Méthode d’analyse du lien entre transport et productivité
Les études analysant les interrelations entre les transports et le développement économique s’articulent autour de deux grands axes, selon qu’on analyse l’effet d’un projet particulier ou qu’on s’intéresse à l’efficacité globale du système de transport dans son intégralité.
Analyse coût – avantage :La première est formée par l’analyse coût – avantages à laquelle les investissements routiers et ferroviaires sont soumis dans la plupart des pays. Ces études ex-ante projet par projet sont primordiales, bien qu’elles laissent parfois dans l’ombre des externalités aussi multiples que diffuses. Par ailleurs, le calcul économique repose sur des hypothèses indispensables mais largement conventionnelles. Le choix des valeurs tutélaires ne va pas de soi. Par exemple, les gains de temps représentent souvent une part importante des avantages identifiés. L’estimation de la valeur du temps pose des difficultés, qui ne sont toutefois pas insurmontables. Normalement, cette analyse coût – avantage est utilisée à l’échelle du projet.
Modèle de fonction de production :La seconde démarche possible étudie les relations économétriques à partir de fonctions de production macro – économiques. Dans les années 1980 et 1990, les décideurs et les économistes se sont penchés sur le rôle que joue l’infrastructure dans la dynamisation de la croissance économique et de la productivité. Depuis, de nombreux économistes ont suivi la théorie néoclassique de la production pour évaluer le rapport entre infrastructure et productivité. Nombre d’économistes ont apporté leur contribution à cette théorie en incluant d’autres facteurs de production tels que l’infrastructure. L’infrastructure est considérée comme un intrant important de la production, parce qu’en l’absence, par exemple, de sources d’énergie et de routes, les fabricants seraient considérablement moins productifs, voire pas du tout. Dans l’analyse de l’influence de l’infrastructure du transport sur la productivité des régions, on utilise soit des données de coupe instantanée soit de série chronologique. L’usage des données de coupe instantanée dans l’analyse peut être catégorisé comme le modèle statique, par contre celui des données de série temporelle peut être considéré comme le modèle dynamique. Les auteurs relient, à travers de notion d’élasticité, une grande caractéristique du développement des infrastructures à une grandeur de type macroéconomique (PIB d’une région).
Méthode d’analyse du lien entre taille de ville et productivité
Considérant l’agglomération économique, la grande ville a une ressource humaine importante. Celle a un effet positif pour la productivité de la ville. Plus la ressource humaine est concentrée dans une ville, plus il est facile aux entreprises de trouver des employés compatibles avec leurs besoins et cela augmentera la qualité du travail.
L’économie urbaine fournit la théorie de base en vue d’analyser comment la forme urbaine influence l’économie (Marshall, 1952 ; Mills and Hamilton, 1989 ; Bogart, 1998). L’un des avantages des efficacités de la ville est la haute productivité de l’employé. Cette productivité s’explique par 2 raisons ; l’efficacité de la ville facilite la recherches d’employés qualifiés et créatifs pour les entreprise; l’efficacité des infrastructures des transports diminue le coût généralisé d’accès au marché de l’emploi.
D’autres avantages correspondent à la taille de la ville, ou à ce que l’économiste appelle l’échelle de l’urbanisation. Un grand marché d’emploi, toutes choses égales par ailleurs, augmente l’accès des entreprises pour trouver les employés qualifiés. La grande ville permet d’avoir un niveau de spécialisation des employés plus élevé et un lien horizontal entre les entreprises plus efficace (Krugman, 1993). La grande ville a aussi une fonction d’incubateur pour la diffusion des sciences et de l’innovation à travers les entreprises. Similairement, l’efficacité est déduite par le co-partage entre la localisation de la résidence et celle de l’entreprise – par exemple l’équilibre entre la résidence et l’entreprise dans le même endroit peut diminuer le coût du transport et donc finalement augmenter la productivité des emplois (les employés peuvent passer plus du temps au bureau) (Cervero, 1996 ; Kain, 1993).
