Mise en perspective du secteur bancaire et de sa transformation digitale
La banque, acteur d’intermédiation centrale des sociétés
La banque est un acteur économique essentiel. Ainsi le rapport (CNN, 2015) mentionne « Les banques restent des acteurs incontournables du financement de l’économie. Il est nécessaire de les impliquer dans la définition de nouveaux produits à destination des modèles d’affaires numériques et définir des relations stables avec les start-up. La contribution des investisseurs privés doit être soutenue, via le crowdfunding et l’investissement des business angels. »
Bref historique philosophique
La monnaie répond à trois fonctions selon Aristote : intermédiaire dans les échanges, réserve de valeur et unité de compte. Progressivement s’est opérée une dématérialisation des supports monétaires. L’une des caractéristiques fondamentales est la notion de confiance en la persistance de sa valeur. La quantité de monnaie détenue correspondant à des objets, des produits et des services, il est apparu nécessaire de la protéger. Il existe par ailleurs des monnaies éphémères . Dans ce contexte, les banques sont des agents intermédiaires garants de la détention et de la sécurité.
Les principaux rôles de la banque sont de servir d’intermédiaire entre les déposants et les emprunteurs, à gérer les risques pour les déposants et les prêteurs et à fournir des services de paiement avec un haut niveau de sécurité (Newzl, 2016) et de plus en plus de services connexes. Ils sont également des agents clés dans le cycle de vie de l’argent. Cependant avec des disruptions (principalement de la part des GAFA et des fintech), le modèle bancaire traditionnel est menacé. Outre l’agilité de ces nouveaux acteurs, ceux-ci sont en phase avec les changements sociétaux. Le changement est conduit par les consommateurs avec, par exemple, des interactions numériques en temps réel en utilisant des appareils mobiles et Internet.
Les principales étapes dans les évolutions de la banque ont été l’apparition du chèque, du compte chèque (utilisé notamment pour le virement des salaires). Un essor de la banque s’est opéré à la fin des années 1960-début des années 1970 dans les pays occidentaux. En particulier pour la France, deux éléments ont été accélérateurs, d’une part la loi du 13 juillet 1965 sur la réforme des régimes matrimoniaux qui a permis aux femmes de travailler sans l’accord de leur mari et d’ouvrir un compte en banque à leur nom propre. D’autre part, l’imposition de la mensualisation des salaires par le président Pompidou avec la signature d’une déclaration commune avec les parties prenantes le 20 avril 1970. Jusqu’alors le paiement des salaires était effectué en liquide en fin de semaine.
A suivi la carte bancaire (en 1967 en France avec les DAB en 1968 et une augmentation grandissante des dispositifs de sécurité mais également des menaces). À noter que la gratuité du chèque est paradoxale par rapport à son coût pour la banque alors qu’en même temps la carte bancaire est payante pour le client alors même que la banque prélève une commission lors de chaque transaction pour les paiements . C’est l’effet d’un service nouveau qu’il est généralement plus facile de facturer. Les banques françaises sont généralement ancrées dans le ni-ni (ni facturation des chèques ni rémunération des comptes) avec comme indicateur clé le produit net bancaire (PNB). La carte bleue a évolué au fil des années. Avec l’essor du paiement sans contact, elle est devenue le support de nouveaux paiements innovants et dématérialisés comme les wallets (Apple Pay, Google Pay, AliPay, Samsung Pay). Ces portemonnaies électroniques reliés à un numéro de carte bleue permettent aussi bien de régler des transactions de proximité qu’à distance sur des sites marchands. Nous avons aussi les banques (Paylib ), des acteurs mixtes (Lyf Pay) avec une union de BNP, Crédit Mutuel, Carrefour et Auchan pour faire face à Google et AliPay. Les fonctions se sont enrichies. Outre le paiement et le retrait d’argent, la question de la fidélité et de l’utilisation d’une cagnotte est une tendance forte pour de nombreux acteurs bancaires d’autant que les acteurs du Web proposent des e-coupons, des cartes de fidélité. La sécurité évolue au fil du temps (techniques de chiffrement et longueur des clés de chiffrement, cryptogramme au verso de la carte, plafond de transaction pour le sans contact de 30 euros pour fluidifier le paiement des petits montants) avec des recours à la biométrie, au QR code, à la tokenisation pour une transaction. La reconnaissance selon Apple (la voix avec Siri ou le visage avec l’iPhone X) pourrait bien devenir la norme. Pour les prochaines années, la tendance sera le paiement avec les objets connectés.
(Shaikh et Karjaluoto, 2016) retracent l’évolution des canaux de distribution alternatifs innovants pour les transactions financières en faisant la distinction avec la banque numérique. Ils mentionnent également le développement des services bancaires par téléphone dans les années 1980, le POS (Point Of Sales) vers 1985 où est réalisée l’opération de paiement par carte, l’extension des services bancaires sur Internet dans les années 1990, l’utilisation croissante des smartphones et des tablettes qui a encouragé les sociétés bancaires à fournir des applications bancaires mobiles et sans succursale avec la banque mobile (m-banking) introduite par la société allemande Paybox en collaboration avec la Deutsche Bank à la fin de 1990 et des services bancaires mobiles introduits et testés principalement dans les pays développés (Allemagne, Espagne, Suède et États-Unis) avant de concerner les pays en voie de développement en 2007 avec le Kenya (service de banque mobile appelé « M-Pesa », disponible dans 11 pays). Tous ces canaux de distribution innovants permettent aux consommateurs de prendre des décisions financières en temps réel de manière pratique, quel que soit le moment et le lieu.
