Médecines Alternatives et Complémentaires

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Médecines Alternatives et Complémentaires

Définition

Dans un premier temps, il est essentiel de s’entendre sur ce qu’on appelle les médecines alternatives et complémentaires. Il est, en effet, difficile de trouver un nom global et universellement accepté à l’ensemble de ces pratiques. On entend communément parler de médecine « douce », « naturelle », « parallèle », « complémentaire », « alternative », « non conventionnelle », « non traditionnelle » ou au contraire « traditionnelle ».
Les définitions de santé solidarité française nous permettent d’aborder un point fondamental à travers les termes de médecine traditionnelle et médecine complémentaire (6).
La médecine « conventionnelle » ou « traditionnelle »
D’après la définition de l’OMS, il s’agit de la « somme de toutes les connaissances, compétences et pratiques reposant sur les théories, les croyances et les expériences propres à différentes cultures qu’elles soient explicables ou non, qu’elles soient utilisées dans la préservation de la santé, ainsi que dans la prévention, le diagnostic, l’amélioration ou le traitement de maladies physiques ou mentales ».
La médecine dite « conventionnelle » s’appuie pour sa part sur des traitements qui ont toujours obtenu une validation scientifique, soit par des essais cliniques, soit parce qu’ils bénéficient d’un consensus professionnel fort. Les essais cliniques sont soumis à des autorisations et à des contrôles rigoureux sur le plan de l’éthique, des conditions de réalisation et de la pertinence scientifique. Les consensus professionnels, quant à eux, sont obtenus après plusieurs années de recul, avec l’accord et l’expérience de la majorité des professionnels de la discipline concernée. Les conditions d’utilisation des techniques y sont définies avec précision. En s’appuyant sur cette méthodologie rigoureuse, l’efficacité de la médecine conventionnelle est prouvée.
La médecine conventionnelle est enseignée dans les facultés de médecine. Les études de médecine conduisent à l’obtention de diplômes de niveau national : le doctorat en médecine et des diplômes dans une des spécialités médicales existantes. Pour obtenir le diplôme et le titre de médecin en France, les seules matières enseignées sont les pratiques « conventionnelles ». Les autres professions de santé (chirurgiens-dentistes, sages-femmes, infirmiers, etc.) bénéficient également d’un enseignement conduisant à l’obtention de diplômes de niveau national (7).
Les pratiques de soins non conventionnelles (PSNC) et les Médecines alternatives et complémentaires (MAC)
D’après la définition de l’OMS, il s’agit d’un « vaste ensemble de pratiques qui ne font pas partie de la tradition ni de la médecine conventionnelle du pays et ne sont pas pleinement intégrées à son système de santé prédominant. Dans certains pays, elles sont utilisées de manière interchangeable avec le terme médecine traditionnelle ».
Sur le site du ministère de la santé français, sont considérées comme des PSNC : ostéopathie, hiropraxie, méditation, hypnose / hypnothérapie, mésothérapie, auriculothérapie, biologie totale, lypolyse, acupuncture / moxibustion, homéopathie, biorésonance, phytothérapie, thérapie nutritionnelle, réflexologie, naturopathie, aromathérapie, sophrologie, thermalisme psychiatrique, jeûne, massages, qi gong, tai-chi etc. (7).
Dans le rapport de l’Académie de Médecine, une annexe avec une liste MeSH (Medical Subject
Headings) des thérapies complémentaires reprend 17 catégories :
• Acupuncture (electroacupuncture, moxibustion)
• Anthroposophie
• Auriculothérapie
• Homéopathie
