Méthodologie et étude des artistes francophones canadiens du domaine musical

Télécharger le fichier pdf d’un mémoire de fin d’études

Le français et la culture au Canada

Le processus de légitimation de la langue française au Canada fut lancé par l’article 133 de la Loi constitutionnelle de 1867. Celle-ci établira le « Confédération Canadienne », composée du Québec, de l’Ontario, du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Ecosse, le reste du territoire étant des colonies britanniques (Terre-Neuve, la Terre de Rupert, les Territoires du Nord-Ouest et la Colombie-Britannique).
L’article 133 est l’unique article de la Loi constitutionnelle de 1867 à aborder la question linguistique: « Dans les chambres du Parlement du Canada et les chambres de la Législature de Québec, l’usage de la langue française ou de la langue anglaise, dans les débats, sera facultatif ; mais, dans la rédaction des registres, procès-verbaux et journaux respectifs de ces chambres, l’usage de ces deux langues sera obligatoire. En outre, dans toute plaidoirie ou pièce de procédure devant les tribunaux du Canada établis sous l’autorité de la présente loi, ou émanant de ces tribunaux, et devant les tribunaux de Québec, ou émanant de ces derniers, il pourra être fait usage de l’une ou l’autre de ces langues.
Les lois du Parlement du Canada et de la Législature de Québec devront être imprimées et publiées dans ces deux langues. »
Ce sera le premier élément de droit imposant la langue française au Canada mais, qui dans les faits, était un moyen d’imposer le bilinguisme au Québec et à ses administrations. Mais c’est seulement à partir de 1963 qu’apparaîtra une politique linguistique au travers la Commission royale d’enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme, autrement appelée « Commission Laurendeau-Dunton ». Cette commission recommanda la mise en place d’un bilinguisme institutionnel de l’Etat, estimant comme étant le rôle de ce dernier d’être bilingue et non celui du peuple canadien. Cette politique visait à soutenir la diversité et le développement de ces « deux sociétés (dont l’une étant le Québec) » composant le Canada. La défiance du gouvernement fédéral vis-à-vis du Québec eut pour effet la mise en place non pas d’une politique valorisant ces deux sociétés, mais d’une politique axée sur le bilinguisme et le multiculturalisme. Une politique qui isolera d’autant plus le Québec. Ainsi, à la suite de la Révolution tranquille, en 1977, aboutira l’adoption par l’Assemblée nationale du Québec de la Charte de la langue française, communément appelée la loi 101. Cette loi définira la langue française comme langue officielle du Québec. Une loi qui sera mise en cause par la Loi constitutionnelle de 1982. Celle-ci imposera le bilinguisme des institutions fédérales (et non pas provinciales). La Charte des droits et libertés qui était incorporée à la Loi constitutionnelle de 1982 porta sur l’enseignement dans la langue de la minorité de langue officielle (Article 23).
« Article 23
1) Les citoyens canadiens :
– a) dont la première langue apprise et encore comprise est celle de la minorité francophone ou anglophone de la province où ils résident,
– b) qui ont reçu leur instruction, au niveau primaire, en français ou en anglais au Canada et qui résident dans une province où la langue dans laquelle ils ont reçu cette instruction est celle de la minorité francophone ou anglophone de la province, ont, dans l’un ou l’autre cas, le droit d’y faire instruire leurs enfants, aux niveaux primaire et secondaire, dans cette langue.
2) Les citoyens canadiens dont un enfant a reçu ou reçoit son instruction, au niveau primaire ou secondaire, en français ou en anglais au Canada ont le droit de faire instruire tous leurs enfants, aux niveaux primaire et secondaire, dans la langue de cette instruction. »
En s’imposant à toutes les provinces, cet article remettra en cause l’unilinguisme Québécois mis en place au travers de la loi 101. La Charte de la langue française prévoyait en effet, que seuls les enfants dont le père ou la mère ayant reçu un enseignement en anglais au Québec puissent bénéficier du droit à fréquenter l’école anglaise au Québec. Au niveau des autres provinces, l’Article 23 impose aux enfants d’avoir fréquenté une école primaire française (au canada, mais hors-Québec, le primaire désigne l’enseignement précédent le lycée, dit secondaire) pour pouvoir inscrire leurs propres enfants en école primaire française.
La Loi sur les langues officielles de 1988 poursuivra l’institutionnalisation du bilinguisme autour de six aspects.
– Le premier imposant le bilinguisme au Parlement ainsi que dans tous les actes législatifs et documents émanant d’une institution fédérale et donnant au français et l’anglais la même valeur légale.
– Le second rendant tout tribunal fédéral bilingue, où chaque citoyen puisse s’y faire entendre dans l’une des deux langues officielles de son choix.
– Ce dernier est repris par le troisième aspect en l’appliquant aux institutions fédérales, chaque service devant être accessible dans chacune des deux langues officielles.
– Le quatrième établissant le français et l’anglais comme langues de travail des institutions fédérales, à la condition que le milieu soit propice à l’utilisation des deux langues et qu’il y ait un besoin officiel (comprendre ici une demande). En cela, le gouvernement s’engage vers une égalité des chances à l’emploi.
