Méthodes d’évaluation de l’état nutritionnel des enfants
Facteurs liés à aux pratiques alimentaires
Pratique d’allaitement
Les pratiques alimentaires et d’allaitement constituent l’un des facteurs déterminants de l’état nutritionnel des enfants, qui à son tour affecte la morbidité et la mortalité infantiles. Le lait maternel est le premier élément d’alimentation et constitue un aliment irremplaçable pour le nouveau né et le nourrisson .Parmi ses avantages par apport au lait artificiel et les raisons pour lesquelles il est fortement recommandé : sa richesse en facteurs de protection (les anticorps transmis par la mère) et en nutriments spécifiques, ses risques faibles d’allergie, d’obésité et d’autre problèmes de santé en plus du lien fort qu’il établit entre la mère et son enfant. De plus, il tombe plus économique que l’allaitement au biberon, pour lequel il faut prendre en compte le coût du lait de substitution ou lait de vache, des biberons et des tétines, et du combustible utilisé pour la stérilisation. Par ailleurs, l’allaitement par le lait maternel prolonge le repos ovarien post partum de la mère, permettant ainsi des naissances espacées [52]. L’allaitement au sein est heureusement le principal mode d’allaitement pratiqué chez nos enfants, avec une prévalence moyenne de 48 %.D’après une enquête conduite en 2003 à l’hôpital Ibn Zohr à Marrakech [27], ce type d’allaitement avait un taux de 54 %. Une ancienne étude effectuée en 1997 à la ville d’Agadir [53] avait montré une fréquence d’allaitement au sein de 66%.Plus avant en 1989, on avait trouvé au CHU de Rabat un taux d’allaitement au sein de 75 % [54].Ces prévalences décroissantes au fil des années prouve donc le recul qu’accuse l’allaitement maternel au Maroc [55], comme dans la plus part des pays en développement, où on continue d’observer une progression déplorable de l’alimentation artificielle. La durée de l’allaitement maternel elle même tend à régresser, de même que sa pratique par les mères : La durée médiane d’allaitement au sein au Maroc était de 15,5 mois en 1992 [56], elle a baissé à 14 mois en 1997 [57]. La durée moyenne d’allaitement maternel selon notre étude est 13,85 mois. Elle est beaucoup mieux à ce qui est observé en Europe. A Rennes en France, une enquête conduite auprès de 150 mères allaitantes au sein à révélé une durée moyenne d’allaitement de dix semaines [58]. Or, l’Unicef depuis plusieurs années conseille une durée d’allaitement optimal de 2 ans ou plus [1], également l’OMS [2]. L’Académie Américaine de Pédiatrie quant à elle, elle recommande que l’allaitement au sein doit être poursuivi jusqu’ au moins 12 mois, et par la suite aussi longtemps que désiré par la mère et l’enfant [59]. De nombreuses raisons expliquent le déclin de l’allaitement maternel et son remplacement par le lait artificiel. Ces raisons peuvent être sociales, économiques ou culturelles. Dans notre série, la pratique de l’allaitement au sein est surtout rencontrée chez les mères rurales (57,54%), analphabètes (70%), inactives (96,22%), multipares (76,4%) et de bas niveau socio-économique (58,5%). Les mêmes résultats ont été rapportés par d’autres auteurs [53]. Autre étude réalisée en 2005 à la maternité Souissi de Rabat, dans le but de préciser les facteurs entravant le bon déroulement de l’allaitement maternel [60] a montré que les mères envisageant allaiter au sein étaient dans 90% des cas des femmes au foyer, et prés de la moitié étaient primipares. Chez ces femmes, les difficultés gênant un allaitement maternel antérieur étaient dominées à 80% par l’insuffisance lactée. 