Réflexion sur le rôle social de la banque, sécurité et évolution
Selon (Durieux, Lorenzi, 2016), la logique d’une banque de détail traditionnelle s’inspire de la culture du coffre-fort et repose sur la relation singulière entre le gestionnaire de compte et son client au sein d’une agence sécurisée. La banque est fermée, secrète et globalement impénétrable. Ce n’est pas un hasard si une majorité des logos des banques sont en format carré, lesquelles symbolisent le coffre-fort et par conséquent la sécurité et la confiance avec la conservation des biens précieux.
A contrario, la banque digitale fait sortir la banque du monde des chambres fortes pour la faire rentrer dans le monde des écosystèmes. Les peurs liées au risque de désintermédiation constituent davantage de formidables opportunités venant de ces écosystèmes en formation que la banque pourra intégrer et contrôler. Intégrer et contrôler un écosystème n’est pas se défendre ou se protéger, mais s’ouvrir et s’interfacer. En devenant une plateforme et en fédérant des API autour, le marketing et la stratégie prévalent alors que les firewalls et l’informatique traditionnelle passent au second plan. C’est ce changement de paradigme que les grandes banques doivent affronter aujourd’hui.
Il existe également un côté peu enthousiasmant de la relation avec la banque : ouvrir un compte, négocier un prêt, gérer une succession. Ces moments sont plus vécus comme des tracas administratifs. Ce n’est pas une coïncidence si Fortuneo a lancé le slogan « J’aime ma banque » en 2012 en prenant le contre-pied des codes habituels de la communication bancaire. Cette déclaration d’amour était là pour matérialiser la différenciation de la banque en ligne des banques traditionnelles. Les piliers de la nouvelle offre étaient un nouveau parcours client avec une accessibilité des services, une simplicité de l’offre et une transparence avec des tarifs compétitifs.
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Table des matières
Remerciements
Table des matières
Liste des figures
Introduction
1. Cadre et objet de la thèse
1.1. Enjeux de recherche
1.2 Quels enjeux d’un modèle de mesure ?
1.3 Similitudes d’approche et différences pour la transformation numérique entre la banque de détail et la banque de marché
2. Définition de la transformation digitale et enjeux pour les acteurs bancaires
2.1 De la transformation digitale
2.2 La digitalisation des banques
3. Problématique, démarche de recherche et plan de la thèse
1. Cadre conceptuel et design de recherche
1.1 Mise en perspective du secteur bancaire et de sa transformation digitale
1.1.1 La banque, acteur d’intermédiation centrale des sociétés
1.1.2 L’apparition de nouveaux acteurs disruptifs dans le monde bancaire
1.1.3 Des évolutions inéluctables du rôle des services bancaires
1.1.4 De la banque en ligne à la banque mobile puis la banque connectée et avantages : efficacité, coût, dépôts
1.1.5 Des facteurs d’adoption de la banque en ligne différenciés selon les richesses des pays et d’autres âges (structure de la population, appétence au numérique, etc.)
1.1.6 Cas de banques à l’international (États-Unis, Chine et dans d’autres nations) et avantages respectifs
1.1.7 Des enseignements des banques traditionnelles qui réussissent leur transformation digitale
1.1.8 Les possibles disruptions au niveau du front office et du back office
1.2 Cadres conceptuels et analytiques mobilisés dans l’appréhension du modèle et sa construction
1.2.1 Apport du cadre conceptuel de la performativité
1.2.2 Le champ lexical et les cadres d’analyse de la « transformation digitale » : migration digitale, sublimation digitale et transformation digitale transitoire et stationnaire
1.2.3 Une catégorisation des banques et des acteurs face au digital
1.3 Design de recherche
2. Construction et présentation du modèle
2.1 Le modèle initial
2.1.1 Principe de construction de la grille d’analyse
2.1.2 L’apport des modèles existants pour l’enrichissement du modèle initial
2.1.3 De DIMM vers la construction du modèle BIMM
2.2 Corpus empiriques développés pour l’enrichissement du modèle
2.2.1 Enquête qualitative à dire d’experts et apports pour les évolutions prévisibles de la banque et la construction du modèle
2.2.2 Enquête massive quantitative sur les attentes des générations X, Y, Z quant à la banque du futur et l’étude des variables indépendantes qui influent sur les usages
2.2.3 Retour d’expérience du PoC paiement sans contact sur le smartphone des facteurs à La Poste
2.3 Le modèle développé
2.3.1 Axe Personnel
2.3.2 Axe Organisation
2.3.3 Axe Stratégie
2.3.4 Axe Technologie et innovation
2.3.5 Axe Offre
2.3.6 Axe Environnement
3. Discussion du modèle
3.1 Analyse critique du modèle
3.1.1 La collecte et l’analyse des informations, préalable nécessaire à la mesure des indicateurs
3.1.2 Des résultats indicatifs à creuser avec des audits de terrain
3.2 Robustesse du modèle
3.2.1 Personnel : de la valeur de l’argent à celle de l’intelligence et du lien à l’autre
3.2.2 Organisation : apport de l’holacratie et des courants de management que d’aucuns disent appliqués par les GAFA notamment et des travaux en organizing
3.2.3 Offre : nouveau rôle sociétal de la banque pour des usages différents
3.2.4 Technologie et Innovation : les révolutions blockchain, IA, big data, etc.
3.2.5 Environnement : l’importance des lobbyings américain, communautaires
3.2.6 Stratégie : de nouveaux courants inspirés des GAFA ?
3.2.7 Comment évoluer vers l’excellence (niveaux 4 et 5) et points de rupture du modèle..
3.2.8 Quels types de banques demain (banques collaboratives, orientées données, banque comme partage de bonnes pratiques) : tentative de typologie
3.3 Recommandations managériales
Conclusion
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