• Médecine traditionnelle (africaine, arabe, ayurvédique et chinoise)
• Mésothérapie
• Thérapies corps esprit (aromathérapie, hypnose, psychodrame, psychophysiologie, psychothérapie, tai chi, thérapie par le rire, toucher thérapeutique, yoga)
• Manipulations de l’appareil locomoteur (chiropratiques, ostéopathiques, acupressure, kinésiologie, massage)
• Naturopathie
• Organothérapie
• Phytothérapie
• Réflexothérapie
• Rajeunissement
• Santé holistique
• Thérapies sensorielles par les arts
• Spéléothérapie
• Thérapies spirituelles (chamanisme, guérison par la foi, guérison mentale, magie, méditation, occultisme, radiesthésie) (8)
L’ensemble de ces pratiques se divise en divers type d’approches, pouvant être préventives, curatives, psychothérapeutiques, de développement personnel, ou encore spirituelles voire mystiques.
Ces pratiques se développent parallèlement à la médecine « conventionnelle », en France et partout dans le monde. Elles sont également en progression dans le champ du bien-être, de la nutrition et de l’apparence esthétique.
Dans la très grande majorité des cas, les PSNC n’ont pas fait l’objet d’études scientifiques ou cliniques montrant leurs modalités d’action, leurs effets, leur efficacité, ainsi que leur non-dangerosité. Lorsqu’elles sont utilisées pour traiter des maladies graves ou en urgence à la place des traitements conventionnels reconnus, elles peuvent donc faire perdre des chances d’amélioration ou de guérison aux personnes malades.
L’enseignement de ces pratiques ne donne pas lieu à des diplômes nationaux, à l’exception de l’acupuncture. Cependant, certaines formations font l’objet de diplômes d’université (DU) ou de diplômes interuniversitaires (DIU) placés sous la seule responsabilité d’une ou de plusieurs universités. Ces diplômes ne signifient pas, ipso facto, que l’efficacité et l’innocuité de la technique sont prouvées. Ce sont des diplômes complémentaires qui, à eux seuls, ne donnent pas le droit à l’exercice d’une profession de santé.
Certaines formations sont par ailleurs délivrées au sein d’organismes privés sans aucun contrôle des institutions publiques quant à leur contenu, et sans reconnaissance par l’Etat des diplômes délivrés.
Des PSNC ou des sites Internet diffusant ces pratiques peuvent afficher un label de qualité (norme, certification du site). Ce label ne signifie pas pour autant que les effets et risques d’une technique ont été évalués scientifiquement.
Certaines PSNC sont présentées comme des « médecines naturelles », ce qui pourrait être compris comme « sans effets secondaires ».
Ces pratiques dites « naturelles » prennent le plus souvent en compte la personne dans son ensemble sans se focaliser sur un symptôme ou une maladie en particulier. Certaines invoquent les capacités d’auto-guérison de la personne malade. Le recours à ces pratiques peut s’expliquer par le fait que les traitements conventionnels nécessitent, pour être efficaces et sûrs, l’application de protocoles de soins rigoureux, ce qui peut donner au patient le sentiment de recevoir des soins standardisés, non adaptés à son cas. Les traitements dispensés dans le cadre de ces pratiques apparaissent plus personnalisés, mais ils n’offrent pas les mêmes garanties d’efficacité et de sécurité que la médecine conventionnelle. (7)
Ces notions permettent donc de souligner que notre définition choisie des médecines complémentaires ne sera en aucune façon ni intemporelle ni universelle. Par exemple la médecine traditionnelle chinoise est ainsi le système de référence dans certains pays d’Asie alors qu’elle est communément chez nous considérée comme une médecine complémentaire. Notre point de référence sera donc évidemment pour nous la médecine traditionnelle occidentale.