21,3 % de ces femmes exprimaient la nécessité de l’allaitement artificiel pour une meilleure croissance du bébé. Selon la même étude,la durée envisagée d’allaitement au sein était dans 30 % des cas inférieur à 6 mois . En fait, la pratique d’allaitement au sein diminue en milieu urbain, parce que là, les pratiques traditionnelles d’allaitement sont remplacées par les méthodes modernes (biberons, tétines…). Egalement, certaines femmes citadines évitent de donner le sein pour des préoccupations esthétiques (elles peuvent se mettre dans l’idée fausse qu’allaiter abîmera leur poitrine). L’activité professionnelle constitue un obstacle à la bonne conduite de l’allaitement maternel ; en effet les conditions et les lois du travail peuvent faire qu’il est difficile pour une femme de garder son travail et d’allaiter son enfant. Bien que notre pays aie une législation de travail qui autorise des arrêts de travail pour allaiter, la distance entre le domicile et le lieu de travail, ainsi que les problèmes de transport font qu’il est pratiquement impossible aux femmes de tirer profit de ces pauses autorisées. Les mères des milieux aisés n’allaitent pas assez au sein. Ces mères ont peut être un sentiment « sophistiqué » de nourrir au biberon. On commence maintenant à voir dans l’allaitement au sein une pratique primitive et dans l’allaitement au biberon un symbole de statut social [23]. La mère primipare a tendance à compléter par le lait artificiel. En général, le premier enfant né reçoit plus d’attention de sa mère, qui lui rajoute du lait industriel tout en ayant l’idée erronée de le supplémenter en vitamines dont le lait naturel est assez pauvre, alors là le rôle de sensibilisation des mères par les personnels de la santé parait primordial.D’après notre enquête, l’allaitement naturel recule au fur et à mesure que le nourrisson progresse dans l’âge, les mères justifient ça par le manque progressif de lait .Celui ci pour la majorité des femmes disparaît au bout de quelques mois. Cet état s’appelle « le syndrome d’insuffisance lacté » qui d’après plusieurs études, c’est un problème avant tout psychologique [23]. Un praticien face à cette situation doit encourager à poursuivre l’allaitement et ne jamais conseiller de compléter avec des biberons. L’état nutritionnel de nos enfants allaités au sein dans cet environnement se caractérise par un taux d’obésité de 26 %, c’est le même taux pour l’allaitement mixte et le double pour l’allaitement artificiel (13%).En fait, le lien entre l’obésité et l’allaitement maternel n’est pas encore élucidé. L’existence d’un effet préventif de ce type d’allaitement vis-à-vis une obésité ultérieure est aujourd’hui probable [52]. Une étude de la Harvard Medical School montre chez 15 000 sujets, que les nourrissons qui ont reçu plus de lait de mère que de formule infantile ou qui ont été nourris au sein pendant de plus longues périodes ont moins d’excès de poids au cours de l’enfance et de l’adolescence|62]. Une autre étude menée à Bethesda sur 2685 enfants âgés de 3 à 5 ans, indique elle, que l’association entre l’allaitement au sein, sa durée et le risque d’excès de poids dans l’enfance reste inconsistante. L’allaitement au sein est naturellement à recommander, mais il est probable qu’il n’est pas si efficace que cela dans la prévention de l’obésité lorsqu’on le compare aux habitudes diététiques et à l’activité physique ultérieures.
