Méthodes d’extraction de R. similis
Présentation de Radopholus similis : classification, morphologie
Généralités
Radopholus similis appartient à la super classe des nématodes, ordre des Tylenchida, famille des Pratylenchidae Thorne, 1949 (Siddiqi, 1963). Les membres de cette famille sont tous parasites obligatoires de plantes ; le genre Pratylenchus Filipjev, 1936, type de la famille, comporte des espèces dont le mode de vie est très proche de celui de R. similis (Siddiqi, 2000).
L’espèce R. similis a été décrite par Coob en 1893, sous deux noms : Tylenchulus similis pour les mâles et de Tylenchulus granulosus pour les femelles. Le dimorphisme sexuel est en effet très marqué (figure 1) : le mâle présente un capuchon céphalique très développé, des anneaux labiaux fins, un stylet avorté, un œsophage réduit ; il est probablement incapable de se nourrir (Van Weerdt, 1960 ; Siddiqi, 2000). La femelle et les juvéniles ont à l’inverse un gros stylet muni de forts boutons basaux, des anneaux labiaux épais. Le spécimen type mesure 580 µm de long par 21 µm de diamètre ; son volume est de 160 000 µm3 (Yeates et Boag, 2006). Siddiqi (2000) indique des tailles comprises entre 0,4 et 0,9 mm de long et un ratio longueur / épaisseur maximal compris entre 20 et 30 (soit 20 à 30 µm pour le plus grand diamètre).
La taille et surtout le diamètre des adultes peuvent en effet varier d’un individu à l’autre ; en général, les mâles sont un peu plus fins que les femelles, les femelles gravides sont plus épaisses que les jeunes femelles adultes. En examinant la progéniture d’une femelle isolée, Van Weerdt (1958) a obtenu des adultes dont la taille variait entre 580 et 785 µm pour 22 à 26 µm de diamètre.
La taille des œufs et juvéniles est indiquée dans le Tableau 1. Il est pratiquement impossible de distinguer les juvéniles mâles de stade 4 des juvéniles femelles de stade 4.
R. similis se reproduit normalement par voie sexuée (Kaplan et Opperman, 2000). Toutefois, en l’absence de mâle, les femelles non fécondées peuvent se reproduire par parthénogénèse
(Brooks et Perry, 1962) après s’être transformées en hermaphrodites syngoniques (qui s’autofécondent) 50 à 60 jours après leur dernière mue (Kaplan et Opperman, 2000). Tableau 1 : Taille en µm des différents stades de R. similis selon Van Weerdt (1958 et 1960). Note : le premier et le début du second stade larvaire se déroulent à l’intérieur de l’œuf. œuf juvénile stade 2 après éclosion juvénile stade 3 juvénile stade 4 mâle femelle Longueur 58-70 244-347 360-550 445-595 447-653 458-785 Largeur 23-28 12-14 14-18 16-24 14-21 17-27
Cuticule et glycocalix
Le corps est entièrement recouvert d’une cuticule de 0,55 µm d’épaisseur pour les femelles, et de 0,40 µm pour les mâles (Valette et al., 1997). Celle-ci est constituée essentiellement de cuticulines et de collagène, protéines hydrophobes riches en proline et lysine (Baldwin et Perry, 2004). Les cuticulines, principaux composants de la cuticule externe, sont très fortement liées entre elles par de nombreux ponts disulfures (Edgar et al., 1982). Certains composants secondaires de la cuticule, glycoprotéines et lipoprotéines sont hydrosolubles ; il s’agirait surtout d’enzymes, par exemple des peroxydases qui permettraient aux phytoparasites de détruire des composés émis par la plante hôte pour se défendre contre les nématodes (Baldwin et Perry, 2004). De plus, les Tylenchida, comme la plupart des nématodes, secrètent un “glycocalix”, couche de glycoprotéines (mucines) qui entourent leur cuticule. Cette couche de mucine est continuellement secrétée et perdue lors des mouvements du nématode (Bird, 2004). Cette couche a été surtout étudiée dans le cadre des interactions entre champignons ou bactéries nématophages d’une part, nématodes (Meloidogyne en particulier) d’autre part car c’est elle qui permet aux microorganismes d’adhérer au nématode (Bird, 2004). La cuticule entoure un volume à peu près constant de fluide et de tissus mous sous pression ; ces derniers forment un “hydrosquelette” (Chapman, 1958) incompressible et dont le volume ne peut varier qu’avec l’ingestion de nourriture, l’excrétion et la défécation (Baldwin et Perry, 2004).