Situation Actuelle

Il y a 70 % des patients de l’Union Européenne qui auraient fait appel aux MAC au moins une fois dans leur vie, 25% y recourent chaque année et ce nombre serait en hausse constante d’après un rapport de 2012 du centre d’analyse stratégique du gouvernement (9).
En France, les données recueillies par l’ordre des médecins sont une bonne base pour illustrer ces propos. Quatre MAC peuvent faire l’objet de titres et mentions autorisés sur les plaques et ordonnances par le Conseil National de l’Ordre des Médecins (CNOM) en France : l’homéopathie, l’acupuncture, la mésothérapie, la médecine manuelle ostéopathie (10). Il a enregistré en 2015, 6 115 médecins français ayant déclaré une orientation de médecine alternative et complémentaire. Un sur cinq exerce à l’hôpital.
La grande majorité des cas (91 %) concerne l’homéopathie, l’ostéopathie ou l’acupuncture. Du coté des patients, 40 % des Français auraient recours aux MAC. L’homéopathie rencontre un succès particulier puisque 56 % des Français y ont déjà eu recours (10). Cependant cette pratique a fait l’objet d’une polémique concernant son remboursement. En effet le niveau de preuve scientifique concernant le bénéfice rendu a posé question quant au remboursement et le décret n° 2019-905 du 30 août 2019 a modifié les conditions de remboursement des spécialités homéopathiques et des préparations homéopathiques. Depuis le 1er janvier 2021 celles-ci ne sont plus remboursées. Parallèlement, de plus en plus de mutuelles françaises remboursent un grand nombre de MAC ce qui en fait même un critère de choix pour certains.
Ces données démontrent l’essor et l’importance que prennent ces MAC en France. En effet, on peut considérer actuellement que quasiment un patient sur deux utilise ou a déjà eu recours à ces pratiques, ce qui peut être intéressant à considérer pour sa prise en charge. Sur le plan financier, l’acupuncture est remboursée en partie par la Sécurité́Sociale à hauteur de 70% si c’est un médecin conventionné qui dispense ou prescrit ces soins.

Rôle dans les Maladies Chroniques

Les patients atteints de pathologie chronique montrent un taux plus important de recours aux MAC (11). La demande de services en MAC devrait augmenter en raison notamment du vieillissement de la population et une probable augmentation subséquente chez les personnes qui éprouvera un ou plusieurs problèmes de santé chroniques (12).
L’ordre des médecins va également dans ce sens en notant une hausse des utilisateurs de MAC chez les patients atteints d’une maladie grave ou chronique en France (10).
L’émergence des MAC en milieu hospitalier en est une bonne illustration avec une utilisation préférentielle dans certains services. Ainsi, on propose l’hypnose comme alternative à l’anesthésie pour certaines chirurgies ou dans les services d’obstétrique mais on retrouve surtout ces thérapies dans des services où sont présents des patients atteints de pathologies chroniques (oncologie, soins palliatifs, rhumatologie, psychiatrie…). Ils sont alors utilisés en tant que soins de support en oncologie ou conjointement au traitement traditionnel dans ces autres disciplines. (13).
Le rapport de 2012 du centre d’analyse logistique spécifie que le taux de recours aux MAC dépend de la pathologie et peut monter jusqu’à 80 % chez les patients atteints de cancer en Europe (9). Les soins de supports peuvent se définir comme l’ensemble des soins et soutiens nécessaire aux personnes malades tout au long de la maladie, conjointement aux traitements oncologiques ou onco-hématologiques lorsqu’il y en a. (14).
On peut transposer ce système à la médecine ambulatoire. En libéral, les patients atteints de maladie chronique constituent une part importante de l’activité du médecin généraliste. Il est le principal acteur et chef d’orchestre des soins de ce type de patients. Il peut jouer un rôle important vis-à-vis de la pratique de ces MAC et cela implique d’être à l’écoute de ces patients afin de recueillir leurs expériences de ces thérapies pour mieux les orienter et conseiller. Par ailleurs, certains médecins choisissent de se former à une ou plusieurs de ces MAC. Ce nouvel outil thérapeutique peut être utilisé en complémentarité de sa formation médicale traditionnelle. Cet atout ne peut constituer qu’une richesse supplémentaire dans sa pratique et assurer au patient une sécurité par sa formation médicale complète.
Nous pouvons prendre l’exemple de l’acupuncture qui est apparue en Chine il y a environ 2500 ans, et qui reste une composante importante de la médecine traditionnelle chinoise aujourd’hui. Une revue menée par l’OMS a suggéré que l’acupuncture peut aider à traiter plus de 20 conditions médicales, y compris les maladies cardiovasculaires (15-16).
Une autre étude américaine a montré que les patients dont le médecin généraliste a reçu une formation supplémentaire en médecine complémentaire et alternative affichent des dépenses de santé et un taux de mortalité plus faible. Cette réduction de coût est due à des hospitalisations et des prescriptions médicamenteuses moins nombreuses (17).
Cependant il est nécessaire de se baser sur plusieurs études pour avancer des preuves scientifiques, d’où l’objet de notre travail. En effet notre méta-synthèse a pour but d’évaluer au travers de la littératures les bénéfices recherchés et les inconvénients ressentis par les patients atteints de pathologies chroniques au sein des médecines alternatives et complémentaires.
Nous pourrons ainsi envisager de concevoir des essais cliniques avec des critères de jugement adaptés aux attentes des patients, afin de vérifier l’intérêt de ces approches dans l’arsenal thérapeutique à proposer à nos patients.
Nous pourrons également adapter notre prise en charge en tant que médecin généraliste si nous comprenons mieux les attentes des patients vis-à-vis de ces approches.

