A Madagascar, la tuberculose reste un problème majeur de santé publique avec, en 2012, une prévalence estimée à 442 (IC 95% : 222 – 735) par 100 000 habitants et une incidence estimée à 234 (IC 95% : 193-280) pour 100 000 habitants. En 2012, le nombre de cas notifiés était de 25 782 avec 4 964 cas de tuberculose extrapulmonaire [1]. La méningite tuberculeuse (MT) est la forme la plus commune de l’atteinte du système nerveux central au cours de la tuberculose. Ces localisations au niveau du système nerveux central représentent entre 5 à 15% des formes extrapulmonaires de tuberculose et entre 1 à 1,3% toutes formes confondues de tuberculose [2–4]. La MT est la forme la plus grave de tuberculose. La mortalité reste très élevée et peut atteindre 69% dans les pays en développement [5].
A Madagascar, grâce à la mise en place d’un programme national de lutte contre la tuberculose, le traitement de toutes les formes de tuberculose est gratuit et standardisé. Le diagnostic des formes pulmonaires par l’examen direct des crachats est entièrement pris en charge par ce programme. Toutefois, les formes extrapulmonaires comme la MT ne bénéficient pas d’un algorithme diagnostique aussi élaboré que dans les formes pulmonaires. L’accès aux différents examens paracliniques permettant le diagnostic de ces formes extrapulmonaires est très limité [6]. A Madagascar, la tuberculose pleurale et ganglionnaire sont les formes les plus fréquentes de tuberculose extrapulmonaire et sont bien décrites [7–9]. La MT est peu connue et reste probablement sous-estimée en pratique quotidienne.
Généralités
Epidémiologie
En 2013, selon les estimations, la tuberculose touchait environ 11 millions de personnes (IC 95% : 10-13 millions), dont 9 millions de nouveaux cas (IC 95% : 8,6- 9,4 millions) et était responsable de 1,1 millions de décès (IC 95% : 0,98-1,3 millions) dans le monde. L’Asie et l’Afrique étaient les régions les plus touchées avec respectivement 56% et 29% des cas estimés. Parmi les 6 116 536 cas de tuberculose notifiés en 2013, il y avait 836 392 cas de tuberculose extrapulmonaire, soit 13,67% des cas notifiés [10].
L’incidence de la tuberculose extrapulmonaire est directement corrélée à la prévalence de la tuberculose. Les atteintes du système nerveux central représentent entre 5 à 15% des tuberculoses extrapulmonaires et entre 1 à 1,3% de toutes formes confondues de tuberculose [2,3,11]. En Inde, un pays à forte prévalence de tuberculose, la mortalité imputable à la MT est estimée à 1,5 pour 100 000 personnes .
Agents pathogènes
Les agents responsables de la tuberculose chez les Mammifères sont regroupés sous la dénomination Mycobacterium tuberculosis complex qui comprend M. tuberculosis, M. bovis, M. africanum, M. canetti, M. microti, M. caprae et M. pinnipedii .
Trois espèces sont responsables de la tuberculose chez l’homme : M. tuberculosis, M. bovis et M. africanum. M. tuberculosis est le principal agent de la tuberculose chez l’homme. M. bovis est responsable de tuberculose chez le bétail et peut causer la tuberculose chez l’homme par contact avec du bétail infecté ou par consommation de lait non pasteurisé. M. africanum est responsable de plus de 50% des cas de tuberculose chez l’homme en Afrique de l’Ouest .
L’homme est le seul réservoir de M. tuberculosis. Il s’agit d’un bacille immobile, non sporulé et aérobie obligatoire à croissance lente avec un temps de dédoublement compris entre 15 et 22 heures. Les espèces du genre Mycobacterium sont difficilement colorées par la coloration de Gram et nécessite soit l’utilisation de la coloration de ZiehlNeelsen, soit la coloration à l’auramine du fait de la propriété d’acido-alcoolo-résistance des mycobactéries. Du fait de leur croissance lente, la culture des mycobactéries nécessite le recours à des milieux spécifiques et complexes. Les cultures sur milieu solide de Löwenstein-Jensen nécessitent entre 3 à 8 semaines d’incubation. Sur milieu liquide, l’incubation varie entre 1 à 3 semaines. Certains de ces milieux liquides sont couplés à des systèmes de détection automatisée de la croissance des mycobactéries soit en mesurant la production de CO2, soit en mesurant la consommation d’O2 par radiométrie, fluorométrie ou par indicateurs colorés. Le système MGIT (Mycobacteria growth indicator tube) de Becton Dickinson fait partie des systèmes les plus utilisés et permet de détecter la croissance des mycobactéries en 1 à 3 semaines par fluorescence visible à l’œil nu ou détectable par un automate. L’examen direct ainsi que la mise en culture pour les mycobactéries peuvent se faire dans des laboratoires à niveau de sécurité biologique 2. Cependant, la manipulation des cultures positives à mycobactéries doit obligatoirement se faire dans des laboratoires à niveau de sécurité biologique 3 du fait du risque de formation d’aérosols contaminés qui constituent un risque pour le personnel du laboratoire. L’identification des mycobactéries peut se faire soit par les tests phénotypiques soit par les méthodes génotypiques. Les techniques de biologie moléculaire d’identification ont supplanté les méthodes biochimiques qui requièrent dans la plupart des cas une étude longue et fastidieuse des caractères métaboliques .
