Une antenne est un dispositif destiné à recevoir ou émettre une information (texte, image, son, etc.) sous la forme d’une onde électromagnétique (EM). Typiquement, la transmission d’une information met en jeu une antenne émettrice et une ou plusieurs antennes réceptrices. On distingue généralement deux domaines d’étude d’un système de transmission : d’une part le codage de l’information et d’autre part la propagation de l’onde. La discipline dite du traitement du signal examine les aspects du codage et du décodage de l’information. Le signal désigne ainsi l’onde électromagnétique en tant que support de l’information. Sans entrer dans les détails, précisons simplement que ce signal est caractérisé par une onde porteuse simple (monochrome). L’information à transmettre se traduit alors par des (petites) variations de fréquences et/ou d’amplitude de ce signal monochrome (modulations).
Dans un autre cadre d’étude, celui qui nous intéresse, on se préoccupe du phénomène de la propagation des ondes électromagnétiques en laissant de côté l’information codée. Il s’agit essentiellement de déterminer l’énergie transmise d’un système à un autre : en réception, le rôle d’une antenne consiste à « récupérer » l’énergie EM de l’espace libre ; en émission il s’agit de répartir cette énergie dans l’espace libre de telle sorte que les récepteurs soient en mesure de la récupérer. Du point de vue énergétique, lorsque l’on s’intéresse à la propagation d’un signal de l’émetteur vers le récepteur, on néglige les modulations de l’onde porteuse et on se restreint à l’étude de la propagation d’une onde monochrome dont la fréquence de fonctionnement correspond à un canal de transmission.
Pour être opérationnelle, une antenne émettrice est soumise à des contraintes de qualité généralement exprimées dans un cahier des charges. Par exemple, la puissance transportée par l’onde émise dans l’espace libre doit respecter certains seuils : d’une part le signal doit être suffisamment fort dans la zone où des antennes réceptrices sont susceptibles de se trouver et d’autre part il doit rester faible dans la zone complémentaire afin d’éviter les interférences avec d’autres dispositifs de transmission. Plus précisément, la qualité d’une antenne se mesure à l’aide de grandeurs physiques caractéristiques. La conception d’une antenne revient donc à chercher des configurations (forme des composants de l’antenne, choix des matériaux, type d’alimentation, etc.) qui satisfont ces critères physiques pertinents. En vue du développement de techniques d’aide à la conception, la qualité d’un système est modélisée par une fonction numérique qui dépend de ces grandeurs physiques. Cette fonction est communément appelée fonction coût ou fonction objectif ou encore fonctionnelle (puisqu’elle dépend d’une fonction qui est le champ électromagnétique). Ainsi, on peut définir la conception optimale d’une antenne comme la minimisation (ou la maximisation) d’une fonction objectif.
Méthodes multiniveaux pour l’optimisation de forme de systèmes soumis à des EDP
Les méthodes numériques de résolution d’équations aux dérivées partielles (EDP) ont atteint une maturité qui leur permet de participer à des procédés d’aide à la conception en ingénierie. Parallèlement, le domaine de l’optimisation s’est considérablement développé avec les infrastructures de calcul. On dispose aujourd’hui d’un certain nombre d’algorithmes pour la résolution de problèmes de programmation non-linéaire, déterministes (méthodes de descente, simplexe) comme stochastiques (recuit simulé, algorithmes évolutionnaires, algorithmes par essaim de particules, etc.). Il paraît donc naturel de combiner ces deux domaines afin de proposer des stratégies automatiques d’aide à la conception basées sur la simulation. Pour cela, en vue de son optimisation, le système étudié est avant tout décrit au travers de paramètres de contrôle, discrets ou continus : composants, matériaux, topologie, géométrie, etc. Ce vaste domaine pose de nombreuses questions, de la théorie aux architectures informatiques en passant par la méthodologie de résolution.