– Le cinquième aspect porte sur la promotion du bilinguisme par le gouvernement fédéral, donnant au secrétaire d’Etat le pouvoir d’intervenir à l’échelle nationale, provinciale et municipale pour mettre en place les mesures qu’il estime nécessaire à la valorisation du bilinguisme.
– Le dernier aspect précise les responsabilités et pouvoirs du commissaire aux langues officielles du Canada, celui-ci étant en charge de l’observation et du développement du statut du bilinguisme institutionnel.
La Loi de 1988 sera complétée par le Règlement sur les langues officielles adopté en 1991. Ce règlement créera deux catégories en se basant sur la part de la minorité linguistique (entre langues officielles) dans un ensemble urbain. La première, appelée régions métropolitaines de recensement (RMR) correspond aux grands centres urbains comptant au moins 100 000 habitants (32 sur l’ensemble du Canada). Pour les RMR ayant une minorité d’au moins 5000 habitants les bureaux des institutions fédérales doivent fournir leurs services dans les deux langues officielles et pour les RMR de minorité de moins de 5000 les deux langues officielles doivent être proposées dans les « services clés » : bureau de poste, centres d’emploi ou de ressources humaines, programmes de la sécurité du revenu, bureau de l’impôt, bureau de Patrimoine canadien et bureau de la Commission de la fonction publique. La seconde catégorie correspond aux subdivisions de recensement (SDR), étant les municipalités, petites villes ou régions rurales, celles-ci devront proposer dans les deux langues dans leurs services si elles possèdent une minorité de 500 habitants représentant 5% de la population de la SDR.
Le Canada étant un gouvernement fédéral, chaque province possède son parlement, son gouvernement (premier ministre, ministres), son lieutenant-gouverneur, son budget, ses tribunaux, etc. Les provinces ont ainsi souveraineté, tant que celles-ci restent dans le cadre légal définit par le gouvernement, sur la propriété et les droits civils, le social, la santé, l’éducation, l’administration de la justice, les institutions municipales, etc. Les provinces peuvent lever un impôt sur le revenu et percevoir des droits de licence. Certaines d’entre elles reçoivent des paiements de transfert et/ou de péréquation du gouvernement fédéral en vertu d’ententes administratives entre les deux ordres de gouvernement.
Ainsi, chaque province a sa propre régulation de la langue française sur son territoire.
Par conséquent, il est nécessaire d’en faire un rappel succinct :
L’Alberta autorise le français dans son Parlement mais celui-ci peut adopter et imprimer ses lois uniquement en anglais. De plus, bien qu’il soit possible d’obtenir un procès en français, les francophones ne bénéficient pas du droit d’être compris.
La Colombie-Britannique s’en tient aux lois fédérales permettant l’utilisation du français avec interprètes dans les tribunaux.
L’Ile-du-Prince-Edouard : les lois sont déposées, modifiées, adoptées et publiées à la fois en anglais et en français. En terme d’Education, elle respecte les dispositions de l’article 23 tout en ayant le pouvoir d’exiger un minimum de 25 élèves sur trois années scolaires pour ouvrir une classe française.
A Manitoba, pour qu’un député puisse s’exprimer en français il doit préalablement en informer le Président de l’Assemblée. De plus, bien que le système judiciaire étant à majorité unilingue anglophone, le gouvernement de Manitoba a mis en place un système de traduction en simultanée. A cela s’ajoute la capitale, Winnipeg, comportant une des communautés francophones la plus large du Canada. La Charte de la Ville de Winnipeg de 2002 impose le bilinguisme à une grande majorité de services municipaux. En terme d’éducation, la Loi sur les écoles publiques de 2004 exige de « la commission scolaire de langue française dispense au moins 75 % de l’enseignement en salle de classe en français, dans chaque classe » (art. 21.31) tout en rendant l’anglais comme matière obligatoire mais ne pouvant dépasser 25 % de l’enseignement en salle de classe. L’article 21.32 impose l’utilisation du français dans l’administration et le fonctionnement de la division scolaire de langue française.
Le Nouveau-Brunswick est l’unique province du Canada qui, administrativement, est officiellement et légalement entièrement bilingue du fait de sa loi provinciale : Loi sur les langues officielles de 2002.
La Nouvelle-Ecosse de par sa Loi sur l’éducation (modifiée en 2004) reconnaît le droit à l’éducation, sans frais, soit en anglais soit en français. Elle institue aussi la mise sur pied du Conseil scolaire acadien provincial (art. 11) et concrétise pour les parents francophones et acadiens de la province le droit constitutionnel à l’éducation en français en tant que langue maternelle pour leurs enfants, ainsi que le droit de gestion du système éducatif.
En Ontario, où l’unilinguisme fut imposé jusqu’en 1927 par le Règlement 17, l’anglais est l’unique langue officielle mais du fait de son importante communauté francophone le bilinguisme administratif est obligatoire dans les zones où la concentration francophone est la plus élevée. L’Office des affaires francophones, créée en 1986, est en charge de faire la liaison entre les communautés francophones de l’Ontario et les ministères ou organismes
gouvernementaux. Elle élabore les politiques et programmes pour les prestations de services en français aux Francophones de l’Ontario. L’Ontario assure que tout élève a droit à l’enseignement dans la langue maternelle de l’un de ses parents.
Le Québec, officiellement français est entièrement bilingue administrativement (Loi constitutionnelle de 1867). Les enfants issus de la minorité linguistique (ici l’anglais) ont le droit à l’enseignement en anglais.