L’efficacité du transport contribue à réduire les effets des distances entre domiciles et emplois. Les recherches précédentes sur la forme urbaine et la productivité de la ville ont pour objet de principalement trouver l’effet de la forme urbaine sur la productivité. Certaines recherches ont utilisé la fonction de production estimée pour l’industrie spécifique, et l’agrègent à l’échelle de la région métropolitaine, produisant la conclusion générale que la productivité augmente avec la taille de la ville, de l’ordre de 5 à 15 pour cents pour un doublement de population (Shefer,1973 ; Sveikauskas, 1975 ; Segal, 1976 ; Soroka, 1984 ; Beeson, 1987). Glaeser et al (1992) ont présenté l’évidence que les avantages dynamiques – en termes de capacité à s’adapter au changement de la technologie et de la tendance de marché – s’accumulent dans la grande ville, et font varier la spécialisation dans la ville.
Méthode d’analyse du lien entre productivité, transport, et taille de ville
Le lien entre la productivité et non seulement la taille de la ville mais aussi les autres facteurs comme la proximité des emplois et la caractéristique du transport a récemment reçu une attention empirique. Il n’y a pas beaucoup de recherches qui ont examiné l’effet de la taille de la ville, la forme urbaine et le niveau de mobilité sur l’économie. Le travail le plus notable est celui fourni par Rémy Prud’homme et de ses collègues, déjà cité.
Prud’homme et ses collègues construisent le modèle indiquant que la productivité de l’employé dans une région est une fonction de la population active totale et de la facilité à accès aux emplois, mesurée par la géographie relative des résidences et des emplois et par l’efficacité du système de déplacements.
Ils ont fait des recherches pour éclairer comment la taille de la ville, la proximité de l’emploi et la vitesse influencent la productivité en utilisant la valeur observée en coupe instantanée à travers quelques pays. Ces travaux révèlent un lien fort et suggèrent que la gestion spatiale et la bonne infrastructure de transport augmentent la productivité de la ville. En utilisant les données de la France et de la Corée du Sud, Prud’homme et Lee (1999) ont trouvé une élasticité entre les facteurs tels que la vitesse et la productivité des emplois environ de +0.30.
Une recherche similaire à celle de Remy Prud’homme a été développée par Cervero (2004) dans le contexte des villes aux Etats-Unis. Il a travaillé sur le lien entre l’infrastructure et la productivité en utilisant deux méthodes différentes appelées l’analyse macro et l’analyse micro. Premièrement, il a employé l’analyse macro (l’approche par fonction de production) pour traiter les données de 47 régions aux Etats-Unis. Le modèle créé dans cette approche relie la variable productivité avec les variables explicatives comme la taille de la ville (population, emploi), la densité de trafic (nombre de trafic par la capacité de route), ainsi que les quantités de marchandises transportées par an.
En second lieu, il a travaillé sur le modèle micro comme celui de Rémy Prud’homme. Ici, il a essayé d’établir un lien entre la productivité et plusieurs variables explicatives comme la taille effective du marché de l’emploi, la taille de la ville (densité de l’emploi) ainsi que la vitesse de déplacement. Le résultat montre que l’élasticité entre la taille de marché de l’emploi avec la productivité est d’environ 0,06 – 0,08. L’augmentation de 10% de marché d’emploi va augmenter la productivité de 0,6 – 0,8%. La vitesse comme l’indicateur de l’efficacité de système du transport a une élasticité un peu plus élevée. Elle atteint 0,1.
Les contraintes de borne de temps de déplacement et de coût de transport pour le marché de l’emploi
Dans les petites villes, tout actif peut rejoindre tout emploi. Ce n’est pas vrai dans les grandes : à mesure qu’elles se développent et s’étendent, les villes ne garantissent plus à chaque actif de pouvoir rejoindre chaque emploi, soit pour des raisons de temps, soit pour des raisons de coût. Dans les pays riches, la contrainte de coût est assez peu active et la contrainte de temps prédomine. C’est pourquoi la plupart des auteurs ne mobilise que la contrainte de temps.
