Mesures de phosphorylation par le phosphate inorganique

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Les ATPases de type PV

Le groupe d’ATPases de type PV regroupe des ATPases sans spécificité connue.
A cause du manque de données relatives à leur caractérisation biochimique, elles ont été classées à part (Catty et coll., 1997; Axelsen et Palmgren, 1998). Ces ATPases se distinguent par leur présence exclusive dans les organismes eucaryotes. Leur structure est inhabituelle par rapport aux autres ATPases de type P: elles possèdent un long domaine extra-membranaire de 100 à 200 résidus entre les hélices transmembranaires 1 et 2 et des séquences consensus qui ne sont pas détectées dans les autres groupes (Catty et coll., 1997). Ce groupe pourrait inclure les ATPases transportant des anions, comme l’ATPase-Cl- d’Aplysia californica (Gerencser et Zhang, 2003).
Les ATPases de type PV ne sont pas considérées dans la classification de Lutsenko (Figure I.3).

Les transporteurs actifs

La probabilité pour qu’un ion traverse spontanément la partie interne hydrophobe de la double couche lipidique d’une membrane biologique est faible. En effet, la membrane est constituée de phospholipides et de glycolipides qui, par leurs longues chaînes carbonées (de C14 à C24), lui  confèrent un caractère hydrophobe, chimiquement opposé au passage de l’ion.
Les ions traversent donc la membrane grâce à des protéines transmembranaires, intervenant dans  deux types de transport: le transport passif et le transport actif.
Le transport passif (ou diffusion facilitée) met en jeu les canaux ioniques. Les canaux ioniques sont des protéines transmembranaires qui aménagent un pore pour le passage ionique. Ces protéines permettent le passage d’un ion dans le sens de  son gradient électrochimique, avec un flux de l’ordre de 106-108 ions/seconde.
Le transport actif d’un ion contre son gradient électrochimique suppose un apport  d’énergie. Dans ce type de transport, le flux est faible: de 1 à 1000 ions transportés par seconde. Deux sources d’énergie coexistent dans la cellule: l’énergie métabolique telle que celle stockée dans l’ATP et libérée lors de son hydrolyse sous forme d’ADP et de Pi, et l’énergie électrochimique stockée dans les gradients transmembranaires d’ions. Les transporteurs qui utilisent l’énergie stockée dans l’ATP pour transporter des ions et qui réalisent le couplage entre transport et réaction chimique sont dits transporteurs actifs primaires. Les transporteurs qui couplent le transport de deux ions en utilisant le gradient électrochimique de l’un pour transporter l’autre sont dits transporteurs actifs secondaires, comme par exemple les systèmes de co-transport qui comprennent les symports (transfert simultané de deux ions dans le même sens) et les antiports (transfert en sens opposé). Les ATPases de type P comme CadALM sont des transporteurs actifs primaires qui utilisent l’énergie fournie par l’hydrolyse de l’ATP pour transporter des ions contre leur gradient électrochimique.

Caractéristiques enzymatiques des ATPases de type P

L’ATPase-Ca2+ SERCA1a du réticulum sarcoplasmique découverte simultanément par Ebashi (1961) et Hasselbach et Makinose (1961) est l’une des ATPases de type P les plus étudiées sur le plan enzymatique. Même si le fonctionnement de l’ATPase-Ca2+ SERCA1a n’est probablement pas exactement le même que celui d’autres ATPases de type P, il est communément utilisé comme modèle enzymatique de cette famille de transporteurs (Fig.I4). Deux Ca2+ sont transportés pour chaque molécule d’ATP hydrolysée (Hasselbach et Makinose 1962, Makinose et Hasselbach 1971).

Phosphorylation de l’ATPase-Ca2+ SERCA1a en présence de Ca2+

Après la fixation des deux Ca2+ a lieu la phosphorylation de l’enzyme par l’ATP (Figure I4, étape 2). La formation du dérivé phosphorylé covalent se produit par transfert du phosphate g de l’ATP sur l’aspartate de la séquence DKTGT, conservé parmi toutes les ATPases de type P, et s’accompagne de la libération d’ADP. Dans cet état phosphorylé, les Ca2+ fixés à la protéine ne sont pas échangeables avec le milieu et pas non plus susceptibles d’être chélatés par l’EGTA. Les sites de fixation du Ca2+ sont dits occlus.