En Saskatchewan, l’anglais reste la langue officielle. Au civil seul l’anglais est reconnu, le pénal étant de la juridiction fédérale est bilingue. Le Bureau de la minorité de langue officielle est en charge de l’éducation française.
A Terre-Neuve, l’accès à l’école française est laissé à la discrétion des conseils scolaires, lesquels peuvent établir, maintenir et faire fonctionner une école de français langue maternelle dans laquelle seront dispensés des programmes scolaires. La minorité francophone dispose d’un conseil scolaire pour gérer ses écoles.
Les trois territoires du Canada sont subordonnés au gouvernement fédéral et leur administration est attribuée au Parlement canadien. Ainsi, Yukon, Nunavut et dans les territoires du Nord-Ouest sont soumis au bilinguisme, mais les langues autochtones sont reconnues elles-aussi. Ainsi, les citoyens ont le droit de s’exprimer dans leur langue maternelle aux tribunaux (autant en pénal que civil) mais pas nécessairement d’être compris (la loi ne le garantissant pas). En matière d’éducation, les enfants ont le droit de recevoir leur enseignement en la langue maternelle de leurs parents.
Mon sujet portant sur les artistes francophones canadiens, il convient de présenter la politique culturelle canadienne et les organismes soutenant la création artistique afin de saisir le contexte dans lequel ces artistes évoluent.
La politique culturelle du gouvernement canadien repose principalement sur le ministère du Patrimoine canadien et de deux organismes culturels, le Conseil des arts du Canada et le Centre national des Arts. Ces deux derniers sont des sociétés à vocation culturelle autonomes qui rendent compte de leurs actes au Parlement par l’entremise du ministre.
Le ministère du Patrimoine canadien a la responsabilité d’élaborer les politiques relatives aux arts et de soutenir financièrement certaines activités artistiques. Il soutient financièrement les activités et les organismes artistiques par la voie des ententes fédérales-provinciales de développement culturel.
Le Conseil des arts du Canada, créé en 1957, a pour objectif de « favoriser et de promouvoir l’étude et la diffusion des arts ainsi que la production d’œuvres d’art ». En cela, il offre des prix, des fonds de dotation, des subventions et des services aux artistes professionnels et aux organismes artistiques d’un bout à l’autre du Canada.
Le Centre national des Arts, créé en 1969, a pour mandat de développer les arts d’interprétation dans la région de la capitale nationale et d’aider le Conseil des arts du Canada à développer les arts d’interprétation ailleurs au Canada. Ses principaux volets sont : l’Orchestre du CNA, le Théâtre français, le Théâtre anglais et la Danse, sans oublier le festival Scène et CNA Présente.
A l’échelle du Québec, la politique culturelle prendra une place centrale dans la politique provinciale à partir des années 60, commençant par la création du ministère des Affaires culturelles (MAC) en 1961. Elle sera suivie par l’Office de la langue française en 1961, la Délégation générale du Québec à Paris en 1962, le Service du Canada français d’outre frontières en 1963, la Direction générale de l’immigration en 1966 et par la Radio Québec en 1968. La politique culturelle du Québec est, depuis 1992, focalisée sur 3 points : l’affirmation de l’identité culturelle québécoise, le développement de la création artistique et l’accès et la participation des citoyens à la vie culturelle. Le Nouveau-Brunswick est officiellement bilingue (loi de 1969). Elle a deux grandes politiques culturelles : l’une axée sur les arts, le patrimoine et les industries culturelles et l’autre sur la langue et la culture.
L’Ontario opère, à partir des années 1990, une décentralisation des responsabilités du gouvernement vers les villes ainsi que vers les secteurs privés et bénévoles. En ce sens, une douzaine d’organismes, de conseils et de commissions autonomes, qui relèvent tous du ministère du Tourisme et de la Culture, gèrent la très grande majorité des programmes culturels.
Saskatchewan aura pendant longtemps utilisé la culture comme un instrument de développement économique. Mais avec la création en 2002 du ministère de la Culture, de la Jeunesse et des Loisirs, Saskatchewan semble considérer la culture comme un moyen de développement communautaire bien que le secteur culturel dépende toujours de financements privés et du bénévolat.
La Colombie-Britannique se distingue des autres provinces canadiennes par le rôle et la part des investissements des gouvernements locaux dans le domaine de la culture.
Cette partie n’avait pas vocation à présenter le fonctionnement politique et institutionnel du Canada envers la Francophonie et la culture dans son entièreté, mais à simplement permettre au lecteur de se représenter le statut occupé par la langue française au Canada ainsi que le contexte culturel dans lequel s’ancre mon sujet d’étude.

Méthodologie et étude des artistes francophones canadiens du domaine musical

L’enquête sociologique dispose d’un ensemble varié d’outils et d’approches différentes et complémentaires. Nous sommes le produit de notre formation sociologique, pour cette raison il est nécessaire de rappeler les différentes théories, approches sociologiques définissant la façon dont nous abordons le sujet. Nous suivrons ce rappel par une présentation du processus par lequel j’ai délimité mon sujet et la méthodologie que j’ai employée. Dans une seconde sous-partie, j’exposerais les résultats obtenus à l’issue de mon enquête et leur analyse.

