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Modalités de consommation de l’héroïne
Le mode d’administration majoritaire de l’héroïne parmi les usagers rencontrés à Dakar est pulmonaire (fumer). Le mode nasale et le mode intraveineux sont minoritaires.
La méthode dite « chasser le dragon », la plus répandue dans le monde, n’est pas utilisée à Dakar et probablement pas au Sénégal. Un usager explique cela par le fait que la quantité d’héroïne vendue pour une dose est trop petite et ne permet pas l’usage de cette méthode qui nécessite, d’après son expérience en France, beaucoup plus de produit. Les usagers sénégalais préfèrent fumer l’héroïne en cigarette. L’héroïne est déposée à l’intérieur de celle-ci comme le décrivent les deux récits suivants : « Je prends une cigarette et j’enlève un peu du tabac et je mets la poudre dedans et j’aspire » ; « Tu prends le papier à rouler Rizla, tu coupes cigarette au milieu et tu mis la poudre à l’intérieur » [38].
Le rejet de l’injection est assez fort dans l’esprit de nombreux usagers comme le confirment les nombreux discours hostiles. La crainte des conséquences en termes de santé est très présente dans leurs discours : « Chacun ici a peur de s’injecter car toutes les gens qui ont injecté sont mort » ; « Je n’aime pas prendre de risques surtout avec la seringue. Je n’aime pas quoi ». Un usager assez âgé dit qu’il sait que « scientifiquement c’est plus efficace » par la puissance des effets en comparaison avec les autres modes d’administration, mais il dit avoir toujours évité d’y recourir par crainte des conséquences et parce qu’il « a toujours trouvé ça trop dégueulasse. La première personne qui l’a vu s’injecter elle n’était pas très présentable et ça m’a dégouté ». Un autre estime que l’injection n’est pas une pratique africaine « On Afrique on ne connaît pas trop ça ca se fume ou ça sniff. Ceux qui sont l’habitude de s’injecter ils ne sont pas des gens d’ici quoi » [38].
En dépit de ce discours radical contre l’injection, cette pratique est utilisée quotidiennement par une certaine catégorie d’usager. Selon les dires de certains parmi eux, elle semble même en augmentation parmi les héroïnomanes : « Quand tu prends ça plus tard tu vas finir par prendre la piqure quoi. À force tu prends tu prends tu te sens pas bien et les toxicomanes disent à l’autre vas-y prends la piqure. À force de fumer tu vas finir par prendre la piqure. C’est plus facile de tomber dans la piqure avec ça » [38].
Plusieurs raisons principales sont évoquées pour expliquer le développement de l’injection parmi les usagers de drogues tout particulièrement dans la région de Dakar :
La première est en lien avec un niveau de vie et de consommation, plus élevé qu’ailleurs. Comme l’explique Mostafa, dealer originaire de Casamance exerçant ses activités à Dakar, les usagers disposent comparativement de moyens financiers plus importants qu’ailleurs. Ils ont un accès plus facile et plus diversifié aux produits en quantités plus importantes. Cela se traduit par un développement plus rapide de la dépendance et de la tolérance aux produits consommés. Cette dépendance et cette tolérance à des niveaux élevés les conduisent presque inexorablement vers l’injection, soit pour retrouver les effets initiaux des produits ou parce que c’est plus économique : « Là-bas ils sont plus évolués que nous. Les gens qui s’injectent, ils ont pris l’héroïne, ils ont pris le caillou, après un moment ça ne donne pas d’effet quoi. Après un moment ils sont rentrés pour s’injecter ». C’est le cas aussi de Benta.
Benta a commencé à consommer de l’héroïne en 1986 exclusivement en sniff, puis est passée à l’injection à partir de 1992. Elle fut initiée à cette pratique par une copine qui venait de rentrer de France; celle-ci lui conseillait de recourir à ce mode d’administration car, disait-elle, « c’est mieux, tu sentais mieux la came». L’occasion s’est présentée lorsqu’un jour elle n’a trouvé de l’héroïne (brune) qu’en forme « patte » qu’elle ne pouvait pas sniffer. Après la première injection faite par la copine elle s’était sentie tellement mieux qu’elle préfère depuis avoir recours à cette voie d’administration. La copine lui a fait l’injection pendant 2 jours, puis elle a appris à le faire toute seule. Le sniff demeure néanmoins une voie de secours lorsque l’injection n’est pas possible, par exemple en cas d’absence de lumière ou lorsque l’endroit « n’est pas propice ». [38]
La seconde est en lien avec les effets de l’injection perçus comme étant plus forts que les autres modes d’administration. C’est ainsi que le formule Balchi, 45 ans, injecteur lui-même : « Si tu l’injectes tu le sens plus que quand tu le fumes. Il part directement dans le sang. Si tu le mets dans la seringue tu vas sentir la dose. Si tu l’injecte tu le sens aussitôt ». [38]
La troisième est plutôt d’ordre économique dans la mesure où l’injection, contrairement aux autres modes d’administration, n’occasionne aucune perte du produit. Comparativement donc, à quantité égale, les effets sont plus forts : « la quantité qu’ils vendent n’est pas beaucoup, à l’injection tu la sens mieux quoi » [38].