Physiopathologie
Les gouttelettes aéroportées contenant M. tuberculosis sont inhalées et atteignent les alvéoles. Les bacilles se multiplient alors dans l’espace alvéolaire, dans les macrophages alvéolaires et dans les macrophages issus de la circulation générale. Initialement, il n’existe pas de réaction immunitaire efficace pour contrôler la dissémination des bacilles. De ce fait, il existe une bactériémie transitoire qui permet la dissémination des bacilles vers les sites extrapulmonaires. Après activation de la réaction immunitaire à médiation cellulaire, il se forme des granulomes au niveau des sites pulmonaires et des sites extrapulmonaires infectés. Au niveau du système nerveux central, ces granulomes sont situés au niveau de la surface du cerveau, ainsi qu’au niveau de la leptoméninge. En l’absence d’une immunité à médiation cellulaire efficace et en présence d’un facteur génétique prédisposant, les granulomes se développent. Par la suite, ils se rompent dans l’espace sous-arachnoïdien ou niveau des ventricules provoquant ainsi une réaction inflammatoire intense avec arachnoïdite et constitution d’un exsudat méningé. Cet exsudat méningé se localise préférentiellement au niveau de la base du crâne qui est le siège de prédilection des granulomes initiaux. Progressivement, il y a extension de l’exsudat au niveau des citernes de la base et de la scissure sylvienne. Il existe également de l’exsudat au niveau du plexus choroïde et des parois latérales des ventricules. Cette exsudation est à l’origine d’un blocage de la circulation du LCR qui engendre par la suite une hydrocéphalie. Au niveau de ces zones où il existe un exsudat, ainsi qu’au niveau des zones contiguës, les artères de petit et moyen calibre, les veines et les capillaires sont le siège d’une vascularite pouvant être à l’origine d’ischémie et d’infarctus .
Signes
Signes cliniques
La MT se manifeste classiquement comme une méningite d’évolution subaiguë. La phase prodromique dure entre 2 à 4 semaines et se caractérise par des signes non spécifiques : asthénie, fièvre, anorexie, amaigrissement et céphalées. Par la suite, apparaît une photophobie, des nausées et vomissements et une raideur de la nuque auxquels s’associent une altération de la conscience de degré variable. Toutefois, le syndrome méningé est rarement complet. D’autres manifestations cliniques comme des convulsions ou des déficits neurologiques focaux incluant l’atteinte des paires crâniennes (VI, III, IV et VII classiquement) peuvent apparaître. L’installation des signes cliniques peut s’étendre sur une période pouvant aller jusqu’à 9 mois. Un contage tuberculeux ou un antécédent de tuberculose peut être retrouvé à l’interrogatoire. L’évolution finale de la maladie se fait dans un tableau de coma profond et de décérébration qui se solde par le décès du patient .
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Table des matières
INTRODUCTION
RAPPELS
I. Généralités
1. Epidémiologie
2. Agents pathogènes
II. Physiopathologie
III. Signes
1. Signes cliniques
2. Signes paracliniques
IV. Diagnostic
1. Diagnostic positif
2. Diagnostic de gravité
3. Diagnostic différentiel
V. Traitement
VI. Pronostic
METHODOLOGIE
I. Type et cadre de l’étude
II. Population d’étude
III. Critère d’inclusion
IV. Variables étudiées
V. Analyses statistiques
RESULTATS
I. Données cliniques
II. Données biologiques
III. Données radiologiques
IV. Données microbiologiques
V. Index diagnostique de Thwaites et définition des cas
VI. Evolution et facteurs prédictifs de mortalité
DISCUSSION
CONCLUSION
REFERENCES