Mesure de la qualité de vie dans la dermatite atopique

Définition de la dermatite atopique

                     La dermatite atopique (DA), ou eczéma atopique, est une dermatose chronique prurigineuse et inflammatoire qui appartient à la famille des atopies, associant une altération de la barrière cutanée à une inflammation cutanée (1). Elle fait partie des hypersensibilités de type IV à lymphocyte CD4 Th2 (2). Ces lymphocytes T, dirigés contre des allergènes externes et/ou des auto-antigènes cutanés, déclenchent une inflammation cutanée. La DA évolue par alternance de phases de poussées et de rémissions, et peut atteindre jusqu’à la quasi-totalité de la surface corporelle dans les cas les plus graves. A ce jour, les facteurs connus de la DA sont génétiques et environnementaux. La concordance chez des jumeaux monozygotes est de 80%, pour 30% pour des jumeaux dizygotes. La prédisposition génétique la plus répandue est une mutation sur le gène de la filaggrine (Rapport de côte = 3) (3), qui cause une déplétion de cette protéine dont la liaison aux kératinocytes joue un rôle clé dans la régulation de l’homéostasie épidermale. Dans le stratum corneum, les monomères de filaggrine peuvent s’incorporer dans l’enveloppe lipidique ou libérer des acides aminés, participant ainsi à la fonction de barrière cutanée et à la rétention d’eau par la peau (4). Les facteurs environnementaux sont multiples. Ils comprennent les allergènes de contact (produits irritants comme le savon, les détergents, les tissus rêches, certains aliments, la chaleur, la sueur ou la sécheresse de l’air). Mais les poussées dentaires, certains changements de situation ou le stress peuvent aussi engendrer une poussée de DA. Cette affection touche majoritairement les enfants. En effet, 45% des patients souffrant de DA ont développé la maladie dans leurs six premiers mois de vie, 60% avant l’âge d’un an et 85% avant l’âge de cinq ans. Les causes de rémission de la maladie restent indéterminées à ce jour. Selon les pays, chez 10 à 30% des sujets cette dermatose persiste à l’âge adulte.

