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Attachement et entrée du virus
L’entrée du virus nécessite une adhésion à la surface cellulaire via les heparan-sulfates à l’aide des complexes gM/gN et gB viraux. Elle implique la participation d’un grand nombre de récepteurs cellulaires encore mal connus. Les glycoprotéines gB et gH se lieraient de manière spécifique au récepteur membranaire EGF-R (epithelial growth factor) (16) et de manière aspécifique à l’annexine II ou à la β2 microglobuline.
Le virus peut pénétrer par endocytose, comme c’est le cas dans les cellules endothéliales, ou par fusion de la membrane virale et de la membrane cellulaire. Ceci aboutit à la libération de la capside et des protéines du tégument dans le cytoplasme cellulaire. La capside est transportée jusqu’au noyau où l’ADN viral est libéré, circularisé et l’expression des gènes très précoces commence.
Cycle productif
Le cycle de réplication du CMV se déroule entre 24 et 48h après l’endocytose. La protéine tégumentaire pp71 active l’expression du promoteur majeur très précoce, le MIEP (major immediate early promoteur) et induit l’expression en cascade des gènes viraux en 3 phases successives (17) :
• La phase très précoce (ou IE pour Immediate Early) : rapide et correspondant à l’expression de gènes IE important dans l’initiation et la maintenance de l’expression des gènes lors du cycle lytique et latent.
• Le phase précoce (ou E pour Early) : correspondant à l’expression des gènes E, qui permettent la production des protéines impliquées dans la réplication de l’ADN viral (notamment la polymérase virale pUL54, la protéine accessoire pUL44, les sous-unités du complexe hélicase-primase, pUL70, pUL102, pUL105 et la kinase virale pUL97). L ’ADN viral est circularisé et répliqué en une multitude de copies assemblées bout à bout pour former une molécule d’ADN bicaténaire.
• La phase tardive (ou L pour Late) : correspondant à l’expression des gènes L, commençant à être exprimés 24h après l’infection et codant pour des protéines de structure du virion. La réplication de l’ADN viral se prolonge durant la phase tardive, puis vient sa maturation, son encapsidation dans les capsides néoformées puis la tégumentation des virions. Une partie des virions matures est ainsi libérée dans le milieu extracellulaire, tandis que l’autre moitié reste attachée à la membrane plasmique. Les nouveaux virions ont une demi-vie de 24 à 48h.
Libération du virus
Le virus est observé sous plusieurs formes dans la cellule : le virion complet, les corps denses (résultant d’une production excessive de protéines virales, constitués uniquement de capsides et de tégument) ou les particules enveloppées non infectieuses (sans ADN).
Le virus sort de la cellule par fusion des vésicules golgiennes avec la membrane plasmique.
La libération s’accompagne de la mort de la cellule hôte.
Latence et réactivation
Le CMV est capable d’établir une latence dans ses cellules cibles : le virus entre dans les cellules mais le cycle réplicatif est ensuite rapidement interrompu et il n’y a pas d’expression des gènes précoces et tardifs. L’ADN viral forme un épisome, permettant la production de « transcrit de latence ». Cette latence se maintient grâce à un échappement à la réponse immunitaire et à des mécanismes moléculaires de maintien du génome viral dans les cellules (7). L’ADN du CMV peut devenir latent dans les cellules de la lignée myéloïde comme les monocytes et leurs précurseurs hématopoïétiques CD34+ (18), ainsi que dans les cellules endothéliales (19). Le virus peut alors se réactiver lors de la différenciation de ces cellules ou sous l’effet d’autres facteurs.
ÉPIDEMIOLOGIE
Les infections à CMV sont cosmopolites et endémiques. Sa séroprévalence est inversement corrélée au niveau socio-économique (50 à 80 % chez l’adulte dans les pays industrialisés et jusqu’à 100% dans certains pays en voie de développement) (6)(20) et augmente avec l’âge (21). On estime, en France, que 50% de la population est séropositive au CMV.