Chang Woon Lee (1997) a utilisé une seule contrainte, le coût temporel, en vue de trouver la taille effective de marché d’emploi urbain. Il a utilisé une série d’indicateurs de l’accessibilité produites à l’aide de différents seuils exprimés par des valeurs-types : 15mn, 30mn, 45mn, 60mn etc. Une série de seuils temporels est aussi utilisée dans la recherche de Sandrine Wenglenski (2003) sur la mesure des disparités sociales d’accessibilité au marché de l’emploi en Ile-De-France et dans le travail de Wachs Martin et Kumagai Gordon T (1973) sur «Physical accessibility as a social indicator». Dans un pays en développement, la contrainte de coût peut au contraire être assez active. C’est pourquoi nous tiendrons compte de deux contraintes.
Par ailleurs, nous souhaitons, comme S. Wenglenski, ne pas utiliser une série de seuils plus ou moins arbitraires, mais fixer les seuils en fonction des observations comportementales de mobilité. C’est pourquoi on travaille d’abord sur l’enquête de de mobilité et sur des enquêtes complémentaires réalisées par nos soins pour trouver des seuils effectifs, dépendants des revenus des actifs. Ces enquêtes spécifiques permettent de fixer des seuils de temps de déplacement et de coût de transport, et le réalisme de l’estimation est testé par confrontation aux comportements effectifs issus des enquêtes.
Les principes d’étude de la mobilité dans les agglomérations
L’étude de chaque ville est conduite selon une logique commune. Dans un premier temps sont présentées les variables de cadrage géographique et socio-économique. Superficie, population, population active, richesse (PIB/habitant), niveau de vie mais aussi niveau des offres routières et état des services de transport public sont décrits dans cette partie.
On y décrit également le découpage en zones de ces villes utilisées dans les travaux sur les transports, la répartition des populations et des emplois dans les zones ainsi que les densités. On a en outre élaboré, au niveau de chaque zone, un indicateur que nous appelons les TEA (taux d’emploi). Il est défini comme le quotient du nombre d’emplois de chaque zone par la population active qui y réside.
Cet indicateur est toutefois imparfait. En effet, la statistique indonésienne considère comme “population active” la population de plus de 15 ans. Une partie de cette population ne travaille pas, soit parce qu’elle poursuit ses études, soit parce qu’il s’agit de femmes au foyer, soit parce que les personnes concernées trop âgées. Ainsi à Surabaya, il y a 1,15 millions d’emplois recensés pour une population active de 1,78 millions.
Dans un second temps, nous utilisons essentiellement des données issues des enquêtes de déplacement pour caractériser la mobilité dans ces villes. Il ne s’agit pas pour nous de faire une étude complète de mobilité dans chacune de ces villes, mais de préparer le terrain aux travaux visant à évaluer le marché effectif de l’emploi dans chacune de ces villes.
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Table des matières
PRESENTATION DE LA RECHERCHE
CHAPITRE 1 – INTRODUCTION
1.1. INTRODUCTION
1.2. ETAT DE L’ART
1.2.1. Méthode d’analyse du lien entre transport et productivité
1.2.2. Méthode d’analyse du lien entre taille de ville et productivité
1.2.3. Méthode d’analyse du lien entre productivité, transport, et taille de ville
1.3. NOTRE APPORT À CE COURANT DE RECHERCHE
CHAPITRE 2 – CONCEPTION DU MODELE GLOBAL
