Eléments de cadrage du projet multimodal
Avant de présenter de façon concrète l’objet de mon stage te la mission qui m’a été confiée, il me semblait important de revenir sur quelques éléments généraux pour mieux comprendre la problématique du sujet. Ces éléments, présentés dans cette partie, sont à la fois des notions théoriques de définition des termes du sujet, mais aussi des éléments de contexte concernant le lieu de stage et l’état des lieux de l’intermodalité en PACA.
Intermodalité et multimodalité : définitions
Il s’agit de définir clairement les concepts de multimodalité et d’intermodalité ainsi que leurs différentes composantes (offre, information, titres, contrôle, etc.). Une approche théorique des différents types de tarification sera aussi abordée.
Définitions
On entend par intermodalité la coordination des modes de transport sur un territoire pour accroître leur performance d’un point de vue global et faciliter leur utilisation.
A noter que nous utiliserons le terme d’intermodalité comme terme générique mais que ce terme regroupe en réalité plusieurs notions :
– l’intermodalité « de chaînage », qui est l’utilisation successive de plusieurs modes de transports au cours d’un même déplacement. Il peut s’agir d’intermodalité entre plusieurs modes de transport en commun utilisés de façon successive au cours d’un même déplacement (bus urbain, puis métro, puis train par exemple). Mais l’intermodalité peut aussi se faire entre des modes de transports individuels (modes doux compris) et des modes de transports collectifs (accès en voiture à un parc relais, puis utilisation des transports en commun urbains par exemple). Dans ce premier cas, une solution intermodale a pour but de minimiser la contrainte liée à la discontinuité de l’offre.
– la multimodalité, qui est la possibilité d’utiliser alternativement plusieurs modes de transport sur une même liaison. Elle est aussiappelée intermodalité alternative. Elle est basée sur la notion de choix et le client multimodal va orienter le choix du mode utilisé différemment selon le jour, l’heure ou le motif de son déplacement. Il cherche à optimiser l’usage de la gamme de transport disponible en jouant sur les avantages de performance intrinsèques à chaque mode.
La notion de territoire est également importante et doit faire l’objet d’une réflexion dans la mise en place d’une tarification intermodale. Dans le cas d’intermodalité « de chaînage », il s’agit de relier entre eux des réseaux qui sont la plupart du temps gérés par des acteurs différents (AO urbaines, interurbaines…). Pour la multimodalité, la notion de bassin de vie est plus importante. Il s’agit en général d’offrir une réponse à une mobilité quotidienne depuis le lieu de résidence d’une population vers son lieu de travail, d’étude, de loisir, d’achats, etc…
Le but de la mise en place de l’intermodalité est bien d’accroître la performance globale des modes de transport, notamment des transports en commun. En effet, en améliorant la synergie et les interfaces entre les modes de transports, on facilite leur utilisation.
Le rôle du transporteur est alors de rechercher des solutions qui facilitent la vie quotidienne des clients mais le développement de l’intermodalité doit aussi passer par une volonté des AOT de trouver des compromis en termes de prise de décision et de financement des projets. Les projets d’intermodalité font intervenir différentes autorités organisatrices, aux intérêts politiques et économiques souvent divergents. Il en va de même pour les transporteurs, qui, s’ils sont complémentaires, sont aussi parfois concurrents (en particulier dans les projets de multimodalité).
Les composantes de la multimodalité
Les projets de multimodalité sont complexes car ils nécessitent la coordination non seulement des transporteurs et AOT, mais aussi d’éléments techniques propres à chaque réseau de transport.
Nous avons distingué 6 composantes différentes de la multimodalité qui doivent faire l’objet d’une coordination. Nous entendons par composantes tout élément qui entre en ligne de compte dans la réalisation et la réussite d’un projet intermodal. Ces composantes sont les suivantes
L’offre
Tout projet de tarification multimodale doit prendre en compte l’offre existante et voir dans quelle mesure elle est coordonnée. Si les transporteurs ne font pas l’effort de coordination de leur offre, les projets d’intermodalité peuvent être voués à l’échec puisqu’ils ne permettent pas aux clients de trouver un avantage à la nouvelle situation. Pour l’intermodalité de chaînage, l’important est que des correspondances soient assurées de la manière la plus efficace possible afin que le client n’ait pas des temps de correspondances dissuasifs, le but étant bien d’augmenter l’attractivité des transports en commun.
Concernant la multimodalité, le client peut choisir entre différentes alternatives. Les offres doivent donc être complémentaires plus que concurrentes. La complémentarité peut se faire sur les horaires, sur la finesse de la desserte ou encore sur la rapidité des modes…
L’information
Pour qu’un projet d’intermodalité soit attractif, il faut que le client puisse disposer de l’information de la manière la plus simple et la plus complète possible. L’information multimodale permet de favoriser l’utilisation des transports publics en renseignant les clients sur l’ensemble des possibilités de déplacements offertes par les transports en commun.
L’information multimodale peut être fournie soit par le biais des nouvelles technologies (Internet, téléphonie mobile, centre d’appel et de relations clients…) soit sur des fiches horaire papier, mais ce support est mal adapté à la complexité de l’information délivrée.
Les lieux d’échanges (pôles d’échanges multimodaux)
Le client des transports collectifs est très souvent amené à réaliser des correspondances entre modes au cours de son déplacement et les ruptures de charge constituent un élément essentiel du choix modal. Pour que l’intermodalité ne soit pas ressentie comme une contrainte, il est important d’aménager les lieux d’interconnexion entre les modes. Cela permet de minimiser l’impact des correspondances et de proposer une chaîne de transport fluide. Cela passe par des aménagements physiques permettant un cheminement aisé et une attente confortable, une signalétique efficace et une information de qualité.
La distribution/commercialisation
Afin de faciliter l’acte d’achat des services multimodaux, le client a besoin d’un interlocuteur unique. Cela peut passé soit par la distribution des billets de chaque réseau par tous les transporteurs, soit par un la création d’un espace de vente multimodal dans lequel le personnel de vente est mutualisé (au sein d’un pôle d’échange par exemple, mais pas obligatoirement).
Dans le cas de la création d’un titre multimodal à part entière, il faut que les clients aient connaissance de son existence, ce qui n’est pas nécessairement évident. La commercialisation des nouveaux titres multimodaux doit donc faire l’objet d’une démarche particulière de marketing. Il faut donc évaluer un budget de communication et la répartition de son financement entre les acteurs, et créer une « campagne » de lancement grâce par exemple au marketing direct, au mailing, à des offres promotionnelles, des jeux concours, etc.
Tous ces points nécessitent donc une concertation entre les partenaires du projet, que ce soit les transporteurs ou les AO, afin de déterminer quelles sont les priorités en termes d’intermodalité et quelle participation financière chacun va apporter.
De la tarification à la tarification multimodale
Notre projet intermodal est un projet de mise en place d’une nouvelle tarification. Nous devons donc nous interroger, en plus des questions d’intermodalité, sur ce qu’est une bonne tarification en transports publics.
Les différents acteurs de la tarification
Les activités transports publics de la SNCF ont cette particularité d’avoir une production régie par un contrat avec une autorité publique (Autorité Organisatrice). Dans le cadre du transport régional, c’est la Région qui décide du service public de transport à mettre en œuvre sur son territoire, des dessertes et de la tarification.
En conséquence, pour les services régionaux, la SNCF, représentée par la Direction Déléguée TER ne décide pas du niveau de service et du prix et sa relation avec le client n’est pas directe. C’est Le Conseil régional (l’AO) qui décide. L’organisation est la suivante.
Les tarifications multimodales
Elles visent les clients qui utilisent de façon alternative plusieurs modes au sein d’un même espace, et ce en fonction du jour, de l’heure et du motif du déplacement.
– Elles permettent à la SNCF d’offrir des solutions à l’étalement urbain dans les grandes zones urbaines. En effet, dans ce type de zones, les déplacements correspondent à des distances qui s’allongent, contribuant à augmenter la pertinence du mode ferroviaire pour des déplacements quotidiens. En conséquence, la SNCF se doit d’avoir une offre adaptée en termes de desserte et de tarification.
Deux principes tarifairessont envisageables :
– l’adoption de la tarification urbaine : l’avantage est de s’appuyer sur une gamme déjà connue, ce qui simplifie la distribution et encourage à la multimodalité. Par contre, le problème est qu’on se limite aux frontières du PTU, et on ne prend donc généralement pas en compte l’ensemble du bassin de déplacement. De plus un problème de recettes peut se poser si l’écart de prix entre la tarification urbaine et la tarification TER est important.
Egalement les clients en frontière de PTU sont confrontés à un mur tarifaire et ce type de tarification est à préconiser uniquement sur les PTU à dimension limitée pour lesquels les enjeux financiers sont plus faciles à maîtriser pour la SNCF.
– la création d’une gamme multimodale spécifique : cette gamme vient en complément des gammes monomodales qui continuent d’exister. Il s’agit d’abonnements ou de billets unitaires multimodaux donnant libre accès et libre circulation sur les réseaux urbains et ferroviaires. Le prix des abonnements multimodaux est au moins légèrement supérieur au prix des abonnements monomodaux de chaque réseau. Ainsi, il n’est utilisé que par les clients réellement multimodaux. Dans ce cas, le risque sur les recettes est limité mais la création d’une nouvelle gamme conduit à complexifier l’information pour le client et oblige à mettre en place une communication spécifique.
Pour simplifier les gammes tarifaires et favoriser la multimodalité, on peut envisager à terme une substitution progressive de la gamme multimodale. Cela implique :
– de fusionner intégralement les gammes et les politiques tarifaires commerciales et sociales de chaque AO
– de résoudre le problème d’un niveau de prix compatible avec des déplacements courte distance (urbain) et longue distance (ferroviaire). C’est dans la résolution de cette seconde difficulté que trouve sa justification la tarification zonale.
Etat des lieux des tarifications intégrées
Dans une logique d’intégration très avancée des réseaux de transports collectifs, on peut réfléchir à la fusion progressive des tarifications des différents réseaux afin d’offrir une gamme unifiée aux clients des transports publics. C’est l’étape de l’intégration tarifaire.
Cette intégration passe alors, pour des territoires étendus, par la mise en place de tarifications zonales, afin de répercuter des tarifs différents en fonction de la distance parcourue. Il faut donc procéder à un découpage territorial.
Nous ne développerons pas plus cette problématique. Elle ne nous semblait pas concerner directement notre projet, tant elle nécessite un état d’avancement important des projets multimodaux et intermodaux, qui n’en sont pour l’instant qu’à leurs balbutiements en PACA. Nous nous contenterons donc d’une présentation rapide de ce que peuvent être les découpages territoriaux, présentée dans le tableau suivant.
La DDTER et l’intermodalité
Présentation de la DDTER Provence-Alpes-Côte d’Azur
L’activité TER de la Région PACA est rattachée à la branche « Transport Public » de la SNCF qui regroupe toutes les Activités dont la production est régie par un contrat avec une autorité publique. Elle dépend également au niveau local de la Direction Régionale de Marseille, qui regroupe et gère les 4 branches de la SNCF au niveau régional.
Territoire de compétence : la région PACA
Le périmètre de l’Activité TER correspond exactement au territoire de la Région PACA. Néanmoins, certains trains sous la responsabilité du TER PACA peuvent circuler sur le territoire d’autres régions (Languedoc Roussillon et Rhône Alpes) et en Italie.
Les TER exploités par la DDTER PACA circulent donc sur les 6 départements de la région PACA, à savoir, les Alpes-de-Haute-Provence, les Alpes-Maritimes, les Hautes-Alpes, les Bouches-du-Rhône, le Var et le Vaucluse.
La Direction Déléguée TER PACA
Elle est dirigée depuis environ un an par Claude Steinmetz et dépend d’une part de la Direction Régionale de Marseille au niveau local, et d’autre part de la Direction Transport Public au niveau national.
Elle est divisé en 3 pôles : le pôle gestion / conventionnement / qualité / marketing / commercialisation, le pôle projets et le pôle production.
La loi SRU, du 13 décembre 2000, a généralisé l’expérimentation de la régionalisation des transports publics ferroviaires d’intérêt public. Ainsi, depuis le 1er Janvier 2002, les Régions sont devenues Autorités Organisatrices de Transport. Dans le cas de la région PACA, le territoire sur lequel s’exerce le rôle d’AOT du Conseil Régional est celui de la Région entière.
Ainsi, l’ensemble des trains régionaux circulant en région PACA sont sous le contrôle du Conseil Régional. Sont donc exclus du domaine de compétence de la Région les trains gérés par la Branche VFE de la SNCF, à savoir les trains grandes lignes (GL, TEOZ, LUNEA) et les TGV. Les TER sont quant à eux gérés par la Région PACA qui en confie l’exploitation à la SNCF par le biais d’un contrat d’exploitation.