Elaboration du sujet et méthodologie

Le Canada est défini par son libéralisme et son multiculturalisme. Ainsi, s’intéresser à la Francophonie au Canada ne peut se résumer à la langue, la francophonie désigne ses locuteurs et les différentes communautés et groupes qu’ils constituent. Les communautés francophones ont leur culture, voir leurs cultures. En cela, il est nécessaire de rappeler quelques concepts sociologiques pour étudier les artistes francophones canadiens.
La définition proposée par Tylor dans Primitive Culture (1871) est la plus générale :« Culture ou civilisation, pris dans son sens ethnologique le plus étendu, est ce tout complexe qui comprend la connaissance, les croyances, l’art, la morale, le droit, les coutumes et les autres capacités ou habitudes acquises par l’homme en tant que membre de la société » (1971, p.).
Cette définition donne un cadre théorique de l’étude de la culture. De cette définition plusieurs approches théoriques et méthodologiques de la culture existent. Pour reprendre le modèle de classification donné par Matthieu Béra et Yvon Lamy dans « Sociologie de la culture »12 , on peut identifier trois grandes catégories : la première regroupant les théories critiques, la seconde les théories de l’intégration et la troisième les théories identitaires.
Les théories critiques ont une approche descendante de la culture, qui s’impose aux individus. On retrouve dans cette vision la sociologie de Bourdieu et Passeron avec l’arbitraire culturel qui, au travers de l’école, s’impose aux élèves. L’école devenant le lieu où les enfants vont intérioriser la culture légitime. De fait, Bourdieu dénonce une domination culturelle, domination qui s’établit, non pas seulement par l’institution scolaire mais aussi avec les médias de masse. Une critique partagée par l’Ecole de Francfort, notamment Max Horkheimer et Theodor Adorno. Ces deux derniers parlent « d’industries culturelles »13, ne s’intéressant pas aux pratiques culturelles mais aux modalités d’organisation d’un système industriel créant des produits culturels taillés ou calibrés en fonction d’une consommation de masse. Ces industries culturelles cherchent une marchandisation de l’Art et des arts accompagné par une standardisation des produits et biens culturels. Ils critiquent une culture s’uniformisant et aliénante.
Les théories de l’intégration voient la culture comme une responsabilité de l’Etat. Ici, l’école est vue comme responsable de la transmission des normes et codes communs à la société. Assimiler la culture partagée est ainsi, nécessaire à l’intégration sociale. Une vision défendue par Durkheim qui sera complétée par Joffre Dumazedier (1915-2002), à l’origine de la sociologie des loisirs en France. Dumazedier et sa sociologie des loisirs voit l’éducation scolaire, pourvoyeuse de la culture commune, dépendante d’une éducation populaire, se faisant par les loisirs. Par leurs loisirs et pratiques, les individus vont préserver leurs valeurs et normes « maternelles ». Ces deux types d’éducation sont vus comme indispensable pour l’intégration sociale d’un individu. Une approche qui aura abouti aux politiques culturelles de Malraux et plus tard celles de Jack Lang.
Les théories identitaires voient les pratiques culturelles comme des moyens de produire du singulier et des collectifs autour de ces singularités. Cette approche de l’identité est le propre de l’Ecole de Chicago. Une de ses grandes figures, Georges Herbert Mead (1863-1931) se focalisera sur la construction du soi au travers les interactions sociales. Comment l’individu construit sa singularité par ses expériences et groupes d’appartenance ? De cette question identitaire sont apparues les Cultural Studies. Les Cultural Studies étudient la culture dans son sens anthropologique, à l’échelle des groupes sociaux et leurs constructions identitaires au travers des processus de domination et de résistances. Portant une attention particulière sur les classes populaires, leurs cultures et les média-cultures, la notion du « culturel » s’y développe en lieu et place de « la culture ». Les Cultural Studies ont davantage une approche horizontale que verticale des cultures.
Des approches à contextualiser à l’échelle du Canada, pays multiculturaliste, les différentes cultures définissants des minorités ethniques. Pour ces minorités la langue est un des indicateurs le plus marqué de leur culture. « Le langage et le système de concepts qu’il traduit, est le produit d’une élaboration collective. Ce qu’il exprime, c’est la manière dont la société dans son ensemble se représente les objets de l’expérience. Les notions qui correspondent aux divers éléments de la langue sont donc des représentations collectives. »14
La question de la culture et du langage s’impose en thème central lors de la découverte de mon terrain et la recherche de mon sujet.