Les maladies chroniques

Les maladies chroniques sont des affections longues qui, en règle générale, évoluent lentement. Responsables de 63% des décès, les maladies chroniques (cardiopathies, accidents vasculaires cérébraux (AVC), cancer, affections respiratoires chroniques, diabète…) sont la première cause de mortalité dans le monde. Sur les 36 millions de personnes décédées de maladies chroniques en 2008, 29% avaient moins de 60 ans et la moitié étaient des femmes (6).
En France, une grande partie des maladies chroniques est recensée sous le nom d’Affection Longue Durée (ALD). Ces pathologies donnent lieu à une prise en charge financière particulière par la sécurité sociale. En 2018, 11,1 millions de personnes affiliées au régime général de l’Assurance Maladie bénéficiaient du dispositif des ALD, soit 18% des assurés.
Entre 2005 et 2012, les effectifs ont évolué de 4,9% par an. Puis de 2,7% par an entre 2012 et 2014. Leur croissance varie mais nous observons une hausse globale de ces effectifs. On peut attribuer cette majoration à l’allongement de l’espérance de vie et à la croissance de la population. L’âge moyen des personnes en ALD a en effet augmenté : en 2015, il était de 63 ans. Les trois-quarts des nonagénaires sont en ALD. Pour les septuagénaires entre 75 et 79 ans, la prévalence est de 60% chez les hommes, et de 46% chez les femmes (4).
Pour ce qui est de leur répartition par pathologie les maladies cardio-neuro-vasculaires (maladie coronaire, insuffisance cardiaque, troubles du rythme, cardiopathies, artériopathies, AVC, hypertension artérielle sévères) touchaient 3,8 millions de personnes en 2018. Elles représentaient 35% des exonérations de frais de soins. Le diabète impactait de son côté 2,8 millions de personnes (25%), suivi par les tumeurs malignes (2,2 millions d’individus) et les affections psychiatriques de longue durée (1,4 million) (5).
Quant au coût de ces maladies pour les finances sociales, la dynamique des dépenses ALD reste le principal facteur de hausse des dépenses d’assurance maladie (4).
Cependant nous n’avons pas de visualisation précise du coût pour les patients des pratiques alternatives et complémentaires, celles-ci ne bénéficiant pas de prise en charge sociale, mise à part l’acupuncture. Or, ces pratiques prennent de nos jours une place de plus en plus importante dans la prise en charge de ce type de pathologie (1).
Cet attrait pour les MAC nous amène à nous poser la question des bénéfices recherchés par les patients souffrant de pathologie chronique se tournant vers ces pratiques. D’autant que, ces pratiques n’ayant pas fait l’objet d’évaluation scientifique rigoureuse, il peut être pertinent de questionner les attentes des patients vis-à-vis de leurs traitements (conventionnels ou complémentaires). En outre, dans la comparaison des différents traitements pour les patients, il nous paraissait primordial de rechercher également les inconvénients ou les risques liés aux MAC. Pour répondre à cela, nous avons choisi d’effectuer une revue de la littérature des études qualitatives menées auprès des patients atteints de pathologies chroniques et ayant eu recours aux MAC.

Stratégie de recherche

Une revue systématique de la littérature a été menée en septembre 2020 à partir de la base de données Medline via PubMed et dans la base de données EBSCOhost
La recherche sur PubMed a été interrogée à partir du Constructeur de Requêtes Bibliographiques Médicales (CRBM) du CISMeF (https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/ et http://crbm.chu-rouen.fr/querybuilder/), en associant les termes MeSH suivants :
(chronic disease) AND (qualitative research) AND (complementary therapies) AND(patients)
Des filtres ont été ajoutés : English, French
Cette recherche a été réalisée le 03 septembre 2020.
Dans EBSCOhost nous avons interrogé les bases de données de American Psychological Association (APA) Psycarticles et Psychology and Behavioral Sciences Collections, toutes les références associées aux mêmes mots-clés Mesh précédemment cités, à l’exception de « qualitative research ».
La liste des articles identifiés dans les bases de données a été constituée et les éventuels doublons ont été éliminés.

Critères d’inclusion et d’exclusion

Les critères d’inclusion étaient les suivants :
• Population de patients atteints de maladie chronique. On s’est entendu par maladie chronique comme toute pathologie nécessitant une prise en charge de plus de 6 mois•
• Étude qualitative
• Approche complémentaire utilisée par les patients
• Critère de jugement principal de l’étude sur l’intérêt et les inconvénients des MAC dans la prise en charge de la pathologie chronique
Les critères d’exclusion étaient :
• Populations de patients atteint de pathologie aiguë
• Études quantitatives
• Études ne portant pas sur les patients (sur les soignants, les prestataires, ou les aidants).
A l’exception des études pédiatrique où ce sont les parents qui sont interrogé pour leurs enfants et leur choix en tant que parents d’avoir recours aux MAC.
• Les revues systématiques de la littérature
• Langue de l’article autre que français et anglais

Extraction des données et évaluation de la qualité

L’inclusion des articles a été menée en double lecture. La première sélection a porté sur la lecture des titres, une seconde sur la lecture des résumés des articles et enfin dans un troisième temps sur la lecture des articles. Les discordances ont été résolues par consensus entre les auteurs.
Nous avons suivi plusieurs recommandations de méthodologie afin d’établir notre revue (20, 21).

Résultats

Sélection des articles

La recherche a été réalisée le 3 septembre 2020.
La requête PubMed a retrouvé 140 articles.
La requête EBSCOhost a retrouvé 46 articles.
Sur ce total de 186 références identifiées nous avons retenus 34 articles après lecture des titres puis des résumés. Ces articles ont fait l’objet d’une lecture intégrale.
Vingt-cinq articles correspondant aux critères d’inclusion ont été conservés (Figure 1).
Le travail ayant duré 6 mois nous avons choisi de ne pas effectuer de mise à jour de l’équation de recherche.

Description des études incluses

Les 25 études incluses ont été publiées entre 1996 et 2020.
Ces études ont toutes pour critère de jugement principal l’évaluation de la pratique des MAC chez des patients atteints de pathologie chronique.
Douze des études retenues rapportaient l’expérience de patients ayant eu recours aux MAC dans le cadre de leur inclusion à l’étude : les patients acceptaient de participer aux interventions proposées et décrivaient leurs ressentis lors d’entretiens semi-structurés.
Les autres études ont interrogé les patients ayant spontanément eu recours aux MAC pour explorer leurs motivations.
Vingt études portaient sur l’évaluation d’une pratique en particulier (acupuncture, yoga, méditation, ou autre) alors que cinq études portaient sur l’évaluation des MAC sans distinction.