Enfin la transition vers l’injection peut être la résultante de l’influence des pairs. C’est le cas d’Amy, 29 ans, qui a fumé l’héroïne en cigarette exclusivement pendant cinq ans. Elle a ensuite effectué une transition vers l’injection. Elle raconte ainsi les circonstances dans lesquelles elle a été amenée à passer outre le tabou de l’injection : « j’étais en manque et j’avis pas d’argent. J’ai lui dit que je suis en manque il faut que tu me soigne. Elle m’a dit qu’elle avait qu’une seule part à partager avec moi. Il faut que tu le shoot. J’ai lui dit que je me shoot pas. Elle a tout pris et elle l’a mis dans la cuillère et a mis de l’eau et elle m’a dit tu choisie si tu veux te shooter ou pas. J’ai dit maintenant qu’est-ce que je vais faire. Elle a dit tu vas à la pharmacie pour demander des seringues. Elle m’a montré comment on fait ». « Rien de mieux (que l’injection) C’est la meilleure. C’est plus fort que la fumette », conclue-t-elle [38].
Cocaïne/Crack
Dénomination
Elle est désignée soit par une domination générique (cocaïne) ou par celle de « cristal ». La forme disponible est la forme base. Cette forme est le plus souvent désignée soit par le terme caillou ou par sa traduction Wolof, « Kher ». Le tout petit caillou peut être appelé « flash » car il se consomme en une seule prise. Il faut signaler que les termes de crack et de « free base » ne sont jamais utilisés pour désigner la forme fumable (base) de la cocaïne.[38]
Formes, disponibilité et prix
Quoiqu’elle soit disponible sur le marché, la forme chlorhydrate de cocaïne (poudre) est plutôt rare à trouver, du moins pour les usagers rencontrés. Ils sont le plus souvent en mesure d’en indiquer le prix à l’unité, qui se situerait pour le gramme entre 20000 à 22000 francs CFA (entre 30,7 € et 33,8 €) [38].
Presque exclusivement, ils achètent la cocaïne dans sa forme free base, dite « cuisinée », caillou/crack, destinée à être fumée. Les récits des usagers concordent sur le fait que les dealers ne vendent jamais la cocaïne en poudre [38].
Un dealer de cocaïne de Dakar, interviewé lors de son séjour de vacances au Cap Skerring en Casamance, décrit le procédé qu’il utilise lui-même ainsi que tous les autres dealers qu’il connaît pour transformer la cocaïne chlorhydrate (poudre) en cocaïne base (crack) : « Tu prends une gaz (gazinière). Tu prends une louche et tu le mets sur le feu. Tu mets un peu d’eau et du bicarbonate.
Tu mets la poudre. Tu prends un brin d’allumette. Apres un moment ça bouille tu collectes avec le brin. Le truc reste collé au brin. A la fin il ne reste que de l’eau. ». Pour 5grammes de poudre, il met 2 grammes de bicarbonate « trop du bicarbonate ça donne la diarrhée » dit-il [38].
En fonction de sa taille, un caillou peut être vendu entre 2500 et 5000 francs CFA (donc entre 3,8 € et 7,70 €). Toutefois ce caillou est le plus souvent divisé en deux ou en quatre par l’usager, ce qui correspond à un prix moyen de la dose d’environ 1 200 francs CFA. Ce prix est comparable au prix moyen d’un paquet d’héroïne.
Même s’ils en connaissent tous le procédé, aucun des usagers rencontrés ne transforme lui-même la poudre en caillou. Ces usagers estiment que cette transformation est l’œuvre des dealers.
Cuisiner » la cocaïne marque ainsi, au plan symbolique tout au moins, la frontière entre usager et dealer [38].