Comme je l’ai énoncé plutôt, notre sujet d’étude doit porter ou être lié à notre stage. Il existe plusieurs approches quant à la définition de ce que sera le sujet de recherche. On peut choisir un sujet pour l’intérêt que nous y portons et dans une logique plus pragmatique définir un sujet en se basant sur des critères d’accessibilités. J’ai commencé à réfléchir à mon sujet d’étude durant mon deuxième mois de stage, mais je pus réellement m’y concentrer vers juillet (soit durant mon quatrième mois de stage). Cela s’explique par diverses raisons. La première, et la plus évidente, est le temps nécessaire pour s’adapter à de nouveaux environnements (pays, ville, lieu de travail). Cette phase d’intégration entend la découverte et la compréhension des codes propres à la culture canadienne. Avant de penser un sujet il faut développer sa compréhension de la culture dans laquelle on évolue. Le Canada, en tant que pays libéral et multiculturaliste propose un modèle différent de celui que j’ai intériorisé en France. Il est donc nécessaire de passer par une phase de déconstruction pour tenter de s’objectiver. Remettre en questions nos conceptions est indispensable à tout sociologue et en tant qu’étudiant de sociologie, expérimenter un choc culturel est, selon moi, une expérience vitale à cette introspection. Une fois familiarisé avec le système culturel canadien et ontarien puis leurs modes de fonctionnements, il m’était difficile de dégager du temps parmi mes responsabilités pour m’attarder sur mon sujet de recherche. En effet, mon rôle en tant que stagiaire du Volet Arts et culture du Centre francophone de Toronto était de participer au développement et à la mise en place de la saison culturelle 2016/2017. Confronté à des problèmes d’immigration, le stagiaire en communication du Centre ne put venir au Canada transférant ses responsabilités aux miennes jusqu’en juin.
Ayant choisi d’étudier les artistes francophones canadiens de la sphère musicale en définissant mon sujet selon plusieurs critères, j’ai commencé mes recherches de terrains en juin. Il m’apparaissait indispensable de sélectionner le sujet qui s’appuierait sur les ressources exclusives auxquelles j’avais accès au sein du Centre francophone de Toronto et de par mon statut de coordinateur au volet Arts et culture. Dans un premier temps j’ai pensé à étudier le public, la clientèle, du Centre francophone de Toronto mais celui-ci propose une grande variété de services. En effet, les services à l’enfance vont se focaliser sur l’éducation et l’aide médicale des enfants (avec de nombreux ateliers pédagogiques parents/enfants) ; le service des nouveaux arrivants apporte un soutien administratif, de mise en réseau et de recherche d’hébergement ; le service juridique permet d’être représenté au civil ainsi que d’avoir accès à des formations aux droits individuels ; il reste le service d’emplois, de santé mentale, de santé et finalement le volet Arts et culture. La clinique médicale est le service du CFT comptant le nombre le plus important de clients. Ainsi, le public du CFT est largement hétéroclite, d’un côté celui-ci a des clients présents au Canada depuis plusieurs générations, de l’autre des nouveaux arrivants. De plus, le positionnement politique du Canada permet le développement de la variété des communautés éthiques. En conséquence, le public du Centre francophone de Toronto ne se constitue pas en un groupe unique et homogène mais davantage en plusieurs groupes et communautés partageant simplement la langue française (en langue maternelle ou non). Pour cette raison, se focaliser sur les publics du centre n’aurait conduit qu’à l’élaboration d’un tableau statistique, en ajoutant à cela que les clients de la clinique et du service juridique sont anonymes. Une fois ce thème exclu, je réfléchis à un nouveau portant sur les employés du Centre francophone de Toronto. Ce sujet aurait étudié les différents profils d’individus travaillant dans une institution communautaire, en essayant d’en comprendre les particularités. J’ai abandonné ce thème pour plusieurs raisons pouvant être résumées ainsi : je cherchais à me focaliser sur une étude qualitative liée au multiculturalisme canadien. L’intérêt et l’attrait de s’intéresser à un modèle étranger au travers mon expérience française. Voulant produire une clé de compréhension d’un aspect de ce système j’ai donc opté pour un sujet portant sur les artistes canadiens ayant choisi de chanter et composer en français. Ce choix s’explique par mon accessibilité à ces artistes, en charge de la programmation culturelle du Centre francophone de Toronto nous disposions au volet Arts et culture d’une base de données et des contacts des artistes francophones que nous avions précédemment programmés. A cela s’ajoute la légitimité que me conférait mon statut lors de ma prise de contact avec ces artistes (ou avec leurs agents). Cet accès privilégié aux expériences personnelles des artistes me permettant de réaliser l’étude qualitative que je recherchais.
Il existe peu d’études se focalisant sur l’expérience personnelle des artistes francophones du Canada. Comme nous avons pu le voir précédemment, la Francophonie (désignant « le dispositif institutionnel organisant les relations entre les pays francophone15 ») et la francophonie (désignant les locuteurs français) occupent une place majeure dans l’histoire ainsi que dans la politique culturelle et identitaire canadienne. Le marché canadien de l’Art et de la culture s’organise autour de deux secteurs, le secteur francophone et le secteur anglophone. Deux secteurs au fonctionnement différent où la question sur les raisons expliquant le choix d’artistes à se consacrer au marché francophone se pose naturellement. Mon approche n’est donc pas de faire un état des marchés francophones et anglophones au Canada, mais de comprendre les motivations et dynamiques à l’œuvre au travers ces artistes francophones. Est-ce lié à leur communauté d’appartenance ? Ou bien dans une approche du marché musical comme industrie culturelle, selon la définition de Adorno et Horkheimer, et la valeur marchande du bien culturel ? Le marché anglais avec, notamment la proximité des Etats-Unis, offrant des perspectives professionnelles plus importantes face à un marché de « minorité ».
S’intéresser aux artistes francophones implique être conscient de la diversité des communautés francophones du Canada. En cela, mon sujet impose une certaine méthodologie. La sociologie se construit autour des outils que sont, les observations de terrains, les questionnaires, les entretiens, les statistiques et la recherche documentaire.