Déphosphorylation de l’ATPase-Ca2+ phosphorylé

La suite du cycle consiste en la libération des Ca2+ de l’autre côté de la membrane (Figure I4, étape 3), puis la déphosphorylation de l’enzyme (Figure I4, étape 4). Une molécule d’eau est consommée pour hydrolyser la liaison acylphosphate et libérer du phosphate inorganique (Pi). Après la déphosphorylation de l’enzyme, l’ATPase-Ca2+, revenue à l’état initial, peut recommencer un nouveau cycle enzymatique.

Réversibilité du cycle enzymatique de l’ATPase-Ca2+

Le cycle enzymatique de l’ATPase-Ca2+ est réversible. Il commence par la phosphorylation par Pi qui ne peut se produire qu’en absence de Ca2+ (Figure I4, étape 4 en sens inverse). Le dérivé phosphorylé covalent se forme sur le même aspartate, conservé parmi toutes les ATPases de type P, formant un acyl-phosphate.
Ensuite, si l’ATPase dispose de Ca2+ et d’ADP, elle synthétise de l’ATP (Knowles et Racker, 1975). Cette synthèse se produit spontanément si la membrane qui contient l’ATPase est refermée sur un volume plein de Ca2+ mimant la lumière du réticulum.
En présence d’ADP, le gradient de Ca2+ fournit l’énergie nécessaire à la synthèse d’ATP (Figure I4, étapes 3 et 2 en sens inverse).
Les deux dérivés phosphorylés décrits dans le cycle, l’un obtenu par l’ATP en présence de Ca2+ et l’autre par le Pi en absence de Ca2+ possèdent des caractéristiques différentes. Le premier est sensible à l’ADP, c’est-à-dire que l’on peut reverser le cycle en ajoutant un excès d’ADP afin de synthétiser de l’ATP; le second est insensible à l’ADP, c’est-à-dire que l’on ne peut reverser le cycle même en ajoutant un excès d’ADP pour synthétiser l’ATP (Shigekawa et Dougherty, 1978).

Changements de conformation des ATPases de type P

Depuis la découverte de l’activité ATPase des fibres du muscle en 1939 (Engelhardt et al, 1939), l’ATPase-Ca2+ SERCA1a a fait l’objet de recherches intensives sur ses caractéristiques enzymatiques. Le grand changement de vision sur l’ATPase-Ca2+ se produit au début des années 60 quand Hasselbach et  Makinose ont mis en évidence le transport de 45Ca2+ à l’intérieur de  vésicules de réticulum sarcoplasmique par une ATPase de la membrane de ces vésicules  (Hasselbach et Makinose, 1961) (c’était l’ATPase-Ca2+ SERCA1a encore inconnue à l’époque). On saisit alors l’étroite intrication entre l’événement chimique (hydrolyse d’ATP) et l’événement vectoriel (transport du Ca2+) qui ne doivent pas pouvoir se produire l’un sans l’autre pour que le couplage de la pompe soit effectif.
Mais la question fondamentale posée par ce mécanisme de couplage reste à élucider : où et comment est transférée l’énergie libérée par l’hydrolyse d’ATP ?
Comment cette énergie contenue dans la liaison covalente aspartyl-phosphate  permet-elle le transfert des Ca2+ au travers de la protéine ? Depuis 40 an maintenant, la réponse est recherchée dans la structure de l’ATPase-Ca2+. Il est généralement accepté que l’énergie libérée par l’hydrolyse d’ATP est d’abord utilisée pour changer la structure de l’ATPase et les changements de conformation de la protéine qui aboutissent ensuite au transport du Ca2+ ont fait l’objet de recherches intensives.