Modalités de consommation de la cocaïne/crack
Trois méthodes principales sont utilisées pour fumer la cocaïne/crack :
Dans une cigarette : le caillou est écrasé et transformé en poudre qui sera mélangée au tabac « comme un joint de chanvre » ;
Dans une « Tama » (pipe artisanale, en wolof) : le plus souvent fabriquée
partir d’une boite d’allumette qu’on couvre le papier d’aluminium pris d’un (Chwingum Hollywood) dans lequel on perce quelques trous, lesquels sont ensuite couverts de cendres sur lesquelles le caillou est déposé. Grâce à un briquet, le caillou est chauffé. La vapeur qui s’en dégage est inhalée. Comme les papiers d’aluminium sont très fragiles, les usagers en fabriquent autant des fois qu’ils sont amenés à fumer. Il est à noter que le « Tama » est plus usité parmi les usagers fumeurs de caillou car il est plus spécifique à cette pratique que «Tokokai » qui semble désigner n’importe quelle pipe, peu important alors le produit utilisé [38].
Dans un verre converti en pipe : le procédé est décrit ici par un usager qui avait l’habitude d’utiliser en France le doseur de Pastis en vogue chez les usagers de crack parisiens. Dès son retour au Sénégal, il dit avoir été contraint de trouver un substitut à cet objet : « J’utilise des matériels locaux : je prends un verre et prends de l’aluminium et je le scotch. Je fais des petits trous à côté pour aspirer. Je prends un élastique pour que l’air n’échappe pas. De l’autre côté je fais une dizaine de trous et je fais un grande trou pour aspirer. Je prends une boite d’aspirine et je mets l’aluminium. Je prends un stylo Bic, et je le $casse, pour aspirer. Je fais des petits trous et je mets des cendres et je mets le caillou au dessus et je tire » [38].
Utiliser un verre comme pipe permet comme pour le doseur de récupérer après plusieurs consommations, le résidu, dit « huile », tant apprécié par les usagers de crack, et de le fumer. Ce faisant, les usagers économisent le prix d’une dose : « quand je fume un jour ou deux le troisième jour je peux récupérer (le huile) et ne pas acheter » et consommer en même temps un produit perçu par les usagers comme beaucoup plus puissant que le caillou classique [38].
Modalités de partage des matériels d’injection et situation à risque de contaminations par le VIH ou le VHC
La forme d’héroïne disponible à Dakar depuis 2002 environ (chlorhydrate, blanche) se prépare pour l’injection tout simplement par un mélange dans un récipient (cuillère) à l’eau froide uniquement sans chauffage ni ajout d’un acide [38].
Les risques inhérents au partage de la seringue sont bien identifiés. Pourtant « des cas de force majeure » conduisent fréquemment les usagers à y avoir recours. En effet, dans les conditions de consommation et d’injection de tous les jours, ces cas sont assez fréquents, notamment lorsque les pharmacies sont fermées : « Parce que des fois il n’y a pas des seringues parce que c’est la nuit et pharmaciens sont fermés et tu es obligé de faire ça » [38].
Contrairement au cas des seringues, les risques liés aux partages des autres matériels d’injection sont peu ou pas connus. Nombreux sont qui croient que «
Ce que dangereux est le partage de seringues. C’est ça que dangereux ». Cette croyance semble être très commune et partagée parmi les usagers, notamment lorsqu’il s’agit de partage de la cuillère (mettre le produit dans le même récipient et aspirer chacun un volume convenu), de conserver les filtres pour les réutiliser en cas de manque, de céder ses propres filtres à un autre usager pour le dépanner, d’utiliser les filtres déjà utilisés par un autre usager pour soulager un état de manque. Outre ces pratiques à risques, il existe des situations potentiellement à risques comme s’injecter dans des lieux de consommation collectifs comme les squats, les maisons abandonnées ou chez le dealer, car achat et consommation s’y déroulent dans le même espace en présence d’autres injecteurs [38].
Disponibilité des seringues dans les pharmacies
Les seringues sont légalement en vente libre à un prix abordable, de 100 à 150 francs CFA. Le type de seringues communément utilisée est le 1cc dite « à insuline » (aiguille fixe). Même si les seringues sont en vente libre, l’attitude de certains pharmaciens constitue souvent une barrière à l’acquisition. En effet, certains refusent d’en vendre aux personnes qu’ils soupçonnent d’être usagers de drogues. « Ils disent qu’il n’ya pas ». Les usagers de leur côté évitent d’aller acheter des seringues en pharmacie car « il y a une gêne »[38].