On distingue deux grandes difficultés majeures qui peuvent mettre en défaut les algorithmes d’optimisation. La première est liée à la formulation du problème. En effet, la notion de conception optimale est basée sur la définition d’une fonction coût qui constitue un modèle de la qualité du système. S’il peut arriver que cette fonction possède un minimum global unique, il existe souvent de nombreux minima locaux vers lesquels les algorithmes sont susceptibles de converger prématurément (multimodalité). La deuxième est liée au processus itératif des algorithmes, qui sont soumis aux difficultés numériques classiques dues à la raideur (convergence lente).
C’est dans ce contexte que s’inscrit la présente thèse. Elle vise à contribuer à la méthodologie d’aide à la conception optimale d’une d’antenne émettrice, ou plus généralement d’une « structure rayonnante ». En particulier on s’attachera à formuler et examiner des stratégies hiérarchiques pour l’optimisation de la forme de réflecteurs. Sur la base de représentations hiérarchiques de la géométrie, ces méthodes s’inspirent en partie des méthodes multigrilles. D’une part elles cherchent à rendre les algorithmes moins sensibles à la multimodalité (robustesse), d’autre part elles cherchent à améliorer la vitesse de convergence.
Simulation de la propagation d’ondes en espace libre
Pour pouvoir évaluer les grandeurs utiles à l’estimation de la qualité de l’antenne, il est nécessaire de déterminer le champ EM rayonné par l’antenne en un point de l’espace Ω et en particulier en zone lointaine, là ou des antennes réceptrices sont susceptibles de se trouver.
D’un point de vue qualitatif la démarche est la suivante :
1. le champ électromagnétique incident connu en amont du guide (supposé parfait dans un premier temps, c’est-à-dire de longueur infinie) induit des courants à la surface des supports conducteurs du domaine extérieur (le cornet et/ou le(s) réflecteur(s)) ; ce champ est harmonique de fréquence f ;
2. le système de Helmholtz (1.9) exprimé sous la forme d’une équation intégrale (principe de Huygens) est résolu par une méthode de collocation (éléments finis de surface) pour déterminer la densité de courant surfacique sur S ; ce problème est bien posé [75, 13] ;
3. une partie du champ rayonné est réfléchie à l’intérieur du domaine D, c’est-à-dire dans le guide parfait ; un coefficient de réflexion modélise cette perte qui est déduite des solutions obtenues précédemment (par linéarité des équations) ; on obtient alors le rayonnement réel du guide ;
4. ces courants sont alors eux-mêmes sources d’ondes électromagnétiques : le champ électromagnétique rayonné dans l’espace libre résulte de la somme de tous ces champs (propriété due à la linéarité des équations de Maxwell) ;
5. enfin, le champ électrique en zone lointaine est déterminé à partir d’approximations asymptotiques lorsque la distance d’observation tend vers l’infini. Ces approximations sont valides dans la zone dite de Fraunhofer. Dans cette zone le champ EM peut s’écrire sous la forme d’une onde sphérique : elle est le produit d’une fonction dépendant des variables angulaires (direction de rayonnement) et d’une fonction dépendant de la variable radiale r de décroissance en 1/r .
Approche CAD-free (non paramétrique)
Le calcul d’analyse de la densité de courant repose sur la discrétisation des surfaces métalliques. L’ensemble des éléments (triangles, nœuds, segments, etc.) caractérise d’une part le domaine de définition de la variable d’état et d’autre part la structure discrète du domaine à optimiser. Chacun de ces éléments peut donc être considéré comme un degré de liberté du problème d’optimisation. Le maillage constitue donc à la fois le support des inconnues discrètes de l’état et les variables de conception. Cependant, les caractéristiques du maillage (finesse, anisotropie, etc.) sont avant tout déterminées par des contraintes liées au calcul d’analyse. Il n’y a pas lieu de penser que cette structure soit adaptée à l’optimisation. En particulier cette approche conduit à des problèmes de grande taille nécessaire pour la précision du calcul de l’état mais potentiellement surdimensionnés du point de vue de l’optimisation. Pour ces raisons on préférera une approche qui sépare la représentation discrète de la géométrie pour le calcul d’analyse de celle en vue de son optimisation.