Etude des changements de conformation par fluorescence

La spectroscopie de fluorescence est depuis longtemps appliquée à la détection des changements de conformation de l’ATPase-Ca2+ SERCA1a. Les variations de l’intensité de fluorescence venant de la modification de l’environnement du fluorophore permettent d’étudier les changements de conformation de la protéine. Le suivi de la fluorescence intrinsèque présente l’avantage de ne pas modifier la structure et l’activité biologique de la protéine. Il est cependant rare qu’une protéine soit constituée d’un fluorophore unique et les changements de conformation observés doivent par conséquent être interprétés comme un changement de structure global de la protéine. Lorsque l’on excite l’ATPase vers 280-290 nm, la protéine émet une fluorescence dont le maximum est centré sur 330 nm. Les premières mesures de florescence intrinsèque ont été accomplies en 1976 (Dupont, 1976); il a alors été démontré que l’intensité de fluorescence de l’ATPase était sensible à la fixation de Ca2+ sur l’enzyme. L’addition de Ca2+ conduit à une augmentation de 4 à 6 % de l’intensité de fluorescence, phénomène réversible après ajout d’un chélateur de Ca2+ comme l’EGTA. La fixation du complexe MgATP au site de fixation du nucléotide, en absence de Ca2+, produit également une augmentation de l’intensité de fluorescence bien que plus faible que celle observée par fixation du Ca2+. Les variations de fluorescence associées à la fixation d’ATP indiquent une constante de dissociation équivalente à celle mesurée à l’aide de nucléotides radioactifs (Dupont et coll., 1988). Par ailleurs, la phosphorylation de l’ATPase par le Pi, en absence de Ca2+ et en présence de Mg2+, est accompagnée d’une augmentation de l’intensité de fluorescence d’environ 4 % (Lacapère et coll., 1981).

Cycle catalytique des ATPases de type P

Malgré des recherches intensives sur les caractéristiques enzymatiques des ATPases de type P et leurs changements de conformation, aucun mécanisme qui tente de relier les  caractéristiques enzymatiques et la structure ne satisfait tout le monde. Pour simplifier la présentation, le cycle enzymatique proposé par de Meis et Vianna et décrit Figure I6 (de Meis et Vianna, 1979) d’une part, et le modèle structural illustrant ce cycle proposé par Toyoshima (Toyoshima et coll., 2004) d’autre part (Fig. I7) sont adoptés ici. Il est toutefois important de noter que dès 1973, Makinose proposait un modèle enzymatique simple mais toujours vrai du fonctionnement de l’ATPase-Ca2+ (Makinose 1973)

Le modèle E1-E2 (Fig. I6)

Le principe du fonctionnement des ATPases de type P est le couplage entre hydrolyse de l’ATP et transport de l’ion considéré. Ce couplage se traduit par une alternance d’événements structuraux – changements de conformation – et chimiques, phosphorylation – déphosphorylation. Un tel couplage implique forcément un ordre, une séquentialité puisque seul l’événement n autorise l’événement n+1. En consultant les bases de données de protéines, on pourra constater que le terme « ATPase de type P » est souvent remplacé par le terme « ATPase E1-E2 ». E1-E2 se réfère au modèle enzymatique proposé par de Meis et Vianna pour l’ATPase-Ca2+ en 1979 (de Meis et Vianna, 1979) et inspiré d’un modèle initialement proposé pour l’ATPase-Na+/K+ (modèle dit d’Albers-Post, Glynn 1978). Le modèle E1-E2 fait apparaître deux conformations de l’enzyme : E1 est une forme de l’enzyme capable de lier les ions Ca2+ du côté cytoplasmique et d’être phosphorylée par l’ATP; E2 est une forme de l’enzyme dont les sites de transport sont orientés vers l’autre côté de la membrane et phosphorylable par le phosphate inorganique. Le modèle E1-E2 fait aussi apparaître une transition conformationnelle E2 E1 dont on pense maintenant qu’elle correspond à une déprotonation de l’enzyme (Forge et coll., 1993). Ce modèle étant théoriquement limité à 2 conformations ne rend pas compte de tous les états conformationnels de l’ATPase. Il a cependant été très utile pour formaliser le fonctionnement de l’ATPase-Ca2+ en particulier, et des ATPases de type P en général.