Epidémiologie descriptive
La consommation de drogues illicites doit être considérée comme une situation sociale et sanitaire qui nécessite une prévention, un traitement et des soins durables. Telle est l’une des principales conclusions qui ressort du Rapport mondial sur les drogues 2015 publié le 26 juin par l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) [39].
Présenté à l’occasion de la Journée internationale de la lutte contre l’abus et le trafic de drogues, le rapport offre un aperçu détaillé des dernières évolutions en matière de consommation de drogues, de production, de trafic et de conséquences sanitaires. Près de 27 millions de personnes seraient dépendantes aux drogues, dont la moitié aux drogues injectables. En 2013, on estimait à 1,65 million le nombre de consommateurs de drogues injectables vivant avec le VIH (environ 13,5 %) ; de plus, les femmes qui consomment des drogues injectables, bien que moins nombreuses, sont souvent beaucoup plus susceptibles d’être infectées que les hommes [39].
Dans un chapitre consacré au VIH, le rapport note également qu’il existe une préoccupation majeure sur l’accès au traitement antirétroviral et aux programmes de réduction des risques pour les consommateurs de drogues injectables et que seulement un consommateur sur six souffrant de troubles liés à la consommation de drogues ou de dépendance bénéficie de ces programmes, qui incluent l’échange d’aiguilles et de seringues et le traitement substitutif aux opiacés. Le rapport reconnaît que des progrès ont été accomplis dans la baisse de la transmission du VIH chez les consommateurs de drogues injectables : les nouveaux cas de VIH diagnostiqués au sein de ce groupe ont chuté d’environ % entre 2010 et 2013. Toutefois, la communauté internationale est bien loin de l’objectif mondial de réduire la transmission de 50 % d’ici 2015, tel qu’il avait été défini dans la Déclaration politique de 2011 de l’ONUSIDA sur le VIH/sida.
Les implications de la consommation de drogues illicites pour la santé publique mises en avant dans le rapport ont été examinées en détail lors d’une réunion d’information spéciale à Genève organisée par l’ONUDC, l’ONUSIDA et l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). À cette occasion, le Directeur exécutif adjoint de l’ONUDC Aldo Lale-Demoz a insisté sur la nécessité d’une approche sur plusieurs fronts qui aille au-delà du démantèlement des réseaux criminels. « Il faut aussi en faire plus pour promouvoir l’importance de considérer et de traiter la consommation de drogues comme une situation sociale et sanitaire qui nécessite une prévention, un traitement et des soins durables », a-t-il déclaré [39].
Les personnes qui consomment des drogues injectables représentent environ 30 % des nouvelles infections à VIH en dehors de l’Afrique subsaharienne et deux sous-régions présentent des taux sensiblement élevés d’infection à VIH chez les consommateurs de drogues injectables : environ 29 % dans le sud-ouest de l’Asie et environ 23 % dans l’est et le sud-est de l’Europe, une région qui concentre environ 40 % du chiffre mondial de ces consommateurs vivant avec le VIH, principalement en Russie et en Ukraine[39].
En 2011, l’enquête UDSEN avait permis d’estimer la taille de la population de CDI à 1324 personnes à Dakar ainsi que les prévalences du VIH à 5,2%, du VHC 23,3% et 7,9% pour le VHB, beaucoup plus élevées que dans l’ensemble de la population, montrant une épidémie d’hépatites C. Une équipe de terrain (dite équipe OUTREACH) a été mise en place dans l’objectif de développer des activités de prévention et d’établir des rapports avec les CDI. À cause de la prévalence du VIH et des besoins de santé exprimés par les CDI, un plaidoyer a été développé à partir de 2010 auprès des institutionnels, des partenaires financiers et techniques, surtout dans le champ de la lutte contre le sida, pour mettre en place un dispositif de prise en charge, ce qui a conduit à la construction et l’ouverture du CEPIAD, au sein du service de psychiatrie du CHU de Fann [63].
Epidémiologie analytique
Il s’agit de l’ensemble des facteurs poussant l’individu à consommer des drogues.
Facteurs psychiques individuels
La psychopathologie et le comportement
Le signe précurseur comportemental le plus important est le syndrome de « l’enfant difficile ». Ce syndrome comporte trois dimensions : le niveau d’activité, l’émotivité et la sociabilité.