Système locomoteur ; mouvements à l’échelle du nématode
Le système locomoteur repose sur des muscles qui sont pratiquement tous longitudinaux et qui sont attachés à la cuticule et entourent l’endosquelette (Baldwin et Perry, 2004). Chez les Pratylenchidae, comme chez la plupart des Tylenchida, il n’y a pas de muscles qui permettent à l’animal de comprimer le corps transversalement (Burr et Robinson, 2004). Ils ne peuvent ainsi avancer grâce à des contractions péristaltiques comme le font les lombrics (Quillin, 1999) ou certains Criconematidae (Robinson, 2004). Ces nématodes rampent comme les serpents, en ondulant le corps par rapport à son axe pour se propulser. Ce type de mouvement a été étudié par Wallace (1958b et 1958c, 1959, 1968) en filmant onze espèces de Tylenchida, de taille et de mode de vie varié, dans des films d’eau d’épaisseur variable sur divers supports. Sur la figure 2, au niveau de la zone ABCD, le nématode a contracté en (a) ses muscles droits CD et ses gauches AB sont relâchés ; en (b), il commence à contracter ses muscles droits A’B’ et relâcher ses gauches C’D’ ; en (c), ses muscles gauches AB sont contractés et ses droits CD relâchés. L’exosquelette étant incompressible, les forces de torsion s’exercent sur le milieu qui par réaction pousse le nématode dans l’axe (figure 3). En adaptant l’amplitude des “vagues”, leur fréquence et la pression exercée sur le milieu, le nématode provoque une poussée (résultante des vecteurs Ni de la figure 3), qui, si elle est supérieure aux frottements, lui permet d’avancer. En principe, ce mouvement par ondulation devrait permettre aussi bien la nage que la reptation. Toutefois, pour nager, il faut non seulement que le nématode bouge de façon à s’appuyer sur l’eau, mais aussi qu’il compense la gravité. La nage nécessite ainsi une amplitude de mouvement et une fréquence élevée que beaucoup de nématodes telluriques ne peuvent fournir (Wallace, 1968 ; figure 4) ; de plus, il faut que la réaction de l’eau au mouvement puisse porter le nématode, ce qui implique qu’il ne soit pas trop dense. Comme la majorité des Pratylenchidae, il semble que R. similis soit incapable de nager. La densité des nématodes, comprise entre 1,08 et 1,13 (Viglierchio et Yamashita, 1983) est même trop élevée pour qu’ils puissent rester en suspension dans l’eau (Seinhorst, 1962). Par contre, dans le sol, R. similis peut s’appuyer efficacement sur les agrégats solides. Il a cependant besoin d’un film liquide pour avancer dans les interstices du sol (Wallace, 1958a). En outre, il ne peut pas pénétrer dans les agrégats et ne peut emprunter que les pores dont le diamètre est supérieur au sien (Wallace, 1958b). Nous détaillerons les conditions liées aux déplacements dans la partie 8.5,
Conséquences
R. similis peut se déplacer dans le sol entre les agrégats mais pas à travers les agrégats et particules solides. Dans le sol, il ne peut être disséminé que par l’intermédiaire des réseaux de capillaires interstitiels. Ceux-ci doivent toutefois 1- présenter des diamètres d’ouverture supérieurs à la largeur du nématode pour permettre son passage ; soit au moins 12 µm pour les juvéniles les plus petits, 25-30 µm pour les femelles gravides 2- au-delà de 500 µm de large, R. similis ne peut plus se mouvoir dans ou à travers une fissure ; par contre, il peut être entraîné de manière passive 3- les conditions de déplacement seraient optimales dans des capillaires de 80 à 200 µm Enfin, de par la nature de son épiderme, il est très improbable qu’il puisse être absorbé ou adsorbé par la matrice du sol.