Pour mon sujet présent j’ai eu recours aux entretiens avec des artistes franco-canadiens issues de communautés francophones différentes, ainsi qu’à la recherche documentaire basées sur des travaux universitaires et gouvernementaux. Ne cherchant pas à produire de données quantitatives les outils y étant liés ne mettant pas utiles.
L’entretien semi-directif était l’outil le plus adapté à mon objet d’étude, les thèmes exposés servants de repères et cadre d’expression pour l’enquêté. Ma grille d’entretien reposait sur trois thèmes. Le premier s’attardait sur la définition de leur activité en leur demandant de se présenter en tant qu’artiste. Cette question, première posée durant les entretiens, amenait des réponses riches de données et informations généralement exploitées plus tard au cours des entretiens. A cette question sur leur identité artistique, les artistes tendent à exprimer les thèmes justifiant leur passion et investissement. Mon second thème portant sur l’éducation et l’expérience culturelle des artistes. L’ordre des thèmes abordé est essentiel, lorsque je commençais des entretiens par le thème de l’éducation, suivit par celui de l’identité artistique, j’obtenais bien moins de données. Je suppose que cela est lié au fait que demander à l’artiste de se définir le poussait à l’introspection, le rendant plus prompt à détailler ses expériences au cours du thème de l’éducation culturelle. De plus, ce premier thème me permettait de prendre connaissance des thèmes à exploiter durant le reste de l’entretien. Lors d’un entretien de ce type, où l’on cherche à comprendre les conditions amenant à l’investissement dans l’art d’une communauté en situation minoritaire, l’approche chronologique est clé : partir du moment présent pour par la suite, amener l’enquêté à questionner son expérience. Une fois fait, s’établissait entre celui-ci et moi une relation informelle, voire de confidence. Cette relation m’a quelque fois permis de recevoir des réponses au cours de mon troisième thème auxquelles je ne m’attendais pas. Mon troisième et dernier thème portait sur leur approche de l’art et du marché francophone. Me permettant de comprendre leurs visions et critiques de l’art et des arts francophones.
L’unique obstacle fut de réussir à réaliser des entretiens. Avant de passer par le réseau interne du Centre francophone de Toronto, j’avais tenté de contacter plusieurs artistes via leurs contacts officiels (leur agence de production ou leurs sites internet), tentatives qui n’aboutit pas. De plus, seuls les artistes dont j’avais les contacts directs, courriel ou téléphone personnel, me répondirent. En effet, une partie des artistes dont nous avions les contacts au CFT étaient en réalité les contacts de leurs agents. Les agents m’ayant répondu de l’impossibilité pour leurs artistes à pouvoir me consacrer du temps. Il est vrai que nous étions durant les mois de juin, juillet et août, période de l’année la plus riche d’activités culturelles. Ainsi, les artistes et moi-même n’avions que peu de temps libre, pour ces raisons l’ensemble de mes entretiens se réalisèrent par téléphone. Les entretiens téléphoniques ont pour principale défaut l’absence de présence physique de l’enquêté, il est donc impossible d’observer les réactions corporelles de ce dernier. Cela représente aussi une difficulté supplémentaire quant à l’émergence d’un cadre informel prompt à la mise en place d’un rapport de confidences avec l’enquêté. L’entretien téléphonique va rendre se procéder « d’humanisation » de l’enquêteur plus difficile. Le vocabulaire et le ton employés doivent davantage être pensés. D’un autre côté l’entretien téléphonique permet d’ignorer les contraintes géographiques et de temps. Même ainsi, il était difficile de trouver des moments propices à la réalisation d’entretiens téléphoniques, mes responsabilités au sein du Centre francophone de Toronto occupant la majorité de mon temps. Il est bon d’ajouter que j’ai tenté d’avoir des artistes représentant les différentes communautés francophones du Canada et le décalage horaire entre les régions était un aspect à prendre en compte. Il y eut plusieurs artistes m’ayant répondu, mais dont il fut impossible de convenir d’une date et d’une heure d’entretiens communes. Finalement, j’ai réussi à réaliser huit entretiens téléphoniques de durées allant d’une heure à une heure et demi. Une chose m’ayant surpris fut leur facilité à parler de leurs expériences personnelles (certain étant plus à l’aise une fois qu’ils eurent réalisé que l’entretien n’était pas à but journalistique).

Des arts et francophones divisés

Ces entretiens réalisés avec des artistes francophones âgés entre 29 et 47 ans m’ont permis d’identifier deux types de moteur à l’investissement dans l’Art musical francophone. Mes interviewés se catégorisent ainsi : les artistes engagés idéologiquement pour la préservation et le développement de leur culture, et les artistes francophones du fait de l’accessibilité du marché.
La responsabilité de la création artistique francophone.
Ces artistes engagés s’investissent dans la préservation de leur culture en assumant une certaine position de porte-parole. Ils estiment avoir le devoir de « performer en français », voyant l’Art comme outil de promotion et de communication de leur culture d’origine. Acte de résistance face à une culture dominante, certains des artistes interviewés s’inscrivaient dans cette logique sans le faire consciemment. Simon Poirier, membre du groupe franco-ontarien Mastik, répondait à ma question sur les raisons le poussant à s’investir dans l’art francophone : « Bas c’est notre langue. Celle que j’ai parlée toute ma vie. L’anglais a toujours été présent mais pas dans ma vie, je m’adresse à mes parents en français, à mes amis en français, j’ai quelques amis avec qui je parle plus en anglais mais majoritairement ça a toujours été ma langue. Je ne me suis jamais vraiment posé la question. » – Mastik, Simon Poirier, élevé dans la communauté francophone d’Ottawa, 10 Juillet 2016.