La région PACA a été une des régions expérimentales de la régionalisation. Le premier contrat d’exploitation entre la Région et la SNCF date donc de 1997. Un second contrat d’exploitation a ensuite été signé entre les 2 parties en 2002 pour une durée de 5 ans. Il arrivera à échéance le 31 décembre 2006 et c’est pourquoi la DDTER est actuellement en phase de reconventionnement. Ce nouveau contrat n’est pas encore signé mais il pourrait cette fois avoir une durée de 8 à 10 ans.
Les compétences de la Région
Le contrat stipule que la région est responsable de la définition de l’offre de service, à savoir : définition des lignes à desservir, des services routiers de substitution, des arrêts, des horaires, des tarifications, des services en gares, des conditions d’information des clients, des objectifs de qualité et de la nature et des caractéristiques des matériels utilisés.
La Région a par ailleurs un pouvoir de contrôle. La SNCF s’engage donc à fournir des tableaux de bords mensuels à la région qui peut vérifier les méthodes et outils servant à l’établissement de ces documents et s’assurer de la bonne exécution et du respect des obligations de la SNCF.
Missions et obligations de la SNCF
La SNCF est responsable de l’exploitation du service TER. Elle doit donc s’assurer de la qualité du service fourni et veiller au respect de 5 critères : la réalisation de l’offre, la ponctualité, la qualité des services à bord, la qualité en gare, et la qualité dans les cars. Des objectifs sont donnés à la SNCF sur ces 5 critères et font l’objet d’un système de bonus/malus en cas de dépassement ou non respect de ces critères. La SNCF s’engage par ailleurs à réaliser des études.
– La SNCF s’engage à assurer la continuité du service ferroviaire régional de transport public de voyageurs, sauf en cas de force majeur.
– La SNCF a la maîtrise de la conception et de l’organisation de la distribution des titres de transport.
Ce que dit le contrat d’exploitation en matière de tarification
Pour la Région Article II.2 – Tarifs
Comme on l’a dit, c’est la Région qui décide des tarifs en application sur son territoire, en accord avec les principes tarifaires nationaux, mais aussi en accord avec la SNCF. « La Région décide des tarifs spécifiques qui s’appliquent au service ferroviaire régional dont elle a la compétence, dans le respect des principes du système tarifaire national et des tarifs sociaux décidés par l’Etat. (…) Les décisions et modifications tarifaires relevant de la compétence de la Région, qu’il s’agisse de création, de suppression de titre, de modification de leur prix et/ou des conditions d’accès, interviendront après accord entre les parties. »
Dans le cas particulier de l’intermodalité, comme d’autres signataires que la SNCF et la Région interviennent, des conventions spécifiques sont signées, afin d’intégrer les particularités liées à ce type d’accords. « Les accords faisant intervenir d’autres partenaires que les signataires, comme les dispositifs de tarifications combinés, font l’objet de conventions particulières et donnent lieu à un avenant au présent contrat. »
Cependant, le contrat stipule qu’en matière de tarification, la SNCF peut être force de proposition auprès de la Région. « La SNCF peut présenter à la Région des propositions en matière tarifaire, cohérentes avec les objectifs de la Région. ».
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Table des matières
Remerciements
Préambule
Partie 1 – Eléments de cadrage du projet multimodal
1. Intermodalité et multimodalité : définitions
2. De la tarification à la tarification multimodale
3. La DDTER et l’intermodalité
Partie 2 – Problématique de la mission : les enjeux de la multimodalité
1. Pourquoi le choix d’une tarification multimodale entre Martigues et Marseille ?
2. Les freins et motivations à la mise en œuvre d’une tarification multimodale
Partie 3 – Eléments de méthodologie : la création du projet technique
1. Mise à plat de l’offre de transport actuelle entre Martigues et Marseille
2. Etude de marché élémentaire
3. Coordination entre les acteurs
4. Description technique du projet
4. Synthèse du projet
Partie 4 – Perspectives et limites 66
1. État d’avancement du projet
2. Enjeux de la présentation aux AO
3. Les recettes
4. Valorisation de la nouvelle offre
5. Limites du projet
Conclusion – Quel développement de la multimodalité pour l’avenir?
Table des matières
Bibliographie
Annexes
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