Le niveau d’activité présente plusieurs aspects :
Hyperactivité-impulsivité : enfant trop agité, incapable de rester assis et de supporter les frustrations ;
Problèmes d’attention et de socialisation : capacité de concentration réduite, des résultats scolaires catastrophiques malgré un niveau d’intelligence se situant dans les normes ;
Comportement antisocial : comportement agressif, destructeur, vols ;
Difficultés d’apprentissage : retard dans l’apprentissage de la lecture et de l’écriture.
L’affectif est une composante du syndrome d’enfant difficile. La labilité émotive, les personnalités extraverties sont des facteurs prédictifs du risque de consommation de substances psychoactives. La coexistence de signes dépressifs et les difficultés relationnelles représentent des facteurs de risque directs.
La sociabilité et la recherche continuelle de nouvelles relations sont souvent perçues comme des facteurs de risque prédictifs. Il s’agirait plutôt d’une pseudo- socialisation. Les toxicomanes invertissent de manière emphatique la substance psychoactive et toutes leurs recherches de plaisir sont orientées vers le plaisir de la drogue [19].
Les attentes
Elle est la recherche d’expérience et de sensations nouvelles, désir de s’affronter au risque et de briser les interdits, quête de plaisir, de la performance, recherche plus systématique de certaines sensations jugées agréables ou qui pallient un manque, remédient à un mal-être [15].
Facteurs socioculturels
Les facteurs familiaux
Les mauvaises pratiques de gestion familiale comprennent le manque d’attente claire relativement au comportement, le manque de surveillance des enfants par leurs parents(ou ils sont et avec qui ils sont).
Le milieu familial est le plus souvent en cause : absence de père ou de père alcoolique, mère surprotectrice, parfois dépressive, avec comportements mal adaptés (laxistes ou coercitifs). Mais le milieu extrafamilial joue aussi un rôle : prison, chômage, ennui… [12].
Facteurs démographiques
Des populations immigrées et les minorités ethniques trouvent souvent refuge dans la drogue. Aux Etats Unies, la population hispanique et les Afro-américains représentent la majeure partie des consommateurs de drogues dures.
Des recherches sur le rôle de l’acculturation entre parents et enfants mettent en évidence un rapport entre la première génération d’immigrés et leurs descendantes. Cas classique en France où l’on retrouve les mêmes données au sein de la population maghrébine [19].
PREVENTION
La prévention primaire
Elle s’appuie sur l’organisation internationale du contrôle de la production et de l’approvisionnement des stupéfiants ; des mesures nationales adapter la législation aux situations locales : l’amélioration des conditions de vie et de loisirs de la jeunesse l’information sélective des adolescents. Mais aussi sur la sensibilisation sur les risques liés à l’usage des drogues injectables.
Prévention secondaire
Elle s’adresse à ceux qui ont déjà gouté à des stupéfiants.
Un guide de l’OMS fixe des objectifs à destination des pays pour l’accès universel aux services de prévention, de traitement et de soins pour les consommateurs de drogues injectables [47]. Ce guide technique fournit des conseils aux pays pour la poursuite des efforts afin de prévenir et traiter l’infection par le VIH chez les personnes qui consomment des drogues injectables. Le guide consacre un chapitre aux références d’évaluation des interventions de réduction des risques. L’évaluation portera sur les diverses stratégies développées par la politique de réduction des risques, à savoir :
Programme d’échange de seringues
Traitement de substitution aux opiacés et autres traitements de la dépendance
Dépistage du VIH et conseil
Traitement antirétroviral
Prévention et traitement des infections sexuellement transmissibles
Programmes de distribution de préservatifs aux consommateurs de drogues injectables et à leurs partenaires
Information, éducation, et communication ciblées pour les injecteurs/consommateurs de drogues injectables et leurs partenaires sexuels
Prévention, vaccination, diagnostic et traitements des hépatites virales
Prévention, diagnostic et traitement de la tuberculose.
Elle portera aussi sur les modes d’administration de ces stratégies. En effet, cette politique a pour objectif de favoriser l’accès, à des populations éloignées, à des structures de soins par la mise en place de dispositifs allant à la rencontre des individus. L’évaluation veillera à ce que la politique de réduction des risques prenne en compte les changements des pratiques (produits et modalités de consommation), des profils des consommateurs ainsi que des contextes de consommation [48].
Prévention tertiaire
Elle propose des services thérapeutiques en centres hospitaliers ou en centres spéciaux ainsi qu’une réinsertion sociale [16].