Pratique de la diversification
La diversification est l’introduction progressive des aliments autre que le lait maternel pour habituer l’enfant en l’espace de plusieurs mois à une alimentation variée proche de l’adulte. L’OMS préconise un allaitement maternel exclusif jusqu’à 6 mois, jusqu’à cet âge le lait maternel couvre parfaitement les besoins énergétiques de l’enfant [64]. Au-delà de 6 mois, l’OMS recommande que des aliments de compléments soient introduits dans l’alimentation, tout en poursuivant l’allaitement maternel jusqu’à 2 ans, car à partir de 6 mois le lait maternel devient insuffisant pour assurer la bonne croissance des enfants [64].Or, les résultats de l’enquête révèlent que ces recommandations ne sont pas observées : nous découvrons que les 2 tiers des enfants (65,28%) ont reçu leur premier aliment de complément plus précocement, avant 6 mois.31% seulement l’ont reçu correctement à l’âge de 6mois. Une telle diversification précoce à été exposée en d’autres études marocaines [41] et même étrangères : une étude française récente décrivant la pratique de la diversification alimentaire a montré que 52% des mères contactées avaient diversifié l’alimentation de leurs enfants avant 4 mois, 24% des enfants avaient pris du gluten à 4 mois. D’après cette enquête, les enfants allaités artificiellement avaient été le plus souvent diversifiés avant 4 mois, que ceux allaités au sein (57% contre 33%) [65]. On conseille de repousser la diversification alimentaire au mieux à 6 mois parce qu’une diversification trop précoce augmente le risque d’apparition ultérieure de manifestations allergiques à savoir l’eczéma, la diarrhée, et ce d’autant plus fréquent que l’enfant est issue d’une famille atopique, ou l’aliment introduit est réputé de nature allergénique (œufs, poissons.)[66].On prouve aussi qu’une diversification précoce a des risques de carences nutritionnelles, car l’introduction de nouveaux aliments entraîne une réduction de la consommation du lait maternel et donc les nutriments qu’il contient [66]. Nous comparons les modalités de diversification alimentaire entre milieu rural et urbain. Très souvent à la compagne, la diversification commence par nourrir l’enfant des constituants du plat familial (51% des cas) : un peu de légumes de ce plat est écrasé à la cuillère et puis arrosé de la sauce épicée et donné à manger à l’enfant. Or, on recommande à cet âge de ne pas saler, ni épicer l’alimentation de l’enfant. On conseille aussi de retarder l’introduction au-delà de la fin de la première année de l’ail, des oignons et des céleris [66], éléments indispensables au plat marocain. Un peu prés du quart des enfants ruraux (23%) ont reçu comme premier aliment de diversification de la pie du pain trempé dans du thé sucré. Ceci constitue une pratique alimentaire lamentable, d’une part à cause de l’introduction très précoce de pain contentent du gluten, aliment allergisant d’excellence [67] et à fort risque d’induire la maladie cœliaque, et d’autre part à cause du thé sucré. A la ville, les farines commerciales sont en général les premiers aliments introduits pour la diversification, avec un taux de 47 %.Il s’agit de préparations dont les origines sont des céréales, des légumineuses ou des tubercules. Ces farines ne sont pas nécessaires à l’alimentation de l’enfant, ils ont même un risque d’augmenter les apports glucidiques et de favoriser l’obésité. Le comité de nutrition de la Société Française de Pédiatrie a démontré qu’aucune de ces préparations ne peut aujourd’hui revendiquer une supériorité nutritionnelle, en particulier en référence au lait maternel, et l’effet fonctionnel de ces préparations n’est véritablement prouvé [68]. L’introduction de légumes et fruits ainsi que des produits laitiers (yaourt et fromage) vient en second lieu après les farines commerciales. L’introduction des aliments à risque d’allergie (gluten) et de carence (thé, épices..) existe en milieu urbain, mais avec des pourcentages plus faibles (2% et 1 %).
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Table des matières
INTRODUCTION
PATIENTS ET METHODES
I. CADRE DE L’ETUDE
1-Type de l’étude
2-Description du lieu et du temps de l’étude
3-Constitution de l’échantillon et description de la population d’étude
II. METHODOLOGIE
1-Méthodes d’évaluation de l’état nutritionnel des enfants
1-1 Evaluation clinique
1-1-1 Interrogatoire
1-1-2 Examen clinique
1-2 Evaluation biologique
1-2-1 Albuminémie et protidémie
1-2-2 Numération de la formule sanguine
1-2-3Fer sérique
2- Méthode d’analyse statistique
RESULTATS
I. CARACTERISTIQUES SOCIODEMOGRAPHIQUES DES ENFANT
1-Age
2-Sexe
3-Milieu de résidence
4-Rang dans la fratrie
I. CARACTERISTIQUES SOCIOCULTURELLES DES MERES
1-Niveau d’instruction des mères
2-Activité professionnelle des mères
3-Parité des mères
II. NIVEAU SOCIO ECONOMIQUE DES MENAGES
IV. ANTECEDENTS DES ENFANTS
1- Poids de naissance
2-Statut vaccinal des enfants
3-Développement psychomoteur
4-Allaitement
5–Diversification
6-Sevrage
7-Enquête alimentaire
V. ETAT NUTRITIONNEL DES ENFANTS
1- Etat nutritionnel selon les indices P/A, T/A, P/T
2- Etat nutritionnel selon l’indice de Quetleet
3- Etat nutritionnel selon l’indice du périmètre brachial
4- Etat nutritionnel selon l’indice de Kanawati et Mc Laren (PB/PC)
5-Etat nutritionnel selon les indices P/A, T/A, P/T selon des caractéristiques démographiques, économiques, socioculturelles et sanitaires
5-1-Age
5-2-sexe
5-3-milieu de résidence des enfants
5-4-Rang dans la fratrie
5-5- Niveau socio-économique
5-6- Niveau d’instruction des mères
5-7- Maladies infectieuses
6-Etat nutritionnel des enfants de 0 à 5 ans selon l’indice de Quételet selon des caractéristiques sociodémographiques, économiques et alimentaire
6-1-Age
6-2-Sexe
6-3- Milieu de résidence
6-4- Niveau socio-économique
6-5- Modes d’allaitement
6-6-Obésité et comportement alimentaire
VII. SIGNES CLINIQUES DE MALNUTRITION
1- Signes de la M.P.E modérée
2- Signes de la M.P.E sévère (Kwashiorkor /marasme)
3- Signes de carence en fer (anémie)
4- Signes de carence en vitamine A (xérophtalmie)
5-Signes de carence en vitamine C (scorbut)
6- Signes de carence en vitamine D (rachitisme carentiel)
7- Signes de carence en iode
8- Signes de carence en fluor
VII. EXAMENS BIOLOGIQUES DE MALNUTRITION
1-Taux d’hémoglobine
2-Protidémie
3- Fer sérique
DISCUSSION
I. GENERALITES
II. ETAT NUTRITIONNEL DES ENFANTS
1-Données cliniques
1-1 Signes de malnutrition protéino énergétique mineure et modérée
1-2 Signes de malnutrition sévère
1-3 Signes de carences spécifiques
1-3-1 Carence en fer (carence martiale
1-3-2 Carence en vitamine A
1-3-3 Carence en vitamine D (le rachitisme)
54 1-3-4 Carence en iode
1-3-5 Carence en fluor
1-3-6 Carence en vitamine C (scorbut
2-Données anthropométrique
2-1-Poids de naissance
2-2-Taille pour l’âge
2-3 -Poids pour l’âge
2-4- Poids pour la taille
2-5- Périmètre brachial
2-6-Rapport périmètre brachial/ périmètre crânien
2-5- Indice de masse corporelle
3-Données biologiques
3-1-Protidémie -Albuminémie
3-2- Taux d’hémoglobine
3-3- Fer sérique
III. FACTEURS DETERMINANT
1-Facteurs sociodémographiques
1-1 Age
1-2 Sexe
1-3 Rang dans la fratrie
2-Facteurs liés à l’environnement de l’enfant
2-1 Milieu de résidence
2-2 Niveau économique
2-3 Niveau d’instruction de la mère
3- Facteurs liés à aux pratiques alimentaires
3-1 Pratique d’allaitement
3-2 Pratique de la diversification
3-3-Sevrage
3-4- Croyances alimentaires dans la ville
3-5- Comportement alimentaire chez les enfants
4-Facteurs liés aux maladies infectieuses
CONCLUSION
ANNEXES
RESUMES BIBLIOGRAPHIE
Evaluation de l’état nutritionnel des enfants à la v
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