La transmission est exclusivement interhumaine, l’homme étant le seul réservoir. Il existe plusieurs modes de transmission (7):
• Par voie sexuelle (sperme et sécrétions cervico-vaginales), par voie salivaire ou par contact avec les excrétions virales (urines de nouveau-nés, salive)
• Lors de transplantations d’organes ou de greffes de cellules souches hématopoïétiques (CSH)
• Par transfusion sanguine (mode de transmission en diminution depuis la déleucocytation des concentrés globulaires)
• De la mère à l’enfant : via le placenta (CMV congénital), le lait maternel, les secrétions cervicales et la salive
On observe 2 pics de contamination : lors de la petite enfance (début de la vie en collectivité) et entre 15-30 ans (principalement par transmission sexuelle ou salivaire).
En France, l’incidence de l’infection à CMV chez la femme enceinte est de 0,6 à 1,4 %. Le risque de transmission du virus de la mère à l’enfant est de l’ordre de 40% (plus souvent par voie hématogène transplacentaire) (6).
Actuellement, l’infection à CMV représente la virose opportuniste la plus fréquente après transplantation d’organe et la plus fréquente des infections virales congénitales dans les pays développés (depuis la diffusion du vaccin contre la rubéole) (22).
PRIMO-INFECTION CHEZ L’IMMUNOCOMPETENT
L’infection à CMV chez le sujet immunocompétent est asymptomatique dans 90% des cas. Elle peut cependant se manifester, après une incubation d’environ 3 semaines, par une fièvre isolée prolongée, une asthénie, des myalgies et des adénopathies, un syndrome mononucléosique (caractérisé par une hyperlymphocytose constituée de lymphocytes hyperbasophiles) et parfois une thrombopénie et une cytolyse hépatique. Dans de rares cas, on peut retrouver des atteintes plus graves du tractus intestinal ou du système nerveux central (méningo-encéphalite, polyradiculonévrite de Guillian Barré). Une fois infecté, le sujet reste porteur du virus à l’état latent (6)(7)(20).
INFECTION CHEZ L’IMMUNODEPRIME
Le pouvoir pathogène du CMV se manifeste surtout chez des patients immunodéprimés, tels que les patients infectés par le VIH au stade de SIDA, les patients transplantés ou les patients présentant un déficit immunitaire lié au développement d’une hémopathie maligne. Une réactivation asymptomatique du CMV est dénommée « infection à CMV ». Mais lorsque la réactivation est symptomatique et responsable d’atteinte tissulaire, on parle de « maladie à CMV ».
Patients transplantés d’organe
Les patients transplantés d’organe peuvent développer une infection ou une maladie à CMV suite à une primo-infection ou à une réactivation.
Le risque de primo-infection est majeur lorsque le donneur est séropositif pour le CMV et le receveur séronégatif (D+/R-). Ces derniers n’ont pas d’immunité humorale et cellulaire préexistante spécifique au CMV et, en présence d’une immunosuppression induite par les médicaments, cela peut entraîner une incapacité à contrôler l’infection. En revanche, lorsque le receveur est séropositif (R+), le virus endogène peut se réactiver suite à l’immunodépression. Plus rarement, le receveur séropositif peut présenter une réinfection par une autre souche provenant d’un donneur positif (D+), moins sévère que la primo-infection.
La réplication peut être asymptomatique ou entrainer une maladie à CMV correspondant soit à un syndrome viral, soit à une atteinte tissulaire. Elle débute par une atteinte de l’organe greffé puis dissémine vers d’autres organes. L’organe le plus fréquemment touché par le CMV est le tube digestif, qui représente plus de 70 % des cas de maladies à CMV invasives dans les tissus. D’autres atteintes viscérales peuvent s’observer : pneumonie, hépatite, myocardite, pancréatite et plus rarement encéphalite. L’infection à CMV est un facteur aggravant le risque de rejet de greffe (6)(21).
