État de l’art sur les MOOC
Les MOOC (ou Massive Open Online Courses) sont des environnements informatiques dont la mission principale est de susciter et d’accompagner les apprentissages d’un grand nombre d’apprenants en ligne. Depuis le tout début de leur apparition, l’objectif recherché était de créer des environnements pouvant contribuer à la formation de différents publics, que ce soit des étudiants ou des personnes voulant se former tout au long de la vie. Il s’agit aussi d’étendre la formation à des personnes qui, pour des raisons sociales ou géographiques, en sont pour l’instant dépourvues. Bien que les MOOC aient vu le jour il y a quelques années déjà (2008), le champ de recherche associé n’a connu un réel essor qu’à partir de 2012 : année d’apparition des MOOC institutionnels (les xMOOC). Il est clair que ce développement offre une valeur ajoutée à l’éducation en général et aux principaux acteurs impliqués, à savoir l’enseignant et l’apprenant .
Pour les enseignants, il s’agit de bien réfléchir à l’acte d’apprentissage en le formalisant, le scénarisant et en le mettant en œuvre à travers de nouvelles technologies et modalités. Cela permet non seulement d’expérimenter les différentes approches et contenus pédagogiques, mais aussi de favoriser le partage et la réutilisation des contenus ainsi que les meilleures pratiques d’apprentissage et d’enseignement. Pour l’apprenant, de nombreux avantages peuvent être perçus, à savoir : la flexibilité, l’accessibilité, l’ouverture, la collaboration, l’autonomie, etc. L’objectif recherché étant de concevoir et développer des pratiques, des outils et des modèles variés qui prennent en compte des aspects complémentaires et pluriels de l’apprentissage en ligne, à travers des dimensions individuelles et/ou adaptatives, collaboratives, ludiques et massives.
La genèse des MOOC
Pendant les dix dernières années, le domaine des Environnements Informatiques pour l’Apprentissage Humain (EIAH), a connu des progrès importants au niveau de l’accès aux ressources et aux modalités d’apprentissages en ligne. Cette évolution a d’abord été marquée par l’accès sur le web, à des ressources multiples et variées à travers des portails ou des plateformes de formation à distance ou LMS (Learning Management Systems). Parallèlement à ces dispositifs, des entrepôts de ressources ont été créés pour permettre le partage et la mutualisation de contenus pédagogiques. Différentes recherches se sont multipliées pour produire des systèmes d’apprentissage adaptatifs. Avec l’arrivée des MOOC, nous assistons à une expansion substantielle du E-learning en général et des plateformes LMS en particulier. Les MOOC constituent un héritage historique et cohérent de la Formation Ouverte et à Distance (FOAD), l’objectif des paragraphes suivants n’est pas de retracer intégralement l’historique, mais de donner un aperçu de l’évolution de cette dernière décennie et ayant contribué explicitement au développement des dispositifs MOOC.
Des ressources éducatives libres aux MOOC
L’avènement du numérique et du web a permis de faire évoluer les moyens de diffusion et l’accessibilité aux formations à distance, et a contribué à la genèse de nouveaux dispositifs pédagogiques (Glikman, 2002). Les MOOC sont une continuation de la tendance à l’innovation et à l’utilisation de la technologie initiée par l’apprentissage à distance et l’apprentissage en ligne, pour offrir des opportunités d’apprentissage à un grand nombre d’apprenants (Daradoumis et al., 2013).
Au début des années 2000, une nouvelle forme d’ouverture d’accès aux savoirs et à la formation est mise en place par le Massachusetts Institute of Technology (MIT) à travers le projet OpenCourseWare (OCW). On parle de ressources éducatives libres (Open Educational Resources), qui sont définies comme des ressources numérisées offertes gratuitement et de façon ouverte pour les enseignants et les étudiants. Ces ressources peuvent être utilisées et réutilisées pour l’enseignement, l’apprentissage et la recherche. Néanmoins, ces dispositifs demeurent assez limités. Il ne s’agit que de documents et ressources conçus initialement pour des cours en présentiel mis à disposition sur une plateforme. Il n’y a donc pas d’interaction ni entre les enseignants et les apprenants, ni entre les apprenants eux-mêmes. Le concept de MOOC a été initié à partir des OER et des OCW (Atiaja & Proenza, 2016). Afin de comprendre la relation qui lie ces différents concepts, Lin et Cantoni (2017) proposent dans leur article une étude des aspects clés qui différencient les OER, les OCW et les MOOC (Figure 2). Selon ces auteurs, le contenu ouvert (open content) fait référence à tout support disponible en ligne, accessible publiquement, comme par exemple, un site web ou une vidéo YouTube. Le contenu ouvert, couplé à un but pédagogique spécifique donne lieu à une OER. Nous citons comme exemple : un ensemble de vidéo YouTube sur la programmation Orientée Objet, dont le but pédagogique est d’initier toute personne désirant apprendre les principes de base de la POO. L’organisation des OER en structure de cours contenant des activités pédagogiques, des objectifs d’apprentissages et une stratégie pour s’autoévaluer donne lieu aux OpenCourseWare.
