supportée par le milieu [101]. Cette approche aboutit à des estimations de R0 dans différentes villes de la Réunion variant entre 0,89 et 2,12. Toutefois, ces deux articles se concentrent principalement sur des considérations théoriques générales, explorant les caractéristiques des modèles choisis, et les estimations de R0 sont obtenues en faisant varier les valeurs des différents paramètres.
D’autres travaux utilisant des modèles similaires se sont attachés par la suite à analyser de manière plus empirique les dynamiques de certaines épidémies de chikun-gunya. Poletti et coll. (2011) analyse l’épidémie italienne à l’aide d’un modèle incluant quatre stades de développement du moustique (œuf, larve, pupe et adulte) ainsi que l’effet de la température sur chaque étape de maturation, et aussi la possibilité pour un humain d’être infecté mais asymptomatique [39]. Cette fois, le modèle est ajusté aux données d’incidence par la minimisation d’une fonction de distance entre don-nées observées et données simulées, faisant intervenir le taux de déclaration des cas symptomatiques. Il s’agit donc d’un modèle ayant pour objectif premier l’inférence des dynamiques d’une épidémie spécifiques à partir de données de surveillance humaine en l’absence de mesures entomologiques, c’est à dire l’estimation des valeurs de para-mètres inconnus et de leur incertitude. Cette approche permet l’estimation du nombre de piqûres par moustique et par unité de temps (noté a dans les modèles précédents) selon différentes hypothèses concernant le nombre de sites de croissance disponibles pour les larves B (qui influence le nombre de moustiques femelles adultes par humain m), seul paramètre complètement inconnu puisque la littérature fournit des fourchettes de valeurs pour les autres paramètres : le taux de mortalité des vecteurs adultes g(T ) (dépendant de la température T ), les probabilités d’infection après piqûre dans les deux sens (b et c), la période d’incubation externe v et le taux de guérison r. Une valeur de R0 est alors calculée selon une formule liée à la structure du modèle choisi : rg v + g(T ) R0 = ma2bc v (2.23).

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Table des matières

1 L’invasion mondiale des moustiques du genre Aedes 
1.1 Origines, adaptations & invasions
1.1.1 Les moustiques du genre Aedes : éléments entomologiques
1.1.2 La domestication d’Aedes aegypti
1.1.3 L’invasion d’Aedes albopictus
1.2 Émergences & réémergences
1.2.1 Virus de la fièvre jaune
1.2.2 Virus de la dengue
1.2.3 Virus du chikungunya
1.2.4 Virus Zika
1.3 Virus émergents du futur
1.4 Prévention & contrôle
2 Modèles de transmission des maladies vectorielles 
2.1 Ross, Macdonald & le paludisme
2.2 Applications aux maladies transmises par Aedes
2.3 Modèles vecteur-implicites
2.3.1 Le modèle SIR
2.3.2 Le modèle SIR délayé
2.3.3 Approches basées sur l’intervalle de génération
3 Épidémiologie comparée du chikungunya et du Zika 
3.1 Présentation de l’étude
3.1.1 Données utilisées et justifications
3.1.2 Objectifs et stratégie d’analyse
3.1.3 Implémentation et validation du modèle
3.2 Article 1
3.3 Principaux résultats
3.4 Commentaires et perspectives
4 Épidémiologie prédictive 
4.1 Présentation de l’étude
4.1.1 Objectifs et stratégie d’analyse
4.2 Article 2
4.3 Principaux résultats
4.4 Commentaires et perspectives
Conclusions 
Annexes 
Annexe A : Informations complémentaires à l’article 1
Annexe B : Informations complémentaires à l’article 2

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