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Table des matières
Remerciements
Liste des figures
Liste des tableaux
Partie 1 : Introduction, données bibliographiques et problématique
1. Présentation de Radopholus similis : classification, morphologie
1.1 Généralités
1.2 Cuticule et glycocalix
1.3 Système locomoteur ; mouvements à l’échelle du nématode
1.4 Conséquences
2. Origine et répartition de R. similis
3. Biologie
4. Gamme de plantes hôtes
5. Répartition
5.1 Dans les sols
5.2 Dans les plantes hôtes : cas des bananiers
5.2.1 Dans l’espace
5.2.2 Dans le temps
6. Interaction avec la plante hôte : cas des bananiers
7. Survie de R. similis hors de sa plantes hôtes
8. Dissémination des nématodes – cas de R. similis
8.1 Anthropique, via le matériel de plantation
8.2 Anthropique, via le sol transporté par les outils
8.3 Par le vent
8.4 Par les eaux
8.5 Active, dans le sol
8.5.1 Echelle macroscopique
8.5.2 Echelle du nématode
8.5.3 cas de R. similis
8.6 Active, dans les racines
9. Populations de R. similis dans les racines
10. Population de R. similis dans les sols ; proportion sol / racines
11. Conclusion partielle
Partie 2 : contexte pédologique, méthodes d’extraction de R. similis
1. Contexte pédologique
1.1 Choix des type de sol
1.2 Granulométries
1.2.1 Cas d’un nitisol : parcelle Ponterre
1.2.2 Cas d’un andosol : parcelle Espérance Haut
1.3 Porosité naturelle
2. Méthodes d’extraction de R. similis
2.1 Des sols : par Baermann modifié
2.1.1 Principe – mode opératoire
2.1.2 Qualité des extractions obtenues
2.1.3 Efficacité des extractions de R. similis à partir du sol
2.1.4 Intérêt de la méthode
2.2 Des sols : par élutriation
2.2.1 Principe – mode opératoire
2.2.2 Qualité des extractions obtenues
2.2.3 Efficacité des extractions de R. similis à partir du sol
2.2.4 Avantages et inconvénients de la méthode
2.3 Des sols et racines : par centrifugation flottaison
2.3.1 Principe – mode opératoire
2.3.2 Qualité des extractions obtenues
2.3.3 Efficacité des extractions de R. similis à partir du sol
2.3.4 Efficacité des extractions de R. similis à partir des racines
2.3.5 Avantages et inconvénients de la méthode
2.4 Des racines : par aspersion (chambre à brouillard de Seinhorst)
2.4.1 Principe – mode opératoire
2.4.2 Avantages et inconvénients de la méthode
2.5 Des racines : par macération dans de l’eau oxygénée
2.5.1 Principe – mode opératoire
2.5.2 Avantages et inconvénients de la méthode
3. Coloration vitale de R. similis
3.1 Choix du colorant
3.2 Mode opératoire
3.3 Fiabilité de la coloration
3.4 Avantages et inconvénients de la méthode
Partie 3 : Survie de R. similis
1 Dans le sol
1.1 Objectifs ; principes généraux
1.2 Essai préliminaire
1.2.1 Matériel et méthode
1.2.2 Résultats
1.2.3 Conclusion partielle
1.3 Matériel et méthode
1.3.1 Essai 1 : sols tamisés et stérilisés par congélation
1.3.2 Essai 2 : sols non perturbés
1.4 Résultats
1.4.1 Essai 1 : survie dans les sols tamisés et stérilisés
1.4.2 Essai 2 : sols non perturbés
1.3.3 Comparaison entre les résultats obtenus lors de ces deux essais
1.5 Rapprochement avec des modèles de décroissance
1.6 Discussion
2 Survie dans les eaux de R. similis
2.1 Matériel et méthode
2.1.1 Principe
2.1.2 Obtention des solutions de sol
2.1.3 Solutions testées
2.1.4 Analyses statistiques
2.2 Résultats
2.2 Discussion
Partie 4 : Dissémination par les eaux
1 Observations préliminaires
2 Dissémination à la surface du sol sous simulateur de pluie
Description du simulateur de pluie
Publication pour Applied Soil Ecology n°1
3 En profondeur sur cylindres de sol
Publication dans Applied Soil Ecology n°2 (n°40, p. 299-308)
4 Étude à l’échelle de la parcelle
Publication dans Crop Protection n°1 (n°27, p. 1237-1243)
Discussion générale
Conclusion
Références bibliographiques
Annexes
Annexe 1 : Méthodes de lutte (cas des bananiers)
1- Lutte chimique
2- Systèmes couplant destruction des populations en place et replantation avec du matériel “sain”
3- Utilisation de variétés résistantes
4- Lutte biologique.
5- Autres méthodes de protections des bananiers
Annexe 2 : Protocoles normalisés
Extraction de nématodes par Elutriation
Extraction de nématodes d’un échantillon de racines par centrifugation-flottaison
Extraction de nématodes par aspersion (Chambre à brouillard)
Annexe 3 : Localisation des parcelles d’étude
Annexe 4 : Publications
Résumé
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