Méta-synthèse

Sur les 25 articles conservés pour cette méta-synthèse, 8 rapportaient des inconvénients liés à l’utilisation des MAC.
Seules les MAC demandant un effort physique (tai chi ou yoga par exemple) ou impliquant des gestes invasifs (acupuncture) présentaient des effets secondaires liés à la MAC parmi les inconvénients relevés (douleur, asthénie…). Les autres inconvénients des MAC mentionnés par les patients relevaient plus de problématiques économiques ou logistiques. Le coût des MAC notamment était parmi les inconvénients cités le plus fréquemment, pouvant être un frein à leur recours. Certains patients ont également évoqué un problème d’investissement en temps : aussi bien le temps nécessaire pour la réalisation-même de ces MAC que la difficulté à maintenir une bonne observance dans le temps.
Concernant les bénéfices éprouvés par les patients, certains semblaient liés aux motivations initiales ayant poussé le patient à avoir recours aux MAC. Par exemple, si les patients avaient comme première motivation la recherche d’une approche complémentaire par manque ou absence de satisfaction vis-à-vis des soins conventionnels reçus, la MAC présentait comme bénéfice immédiat l’absence des effets liés aux soins conventionnels. D’autres patients avaient comme motivation la recherche d’un bien-être global ou au moins de bénéfices concernant leur santé. Selon les effets ressentis, certains pouvaient être satisfaits quand d’autres étaient déçus : sur les 25 articles de cette méta-synthèse, 20 recensaient une amélioration des symptômes des pathologies traitées ou des pathologies adjacentes.
Le détail des bénéfices et des inconvénients rapportés par les patients selon le type de MAC est synthétisé dans le tableau 1.

Motivations des patients

Notre méta-synthèse retrouve que les patients se dirigent vers les MAC, soit par conviction de leurs bienfaits, soit par insatisfaction des médecines conventionnelles. La conviction des bienfaits des MAC est fonction de la culture des patients. Par exemple, une étude menée en Ethiopie révèle que, sur un total de 240 patients âgés atteints de pathologie chronique, 40,8% d’entre eux ont recours aux MAC par insatisfaction des thérapies conventionnelles et 30,8% par croyance en leurs bienfaits. Cette étude met aussi en avant certains facteurs intrinsèques favorisant l’usage des MAC tels que : le mode de vie rural, le haut statut éducatif, les revenus mensuels plus élevés et la présence de comorbidités chez le patient (50). Paradoxalement, on observe une baisse d’utilisation des MAC chez les patients les plus âgés, notamment après 80 ans, alors que le taux de pathologies chroniques augmente avec l’âge (51).
L’influence de la culture d’un pays sur le recours aux MAC est également révélée par des études de prévalence, avec des chiffres allant de 30% à 76% d’utilisation en fonction des pays recensés (46, 52). Le plus fort recours aux MAC étant recensé dans les pays asiatiques comparativement aux pays occidentaux. Cependant, il n’y a pas encore d’étude multinationale réalisée pour confirmer cette supposition.
Outre la culture comme facteur prédisposant au recours aux MAC, deux grandes catégories de motivation ressortaient de cette revue de la littérature : les motivations poussant les patients vers les MAC (facteurs « push ») et les motivations attirant les patients vers celles-ci (facteurs « pull »). Cette notion de facteurs « push » et « pull » est bien évoquée par Shaw et al. à propos des motivations des patients asthmatiques à pratiquer les MAC (21). Nous la retrouvons également dans une autre étude réalisée en Inde chez des patients atteints de pathologies coronariennes (53).
La crainte des médicaments et de leurs effets secondaires sont parmi les facteurs « push » les plus exprimés dans les articles de notre méta-synthèse. A ce propos, un sondage du CSA en 2011 retrouve que 35% des français ne faisaient pas confiance aux médicaments (54).
Nous retrouvons également d’autres facteurs « push » telles que l’absence de réponse sur les symptômes des thérapies conventionnelles mais aussi l’absence d’écoute et de réponse de la part des praticiens conventionnels (43). Dans de nombreuses études de notre méta-synthèse, l’écoute accordée par les praticiens de MAC est une motivation fréquemment rapportée par les patients. Par ailleurs, le choix des MAC peut aussi s’inscrire dans un projet plus personnalisé de soins, considéré plutôt comme un facteurs « pull » et non comme un rejet des traitements conventionnels. De nos jours, les patients souhaitent de plus en plus être acteurs de leur prise en charge et sont dans une quête du bien-être ou du mieux-être. Dans cette optique, ils sont dans une démarche pro-active de recherche d’approches différentes pour leur prise en charge (55).
Une étude internationale menée sur internet montre également que l’usage des MAC n’est pas associé à un rejet des soins conventionnels et paradoxalement, qu’il est le contraire. En effet, dans cette étude, il est démontré que les patients ayant recours aux MAC feraient l’usage d’une plus grande variété de services de soins conventionnels et réaliseraient plus de consultations que les patients n’utilisant pas de MAC (56).
On a vu que l’usage des MAC est plus important chez les patients atteints de maladie chronique. La pathologie dont ils souffrent ainsi que leur expérience des MAC va aussi influencer le recours à ces pratiques.
En revanche, une étude allemande montre que les pathologies plus graves pouvant mettre en danger le pronostic vital sont un facteur de moindre utilisation des MAC pour ceux qui ne sont pas familiers avec ce type de soins (57).
En somme, nous retrouvons dans notre méta-synthèse des motivations de « récompense », à savoir la recherche de bénéfices.