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Table des matières

Abréviations
Introduction :
I .1 CadA de Listeria monocytogenes
I.2 Les ATPases de type P
I.3 Caractéristiques de la séquence protéique des ATPases de type P
I.4 Classification des ATPases de type P
I.4.1 Les ATPases de type PI
I.4.2 Les ATPases de type PII
I.4.3 Les ATPases de type PIII
I.4.4 Les ATPases de type PIV
I.4.5 Les ATPases de type PV
I.5 Les transporteurs actifs
I.6 Caractéristiques enzymatiques des ATPases de type P
I.6.1 La fixation du Ca2+
I.6.2 Phosphorylation de l’ATPase-Ca2+ SERCA1a en présence de Ca2+
I.6.3 Déphosphorylation de l’ATPase-Ca2+ phosphorylé
I.6.4 Réversibilité du cycle enzymatique de l’ATPase-Ca2+
I.7 Changements de conformation des ATPases de type P
I.7.1 Etude des changements de conformation par fluorescence
I.7.2 Etude des changements de conformation par protéolyse ménagée
I.7.3 Etude des changements de conformation par structure cristalline
I.8 Cycle catalytique des ATPases de type P
I.8.1 Le modèle E1-E2 (Fig. I6)
I.8.2 Le modèle structural (Fig. I7)
I.9 Objectifs de la thèse
Matériel et méthodes :
M.1. Matériel et méthodes sur Résultat R1
M.1.1 Schéma global
M.1.2 Matériel
M.1.3 CadALM sauvage
M.1.4 Les formes de CADA étiquetées
M.1.5 Tests phénotypiques
M.1.6 L’extrait membranaire de la levure Saccharomyces cerevisiae
M.1.7 Dosage des protéines
M.1.8 Gels SDS-PAGE
M.1.9 Immunodétection
M.2. Matériel et méthodes sur Résultat R2
M.2.1 Schéma global
M.2.2 Mesures de phosphorylation par l’ATP
M.2.3. Mesures de phosphorylation par le phosphate inorganique
M.2.4 Mesures d’activité ATPase
M.3. Matériel et méthodes sur Résultat R3
M.3.1 Schéma global
M.3.2 Mutagenèse dirigée par PCR
M.4. Matériel et méthodes sur Résultat R4
M.4.1 Schéma global – Voir R12 et R16
M.4.2 Grand domaine cytoplasmique de CadALM, CCC2 et Serca1a
M.4.3 Domaine nucléotidique de CadALM, CCC2 et Serca1a
M.4.4 Domaine de phosphorylation de CadALM, CCC2 et Serca1a
Résultats :
R.1 Expression de CadALM et de ses variants dans Saccharomyces cerevisiae
R1.1 Augmentation de la sensibilité au cadmium de S. cerevisiae induite par CadALM
R.1.2 Le phénotype de la levure exprimant CadALM n’est pas reproduit par des levures exprimant d’autres ATPases de type P.
R.1.3 Effets des métaux
R.1.4 CadALM produite dans la levure est fonctionnelle
R.1.5 Localisation intracellulaire de CadALM
R.1.6 Comment CadALM empoisonne-t-elle la levure ?
R.2 Etude fonctionnelle de CadALM en absence de Mg2+
R.2.1 Activité ATPase de CadALM en absence de Mg2+
R.2.2 Phosphorylation de CadALM en absence de Mg2+
R.2.2.1 Phosphorylation par l’ATP selon de la concentration de cadmium
R.2.2.2 Déphosphorylation du dérivé phosphorylé en fonction du temps
R.2.2.3 Déphosphorylation du dérivé phosphorylé par la dilution isotopique
R.2.2.4 Le dérivé phosphorylé formé à 500 μM de cadmium est sensible à l’ADP.
R.2.2.5 La phosphorylation par le CdPi
R.2.3 Phosphorylation de CadALM en présence de Mg2+
R.2.4 Les effets de Mg2+ sur CadALM
R.2.5 Phosphorylation par l’ATP en présence d’autres métaux
R.3 Identification et caractérisation des sites de transport de CadALM
R.3.1 Analyse préliminaire de CadALM
R.3.2 Choix des acides aminés
R.3.3 Le test phénotypique comme outil de prédiction.
R.3.4 Test phénotypique des mutants de CadALM
R.3.5 Etude de CadALM et ses variants par protéolyse ménagée
R.3.6 Analyse biochimique des mutants de CadALM
R.4 Chimères d’ATPases
R.4.1 Chimères de grandes boucles
R4.1.1 Analyse phénotypique des chimères produites dans la levure
R4.1.2 Immunodétection des ATPases chimériques
R4.1.3 Analyse fonctionnelle des chimères
R.4.2 Chimères des domaines N et P de CadALM
Discussion

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