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Table des matières
Introduction
1 Formulation de problèmes de conception optimale d’antenne
1.1 Équations de Maxwell
1.1.1 Formulation générale
1.1.2 Dépendance temporelle harmonique : système de Helmholtz
1.1.3 Conditions aux limites et conditions d’interface
1.2 Rayonnement des antennes à réflecteur
1.2.1 Modélisation d’une antenne en émission
1.2.2 Simulation de la propagation d’ondes en espace libre
1.2.3 Le logiciel SRSR
1.3 Caractéristiques typiques des antennes
1.3.1 Énergie et puissance électromagnétique en espace libre diélectrique
1.3.2 Intensité et directivité
1.3.3 Diagramme de rayonnement
1.3.4 Coefficient de réflexion d’une source guidée
1.4 Fonctions objectifs pour la conception optimale d’antenne
1.4.1 Problèmes inverses sur la puissance rayonnée en zone lointaine
1.4.2 Minimisation des pertes dans la source guidée
1.4.3 Optimisation multipoint sur une bande de fréquence
1.4.4 Optimisation bicritère
2 Optimisation numérique de forme : géométrie et algorithmes
2.1 Généralités
2.1.1 Formulation d’un problème d’optimisation de forme
2.1.2 Conditions d’optimalité
2.1.3 Méthodologie générale
2.2 Représentation de la géométrie
2.2.1 Approche continue
2.2.2 Approche topologique
2.2.3 Approche CAD-free (non paramétrique)
2.2.4 Approche paramétrique classique
2.2.5 Approche paramétrique Free-Form
2.2.6 Déformation de la surface par un champ normal
2.2.7 Contraintes sur les variables de conception
2.3 Algorithmes d’optimisation numérique
2.3.1 Enjeux
2.3.2 Algorithmes de descente
2.3.3 Algorithmes sans gradient
2.3.4 Hybridation
2.4 Diagnostic de la convergence
2.4.1 Taux et vitesse de convergence
2.4.2 Critère d’arrêt
2.5 Validation des algorithmes et illustration de cas pathologiques
2.5.1 Algorithmes de descente et illustration de la raideur
2.5.2 Algorithme PSO et illustration de la robustesse
2.5.3 Problème inverse sur la puissance rayonnée
Conclusion
3 Algorithme bigrille idéal pour l’optimisation de forme
3.1 État de l’art et enjeux
3.2 Définition d’un problème modèle géométrique
3.2.1 Problème de meilleure approximation
3.2.2 Fonctionnelle paramétrique
3.2.3 Application à la paramétrisation P1
3.3 Méthodes itératives de base
3.3.1 Rappels sur la convergence d’une itération linéaire
3.3.2 Itération de Jacobi
3.3.3 Accélération de Tchebychev, méthode de Richardson
3.3.4 Méthode de plus grande descente
3.3.5 Préconditionnement par une méthode de type quasi-Newton
3.3.6 Fonction d’amortissement
3.4 Algorithmes multigrilles
3.4.1 Opérateurs de prolongement et de restriction
3.4.2 Enrichissement progressif : Nested Iteration
3.4.3 Algorithme bigrille idéal
3.4.4 MG, FMG, FAS
3.4.5 Application des algorithmes classiques pour l’optimisation de forme
3.4.6 Redéfinition des opérateurs de transfert
3.4.7 Révision de l’algorithme bigrille idéal
3.4.8 Expériences numériques
3.5 Influence de la paramétrisation sur la raideur
3.5.1 Paramétrisation de Bézier
3.5.2 Paramétrisation B-splines
3.5.3 Polynômes orthogonaux
3.5.4 Influence de la dimension sur la raideur
3.5.5 Expériences numériques
Conclusion
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