Les bénéfices retenus

Amélioration des symptômes par une autre approche

Les patients atteints de pathologies chroniques souffrent de différents symptômes qui peuvent entraver leur qualité de vie. Ces patients vont alors chercher différents moyens d’y remédier et beaucoup d’entre eux vont s’orienter vers les MAC pour la gestion de ces symptômes.
Un des principaux bénéfices retenus dans notre méta-synthèse est l’effet positif des MAC sur les symptômes de la pathologie traitée. A ce titre, certaines études quantitatives essaient même de chiffrer ce bénéfice. Au Japon, une étude rapporte environ 75% d’efficacité des MAC, sans pour autant préciser ni le type de MAC, ni les pathologies concernées (52). Cette recherche de bénéfice sur les symptômes aboutit le plus souvent à une utilisation complémentaire plutôt qu’à une utilisation exclusive des MAC par rapport aux soins conventionnels, l’usage exclusif des MAC semblant plus rare. En Norvège, une enquête menée en 2007 sur près de 55 000 personnes dans la population générale montre que l’usage exclusif des MAC reste rare (1,5%) (58).
Vingt-et-un articles sur les 25 recensés pour notre étude explorent des pathologies chroniques précises avec une symptomatologie variée en fonction des pathologies. Cependant, nous pouvons retenir que la douleur est un symptôme prépondérant que ce soit de la pathologie chronique elle-même ou d’une maladie adjacente. Plusieurs de ces études montrent un effet positif sur ce symptôme et une baisse de prise médicamenteuse est fréquemment rapportée.
La diminution de prise médicamenteuse est ainsi un bénéfice mentionné parmi les études ; elle s’inscrit dans une recherche de mieux-être et d’une médecine considérée comme plus naturelle. On retrouve notamment cette quête de médecine plus douce chez les patients atteints de pathologies chroniques, avec des traitements au long cours qui présentent des effets secondaires fréquents tels que les biomédicaments pour la SEP (45) ou les corticothérapies pour l’asthme (21). Pour ces deux exemples cités, les patients recherchent une alternative à ces traitements au travers des MAC plutôt qu’une aide complémentaire pour gérer les effets secondaires.

Contrôle de soi et de sa maladie

Parmi les bénéfices éprouvés par les patients ayant eu recours aux MAC, la quête de contrôle de soi et ainsi, du contrôle de la maladie, était évoqué dans plusieurs des études analysées.
Ce bénéfice est souvent décrit dans les études chez les patients asthmatiques ou atteints de pathologies chroniques respiratoires. Beaucoup d’entre eux ont recours à des pratiques alternatives ou complémentaires telles que le yoga, les exercices respiratoires Buteyko, la thérapie Bowen, etc. (21, 58).
Cette volonté d’être actif dans sa prise en charge est également retrouvée dans les études réalisées chez des patients atteints de pathologies cancéreuses. Ainsi, dans cette étude américaine de Henderson et Donatelle en 2003, on a remarqué que sur 551 femmes atteintes de cancer du sein, la majorité avait le sentiment de mieux maîtriser leur maladie en étant utilisatrices d’une ou de plusieurs MAC. Ils ont en même temps conclu qu’un fort désir de contrôle de la maladie et de sa cause était un facteur favorisant la pratique d’une MAC (59).
Une autre étude conduite en Australie auprès de 151 usagers des thérapies alternatives et complémentaires, a montré que ces derniers y ont recours non seulement pour améliorer leurs symptômes mais aussi dans 54% des cas pour recueillir des conseils concernant des problèmes de santé généraux et 36% pour rechercher une meilleure compréhension de soi et ainsi bénéficier d’une perspective plus large de guérison. De plus, les patients ont décrit que la qualité de la relation avec leur praticien de MAC avait un impact sur l’observance et la continuité du traitement (60).