Ainsi, bien qu’ayant reçu une éducation musicale portant principalement sur le rock et folk américain des années 70 (Pink Floyd, Dire Straits,…), la question de faire de la musique en anglais ne s’est jamais posée. Les artistes issues de communautés restreintes, en situation minoritaire forte, parlaient tous d’une certaine responsabilité à chanter et créer en français. La langue maternelle est une des principales constituantes de l’identité, de sa construction à sa distinction. Exercer son art dans sa langue maternelle est donc un moyen de reconnaissance et de légitimation par et auprès du groupe d’origine.

L’accessibilité du marché francophone

Les artistes s’inscrivant dans la seconde catégorie ont un rapport plus pragmatique à l’art et son marché. Le marché francophone est plus facile d’accès, étant plus organique que le marché anglophone, se construire ou accéder à un réseau déjà existant. Il existe une grande variété d’institutions et associations chargées de l’accompagnement et du développement de l’art francophone et de ses jeunes artistes. Des concours tel que « Rond Point » (organisé en Ontario par l’Association des professionnels de la chanson et de la musique) vont permettre aux artistes d’entrer dans le réseau francophone. L’enjeu est de faire partie de celui-ci et il est plus facile d’y accéder que le marché anglophone car la compétition y est plus faible.
« Le marché francophone, surtout en Ontario, c’est très petit et dans le marché anglais on est un très très petit poisson dans un océan immense. Alors que dans le marché francophone tu es le même poisson mais dans un océan bien plus petit. Ça fait qu’on apprend à se connaître l’un l’autre, on devient des amis, on sait qui joue avec qui, qui est actif ou non. Et du fait que c’est plus petit, les opportunités arrivent plus vite, comme la notion du succès. Le mot se passe plus vite, lorsque quelqu’un travaille bien, ça se sait, un cercle plus petit. » – Kevin Daoust, 16 Juillet 2016.
Le réseau se mobilise de lui-même, il existe des structures d’accueil et ces structures s’appuient sur les artistes francophones confirmés, on observe une relation d’interdépendance, de cercle vertueux. Ainsi, du fait de leur statut de minorité linguistique (tant en étant la seconde langue officielle), les institutions ayant pour objectif de soutenir la création artistique francophone sont intégrées au sein des différentes communautés francophones. Face à un marché anglophone compétitif et isolationniste, le marché francophone s’impose par sa dimension communautaire forte et l’interdépendance de sa scène artistique. Les artistes francophones interrogés appartenant à cette catégorie et partageant une vision pragmatique du marché musical présentaient tous le marché musical anglophone comme un marché quantitatif, ne laissant que peu d’espace à la recherche artistique.
« En tant qu’artiste je suis un produit… Si je rentre dans le marché anglophone, je rentre dans la masse, je suis un parmi plusieurs. C’est clair qu’il y a un plus large public mais c’est beaucoup plus difficile de percer dans le marché anglophone et d’un autre côté moi qui suis un artiste très Texte, on s’entend que sur le marché anglophone ce ne sont pas ce type d’artistes qui sont mis en avant. Du coup coté stratégique, ce n’est pas intéressant. De l’autre côté de la médaille, je me retrouve en Ontario, à faire de la musique en Français et d’être dans un marché de niche. Donc bien plus facile pour moi de me distinguer et d’avoir une proposition artistique intéressante que de rentrer dans le moule et faire de la musique anglaise. » – Yao, élevé à Abidjan, 26 Juin 2016.
L’ensemble des artistes interrogés (dont certains travaillent aussi pour le marché anglais) dénoncent un marché anglophone où le besoin de productivité prend le pas sur celui de qualité. A cela s’ajoute un espace plus grand pour la création dans le marché francophone. De par sa taille beaucoup de sujets, de types d’œuvres ne sont pas présentes sur le marché francophone. Comme me le précisait Nathalie Nadon créatrice du groupe Les Chiclettes, avant la création de son groupe il n’existait pas de trio féminin musical jazz (sous forme de cabaret) :
« Quand je fais ma création je le fais en français, pas en anglais. Je pense que la raison c’est que, le bassin anglophone est plus gros donc on pense que l’on aura plus de personnes à venir mais ce n’est pas nécessairement vrai parce que c’est tellement difficile de faire des créations….
En fait moi je crée par manque, pour combler un besoin. » – Nathalie Nadon, élevée à Gatineau puis Montréal, 8 Juin 2016.
Il est plus facile de créer dans le marché francophone du fait de la plus grande quantité de subventions et la plus grande facilité pour leur obtention, la présence d’une demande liée à l’absence de compétition (sur certaines offres et secteurs) et il est plus facile de se diffuser. Les spectacles et ateliers artistiques que mes interviewés ont créés il y a plusieurs années sont encore à ce jour commandés par les diffuseurs.
On peut ainsi identifier ces deux types d’approches de l’art francophone par les artistes.