Patients greffés de cellules souches hématopoïétiques (CSH)
Les infections à CMV suite à une allogreffe de CSH sont liées à une primo-infection du patient séronégatif avec un donneur séropositif (D+/R-) (avec une incidence de 17%) ou liées à la réactivation du virus latent du receveur. Les receveurs de greffes allogéniques sont particulièrement exposés au risque de pneumopathie à CMV, avec une incidence d’environ 10 à 30 % (contre 1 à 6% après une greffe autologue). Elle survient à un stade d’immunosuppression majeure, dans les 3 mois suivant la greffe, et conduit au décès dans 70% des cas en l’absence de traitement. Le CMV interviendrait également dans la réaction du greffon contre l’hôte (6)(21). Contrairement aux transplantés d’organes solides, le risque d’infection et de maladie à CMV chez les receveurs de greffe de CSH est plus élevé lors d’un statut CMV R+, avec une incidence autour de 70 % (24). Elle peut être prévenue par la recherche systématique par PCR d’une virémie pendant les 3 mois qui suivent la greffe.
Patients VIH
Chez les personnes infectées par le VIH, l’infection à CMV a des conséquences dépendantes du taux de lymphocytes T CD4. En effet, elle peut survenir lorsque le taux de CD4 est inférieur à 50/mm3. La rétinite à CMV est la localisation la plus fréquente (80%), parfois associée à des atteintes digestives (colites), pulmonaires ou neurologiques (encéphalites, neuropathies périphériques). La rétinite, en l’absence de traitement, entraîne une destruction rétinienne progressive subaiguë conduisant à une cécité irréversible. Un fond d’œil est donc réalisé chez les patients ayant un taux de CD4 inférieur à 100/mm3 et une sérologie CMV positive (6)(21). La maladie à CMV est devenue une infection opportuniste rare, depuis la généralisation des traitements antirétroviraux.
INFECTION CONGENITALE
Épidémiologie
La prévalence mondiale de l’infection congénitale à CMV est de 0,64%, mais varie selon le contexte socio-économique (25). En effet, elle est autour de 0,5-1 % en Amérique du Nord et en Europe, et jusqu’à 6 % dans les pays en développement (26). L’immunité maternelle diffère également selon le contexte socio-économique (90% pour les femmes de catégories socio-économiques basses contre 50% pour les femmes de catégories socio-économiques supérieures). Le CMV représente la première cause d’infection congénitale d’origine virale dans le monde (7).
Manifestations cliniques
L’infection du fœtus par le CMV peut survenir tout au long de la grossesse avec une transmission à travers le placenta, par les leucocytes lors d’une virémie maternelle. L’infection survient le plus souvent chez les nourrissons nés de mères ayant développées une primo-infection pendant la grossesse (la transmission se produisant dans environ 40% des cas (27)), et plus rarement lors d’une infection non primaire par le CMV, c’est à dire lors d’une réinfection ou d’une réactivation (21). En France, environ 0,4% des nouveau-nés sont infectés par le CMV (6). Le risque de transmission materno-fœtale augmente en fonction de l’âge gestationnel de la primo-infection maternelle (de <5% en période péri-conceptionnelle à près de 70% en fin de grossesse) (28).
Le risque d’anomalie congénitale est majeur lorsque la primo-infection maternelle survient dans les 3 premiers mois de la grossesse (< 20 semaines d’aménorrhée). La sévérité des atteintes fœtales diminue au cours de la grossesse (29).
Dans 90% des cas, les enfants infectés in utero se développent normalement, mais certains d’entre eux peuvent présenter des séquelles graves à la naissance (principalement la surdité). Par ailleurs, 10% des infections in utero sont symptomatiques et peuvent être responsables d’atteintes viscérales parfois mortelles. La maladie congénitale à CMV peut se manifester par une éruption pétéchiale, un ictère avec hépatosplénomégalie, des anomalies neurologiques telles que microcéphalie, choriorétinite, atrophie du nerf optique, prématurité et faible poids à la naissance. Certains de ces nouveaux nés garderont des séquelles neurosensorielles notamment une surdité, des retards psychomoteurs ou mentaux (Figure 6) (27)(29)(30), avec parfois de apparition tardives. L’infection congénitale à CMV est la première cause de déficit auditif d’origine infectieuse diagnostiquée avant l’âge d’acquisition de la parole (6).
L’infection de la femme enceinte par le CMV peut être corrélée à un contact avec de jeunes enfants (dans les crèches par exemple), excrétant souvent de façon abondante du virus dans la salive et les urines.
