Mobilité et redistribution à long terme des éléments traces métalliques exogènes dans les sols

Les éléments traces sont les 68 éléments minéraux, constituants de la croûte terrestre, dont la concentration est, pour chacun d’eux, inférieure à 0,1% (Alloway, 1990c; Baize, 1997b). A eux tous, ils ne représentent que 0,6% du total des éléments. L’expression « élément trace métallique » (ETM) renvoie aux métaux (densité atomique supérieure à 6 g cm-³) présents à l’état de traces (cadmium, chrome, cuivre, nickel, zinc, plomb…).

Les éléments traces métalliques dans les sols proviennent de différentes sources. Les uns, endogènes, sont hérités du matériau parental et redistribués dans les sols par les processus pédogénétiques. Ils constituent ce qu’on appelle le fond pédo géochimique (Baize, 1997b). Les autres, exogènes, sont d’origine anthropiques (industries, épandages) ou naturelles (poussières, volcanisme) (Alloway, 1990c; Juste et Robert, 2000). Les principales sources d’ETM anthropiques sont les industries, l’urbanisme (chauffage, eaux usées, boues de station d’épuration), les transports (routiers, fluviaux), l’agriculture (fertilisants, herbicides, lisiers) (Alloway, 1990c). D’une manière générale, ces dernières décennies, la quantité d’ETM apportés aux sols a augmenté, entraînant des accumulations plus ou moins fortes de ces éléments (Alloway, 1990c; Juste et Robert, 2000; Lamy et al., 2005). On peut distinguer deux types de pollutions, des pollutions dites ponctuelles, généralement réduites à la parcelle et le plus souvent apportées par des effluents agricoles (lisiers), industriels ou urbains, et des pollutions plus diffuses, de taille régionales, dont le vecteur est le plus souvent atmosphérique (fumées de centrales thermiques, d’usines métallurgiques…).

Cette accumulation d’ETM dans le sol peut avoir des impacts néfastes sur l’environnement, avec, selon les cas, un risque de contamination des cultures, des eaux de surface ou des eaux souterraines. En effet, si la plupart de ces éléments sont nécessaires à la vie, à l’exception de Pb et de Cd pour lesquels on ne connaît pas à l’heure actuelle d’utilité biologique, ils sont toxiques à forte concentration (Mc Bride, 1994).

Une fois dans le sol, les ETM peuvent être prélevés par les végétaux, ou bien être redistribués dans le sol, en surface par l’érosion et le ruissellement, ou en profondeur, en migrant avec la solution du sol (Figure 1). Leur devenir dans l’environnement est très variable selon l’élément considéré.

Concernant leur redistribution dans le sol, les ETM sont, en surface, redistribués latéralement par le labour et l’érosion diffuse (Korentajer et al., 1993; Zhao et al., 2001; Zang et al., 2003). A notre connaissance, seuls Yingming et Corey (1993) et Mc Grath et Lane (1989) ont estimé les quantités de métaux redistribués par le travail du sol. Yingming et Corey (1993) ont estimé que le travail du sol redistribuait, en une vingtaine d’années 15% à 20% des ETM apportés ; et Mc Grath et Lane (1989) estiment cette proportion à 21-28% sur une quarantaine d’années.

Historique de l’épandage des eaux usées en région parisienne

Au milieu du 19ème siècle, le principe d’épuration des effluents urbains de la ville de Paris par le sol a émergé à la fois comme solution au problème de la pollution grandissante de la Seine et comme solution au déficit des matières organiques, révélé par les agronomes, dont souffraient les terres agricoles. Malgré de vives polémiques faisant s’affronter agronomes, urbanistes, hygiénistes, agriculteurs ou riverains, le principe du recyclage des eaux usées par épandage sur les terres agricoles prévalut finalement sur le rejet des effluents en rivière. Suite aux plaintes de riverains concernés par les épandages d’eaux usées de la ville de Paris, une enquête d’utilité publique fut lancée en 1876 pour recenser les arguments des plaignants et étudier la salubrité du procédé d’épandage. Les travaux d’irrigation par les eaux usées brutes furent déclarés d’utilité publique en 1894. Le système mis en place visait à répondre à quatre objectifs : débarrasser la ville de Paris de ses  immondices, éviter la perte d’éléments fertilisants, limiter la pollution grandissante de la seine, récupérer l’eau épurée par le sol pour la distribuer aux parisiens. En 1894, on épandait 30 millions de m³ d’eau sur une surface de 900 ha (soit une lame d’eau moyenne de 3,3 m) (D’Arcimoles et al., 2000). Aux environs de 1910, on compte 220 millions de m³ épandus sur 5500 hectares de terres irriguées par l’épandage des effluents parisiens répartis de part et d’autre de la Seine, et recevant en moyenne 40000 m³ par hectare et par an (soit une lame d’eau moyenne de 4 m) (D’Arcimoles et al., 2000). Devant l’intensification des épandages, les controverses ne cesseront de s’amplifier jusqu’en 1930, date de la construction de la première station d’épuration à Achères

Le cas de la plaine de Pierrelaye

La plaine de Pierrelaye est une plaine agricole qui se situe dans la banlieue nord-ouest de Paris. L’irrigation par les eaux usées y a duré de 1899 à 2002, date à laquelle l’utilisation d’eau clarifloculée a été imposée sur le site (Vedry et al., 2001). A l’origine, c’était une plaine entièrement maraîchère, puis la partie nord fut convertie en maïsiculture dans les années 70, et la partie sud en 2000, suite à l’interdiction faite par le Conseil Supérieur d’Hygiène de France de vendre de la production maraîchère de ce site (Baize et al., 2002).

