Définition générale de la notion d’environnement
La notion d’environnement bien que largement répandue et couramment employée, se révèle en pratique être un concept « fourre-tout » difficile à définir. « L’environnement » est en effet une notion aux contours incertains, variant en fonction des disciplines s’y référant (littérature, philosophie, histoire de l’art, économie, droit, biologie, etc), des enjeux et des sujets en cause. Ces différents éléments concourent à rendre peu aisée la définition de cette notion si fréquemment utilisée. Etymologiquement, « environnement » est issu du grec gyros, qui en latin a donné girare, puis virare, tourner. L’environnement s’entend ainsi comme « ce qui entoure, un être vivant, un groupe ». Cette notion apparaît complexe en ce qu’elle intègre des composants « abiotiques », tels le sol, l’eau, l’air, mais également des composants « biotiques » (les autres êtres vivants) et leurs interrelations. Au cœur de l’environnement, se trouve ainsi le « milieu », ou plus communément « l’habitat », du latin habito, habitare, forme fréquentative du verbe habeo, habere, qui signifie « avoir ». L’habitat est ainsi ce que l’on a habituellement à notre disposition, notre habitation ou maison. Ceci explique la confusion fréquente entre l’environnement et la science de la maison qu’est « l’écologie », du grec oikos et logos. Créée en 1868 par le biologiste allemand Haeckel, l’écologie est définie comme « la somme de toutes les relations amicales ou antagonistes d’un animal ou d’une plante avec son milieu organique ou inorganique, y compris les autres êtres vivants, l’ensemble de toutes les relations complexes considérées par Darwin comme les conditions de la lutte pour la vie ». L’environnement est également confondu avec d’autres notions, par exemple celle de « paysage » . Les différentes enquêtes d’opinion menées sur l’Union européenne par la Commission européenne, dans le cadre de l’Eurobaromètre 17 témoignent ainsi de cette perception de l’environnement qu’ont les citoyens européens. Les tentatives récentes pour offrir à l’environnement une définition globalisante ne simplifient pas l’appréhension des contours de cette notion. Ainsi, la Convention d’Aarhus sur l’accès à l’information et la participation du public et l’accès à la justice en matière d’environnement de 1998 inclue dans la notion « l’air et l’atmosphère, l’eau, le sol, les terres, les paysages et les sites naturels, la diversité biologique et ses composantes, y compris les OGM et l’interaction entre ces éléments ». De même, l’environnement, selon la définition du Conseil International de la Langue Française (1976), « désigne l’ensemble à un moment donné, des agents physiques, chimiques et biologiques, et des facteurs sociaux susceptibles d’avoir un effet direct ou indirect, immédiat ou à terme, sur les organismes vivants et les activités humaines ». Enfin, l’Encyclopaedia Universalis assimile l’environnement à « l’écologie », et ainsi à la « science des habitats » qui concerne « dans le mode de vie des animaux, l’ensemble des relations qu’ils entretiennent avec le milieu dans lequel ils se trouvent ».
Appréhension de l’environnement par l’entreprise
Outre les difficultés précédemment évoquées relatives à la notion même d’environnement, un élément supplémentaire intervient lorsque l’on s’intéresse à l’appréhension de l’environnement par l’entreprise. En effet, comme le relèvent N. et R. Dorfman, un grand nombre d’éléments environnementaux intéressent l’ensemble des individus de l’Humanité sans pour autant n’appartenir à personne « et manquent par conséquent de la protection et du contrôle apportés normalement par un propriétaire privé. Cette situation était supportable lorsque les ressources hors propriété étaient abondantes et lorsqu’on pouvait les utiliser de façon inconsciente sans conséquence grave, mais désormais, nous ne pouvons plus nous permettre une telle négligence ». La confrontation de cette « non-propriété » avec les acteurs économiques que sont les entreprises est hautement problématique, notamment en termes de protection de ces éléments. Comment se prévaloir de l’atteinte à un bien, si celui-ci ne vous appartient pas ? Comment comprendre la gestion d’un bien par une personne n’en étant pas propriétaire ? S’intéressant à cette problématique sous l’angle des sciences de gestion, Giraudo dans ses travaux de recherche24, développe une analyse intéressante des relations qu’entretiennent les entreprises avec l’environnement, notamment dans le cadre d’un SME. Il considère que l’étude de l’environnement appréhendé par l’entreprise consiste à évaluer comment l’entreprise envisage et gère les droits de propriété environnementaux qui lui sont alloués, comment elles les respectent ou les dépassent. Il place au cœur de son analyse la notion de « bien environnemental », et s’intéresse à leur affectation contrainte ou volontaire à l’entreprise. Le droit de l’environnement, au nom de l’intérêt général, intervient ainsi pour règlementer l’utilisation, l’impact des entreprises sur la majeure partie des biens environnementaux. Le droit définit ainsi les niveaux minimaux de la pollution acceptable. Il constitue à ce titre le socle définissant les rapports entretenus par l’entreprise avec son environnement et le vecteur prépondérant d’affectation des biens environnementaux aux entreprises, puisque comme le relève Milton Friedman, « le rôle du gouvernement consiste à faire ce que le marché ne peut accomplir lui-même, c’est-à-dire déterminer, arbitrer et faire respecter les règles du jeu ». Le droit n’intervient pas dans la description des méthodes que l’entreprise doit mettre en œuvre pour respecter les seuils, valeurs légales. Il renvoie ainsi le soin à l’entreprise de déterminer les moyens d’obtention de ces volumes au travers des différentes techniques productives qu’elle met en œuvre. Le cadre juridique de base apparaît ainsi parfois dépassé par certaines entreprises engagées dans un SME, lorsqu’elles s’engagent dans une démarche proactive où elles captent d’autres biens environnementaux et s’imposent volontairement une gestion environnementale plus large que le « minimum légal ». Dépassant la conception classique où le droit n’est perçu que comme une contrainte, l’entreprise proactive instaure une relation de coopération avec l’autorité publique. Giraudo, schématise ainsi le SME au travers de la passation d’un « contrat » entre l’environnement et l’entreprise (en ce qu’il les lie durablement et fortement). Le « contrat » consistant en un échange de droits de propriété ou la création de nouvelles servitudes sur un ensemble de droits de propriété, il permet une réappropriation par l’entreprise de son environnement naturel. Le contrat environnement/entreprise résout en partie la problématique liée à la propriété environnementale. Le « contrat » évoqué par Giraudo prend la forme d’un « contrat unilatéral de l’entreprise envers l’environnement ». Précisons que ce « contrat » fait intervenir outre l’environnement naturel, d’autres acteurs, notamment, les acteurs institutionnels et les organismes de protection de l’environnement. Par ce « contrat », l’entreprise obtient un droit de jouissance de certains biens environnementaux, l’environnement en conserve la nue-propriété. La dernière catégorie d’acteurs apparaît être un garant, « tuteur de cette nue-propriété ». La force opératoire du « contrat environnement-entreprise » résulte de la validation de la conformité de l’entreprise au référentiel du SME, au travers de la certification. Ce point selon nous mérite d’être discuté, au vu notamment des critiques émergentes à l’égard de l’impartialité des organismes certificateurs. Si la validation de la conformité de l’entreprise à un référentiel de SME nous parait nécessaire, d’autres modes de validation méritent selon nous d’être envisagés (ce point sera notamment discuté dans le chapitre 2 relatif aux outils de mesure de la performance du SME).
Le dispositif ISO 14001 : Norme de référence en matière de SME
La Norme ISO 14001, publiée en 1996 et révisée en 2004, spécifie les exigences d’un SME, permettant à un organisme de développer et de mettre en œuvre une politique et des objectifs qui prennent en compte les exigences légales l’impactant ainsi que les informations relatives aux aspects environnementaux significatifs de ses activités. Elle s’applique aux aspects environnementaux que l’organisme a identifié comme étant ceux qu’il a les moyens de maîtriser et ceux sur lesquels il a les moyens d’avoir une influence. Elle n’instaure pas en elle même de critères spécifiques de performance environnementale. La révision de la norme en 2004 a permis de clarifier la première édition et de renforcer la compatibilité entre la norme ISO 14001 et les dispositions de l’ISO 9001 relative au système de management de la qualité, en vue notamment de faciliter la gestion intégrée des problématiques environnementales, qualité ou encore de la SST (Santé Sécurité au Travail). La démarche de l’ISO 14001 est censée être applicable à tous les types et tailles d’organismes et s’adapter à des situations géographiques, culturelles et sociales diverses. En pratique, le coût relativement important de mise en œuvre de ce système en termes humains et financiers, dissuade un grand nombre d’organismes, et notamment, sur le périmètre qui nous intéresse (celui des entreprises), les TPE et PME44 . La norme s’adresse ainsi principalement aux entreprises de taille importante qui souhaitent :
– établir, mettre en œuvre, tenir à jour et améliorer un système de management environnemental,
– s’assurer de leur conformité avec leur politique environnementale,
– démontrer leur conformité aux exigences de la norme.
Ce dernier point recouvre des objectifs très variés, et des méthodes de vérification de la conformité qui le sont tout autant. En effet, la démonstration de la conformité peut être réalisée au moyen d’une autoévaluation ou d’une autodéclaration, ou encore d’un audit externe de certification. Elle peut en outre être orientée par la recherche d’informations stratégiques orientant la prise de décision en interne et/ou d’une confirmation de sa conformité à l’intention des parties ayant un intérêt pour l’organisme, telles que les clients, ou d’autres parties externes à l’organisme, telles que les investisseurs, etc. (cf. Chapitre 2, section 1.1, La légitimation de l’action environnementale au regard des attentes des parties prenantes). L’objectif annoncé de la norme est d’équilibrer la protection de l’environnement et la prévention de la pollution avec les besoins socio-économiques. La démarche de mise en œuvre du SME décline ainsi dans un cadre structuré les principes classiques du management selon les quatre phases du modèle dit du « P.D.C.A. » pour « PlanDo-Check-Act ». Appliquées au SME, ces différentes phases correspondent à :
– Planifier (Plan): définition d’une politique environnementale, et détermination des objectifs et processus nécessaires à la fourniture de résultats en accord avec la politique environnementale de l’organisme.
– Mettre en œuvre (Do): mettre en œuvre les processus.
– Contrôler (Check): piloter et mesurer les processus par rapport à la politique environnementale, les objectifs, les cibles, les exigences légales et autres, et rendre compte des résultats.
– Agir (Act): mener des actions pour améliorer de façon continue la performance du système de management environnemental.
L’ensemble de la démarche est ainsi sous-tendue par l’objectif d’amélioration continue. La base de l’approche déclinée dans la norme ISO 14001 est généralement illustrée sous la forme de la figure suivante, qui présente les différentes phases du PDCA dans une boucle d’amélioration continue ou « Roue de Deming ».
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Table des matières
– De l’idée de la Thèse –
Première Partie – Mise en évidence des enjeux de la mesure de la performance des Systèmes de Management Environnemental
Chapitre 1er – Appréhension classique de la performance environnementale de l’entreprise : la gestion juridique des risques environnementaux
Section 1. Présentation de l’objet de recherche : le management des risques environnementaux de l’entreprise
I. Caractérisation de la relation environnement/entreprise
A. Définition générale de la notion d’environnement
B. Appréhension de l’environnement par l’entreprise
II. Présentation du Système de Management Environnemental (SME)
A. Définition de la notion de SME
B. Présentation des deux principaux référentiels utilisés par les entreprises en France : la norme ISO 14001 et le référentiel EMAS
1. Le dispositif EMAS
2. Le dispositif ISO 14001 : Norme de référence en matière de SME
C. Présentation de la démarche de mise en œuvre du SME
Section 2 – Influences juridiques théoriques impactant le SME : Panorama du droit de l’environnement en France
I. Sources et acteurs du droit de l’environnement
II. Spécificité du droit de l’environnement
III. Principales obligations environnementales impactant les entreprises
Section 3 – Influences juridiques réelles impactant le SME : Conséquences du non respect par l’entreprise de ses obligations environnementales légales et règlementaires
I. Etude de l’effectivité du droit de l’environnement
A. Effectivité de la règle de droit
B. Effectivité du contrôle du non respect de la règle de droit
II. Etude de l’efficacité du droit de l’environnement
A. Principaux éléments traduisant l’inefficacité du droit de l’environnement
B. Principaux éléments traduisant l’efficacité du droit de l’environnement
Chapitre 2 – Appréhension extensive de la performance environnementale de l’entreprise : Contexte et enjeux de la mesure de la performance du SME
Section 1- Elargissement de la notion de performance environnementale de l’entreprise
I. Légitimation de l’action environnementale au regard des attentes des parties prenantes
II. Lien entre amélioration de la performance environnementale de l’entreprise et performance financière
Section 2 – Cadre théorique de la mesure de la performance du SME
I. Analyse théorique générale de la mesure de la performance
A. Définition générale de la performance
B. Enjeux de la mesure de la performance : l’évaluation de la performance pour l’amélioration de sa stratégie
C. Définition des concepts clefs de la mesure de la performance : pilotage, indicateur de performance et tableaux de bord
1. Présentation de la notion de pilotage
2. Présentation des indicateurs de performance
3. Présentation des tableaux de bord
II. Mesurer la performance du SME : une évaluation vectrice d’amélioration continue de la performance environnementale de l’entreprise
A. Définition de la performance du SME : distinction de la performance du SME et de la performance environnementale
B. Présentation des systèmes d’évaluation de la performance du SME
Section 3 – Panorama critique des pratiques actuelles en matière de mesure de la performance des SME
I. Etude critique des pratiques en matière d’analyse environnementale
A. Caractérisation des pratiques en matière d’analyse de conformité
B. Caractérisation des pratiques en matière d’identification des impacts environnementaux significatifs
II. Etude critique des pratiques en matière d’audit environnemental
A. Caractérisation des pratiques en matière d’évaluation de conformité interne
B. Caractérisation des pratiques en matière d’audit environnemental externe
III. Etude critique des pratiques en matière de reporting et de plans d’actions environnementaux
A. La pratique des plans d’actions
B. Caractérisation des pratiques en matière de reporting environnemental
Seconde Partie – Développement et validation d’un dispositif de mesure de la performance des SME
Chapitre 3 – Formalisation d’un modèle de système de mesure de la performance du SME enrichi
Section 1. Présentation de la démarche de modélisation suivie
I. Cadre théorique de la notion de modèle
II. Définition des finalités du modèle
III. Caractérisation du modèle
Section 2. Présentation des processus retenus pour un modèle de système de mesure de la PSME enrichi : la contribution de la dimension conformité
I. Synthèse des éléments d’identification des processus du modèle de mesure de la PSME enrichi
II. Proposition d’un enrichissement du modèle de système de mesure de la PSME par la conformité
III. Présentation des processus liés aux objectifs originaux de modélisation de la mesure de la PSME
A. Présentation du processus de traitement des bases de connaissances « règlementaires »
1. Synthèse du modèle de Système de Maîtrise de la Conformité (SMC) retenu
2. Méthodologie de traitement des bases de connaissances dans le cadre de la gestion de la conformité d’un organisme
B. Présentation des processus liés : le découpage organisationnel, le plan d’actions et le reporting environnemental
1. Schématisation préliminaire du SME de l’entreprise par le processus de découpage organisationnel
2. Présentation des processus liés aux dimensions essentielles de mesure de la PSME : Plan d’actions et Reporting environnemental
Section 3. Proposition d’un modèle de système de mesure de la performance des SME enrichi
I. Définition du modèle de découpage organisationnel retenu
II. Définition du modèle de veille environnementale retenu
A. Définition du modèle d’analyse de conformité ou de « veille règlementaire »
B. Définition du modèle d’analyse des aspects environnementaux de l’entreprise
III. Définition du modèle d’évaluation retenu
A. Définition du modèle d’évaluation de la conformité
B. Définition du modèle d’évaluation des impacts environnementaux significatifs (AE)
IV. Définition du modèle de plans d’actions retenu
V. Définition du modèle de reporting retenu
VI. Présentation du modèle global du système de mesure de la PSME enrichi
Chapitre 4. Opérationnalisation et expérimentation du modèle au travers d’une ingénierie dédiée
Section 1. Présentation des ingénieries développées par l’entreprise partenaire PREVENTEO
I. Présentation de la société PREVENTEO
II. Présentation des progiciels développés et de leur apport à l’opérationnalisation du modèle de mesure de la performance des SME proposé
III. Construction d’une ingénierie du modèle de système de mesure de la PSME enrichi
A. Définition et développement des bases de connaissances relatives à l’analyse environnementale
B. Définition et développement d’une base de données règlementaires en environnement
C. Réalisation de la veille règlementaire en environnement
D. Création et actualisation des référentiels d’évaluation de la conformité règlementaire
Section 2. Expérimentations et Présentation des résultats
I. Vérification de la validité du mode de traitement des bases de données règlementaires
A. Première phase de validation du modèle de traitement des bases de connaissances règlementaires : l’intégration de textes spécifiques
B. Seconde phase de validation du modèle de traitement des bases de connaissances règlementaires : évaluation de la portabilité du modèle sur la sécurité industrielle
II. Expérimentation de l’ingénierie du modèle de système de mesure de la PSME enrichi
A. Objectifs de l’expérimentation
B. Protocole d’expérimentation
C. Résultats de l’expérimentation menée
Section 3. Discussion des principaux résultats de l’expérimentation et perspectives
III. Principaux apports et limites de l’expérimentation
A. Apports de l’expérimentation au processus de découpage organisationnel
B. Apports de l’expérimentation au processus d’analyse de la conformité et de veille
C. Apports de l’expérimentation au processus d’évaluation de la conformité
D. Apports de l’expérimentation au processus d’analyse environnementale
E. Apports de l’expérimentation au processus de reporting et de planification des actions
IV. Axes d’amélioration du modèle de système de mesure de la PSME enrichi et de son opérationnalisation
A. Intégration de données complémentaires à l’ingénierie
Cette dernière remarque nous invite à repenser le modèle proposé à la lumière des enseignements tirés de l’expérimentation
B. Enrichissement du modèle proposé
C. Fiabilisation de la démarche méthodologique
Conclusion Générale
LEGENDE
Figures
Tableaux
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXE
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