DIAGNOSTIC MICROBIOLOGIQUE
Le diagnostic de l’infection à CMV peut se faire à partir d’éléments paracliniques d’orientation tels que des signes biologiques de primo-infection : syndrome mononucléosique, neutropénie, thrombopénie, cytolyse hépatique. Mais des examens biologiques sont nécessaires au diagnostic de primo-infection ou de réactivation. La recherche du virus a pour but d’évaluer le risque d’apparition de complications liées aux pathologies à CMV. Des examens virologiques sont réalisés
à partir de différents prélèvements biologiques selon le contexte clinique : sang, salive, urines, liquide-céphalorachidien (LCR), biopsies, liquide amniotique.
En cas de suspicion de primo-infection, le diagnostic indirect par sérologie est le plus souvent réalisé et suffisant au diagnostic. En cas de réactivation, notamment chez les patients immunodéprimés, le diagnostic direct par biologie moléculaire sera préféré (6).
DIAGNOSTIC INDIRECT
Sérologie
Le diagnostic indirect se fait par technique sérologique à partir d’un prélèvement sanguin, la plupart du temps sur un tube sec, et permet de mettre en évidence des anticorps anti-CMV dans le sérum du patient.
Les techniques principalement utilisées sont de type immuno-enzymatiques, notamment la technique de type ELISA (« Enzyme-linked immunosorbent assay »). Elle permet la détection des immunoglobulines G (IgG) et immunoglobulines M (IgM) dirigées contre le CMV. Les IgM anti-CMV apparaissent en premier, mais ne sont pas toujours synonymes de primo-infection. En effet, elles peuvent également être retrouvées lors d’une persistance prolongée des IgM, une réactivation, une réinfection ou d’une réactivité non spécifique (par exemple une réaction croisée vis-à-vis de l’EBV ou une interférence avec un facteur rhumatoïde de classe IgM).
C’est la mise en évidence d’une séroconversion (apparition des IgM puis des IgG anti-CMV) qui permet le diagnostic de certitude de primo-infection. La présence seule d’IgG est le témoin d’une immunité ancienne. Leur taux peut augmenter en cas de réactivation ou réinfection (6)(20)(28). Les IgM apparaissent entre 2 et 4 semaines après l’infection primaire, et les IgG sont détectables quelques jours après les IgM.
La sérologie anti-CMV est indispensable pour diagnostiquer une primo-infection, notamment chez la femme enceinte ou pour connaître le statut sérologique avant une transplantation. Mais elle n’est pas recommandée pour le diagnostic en temps réel de l’infection à CMV chez les personnes immunodéprimées. En effet, il existe un décalage entre l’apparition de la maladie clinique et l’apparition des IgM, de plus les IgM peuvent persister longtemps après la résolution de la maladie, et enfin certains patients immunodéprimés ne développent pas de réponse sérologique (31)(32).
Principe de la technique ELISA :
C’est une technique immuno-enzymatique qui se déroule en plusieurs étapes (33) :
• Fixation de l’antigène : L’antigène connu et spécifique à l’anticorps recherché, est incubé sur une plaque de microtitration. L’antigène va se fixer au fond des puits. Ils sont ensuite lavés pour enlever les antigènes non fixés.
• Fixation de l’anticorps à doser : On incube notre sérum à doser (contenant des anticorps ou non). Les anticorps spécifiques vont se fixer aux antigènes. Un lavage des puits est nécessaire pour enlever les anticorps non fixés.
• Fixation de l’anticorps secondaire : On incube ensuite un anticorps secondaire couplé à une enzyme, de nature anti-IgG qui reconnait l’anticorps primaire. Un lavage des puits est nécessaire pour enlever les anticorps secondaires non fixés.
• Révélation : On incube un substrat spécifique à l’enzyme qui, si la réaction est positive (présence de l’anticorps recherché), va être transformé et induire une coloration. L’intensité de la coloration est proportionnelle à la quantité d’enzyme présente et donc à la concentration d’anticorps recherchés.