Les polluants métalliques apportés au cours d’un siècle d’irrigation par les eaux usées de la Ville de Paris sur des sols agricoles, ou par toute autre source dans un tel contexte péri-urbain, ont été progressivement incorporés dans l’horizon superficiel, soit directement avec l’infiltration de l’eau, soit mécaniquement suite aux labours annuels et retournement des croûtes de particules solides séchées en surface. Cette incorporation progressive a abouti à un horizon de labour fortement anthropisé, dont la contamination n’est pas influencée par la pédologie.

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Table des matières

Introduction
I. Problématique
II. Objectifs
III. Contexte
III.1. L’utilisation des eaux usées
III.2. Conséquences sur les sols
III.3. Conclusion
Chapitre 1 : Présentation du site et stratégie d’échantillonnage
I. Historique de l’épandage des eaux usées en région parisienne
II. Le cas de la plaine de Pierrelaye
III. Choix d’un site d’étude et stratégie d’échantillonnage
Chapitre 2 : Distribution spatiale des ETM dans l’horizon de surface
I. Enhancing spatial estimates of metal pollutants in raw wastewater irrigated fields using a topsoil
organic carbon map predicted from aerial photography
I.1. Abstract
I.2. Introduction
I.3. Material and methods
I.3.1. The site and the survey
I.3.2. Kriging methods
I.3.3. Validation criteria
I.4. Results and discussion
I.4.1. Summary statistics
I.4.2. Variography analysis and spatial prediction of TE by ordinary kriging
I.4.3. Trace elements (TE) spatial distributions estimated by cokriging
I.4.4. Trace elements (TE) mapping by collocated cokriging method
I.4.5. Kriging TE using SOC map as an external drift
I.4.6. Validation results
I.4.7. Sensitivity of KED and CC methods to the sampling density of the target
variables (TE)
I.5. Conclusion
II. Recherche des facteurs responsables de la structure observée
III. Conclusion
Chapitre 3 : Distribution des ETM en profondeur
I. Etude à l’échelle des constituants : devenir à long terme des métaux exogènes dans un Luvisol sableux soumis à une irrigation massive par des eaux usées brutes
I.1. Résumé
I.2. Introduction
I.3. Matériel et méthodes
I.3.1. Les sols
I.3.2. Extraction et dosage des ETM
I.3.3. Spéciation des ETM exogènes
I.4. Résultats et discussion
I.4.1. Localisation des ETM dans le sol témoin
I.4.2. Spéciation des ETM exogènes dans le sol contaminé
I.5. Conclusion
II. Etude à l’échelle du solum : reconstitution des apports en éléments traces métalliques et bilan de leur migration dans un Luvisol sableux soumis à 100 ans d’irrigation massive par des eaux usées brutes
II.1. Résumé
II.2. Introduction
II.3. Matériel et méthode
II.3.1. Description du site
II.3.2. Prélèvements de sol et analyses
II.3.3. Stocks d’ETM dus à la contamination
II.3.4. Reconstitution des apports d’ETM en surface
II.3.5. Calcul des incertitudes
II.4. Résultats et discussion
II.4.1. Estimation des stocks de polluants
II.4.2. Reconstitution des apports par le Cr
II.4.3. Discussion sur la mobilité relative des ETM au sein du solum
II.5. Conclusion
III. Etude à l’échelle de la toposéquence : déterminisme de la distribution tridimensionnelle du zinc dans un sol sableux suite à 100 ans d’épandage d’eaux usées brutes
III.1. Résumé
III.2. Introduction
III.3. Matériels et méthodes
III.3.1. Présentation du site de Pierrelaye
III.3.2. Les sols
III.3.3. Stratégie d’échantillonnage
III.3.4. Estimation du fond pédo-géochimique naturel local
III.3.5. Analyses
III.4. Résultats et discussion
III.4.1. Distribution horizontale
III.4.2. Distribution verticale
III.5. Conclusion
Conclusion générale
Perspectives
Bibliographie
Annexe

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Comments (1)

  1. Je suis intéressé par cet article à utiliser comme référence car je travaille pratiquement sur la même thématique mais dans un contexte de l’exploitation minière en République Démocratique du Congo, précisément à Kolwezi. Je suis Doctorant à la faculté des sciences agronomiques, au département des ressources naturelles, de l’Université de Lubumbashi en partenariat avec l’Université de Liège en Belgique.