Il s’agit de la prise en charge des complications de la toxicomanie qui peuvent être d’ordre infectieuses (VIH, VHB, VHC, abcès aux sites d’injections et les septicémies), psychiatriques, cardio-vasculaire, neurologique, pleuro-pulmonaire, ORL etc…
Le traitement par la substitution, les interventions psychosociales, et les cures de désintoxications sont mises en avant afin de répondre aux besoins spécifiques de chaque toxicomane et sont combines afin de garantir l’efficacité du traitement à long terme, réduire la récidive et favoriser la réinsertion sociale [58].
La méthadone est promue à l’échelle mondiale comme un médicament essentiel dans le cadre des interventions basées sur des preuves pour traiter l’addiction à l’héroïne et réduire les risques d’infection par le VIH et les virus des hépatites. Elle a été utilisée à partir de 1960, et surtout des années 1980, comme traitement de substitution aux opiacés (TSO) chez les consommateurs d’héroïne. Son introduction récente au Sénégal dans le cadre d’un projet pilote et dans un contexte de gestion essentiellement répressive des drogues a nécessité de multiples adaptations [61].
Au 1er décembre 2014, le centre de prise en charge intégré des addictions de Dakar (CEPIAD) était inauguré avec l’objectif principal d’offrir une prise en charge globale aux personnes dépendantes de drogues dans le respect des droits humains. L’approche combine la réduction des risques (RDR : prévention par la sensibilisation et la mise à disposition de préservatifs, kits d’injection, méthadone, etc.), le dépistage et traitement des pathologies et des activités d’intégration ou de convivialité. Il s’agit du premier centre d’addictologie en Afrique de l’Ouest francophone qui propose la méthadone alors qu’en Afrique, seuls quelques programmes en Afrique de l’Est et en Afrique du Sud ont cette expérience [63]. En février 2017, 1112 dossiers de consommateurs de drogues injectables (CDI) ont été ouverts au CEPIAD dont 252 sont sous méthadone et environ 100 sont en attente d’être inclus dans le programme.
La dispensation de la méthadone repose sur une prise quotidienne en ambulatoire sur place afin d’assurer l’observance du traitement. Cette mesure est similaire aux modalités de dispensation dans le cadre de la stratégie DOT (Directly Observed Treatment) promue par l’OMS pour traiter la tuberculose dans les services de santé primaires [62]. Dispensée au CEPIAD sous forme de sirop, la méthadone est délivrée sous contrôle d’un membre de l’équipe de la pharmacie, du lundi au vendredi de 9 heures à 13 heures.
L’emport de la méthadone à domicile les week-ends et jours fériés est expérimenté depuis septembre 2016.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : GÉNÉRALITES SUR LES DROGUES
I. TOXICOMANIE
1. Définition de la toxicomanie et des conduites addictives
2. Dépendance et abus
3. Classification des substances psychoactives à l’origine de dépendances
II. LES DROGUES INJECTABLES
1. Héroïne
2. Cocaïne/Crack
3. Modalités de partage des matériels d’injection et situation à risque de contaminations par le VIH ou le VHC
4. Disponibilité des seringues dans les pharmacies
5. Données pharmacologiques et biologiques
III. EPIDEMIOLOGIE
1. Epidémiologie descriptive
2. Epidémiologie analytique
a. Facteurs psychiques individuels
b. Facteurs socioculturels
IV. PREVENTION
1. La prévention primaire
2. Prévention secondaire
3. Prévention tertiaire
DEUXIEME PARTIE
1. But
2. Objectifs
II. CADRE DE L’ETUDE
1. Genèse du centre
2. Localisation et description du CEPIAD
3. Objectifs du CEPIAD
4. Fonctionnement du centre
5. Circuit de la prise en charge des consommateurs au centre
6. Critères d’inclusion
7. Composition en ressources humaines du centre
III. METHODOLOGIE
1. Type et période d’étude
2. Population d’étude
3. Recrutement
4. Collecte de données
5. Saisie et analyse des données
6. Considérations éthiques
IV. RESULTATS
1. Résultats descriptifs
2. Résultats analytiques
V. DISCUSSION
1. CARACTÉRISTQUES SOCIODÉMOGRAPHIQUES DES USAGERS DE DROGUES INJECTABLES PAR LES UDI SUIVIS AU CEPIAD
3. FACTEURS ASSOCIÉS À LA SURVENUE DE PERDUS DE VU
4. FACTEURS ASSOCIÉS À LA SURVENUE DE TROUBLES PSYCHIATRIQUES CHEZ LES USAGERS DE DROGUES INJECTABLES
CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS
REFERENCES
ANNEXES
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