Test d’avidité des IgG
Dans certains cas, notamment chez la femme enceinte, il peut être nécessaire de dater la primo-infection. Le test d’avidité des IgG permet de distinguer les infections récentes (< 3mois) des infections anciennes (> 3 mois). L’avidité mesure l’affinité des IgG anti-CMV synthétisées en réponse à une infection. Les anticorps produits au cours de l’infection primaire ont une affinité plus faible pour l’antigène que dans le cas d’une infection non primaire. L’avidité des IgG augmente progressivement avec le temps après une immunisation. Donc, les IgG de faible avidité permettent d’affirmer une primo-infection récente datant de moins de 3 mois, alors que les IgG de forte avidité excluent une primo-infection dans les 3 premiers mois (34).
L’utilisation d’un agent dissociant la liaison antigène/anticorps (ex : l’urée), en parallèle avec la technique habituelle de mesure des IgG, permet de comparer la densité optique (DO) obtenue après action de l’agent dissociant avec la DO obtenue sans action de cet agent (35).
On mesure l’avidité de cette façon : DO en présence d’agent dénaturant / DO sans agent dénaturant x 100. La valeur seuil pour déterminer si l’avidité est faible ou forte est notifiée par chaque fournisseur de la technique utilisée.
Détection de l’ADN par biologie moléculaire
La recherche du CMV par biologie moléculaire est la méthode privilégiée pour le diagnostic rapide du CMV chez les personnes immunodéprimées. Elle est basée sur la détection ou/et la quantification des acides nucléiques du CMV dans des prélèvements biologiques. Cependant, le CMV peut persister sous forme latente dans des cellules nucléées, c’est pourquoi il existe un risque de détecter un CMV inactif et non répliqué, d’où la nécessité d’une quantification à partir des prélèvements sanguins.
Parmi les méthodes moléculaires de quantification du CMV, la détection du génome viral peut être réalisée par différentes techniques (38)(39):
§ Amplification de l’ADN viral par PCR (polymerase chain reaction) classique, avec détection des amplicons en point final, mais cette technique n’est quasiment plus utilisée.
§ Amplification de l’ADN viral par des techniques de PCR en temps réel, plus sensibles et plus précises que la PCR classique, et adaptées aux grandes séries. En effet, la PCR en temps réel permet simultanément d’amplifier le gène d’intérêt et d’analyser les produits d’amplification, permettant une obtention des résultats plus rapide que la PCR classique (en moins de trois heures). Le risque de faux positifs par contamination est également réduit. Il existe de nombreux protocoles maisons et des trousses commercialisées (40)(41).
§ Détection des transcrits ARNm très précoces ou tardifs (pp67) par NASBA.
§ Détection de l’ADN viral par hybridation moléculaire.
La PCR en temps réel est la technique virologique de référence pour déterminer la charge virale du CMV (21)(40). Cette technique, d’une excellente sensibilité (proche de 100%), consiste à amplifier in vitro une séquence connue du virus, ciblée par deux amorces qui sont dirigées l’une vers l’autre, et une sonde marquée par un fluorochrome permettant la détection du produit d’amplification. Il est nécessaire tout d’abord d’extraire l’ADN à partir des échantillons primaires. Puis, à partir de l’extrait, la PCR en temps réel se déroule en plusieurs étapes (42) (43) (Figure 9) :
• Dénaturation de l’ADN : séparation des doubles brins de la séquence d’ADN en simples brins, par augmentation de la température.
• Hybridation : les amorces s’hybrident au niveau de chaque simple brin dénaturé à une température spécifique de la séquence ciblée.
• Élongation : l’ADN polymérase synthétise l’intégralité du brin complémentaire de la séquence ciblée. À chaque fois qu’un brin complémentaire est synthétisé, l’activité
3’exonucléasique de l’ADN polymérase va hydrolyser la sonde et libérer le fluorochrome. Ces trois étapes correspondent à un cycle qui sera répété plusieurs fois sur un automate
(thermocycleur) afin de permettre l’amplification de l’ADN. Plus les cycles de réplication s’enchainent, plus la quantité d’ADN va augmenter. L’augmentation de l’intensité de fluorescence est directement proportionnelle à la quantité d’ADN produit durant la réaction. Une courbe de fluorescence est établie et on détermine le cycle de température (Ct) à partir duquel la courbe se forme, et qui correspond à un nombre de cycles minimum où l’ADN est détectable. Plus l’ADN est détectable tôt (ce qui correspond à un Ct bas), plus la quantité d’ADN présente dans l’échantillon est importante (Figure 10).