Mesure de la sévérité de la dermatite atopique

                Depuis les années 80, les dermatologues ont eu un recours croissant à des échelles (ou scores) de sévérité standardisées pour l’évaluation clinique, l’observation de la réponse aux traitements et pour partager avec la communauté médicale. A ce jour, vingt-huit échelles différentes de mesure de la sévérité de la DA ont été identifiées au cours des vingt-cinq dernières années, sans qu’aucune ne fasse de consensus international (18–31). Elles emploient diverses méthodes incluant des grilles de cotation, décrivant les aspects objectifs de la maladie et leur portée. Certaines échelles intègrent également des aspects subjectifs de la maladie. Les plus couramment utilisées sont le « Severity Scoring of Atopic Dermatitis SCORAD index (SCORAD) », l’ »Eczema Area and Severity Index (EASI) », l’ »Investigator’s Global Assessment (IGA) », le « Patient-Oriented Eczema Measure (POEM) » et le « Six Area, Six Sign Atopic Dermatitis (SASSAD » (18). Les cinq scores de sévérité les plus utilisés dans les études cliniques (SCORAD, EASI, IGA, VAS Prurit et SASSAD) ont été utilisés dans 242 des 382 études, soit 6 sont utilisés les principaux scores de sévérité d’après la présente revue (18,32) Ces échelles sont utilisées principalement dans les essais cliniques, mais rarement en pratique clinique car elles n’ont pas été conçues à cette fin.
· « Severity Scoring of Atopic Dermatitis (SCORAD) » : Depuis son développement en 1993, le SCORAD index a été la plus utilisée des échelles de sévérité dans la DA. Il a été utilisé dans 113 des 382 études retenues par mes critères de recherche dans la base de données Medline. Cet outil a été développé par l’ »European Task Force on Atopic Dermatitis ». Le SCORAD index utilise la règle des 9 pour estimer l’étendue de la maladie et évalue 5 caractéristiques cliniques pour déterminer la sévérité de la DA : L’érythème, l’œdème et les papules, le suintement et les croûtes, l’excoriation et la lichénification. – La règle des 9 est une méthode rapide pour calculer une proportion de surface corporelle. Le nom vient du fait que le corps peut être grossièrement divisé en fragments de 9% de surface corporelle (33) (Voir annexe 1). Le SCORAD évalue aussi deux symptômes subjectifs, le prurit et la dégradation du sommeil avec des échelles analogiques. Les trois aspects (A : étendue, B : sévérité et C : symptômes subjectifs) sont combinés et peuvent atteindre un score maximal de 103. De tous les outils de mesure de la sévérité de la DA, c’est le plus souvent validé mondialement (34). Il chiffre l’état cutané du patient à un moment donné, permet de définir un objectif de traitement précis et offre une comparaisonpossible d’une consultation à l’autre, en restant reproductible d’un médecin à l’autre (tableau 1). Le SCORAD est recommandé par la Société Française de Dermatologie, et existe également sous deux autres formes : Le score dérivé « Objective SCORAD » ne tient compte que des composantes A et B du SCORAD, ne tenant pas compte des critères subjectifs compilés dans la composante C du score. Dans la version Patient-Oriented SCORAD (PO-SCORAD), le patient évalue lui-même l’état de sa maladie au moyen d’une échelle de mesure simplifiée et partagée avec le médecin pour faciliter l’information et la communication entre praticien et patient (35).
· « Eczema Area and Severity Index (EASI) » : Dans cette revue de la littérature, EASI apparaît comme le second score de sévérité le plus utilisé. Il a été utilisé dans 63 des 382 études retenues, soit une proportion de 16%. EASI est une version adaptée à la DA du « Psoriasis Area and Severity Index (PASI) », un questionnaire de sévérité développé initialement dans le psoriasis (36). EASI évalue l’étendue des lésions à quatre endroits du corps et mesure quatre signes cliniques : Érythème, induration et papulation, excoriation et lichénification. Chaque signe est évalué de 0 pour nul à 3 pour signe sévère. Le score maximal est de 72. EASI évalue deux dimensions de la DA : l’étendue de la DA et les signes cliniques. Contrairement au SCORAD, cet outil n’évalue ni le prurit ni la dégradation du sommeil. Enfin, s’il s’agit d’un outil validé et fiable, les plus importantes variabilités entre observateurs (médecins) concernent l’estimation de l’induration et de la papulation (18).
· « Investigator’s Global Assessment (IGA) » : IGA est la troisième échelle de sévérité la plus utilisée, figurant dans 48 des 382 études, soit 13%. Cet outil permet à l’observateur d’évaluer un ensemble de signes (érythème, infiltration, papulation, suintement et croûtage) notés de 0 pour l’absence de maladie à 5 pour les cas les plus graves, afin de coter la sévérité de la DA. IGA n’est pas validé dans la littérature, mais est très simple d’utilisation et se corrèle bien avec EASI. Ce score ne tient pas compte de critères subjectifs, et discrimine peu les sévérités de la DA.
· « Six-Area, Six-Sign Atopic Dermatitis (SASSAD) » : C’est la quatrième échelle la plus utilisée pour la sévérité de la DA. SASSAD évalue six signes cliniques de sévérité (érythème, exsudation, sécheresse, craquellement, excoriation et lichénification) sur six sites du corps (tête/cou, tronc, bras, mains, jambes et pieds). Chaque signe clinique sur un des sites du corps est noté de 0 pour nul à 3 pour sévère, et le score maximal est de 108. SASSAD n’évalue pas les symptômes subjectifs. Dans une petite étude de fiabilité impliquant six patients, les principales différences entre observateurs portaient sur la sécheresse et la lichénification (37). Le développement d’une échelle fiable nécessite des tests rigoureux et une évaluation des propriétés statistiques suivantes : fiabilité inter- et intra-évaluateur, validité du design de l’étude (construction, contenu), répétabilité, responsivité au changement, et différence clinique minimale significative (19,28). D’après la littérature, les échelles les plus validées par la communauté des dermatologues à travers le monde sont le SCORAD index, le EASI et le POEM. Quand EASI repose uniquement sur les observations objectives du dermatologue, le SCORAD intègre à la fois des données objectives du médecin et une évaluation subjective des démangeaisons et de la dégradation du sommeil par le patient lui-même. POEM a été spécifiquement conçu pour mesurer la sévérité de l’AD du point de vue du patient en utilisant sept questions sur les symptômes et leur fréquence (18). Enfin le « Three Item Severity scale (TIS) » est une échelle simplifiée qui suscite de l’espoir chez les dermatologues pour être utilisée en pratique clinique, mais nécessite encore de plus amples évaluations pour obtenir une validation internationale (19,21). Les questionnaires Patient-Oriented SCORAD et POEM sont présentés en annexe. La « VAS pruritus » est une échelle de mesure analogique du prurit seul, ne tenant pas compte des autres manifestations de la DA. Elle consiste en une notation de 0 à 100 du prurit. De par sa simplicité d’utilisation, elle est très utilisée dans les études cliniques. Devant le manque d’uniformité dans l’usage d’échelles de mesure de la sévérité de l’AD, des initiatives internationales s’efforcent de travailler à la standardisation des outils (38). Il s’agit de développer un ensemble de données validées relatives aux signes et symptômes de l’AD, et destinées à être mesurées lors des essais cliniques. Un tel ensemble favoriserait les comparaisons entre les études et augmenterait la puissance des méta-analyses en réseau. On remarque que les différentes échelles de mesure ne sont pas aussi adaptées à toutes les formes de DA. Chaque outil est axé sur un ensemble de signes cliniques, sans jamais tous les prendre en compte. Il convient donc d’adapter le choix de l’échelle en fonction des manifestations cliniques observées chez le patient pour établir le diagnostic le plus précis possible. SCORAD, EASI, IGA et SASSAD sont utilisés dans la majorité des essais cliniques sur la DA à travers le monde, en raison de leur validation par de nombreuses études.

Les prochaines thérapies en vue

                 De très nombreuses thérapies sont en développement à travers le monde dans l’indication de la DA. Elles incluent des produits injectables, des médicaments oraux et également des topiques. Les thérapies potentiellement sur le marché mondial dans les prochaines années sont les suivantes : Le vaccin du BCG est actuellement en essai clinique de phase III dans la dermatite atopique. L’étude danoise Calmette, réalisée entre 2012 et 2015 sur un échantillon de 4000 nouveau-nés dans leur première semaine de vie, a démontré de manière significative le caractère protecteur de la vaccination néonatale vis-à-vis de la DA (46). Également en phase III et sous autorisation temporaire d’utilisation nominative (ATUn) en France, le dupilumab est un anticorps monoclonal qui inhibe la signalisation des interleukines IL-4 et IL-13, impliquées dans la DA. L’essai clinique porte sur une population pédiatrique d’âge compris entre 6 et 18 ans (47). Par ailleurs de nombreux dermocorticoïdes, en association ou non (Désonide associé à des acides aminés, fumarate de clémastine associé à de la dexaméthasone, désoximéthasone) et même un gel douche dénommé « Holly Mangrove Shower Gel » sont actuellement en phase III de développement. Le « Holly Mangrove Shower Gel », développé par la « Mahidol University » en Thaïlande, est formulé à partir d’extraits de P. multiflorum et d’A. ilicifolius (48). Son efficacité est en cours d’évaluation surl’amélioration de la barrière cutanée et sur la réduction du prurit dans la DA. Enfin, les principaux laboratoires de dermocosmétique développent leurs gammes pour que leurs produits puissent être utilisés sur des peaux atopiques.