2.1. INDICATEUR DE LA LOCALISATION RELATIVE DES EMPLOIS AUX DOMICILES
2.1.1. Distance aux emplois
2.2. INDICATEUR DE L’EFFICACITE DU SYSTEME DU TRANSPORT
2.2.1. La vitesse
2.3. INDICATEUR DU MARCHE DE L’EMPLOI
2.3.1. La taille effective du marché de l’emploi du point de vue des entreprises
2.3.2. La taille effective du marché de l’emploi du point de vue des ménages/ population active
2.3.3. La mesure de l’accessibilité aux emplois du point de vue des entreprises
2.3.4. La mesure de l’accessibilité aux emplois du point de vue des ménages/ population active
2.3.5. Les contraintes de borne de temps de déplacement et de coût de transport pour le marché de l’emploi
2.3.6. Données et le calcul du marché d’emploi sur l’année de base
2.3.7. Données et calcul de modèle du marché d’emploi
CHAPITRE 3 :LA MOBILITE DANS LES VILLES DE JAKARTA, SURABAYA, MEDAN, ET SEMARANG
3.1. LES DONNEES DISPONIBLES
3.1.1. L’enquête du ménage et de la mobilité
3.1.2. Usage des données
3.2. LES PRINCIPES D’ETUDE DE LA MOBILITÉ DANS LES AGGLOMERATIONS
3.3. L’ INDONESIE: INFORMATION GENERALE SUCCINCTE
3.4. SURABAYA
3.4.1. Généralité sur la ville de Surabaya
3.4.2. La mobilité à Surabaya
3.5. MEDAN
3.5.1. Généralité sur la ville de Medan
3.5.2. La mobilité à Medan
3.6. JAKARTA
3.6.1. Généralité sur la ville de Jakarta
3.6.2. La mobilité à Jakarta
3.7. SEMARANG
3.7.1. Généralité sur la ville de Semarang
3.7.2. La mobilité à Semarang
3.8. COMPARAISON DES VILLES
3.8.1. Population et emploi
3.8.2. Revenu/ Unité de consommation
3.8.3. Le système de zone
3.8.4. Partage de mode de transport
3.8.5. Les seuils temporels et monétaires des déplacements
3.8.6. Les caractéristiques des déplacements selon le revenu de ménage
3.8.7. Les caractéristiques de déplacement selon le taux d’emploi et de la population active (TEA) de la zone de résidence
3.8.8. Le lien des caractéristiques de déplacement avec la loi de Zahavi
CHAPITRE 4 :LA TAILLE EFFECTIVE DE MARCHE DE L’EMPLOI URBAIN
4.1. LA VILLE DE SURABAYA
4.1.1. Marché de l’emploi selon les entreprises
4.1.2. Marché de l’emploi selon les ménages
4.2. LA VILLE DE MEDAN
4.2.1. Marché de l’emploi selon les entreprises
4.2.2. Marché de l’emploi selon les ménages
4.3. LA VILLE DE JAKARTA
4.3.1. Marché de l’emploi selon les entreprises
4.3.2. Marché de l’emploi selon les ménages
4.4. LA VILLE DE SEMARANG
4.4.1. Marché de l’emploi selon les entreprises
4.4.2. Marché de l’emploi selon les ménages
4.5. LES TAILLES DE MARCHE DE L’EMPLOI, SYNTHESE
CHAPITRE 5 :MODELE DE LA TAILLE EFFECTIVE DU MARCHE DE L’EMPLOI URBAIN
5.1. MODELE 1 LE MARCHE DE L’EMPLOI SELON LES MENAGES EN VOITURE SANS PRISE EN COMPTE DES TAUX D’EQUIPEMENT
5.2. MODELE 2 LE MARCHE DE L’EMPLOI EN DEUX ROUES A MOTEUR SELON LES MENAGES SANS PRISE EN COMPTE DES TAUX D’EQUIPEMENT
5.3. MODELE 3 LE MARCHE DE L’EMPLOI SELON LES MENAGES EN TRANSPORT EN COMMUN
5.4. MODELE 4 LE MARCHE DE L’EMPLOI SELON LES MENAGES PAR L’ENSEMBLE DES MODES SANS PRISE EN COMPTE DES TAUX D’EQUIPEMENT
5.5. MODELE 5 LE MARCHE DE L’EMPLOI EN VOITURE SELON LES MENAGES EN CONSIDERANT LES TAUX D’EQUIPEMENT
5.6. MODELE 6 LE MARCHE DE L’EMPLOI SELON LES MENAGES EN DEUX ROUES EN CONSIDERANT LES TAUX D’EQUIPEMENT
5.7. MODELE 7 LE MARCHE DE L’EMPLOI SELON LES MENAGES PAR L’ENSEMBLE DES MODE EN PRENANT EN COMPTE LA DETENTION
CHAPITRE 6 – CONCLUSION ET PERSPECTIVES
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