On peut ainsi quantifier l’ADN amplifié, grâce à une gamme d’étalonnage qui exprime le nombre de copies virales/mL en fonction du Ct. Le Ct de l’échantillon est converti en copies/mL, qui correspond à la charge virale. La quantification de la charge virale permet d’évaluer la cinétique de l’expression virale d’un patient et ainsi d’adapter au mieux la stratégie thérapeutique, notamment chez les patients transplantés. Il existe également un standard international WHO de quantification qui permet de convertir les résultats en UI/mL.
Une étude de 2012 (44) a répertorié les différentes techniques de PCR utilisées dans plusieurs laboratoires de France. Certains d’entre eux utilisaient des trousses commerciales : R-gene (ARGENE®) ou CMV PCR Kit (Qiagen®) et d’autres, des PCR artisanales ciblant des gènes différents (UL83, UL123, US8, US18 ou la région HXLF4).
Examen histopathologique
Pour le diagnostic de la maladie invasive à CMV dans les tissus, l’examen histologique des échantillons de biopsie est essentiel. Il se fait par l’examen microscopique d’un fragment tissulaire avec la recherche de signes inflammatoires, de l’effet cytopathique du virus (responsable de la formation de cellules à inclusions intranucléaires) et de la présence d’antigènes ou d’ADN spécifiques du CMV. Pour confirmer la présence du CMV dans les tissus, l’ADN du CMV peut être mis en évidence par hybridation in situ, par exemple à l’aide d’une sonde ADN biotinylée, ou par PCR CMV effectuée sur coupes de tissus inclues en paraffine (6)(46).
PARTICULARITES DIAGNOSTIQUES
Dans le cadre de la grossesse
Infection maternelle
Le statut sérologique de la femme enceinte n’est pas déterminé de manière systématique car le dépistage n’est pas recommandé en France, bien que l’infection congénitale à CMV soit un problème de santé publique (40)(47). Mais il est tout de même souvent réalisé afin de détecter les primo-infections durant la grossesse et de les dater à l’aide de l’avidité des IgG. Pour la détection des IgM, les techniques d’immunocapture seront privilégiées car elles limitent le risque de réactions faussement positives, pouvant être liées à la présence de facteur rhumatoïde.
Si une première sérologie évoque une primo-infection, il est nécessaire de faire un contrôle sérologique sur un 2ème prélèvement à 15 jours d’intervalle pour confirmer cette primo-infection (20). Une fièvre ou des anomalies échographiques doivent faire suspecter une primo-infection maternelle au CMV.
La datation de la primo-infection présente un intérêt majeur au 1er trimestre de grossesse. En effet, une avidité forte au 1er trimestre de grossesse correspond à une phase aiguë virémique de la primo-infection maternelle à priori antérieure au début de grossesse, donc avec un risque faible de transmission materno-fœtale de l’infection à CMV. En revanche, une faible avidité au 1er trimestre suggère une phase aiguë de primo-infection maternelle survenue au cours de la grossesse, donc à un risque important de transmission de l’infection maternelle au fœtus (40).
Il n’existe pas de standardisation des tests de dépistage entre les différents laboratoires d’analyses médicales, ce qui peut impacter l’interprétation des résultats notamment pour la datation. En cas de résultats douteux, il est souhaitable que la mesure d’avidité soit contrôlée et interprétée par un laboratoire spécialisé pour éviter les erreurs diagnostiques (40).
Infection fœtale
La mise en évidence d’un virus sur un prélèvement fœtal atteste du diagnostic d’infection congénitale. L’infection fœtale peut être diagnostiquée par la détection de l’ADN du CMV dans le liquide amniotique, idéalement après la 21ème semaine d’aménorrhée et au moins 6 semaines après la première sérologie maternelle positive. La PCR en temps réel est la méthode de référence avec une spécificité de 100% et sensibilité de 95% (28).