La qualité de vie dans les études cliniques

                  Historiquement, le concept de QdV s’est élaboré dès les années 30 aux ÉtatsUnis. Trois principaux courants conceptuels se sont développés selon qu’ont été plus particulièrement privilégiés l’aspect environnemental, la notion de santé ou les différents domaines de vie de la personne (80). Appliquant ce concept au domaine de la santé, les groupes de Karnofsky en 1949 (81), puis de Katz en 1963 (82) ont souligné l’intérêt d’évaluer les fonctions et les handicaps physiques et psychiques dans le contexte de la vie quotidienne. Vers la fin des années 70, les politiques de santé se sont surtout intéressées à la QdV par le biais des concepts d’état de santé et de QdV reliée à la santé (« Health Related Quality of Life », ou HRQoL) (83–85). Il n’existe pas de définition véritablement consensuelle de la QdV (86). Cependant, un accord semble se dégager pour en donner une définition à partir de l’ensemble des événements et de leur retentissement sur la vie de chaque individu. Cette définition de la QdV se situe dans le champ de la santé positive, qui comporte la capacité pour chacun d’intervenir sur sa propre condition, sans limiter la santé à la seule absence de maladie ou d’infirmité. L’OMS a défini en 1995 la QdV comme «la perception qu’a un individu de sa place dans l’existence, dans le contexte de la culture et du système de valeurs dans lesquels il vit en relation avec ses objectifs, ses attentes, ses normes et ses inquiétudes. C’est un concept très large influencé de manière complexe par lasanté physique du sujet, son état psychologique, son niveau d’indépendance, ses relations sociales ainsi que sa relation aux éléments essentiels de son environnement. »(86). Durant les trois dernières décennies, la communauté scientifique s’est progressivement tournée vers le concept de QdV (87). L’évaluation de la QdV dans la DA est importante car c’est une pathologie à très haute prévalence mondiale qui mobilise les systèmes de santé pour son contrôle. De « la bonne santé à tout prix », on est passé à une relativisation de l’état physique, mental et social des individus. A cause des intenses démangeaisons, les patients peuvent souffrir d’insomnie, d’irritabilité et d’inconfort permanent. Les soins par des bains, l’hydratation cutanée et l’attention portée aux vêtements demandent dans les formes de DA les plus sévères beaucoup de temps et d’attention. La vie sociale du patient est souvent affectée à l’école et dans la vie professionnelle, avec des absences régulières et/ou une productivité diminuée pendant les crises. Les relations avec amis et collègues sont dégradées également, de même que les vacances et les activités physiques (88). L’AD a des répercussions d’ordres physique, psychologique et psychosociales sur le patient et sa famille de mieux en mieux décrites dans la littérature (18,43,54,56,61,66,72,88– 99).

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Table des matières

INTRODUCTION
PARTIE I – La dermatite atopique, présentation et approche thérapeutique
1. Présentation de la maladie
1.1. Définition de la dermatite atopique
1.2. Diagnostic clinique
1.3. Physiopathologie
1.4. Complications
1.5. Epidémiologie
2. Évaluation et prise en charge de la dermatite atopique 
2.1. Objectifs de la prise en charge
2.2. Mesure de la sévérité de la dermatite atopique
2.3. Options thérapeutiques
2.4. Les prochaines thérapies en vue
PARTIE II – Impact de la dermatite atopique sur la qualité de vie 
1. Fardeau de la maladie
1.1. Chez l’enfant
1.2. Chez l’adulte
1.3. Impact de la maladie sur l’environnement familial
2. Mesure de l’impact de la maladie sur la qualité de vie
2.1. La qualité de vie dans les études cliniques (tableau 7)
2.2. Les outils (ou échelles) de mesure de la qualité de vie
3. Corrélation entre les mesures de sévérité de la maladie et de qualité de vie 
PARTIE III – Outils génériques, outils spécifiques à la dermatologie et outils spécifiques à la dermatite atopique pour la mesure de la qualité de vie 
1. Méthodologie de la revue de la littérature
2. Outils génériques de mesure de la qualité de vie
3. Outils spécifiques à la dermatologie 
1.1. Pour l’enfant
1.2. Pour l’adulte
4. Outils spécifiques à la dermatite atopique
4.1. Pour le nourrisson
4.2. Pour l’enfant
4.3. Pour l’adulte
5. Instruments de mesure de l’impact sur la qualité de vie de la famille 
CONCLUSION – Recommandations sur l’usage d’instruments de mesure de la qualité de vie liée à l’état de santé dans la dermatite atopique
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES

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