MESURE DE LA CONCORDANCE DE L’ADJUDICATION DES CAUSES DE DECES

MESURE DE LA CONCORDANCE DE L’ADJUDICATION DES CAUSES DE DECES

DISCUSSION

Notre travail visait à évaluer la concordance entre deux modes de classification des décès : 1) celui réalisé par un comité d’experts indépendants lors d’une étude clinique à partir des données recueillies à posteriori et 2) celui réalisé par le centre d’épidémiologie sur les causes médicales de décès à partir des certificats de décès. Il montre les limites de ces deux classifications et leur faible niveau de concordance globale. Il apporte aussi des éléments importants sur les circonstances de décès des patients lors ou au décours d’une hospitalisation en urgence pour raison médicale.
Il s’agit à notre connaissance de la première étude de ce type et elle porte sur un nombre conséquent de patients. Ses limites sont liées à son caractère rétrospectif et au manque de précision de la codification des causes de décès par le CEC, établie par grandes catégories et non par pathologies.D’un point de vue épidémiologique notre étude confirme les résultats de l’Institut National des Etudes Démographiques (INED), dans son enquête concernant la fin de vie en France. On retrouve la forte proportion des décès hospitaliers avec plus d’une personne sur deux venant y finir ses jours toute provenance confondue. (5) Cependant le taux de 80% de décès hospitaliers est au delà des chiffres attendus. Cela s’explique par le recrutement de la population au travers des services d’urgence. Il s’agit de personnes âgées atteintes d’une pathologie aigue, ne pouvant être soignées en ambulatoire puisque adressées aux urgences. Ceci signe une situation à risque majoré (lié au terrain, à la nature de la pathologie aigu, à l’entourage du patient), les patients les plus graves étant adressés aux urgences. Notre étude confirme aussi la prédominance masculine des décès hospitaliers, 60% des hommes et 50% des femmes décédant à l’hôpital. Il est intéressant de noter que selon l’INED le lieu de décès dépend aussi du type de pathologie sous jacente : on meurt davantage à l’hôpital en cas d’infection et de cancer, davantage en dehors des structures hospitalières en cas de pathologie vasculaire. Cette dernière affirmation est à nuancer puisque basée sur les certificats de décès. Or le sur diagnostic des pathologies cardiovasculaires sur les certificats de décès est maintenant clairement établi. (6)(7)(8)(9)(10)
Notre étude cherchait à mesurer la concordance entre deux instances, un groupe d’experts et le CépiDC, qui élabore les statistiques nationales concernant les causes de mortalité en France. La corrélation globale calculée, concernant la cause sous jacente du décès, est médiocre. Il n’existe pas de différence selon que l’on considère la population générale ou les sous groupes en fonction du lieu de décès.Dans l’analyse en fonction du type de diagnostic la corrélation n’est significativement bonne que concernant la pathologie néoplasique (κ=0.7, significative au risque 5%). Pour les autres diagnostics la corrélation n’est pas significative et serait au mieux médiocre. La bonne corrélation diagnostique concernant les pathologies néoplasiques est fréquemment retrouvée, que l’on compare les causes retenues aux résultats d’autopsies, ou à des certificats remplis par des médecins (généralistes ou pathologistes).(1) Cela est vrai pour les études s’intéressant à la corrélation diagnostique toutes causes de mortalité confondues ou spécifiques de certaines pathologies. (3)(11)(12) Cependant aucune étude ne s’est intéressée à notre connaissance aux données concernant la cause immédiate de décès. Dans ce cas la corrélation n’est pas meilleure, (κ=0.4) dans la population générale ou en analyse de sous groupe. Par contre la sensibilité diagnostique se trouve nettement améliorée, sans détérioration de la spécificité. Dans l’optique où les évènements recherchés par le CEC sont des phénomènes aigus (embolie pulmonaire, hémorragie grave) l’utilisation des causes immédiates de décès semble plus pertinente. Malheureusement la sensibilité diagnostique n’est pas suffisante pour pouvoir substituer la cause immédiate de décès à l’adjudication par le CEC.Le caractère médiocre de la concordance s’explique de plusieurs manières. Tout d’abord il n’est pas toujours aisé de porter un diagnostic unique et sûr à propos d’un tableau clinique évolutif faisant intervenir potentiellement plusieurs composantes (cardiaque, pulmonaire, embolique concernant la dyspnée) sur un terrain donné qui apportera ses spécificités. La majorité des études semblent pointer que la discordance augmente avec l’incertitude clinique  mais cette donnée n’est pas toujours retrouvée Une méta analyse, publiée en 2005, qui incluait 18 études mesurant la concordance diagnostique entre les diagnostics cliniques/paracliniques et autopsiques retrouvait une discordance de diagnostic principal comprise entre 30 et 60%. Ce taux de discordance global semble être resté longtemps stable au travers du temps, même s’il a été amené à varier pour des diagnostics particuliers. La tuberculose, très bien diagnostiquée dans les années 1930, l’est moins bien de nos jours, l’inverse est vrai pour l’infarctus du myocarde, la prévalence de ces pathologies ayant changé, les moyens diagnostics aussi Ces résultats sont fondés sur des cohortes d’autopsies anciennes antérieures à l’avènement des moyens diagnostics modernes. Une étude suisse publiée en 2000 comparant la sensibilité et la spécificité diagnostique au cours du temps, avec un taux conservé d’autopsies de 90% sur 20 ans, montre une élioration significative de la qualité diagnostique dans le cas des pathologies infectieuses, cardiovasculaires et cancéreuses.(20) Malheureusement le taux d’autopsies chute de manière continue à travers le monde compromettant la poursuite de l’évaluation des performances cliniques par rapport à l’examen de référence.(21) Dans notre cohorte seuls deux patients avaient bénéficié d’une autopsie, nous ne disposons pas d’information concernant l’éventuelle utilisation du compte rendu d’autopsie dans l’analyse des causes de mortalité par le CEC ou le CépiDC.
Ensuite certaines pathologies sont intrinsèquement à risque de confusion et donc de discordance. Par exemple les pathologies de symptomatologie respiratoires sont de diagnostic difficile. Il est fréquent que l’une soit prise pour l’autre. Dans l’étude TORCH, concernant l’analyse de l’imputabilité des décès à la BPCO, une de leurs principales difficulté de classement, pourtant réalisé par des pneumologues experts, concernait l’exacerbation de BPCO par rapport à la pneumopathie.(3) Dans une autre étude publiée en 2002 les causes pour lesquelles il existe une discordance de classe I de la classification de Goldman sont quasi exclusivement des pathologies thoraciques brutales de symptomatologie respiratoire à l’origine de dyspnée.discordance diagnostique de classe I : discordance diagnostique majeure dont la connaissance aurait conduit à une modification des thérapeutiques et aurait pu prolonger la survie du patient). Un facteur encore aggravant est la rapidité d’installation et d’évolution de ces pathologies laissant peu de temps pour réaliser des examens complémentaires et parvenir à un diagnostic de certitude.
Mais un même tableau clinique peut aussi être considéré, et donc codé, de plusieurs façons par les cliniciens. Les détresses respiratoires secondaires aux pneumopathies peuvent être classées comme infection ou détresse respiratoire aigue par exemple. Ceci génère un manque de spécificité de ce diagnostic, un manque de reproductibilité des classifications et in fine une discordance diagnostique apparente alors que le diagnostic est bien établi. Dans le cas du CEC la méthodologie de classifications n’est pas décrite, en dehors de la notion de consensus d’expert. Ces experts n’ont pas reçu de formation à la méthodologie de codification des décès, et leur nécessaire protocolisation afin de garantir leur reproductibilité. Une analyse de la méthodologie de 44 études examinant les causes de décès a souligné l’hétérogénéité et l’absence de reproductibilité des processus de classification des causes de décès.
Mais cette étude montre encore une différence importante de point de vue entre le CEC et le CépiDC. Le CEC dans son objectif de mieux détecter les décès en lien avec le traitement anticoagulant (hémorragie) ou la survenue de pathologie thromboembolique (embolie pulmonaire) a examiné les circonstances de survenue du décès, la notion de brutalité des décès notamment. Le CEC s’intéresse donc à la cause immédiate de décès dont le CépiDC nous donne cette définition : « maladie terminale, ou complication ayant directement entraîné la mort ». Le CépiDC lui se focalise sur la cause sous jacente du décès : « la maladie qui a déclenché l’évolution morbide conduisant directement au décès »(23). Le moment sur lequel se focalise l’attention du CEC et du CépiDC est donc différent générant une discordance supplémentaire. La meilleure concordance suggérée (résultats non significatifs) entre le CEC et la cause immédiate de décès par rapport à celle entre le CEC et le CépiDC par pathologie en est l’illustration.
Enfin, quand bien même le diagnostic est posé avec pertinence, sa retranscription sur le certificat est à l’origine d’erreurs, d’approximations. L’erreur la plus commune réalisée par les cliniciens est de noter un mécanisme de décès sur la première ligne et non une pathologie.(25) Cette erreur est retrouvée dans 34% des cas. Le mécanisme de décès doit être reporté dans la partie 2 du certificat médical de décès (arrêt cardiaque par exemple).(26) De même il est fréquent d’intervertir l’ordre de la chaîne ayant conduit au décès, (commençant par la pathologie sous jacente pour aboutir à la cause immédiate), d’inscrire les comorbidités dans la partie I. La participation, ou non, de pathologies chroniques évoluant depuis des années dans le phénomène aigu est aussi sujet à interprétation et donc a discordance. La bonne concordance des pathologies néoplasiques s’explique par le fort impact mémoriel tant chez les soignants que chez les patients. De plus ce sont des pathologies d’évolution lente permettant la réalisation d’examens complémentaires histologiques à l ‘origine d’une bonne fiabilité diagnostique.
Pour finir, le codage réalisé par le CépiDC est lui aussi générateur d’erreurs. Certaines caractéristiques des certificats de décès sont intrinsèquement génératrices d’erreur (nombre de diagnostic important, abréviations, codage de maladies chroniques). La concordance entre codeurs professionnels est bonne dans le cadre de l’infarctus, des cancers, moins bonne pour les infections et les pathologies respiratoires générant là encore un facteur de discordance.
La succession d’étapes menant d’un patient malade décédant d’une pathologie donnée à sa déclaration et sa comptabilisation statistique est longue et les sources d’erreurs multiples. La combinaison de tous ces phénomènes explique bien le faible taux de corrélation entre le CEC et le CépiDC.

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Table des matières

INTRODUCTION
MATERIEL ET METHODE
Objectif principal
Objectifs secondaires
Type d’étude
Population
Schéma de l’étude
RESULTATS
DISCUSSION
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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