L’imagerie fœtale par échographie joue un rôle important également car elle permet de mettre en évidence un retard de croissance fœtale, une microcéphalie et des anomalies structurelles du cerveau (21)(48).
Le diagnostic prénatal n’élimine pas le risque d’infection congénitale, c’est pour cela que le nouveau-né devra faire l’objet d’un dépistage postnatal.
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Table des matières
PARTIE 1 : LE CYTOMEGALOVIRUS
I. GENERALITES
A. HISTORIQUE
B. CLASSIFICATION
C. STRUCTURE DU VIRUS ET DU GENOME
1. L’enveloppe
2. Le tégument
3. La capside
4. Le génome
D. MECANISME DE REPLICATION : LE CYCLE VIRAL
1. Attachement et entrée du virus
2. Cycle productif
3. Libération du virus
4. Latence et réactivation
II. ÉPIDEMIOLOGIE
III. PHYSIOPATHOLOGIE
IV. CLINIQUE
A. PRIMO-INFECTION CHEZ L’IMMUNOCOMPETENT
B. INFECTION CHEZ L’IMMUNODEPRIME
1. Patients transplantés d’organe
2. Patients greffés de cellules souches hématopoïétiques (CSH)
3. Patients VIH
C. INFECTION CONGENITALE
1. Épidémiologie
2. Manifestations cliniques
V. DIAGNOSTIC MICROBIOLOGIQUE
A. DIAGNOSTIC INDIRECT
1. Sérologie
2. Test d’avidité des IgG
B. DIAGNOSTIC DIRECT
1. Culture cellulaire
2. Détection d’antigènes viraux
3. Détection de l’ADN par biologie moléculaire
4. Examen histopathologique
C. PARTICULARITES DIAGNOSTIQUES
1. Dans le cadre de la grossesse
2. Chez les patients transplantés
VII. TRAITEMENTS ET MECANISMES DE RESISTANCE
A. MOLECULES ANTIVIRALES DISPONIBLES
1. Ganciclovir (CYMEVAN®) et Valganciclovir (ROVALCYTE ®)
2. Cidofovir (VISTIDE ®)
3. Foscarnet (FOSCAVIR ®)
4. Aciclovir et Valaciclovir
5. Autres molécules
B. NOUVELLES CIBLES ANTIVIRALES
1. Inhibiteur du complexe terminase : Letermovir
2. Maribavir
C. STRATEGIES THERAPEUTIQUES
1. Infection congénitale
2. Infections chez les patients transplantés
D. RESISTANCES AUX TRAITEMENTS
1. Tests phénotypiques
2. Tests génotypiques
3. Fréquence des résistances et facteurs de risque
4. Mécanismes de résistance
5. Prise en charge thérapeutique en cas de résistance
PARTIE 2 : MISE AU POINT D’UNE TECHNIQUE DE GENOTYPAGE DU CMV
I. MATERIELS ET METHODES
A. ÉTUDE BIO-INFORMATIQUE
1. Sélection des séquences du génome complet du CMV
2. Détermination des régions à séquencer
6. Design des amorces
B. REGENERATION DES AMORCES
C. SELECTION DES ECHANTILLONS
1. 1ère série d’échantillons
2. 2ème série d’échantillons
D. EXTRACTION DES ECHANTILLONS
E. PCR
F. MIGRATION SUR GEL D’AGAROSE
1. Préparation du gel d’agarose
2. Électrophorèse sur gel
G. PURIFICATION DE L’ADN
H. QUANTIFICATION DE L’ADN ET PREPARATION DES TUBES POUR LE SEQUENÇAGE
I. SEQUENÇAGE
II. RESULTATS DES PCR ET PROPOSITIONS D’AMELIORATION
A. RESULTATS DES PCR
1. Analyse des gels d’électrophorèse
2. Résultat de la quantification d’ADN
B. SOURCES D’ECHEC DES PCR ET PROPOSITIONS D’AMELIORATION
1. Optimisation de la PCR
2. Amélioration de nos PCR
III. RESULTATS DU SEQUENÇAGE
DISCUSSION
BIBLIOGRAPHIE
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