Les artistes de la première catégorie seront dans une logique de reproduction et préservation de leur culture d’origine. Que cela soit fait consciemment en se positionnement en acteur et représentant d’une culture, d’une communauté ou de façon inconsciente et lié à la construction identitaire (en permettant de s’affirmer et de revendiquer son appartenance à son groupe) comme le champ lexical de la famille (en parlant du monde de la francophonie) très présent au sein de leurs entretiens l’illustre. Cette première catégorie est possible grâce à la présence d’organismes et de canaux de diffusions permettant à leur culture et arts de s’institutionnaliser.
Dans la deuxième catégorie, on retrouve les artistes ayant rationnalisé leur approche du marché de l’art. Ces derniers se placent davantage dans un rapport personnel à l’art. Ils interrogent les différents critères nécessaires à leur réussite artistique.
Ces deux catégories regroupent les deux types de comportements que j’ai pu identifier et bien que certains des artistes se conforment à l’une de ces logiques, d’autres semblent avoir une double-approche. Mais il est nécessaire de rappeler le statut du marché francophone au Canada, il existe deux marchés, le marché francophone québécois et le marché francophone hors-Québec (que nous allons différencier au cours de la partie suivante), la survie du second le place dans un rapport d’interdépendance avec ses artistes. Cette interdépendance peut faire apparaître le comportement de certains artistes comme se rattachant à la première catégorie précédemment définie. Mais il faut garder à l’esprit quelle est la démarche première de l’artiste francophone. Les premiers rapportent leurs créations à un devoir tandis que les seconds à la faisabilité de leurs créations (faisabilités comprenant ici leur diffusion et la capacité de leurs œuvres à devenir populaires).
Ces deux logiques amènent la question des raisons de leur existence. Pour cela il faut s’intéresser aux profils des artistes interrogés. Il est possible de lier des comportements selon l’origine géographique et la communauté d’appartenance des artistes. Au travers de mes entretiens sont apparus trois grandes dynamiques liées au comportement artistique des interviewés. La première s’incarne au travers du Québec et son marché francophone artistique, la seconde au travers du marché francophone hors-Québec et la dernière au travers de l’art francophone des minorités issues de l’immigration (hors peuples fondateurs).
Le statut de l’artiste et la valeur de langue, un aspect commun aux artistes francophones
Il est bon de rappeler deux aspects que chacun des interviewés partagent. Dans un premier temps, tous se décrivent comme francophone et accordent à la francophonie un statut prioritaire dans leur vie personnelle allant de leur famille à leur éducation (tous ayant suivi un cursus francophone jusqu’au lycée). Etre francophone au Canada sous-entends partager une culture commune et tous les interviewés se qualifiait de francophone avant d’être canadien. Comme l’exprimait Nathalie Nadon : « Mon mari Michael ne comprenait pas que dans ma famille on ne communiquait qu’en Français alors que nous sommes capables d’échanger en anglais, mais je lui disais « mais voyons Michael on n’est pas des anglophones ! ». » – Nathalie Nadon, 8 Juin.
Il est important de signifier le lien émotionnel qui les rattachent à la langue française. Etre conscient de ce lien permet d’éviter de prendre l’attachement à la langue comme variable. Second aspect partagé par tous les artistes est leur diversité d’activité. Certains vont avoir ce qui est qualifié d’emploi de survie. L’emploi de survie est l’activité professionnelle sur lequel l’artiste s’appuie pour « survivre économiquement ». Le statut d’artiste au canada est définie comme entrepreneurs indépendants. Le statut d’intermittent du spectacle n’existant pas, les artistes ont souvent recours à « l’emploi de survie » qui s’avère souvent être des emplois de technicien de scène ou de son ou encore des emplois à temps partiels. Les autres artistes auto-entrepreneurs reste dans le secteur de la création en produisant différents supports, allant d’ateliers artistiques, l’écriture de pièces de théâtres,…
« La musique constitue mon activité principale, c’est tout ce que je fais et ça l’est toujours pour l’instant. Des fois je fais des ateliers, du coaching et fait des révisions d’écriture de textes pour d’autres. Surtout en Français, presque uniquement en Français. » – Anique Granger, 10 aout 2016.
Au Canada, et plus particulièrement dans le milieu francophone, la définition d’artiste sous-tend une diversification de l’activité artistique.
La profession d’artiste est un statut précaire, ainsi, notre première pensée quant au raisonnement des artistes est d’accéder au marché étant économiquement le plus viable. En ce sens, le marché québécois s’impose comme étant le plus attractif tandis que certains artistes franco-canadiens se focalisent sur le marché francophone hors-Québec.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Remerciements
Sommaire
Introduction
Partie I : Francophonie et les politiques linguistiques et culturelles du Canada
I – 1) Comprendre la Francophonie
I – 2) Le français et la culture au Canada
Partie II : Méthodologie et étude des artistes francophones canadiens du domaine musical
II– 1) Elaboration du sujet et méthodologie
II – 2) Des arts et francophones divisés
Partie III : Des arts québécois et des arts franco-canadiens hors-Québec
III – 1) Organisation des organismes et artistes franco-canadiens
III – 2) Québec et communautés francophones en situation minoritaire : deux identités
III – 3) Un engagement et une création artistique amenés à évoluer
Conclusion
Bibliographie

Télécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *