L’utilisation de la simulation numérique, encore balbutiante il y a une vingtaine d’années, est en pleine expansion dans le milieu industriel et tend à devenir incontournable. Son utilité est multiple. Tout d’abord elle permet de réduire les temps de développement de nouveaux produits en facilitant les différents choix à effectuer (processus de fabrication, type de matériaux, type de machine, etc.) et en remplaçant les études de faisabilité. Elle permet également de réduire les coûts en optimisant le procédé (gain matière, augmentation de la durée des outils, réduction des temps de cycle, etc.). Afin d’être autant que possible en adéquation avec la réalité, les simulations se doivent d’être précises, tout en conservant des temps de calcul compétitifs. C’est en ce sens qu’est développé au centre de mise en forme des matériaux (CEMEF) le logiciel Forge2005®, logiciel commercialisé par la société Transvalor. Dédié à la simulation de procédé de forgeage (déformation de solide massif par déformation plastique à l’état solide) en trois dimensions, il permet de réaliser des simulations multi-corps afin de connaître les sollicitations thermo-mécaniques imposées aux outils durant la mise en forme du lopin. L’étude de ces sollicitations aide à comprendre la fatigue et les casses constatées sur les outils lors du forgeage réel. On peut ainsi accroître la durée de vie des outils en optimisant la mise en données du procédé grâce au logiciel.
Le procédé de roulage est un procédé original, développé et breveté par SNR. On peut le ranger parmi les procédés de forgeage, et donc le simuler avec un logiciel comme Forge2005®. La simulation de ce procédé, comme souvent celle de nouveau procédé, nécessite un premier travail de mise au point. Il faut tout d’abord adapter le logiciel aux spécificités du procédé, à savoir la cinématique très particulière de l’outillage dans le cadre du roulage. Cette cinématique nécessite également de fournir un travail conséquent sur l’accélération des temps de calcul, afin de rester dans des grandeurs acceptables pour une utilisation à caractère industriel. Enfin une phase d’identification des coefficients thermomécaniques régissant le procédé s’avère souvent primordiale, afin d’être le plus prédictif possible. Ce travail, réalisé en partenariat avec les sociétés SNR et Transvalor, est ainsi dédié à la simulation de la mise en forme de bague extérieure de roulement à bille par le procédé de roulage.
La simulation du forgeage en 3D
Le problème mécanique
Formulation du problème continu
Le métal à forger est assimilé à un domaine fini Ω de frontière ∂Ω . Son comportement est régi par les principes fondamentaux de la mécanique des milieux continus que sont la conservation de la masse ainsi que la conservation de la quantité de mouvement. Ses équations sont complétées par des conditions aux limites et par des lois rhéologique et tribologique décrivant respectivement le comportement des matériaux et le comportement de ces domaines aux interfaces. On obtient ainsi le système décrivant le problème mécanique. On utilise une formulation à deux champs, que sont la vitesse v et la pression p . Les équations sont définies en tout point de Ω en fonction du champ (v, p).
Thermique asynchrone
Il arrive souvent que le gradient thermique à l’interface entre la pièce et les outils soit très important. Pour minimiser les problèmes numériques qui peuvent résulter de ce choc thermique, on pourrait utiliser un maillage très fin aux interfaces. Cependant, la discrétisation spatiale étant la même pour les problèmes mécanique et thermique, un fort accroissement du nombre de nœuds se traduirait par une forte augmentation du temps de calcul de la solution mécanique. Ainsi, on utilise généralement des maillages calibrés pour le problème mécanique, même si la précision de la résolution du problème thermique s’en ressent. Pour prendre en compte correctement ce phénomène thermique, une technique de pas de temps asynchrone est utilisée. Elle est basée sur le fait que les chocs thermiques, qui entraînent des oscillations spatio-temporelles du champ de température, sont liés à un temps de pénétration de la chaleur tp. Ce temps est défini comme celui nécessaire au flux thermique pour parcourir une taille de maille.
Couplage thermo-mécanique
A chaque incrément de temps, les inconnues du problème sont d’une part le couple vitesse / pression et d’autre part la température. Le choix adopté ici est d’utiliser un couplage faible. On ne cherche pas à résoudre le problème couplé par exemple avec un algorithme de point fixe ou une résolution globale (V,P,T). Les motivations et les justifications de ce choix sont présentées dans [Soyris90]. On résout indépendamment et de façon séquentielle le problème mécanique (1-5) et le problème thermique (1-71). Si l’on se place à l’instant t , le problème mécanique est résolu avec la configuration mécanique et thermique à l’instant t , alors que le problème thermique sera ensuite résolu avec la configuration mécanique (en particulier les termes de dissipation visqueuse et de frottement) à l’instant t + ∆t calculé précédemment et la thermique à l’instant t .
Modélisation des outils flottants rigides
En règle générale, le déplacement des outils de forgeage est fonction de la nature de la presse utilisée. Leur cinématique est ainsi connue a priori. Cependant dans certains procédés particuliers, le déplacement des outils suivant certaines directions dépend des forces extérieures, de l’écoulement de la matière et des forces de contacts résultantes. Leur mouvement est dit « flottant », et est en interaction avec celui de la matière. Le problème mécanique inclut la détermination du mouvement des outils flottants. Cette problématique a été étudiée et implémentée dans Forge2005® par [Boyère99] et [Traoré01].
Le problème mécanique (1-45) reste quasiment inchangé, à la différence près que outil v n’est plus une donnée, mais une inconnue du système. Intéressons nous alors aux équations du problème des outils flottants, en les définissant comme étant rigides. Le mouvement d’un outil est alors entièrement déterminé par six degrés de liberté, les trois premiers correspondant à un vecteur vitesse de translation et les trois autres à un vecteur vitesse de rotation. Si le procédé simulé contient n outils flottants, le système à résoudre aura 6 degrés de liberté n supplémentaires. Pour ne pas surcharger l’exposé, on se restreint au cas où seulement un outil est considéré comme flottant.
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Table des matières
Introduction générale
1. La simulation du forgeage en 3D
1.1. Le problème mécanique
1.1.1. Formulation du problème continu
1.1.2. Formulation du problème discrétisé
1.1.3. Résolution du système
1.2. Le problème thermique
1.2.1. Equation de la chaleur
1.2.2. Conditions aux limites
1.2.3. Formulation variationnelle
1.2.4. Discrétisation spatiale
1.2.5. Discrétisation temporelle
1.2.6. Thermique asynchrone
1.3. Couplage thermo-mécanique
1.4. Modélisation des outils flottants rigides
1.4.1. Principe des puissances virtuelles dans l’outil
1.4.2. Système à résoudre
1.4.3. Contributions liées au contact
1.4.4. Contributions liées au frottement
1.5. Conclusion
2. Le roulage
2.1. Présentation du procédé
2.1.1. Avant propos : le procédé de laminage circulaire
2.1.2. Principe de base du roulage
2.1.3. Pilotage de la molette
2.1.4. Outillage et pièce
2.1.5. Description d’un cycle
2.1.6. Motivations de la simulation
2.2. Cinématique de la molette
2.2.1. Modélisation d’un outil flottant en rotation et en excentration
2.2.2. Formalisation du couplage pièce / outil flottant
2.2.3. Système à résoudre
2.2.4. Contributions liées au contact
2.2.5. Contributions liées au frottement
2.3. Instrumentation de la machine
2.3.1. Partie moteur
2.3.2. Matrice
2.4. Simulations du procédé de roulage sur le symbole CUV40918
2.4.1. Molette, bague finale
2.4.2. Données expérimentales
2.4.3. Données numériques
2.4.4. Première approche : Vitesse d’excentration constante et molette folle en rotation
2.4.5. Deuxième approche : pilotage en effort maximal et molette folle en rotation
2.5. Etude thermique des outils pour le symbole CUV40918
2.5.1. Trajectoire point par point
2.5.2. Recalage thermique
2.5.3. Maillages et temps de calcul
2.5.4. Contraintes équivalentes de Von Mises
2.5.5. Etape de planage
2.5.6. Etapes de laminage et de retour
2.5.7. Etapes d’extraction de la bague et d’insertion du lopin
2.5.8. Evolution de la température du lopin
2.5.9. Remplissage
2.5.10. Bilan de la simulation
2.6. Validation de la simulation sur le symbole BEGB40899
2.6.1. Molette, bague
2.6.2. Données expérimentales
2.6.3. Données numériques
2.6.4. Maillages et temps de calcul
2.6.5. Evolution de la température du lopin au cours d’un cycle
2.6.6. Cycle thermique de la matrice
2.6.7. Remplissage
2.7. Conclusions
2.8. Perspectives
3. Les méthodes multigrilles
3.1. Présentation
3.1.1. Principe
3.1.2. Multigrilles algébriques (AMG)
3.1.3. Multigrilles géométriques
3.1.4. Avantages et inconvénients des deux approches
3.2. La méthode développée
3.2.1. La librairie PETSc
3.2.2. Déraffinement automatique de maillage
3.2.3. Le lissage et la correction
3.3. Influence de la qualité de déraffinement
3.3.1. Influence du taux de déraffinement
3.3.2. Influence de la taille de la grille grossière
3.3.3. Nombre de niveaux
3.3.4. Comparaison entre des méthodes deux et trois grilles
3.3.5. Remaillage
3.3.6. Limitation
3.4. Performances
3.4.1. Convergence asymptotique
3.4.2. Etude sur trois incréments de temps de calcul
3.4.3. Simulation du forgeage d’une bielle
3.4.4. Simulation entière de forgeage d’une bague CUV40918
3.4.5. Simulation entière du forgeage d’une bague BEG40899
3.5. Conclusion
3.6. Perspectives
Conclusion générale
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