Les OCW permettent donc de mettre à disposition en ligne et de façon ouverte des ressources et activités pour l’enseignement et l’apprentissage. Les MOOC ont cherché à aller plus loin en fournissant des cours complets et structurés autour d’un syllabus bien défini, avec des capsules vidéos, des quiz, des forums pour encourager l’engagement et l’interaction des apprenants, des devoirs notés et moyens d’évaluation, menant à des certifications ou non (Butler, 2012). Par conséquent, du point de vue historique, il convient de définir le MOOC dans l’extension des OER et des OWC, mais aussi, comme souligné plus haut, par rapport aux différents travaux sur les EIAH. Cependant, le manque d’encadrement et d’interactions entre étudiants dans les OCW va conduire à l’émergence d’une théorie de l’apprentissage fondée sur l’apprentissage collaboratif en réseaux prenant le nom de connectivisme (Cisel, 2016 ; Mangenot, 2014 ; Siemens 2005). Ce n’est qu’en 2010 que David Cormier initie l’acronyme MOOC qui désigne le cours «Connectivism and Connective Knowledge » (CCK08) mis en ligne en 2008 par Georges Siemens et Stephen Downes à l’Université du Manitoba au Canada (Sonwalkar & Maheshkar, 2015). Ce cours qui était offert gratuitement en ligne a pu rassembler plus de 2300 apprenants (Sonwalkar & Maheshkar, 2015). Afin de stimuler l’intérêt et la communication entre les apprenants, des vidéos et des activités sont régulièrement proposées, des groupes de discussion sont encouragés et incités, et l’utilisation des réseaux sociaux et la création de nouveaux supports ont été favorisées pour construire des connaissances. Ces types de cours en ligne ouverts et massifs ont ensuite été désignés sous le nom de cMOOC. C’est en 2012 que les MOOC connaissent leur réel développement lorsque les universités américaines adoptent ce concept. Sebastian Thrun, professeur à l’Université de Stanford et Peter Norvig, directeur de recherche chez Google (Atiaja & Proenza, 2016) ont lancé le MOOC « Introduction To Artificial Intelligence » auquel se sont inscrit plus de 160 000 apprenants (Brahimi & Sarirete, 2015). Suite à ce succès, plusieurs acteurs universitaires ont lancé de nouvelles plateformes MOOC : Coursera, Edx, Udemy, Udacity, etc. Cependant, tout MOOC mis en œuvre ne suit pas la même pédagogie où l’idée sous-jacente du connectivisme et de l’apprentissage en réseau proposé par Siemens. Il s’agit principalement de MOOC transmissifs qui ont vu le jour et sont connus sous le nom de xMOOC. Ces MOOC mettent en œuvre des approches d’apprentissage antérieures (béhaviorisme et constructivisme).
Quelques développements en France et au Maroc
Le contexte de cotutelle de ce travail de thèse, entre la France et le Maroc, nous incite à étudier plus particulièrement le développement des MOOC dans ces deux pays. En France, plusieurs initiatives ont vu le jour. En 2008, le MOOC ITyPa (Internet Tout y est Pour apprendre) fut lancé. C’est un MOOC proclamé connectiviste à l’issue du MOOC CCK08. En 2013, dans une vision plus large (exploitant à la fois les pratiques transmissives et connectiviste), le MOOC « gestion de projet » a été lancé par Rémi Bachelet de l’Université de Lille. France Université Numérique (FUN) propose la première plateforme MOOC française en 2014 avec plus de 350 MOOC hébergés et diffusés en 2017. Au Maroc, de nombreuses universités se sont lancées dans les MOOC et des initiatives se sont développées. En 2016, une coopération entre FUN et le ministère de l’éducation nationale au Maroc a eu lieu et vise initialement à lancer la plateforme Maroc Université Numérique (MUN) en marque blanche sur France Université Numérique. La plateforme a été lancée officiellement en 2018 et héberge actuellement quatre cours. Au niveau international, le nombre de MOOC a rapidement augmenté. En 2016, il a été rapporté qu’il y avait environ 6 850 cours offerts (Shah, 2016). Ce nombre ne cesse d’augmenter puisqu’on signale que début de 2019 plus de 10 000 (Meslin, 2018) à travers le monde entier.
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Table des matières
REMERCIEMENT
RESUME
ABSTRACT
LISTE DES FIGURES
LISTE DES TABLEAUX
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION GENERALE
ÉTAT DE L’ART SUR LES MOOC
1.1 La genèse des MOOC
Des ressources éducatives libres aux MOOC
Quelques développements en France et au Maroc
Quelques défis à relever
1.2 Variation des travaux de recherche autour des MOOC
Dropout et taux de rétention dans les MOOC
Classification de l’apprenant et questions sur son engagement dans les MOOC
Questions liées à la personnalisation et à l’adaptation
Analyse des traces massives d’apprentissage
Questions liées aux modalités d’évaluation
1.3 Terminologies et caractérisation des MOOC
Terminologie
Caractérisation des MOOC
1.3.2.1 Une caractérisation par l’innovation
1.3.2.2 Une caractérisation par le sens du concept
1.4 Typologie des MOOC
Typologie de base : xMOOC vs cMOOC
Extension de la typologie des MOOC
1.5 cMOOC : point sur le connectivisme
Les quatre piliers des activités orientées cMOOC
1.5.1.1 Aggregating (agrégation)
1.5.1.2 Remixing (remixage)
1.5.1.3 Repurposing
1.5.1.4 Feed Forwarding
Les nouveaux rôles de l’apprenant
1.6 Synthèse
ÉTAT DE L’ART SUR LA SCENARISATION PEDAGOGIQUE
2.1 Les concepts des scénarios et de la scénarisation pédagogique
2.2 Les aspects de la scénarisation pédagogique dans les cMOOC
Le modèle pédagogique connectiviste des cMOOC
Dimensions d’un scénario pédagogique cMOOC
2.3 État de l’art des langages et modèles de modélisation pédagogique
IMS-LD
Panorama des langages et outils de modélisation visuels
2.3.2.1 COMPENDIUMLD
2.3.2.2 MOT
2.3.2.3 LAMS
2.3.2.4 CADMOS
2.3.2.5 Mooditor
BPMN en tant que langage de modélisation pédagogique
2.4 Analyse des langages et outils de modélisation
Classification de Botturi et al. (2006)
Classification de (Nodenot 2007)
Choix de BPMN comme notation pour la scénarisation des cMOOC
2.5 Synthèse
PROPOSITION D’UN PROCESSUS DE CREATION ET DE DEROULEMENT D’UN CMOOC
3.1 Définition d’un processus de création et de déroulement d’un cMOOC
Définition des acteurs
3.1.1.1 L’apprenant
3.1.1.2 L’enseignant
3.1.1.3 Le facilitateur
3.1.1.4 L’administrateur
Vue générale du processus
3.1.2.1 Phase 1 : Pré-MOOC
3.1.2.2 Phase 2 : Conception
3.1.2.2.1 Définition des objectifs d’apprentissage
3.1.2.2.2 Formalisation du scénario pédagogique
3.1.2.2.3 Conception et production de ressources
3.1.2.3 Phase 1 : Déploiement
3.1.2.4 Phase 4 : Apprentissage
3.1.2.5 Phase 5 : Analyse
3.1.2.6 Phase 6 : Adaptation
3.1.2.7 Phase 7 : Rétrospective
3.1.2.8 Phase 8 : Gestion et administration
3.2 Positionnement de nos contributions dans le processus global de création et de
déroulement d’un cMOOC
CORPS, UN MODELE DE SCENARIO ORIENTE CMOOC
4.1 Méthodologie d’élaboration du modèle cORPS
4.2 Vue générale des niveaux de modélisation d’un scénario pédagogique
Niveaux M2 (le modèle cORPS)
Niveau M1 (le scénario pédagogique abstrait)
Niveau M0 : le scénario pédagogique opérationnalisé
4.3 cORPS Model : cMOOC ORiented Pedagogical Scenario Model
Niveau scénario
Niveau Activité
Niveau Acteur
Niveau Environnement
4.4 Synthèse
CONCLUSION GENERALE
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