Inconvénients

Notre méta-synthèse recense assez peu de points négatifs à l’utilisation des MAC. Ceux retrouvés peuvent être classées en deux catégories : les effets secondaires des pratiques et les difficultés d’observance.

Les effets secondaires

Dans notre méta-synthèse, nous avons relevé des effets secondaires avec la pratique de l’acupuncture, du yoga et du Tai Chi. Une étude quantitative menée en Allemagne s’est aussi intéressée aux effets secondaires de la pratique du yoga. Sur 1702 utilisateurs interrogés, 10,2% ont rapporté des effets secondaires. Le risque d’effets secondaires était plus grand chez les patients atteints de maladie chronique et chez ceux le pratiquant de manière autodidacte, sans supervision (61).
En revanche, notre méta-synthèse n’a pas révélé de mention du danger que peut représenter les MAC. Pourtant, il arrive que les MAC comportent certains risques liés à leurs pratiques elles-mêmes ou bien en rapport à la concurrence faite aux médecines conventionnelles. Cette concurrence peut malheureusement provoquer des retards de diagnostic ou de prise en charge de maladies ayant un mauvais pronostic telles que les cancers.
L’OMS dans son rapport 2014-2023 énumère ces différents risques :
• L’utilisation de produits de qualité médiocre, falsifiés ou contrefaits
• Des praticiens non qualifiés
• Un diagnostic tardif avec non-utilisation des traitements conventionnels
• Des interactions thérapeutiques indésirables
• Une information trompeuse ou non fiable pouvant conduire à des conséquences thérapeutiques graves avec un retentissement direct sur la santé du patient.
Dans la littérature, on retrouve énormément d’enquêtes sur le sujet notamment réalisées par des ostéopathes. Celle publiée par le conseil pluridisciplinaire pour l’encadrement des risques liés à l’exercice de l’ostéopathie, cite la dissection artérielle vertébro-basilaire comme la conséquence la plus grave. Les études se contredisent néanmoins quant à la relation avec les manipulations cervicales. Des accidents moins graves sont également mentionnés dans le cadre des complications ostéoarticulaires : hernies discales cervicales, fractures, luxations, entorses. Une démarche diagnostique est indispensable pour détecter les situations et les personnes à risques afin d’éviter ces désagréments (62).
Le manque d’encadrement des formations des plusieurs MAC aboutit à l’émergence de certains « charlatans » qui profitent allégrement de la situation de faiblesse de patients prêts à tout pour trouver des solutions de guérison. Ils sont un des principaux arguments des militants contre les MAC et entachent les potentiels bénéfices de leur pratique.
En somme, afin de limiter les risques inhérents à ces pratiques, il nous semble nécessaire que les formations et la pratique des MAC soient correctement encadrées d’un point de vue juridique et réglementaire et que les patients bénéficient d’un accompagnement voire d’un encadrement par un professionnel de santé agréé.

Les difficultés d’observance

Notre méta-synthèse a mis en avant 2 types frein à l’observance de la pratique des MAC : d’une part, leur coût financier et d’autre part, le temps qu’elles requièrent.
Actuellement en France, le système de santé permet le remboursement de soins conventionnels et les pathologies chroniques sont parmi les plus grosses dépenses de ce système alors que la plus grande majorité des soins non conventionnels restent à la charge intégrale du patient. En effet, de nombreuses pathologies chroniques sont répertoriées en tant qu’Affection Longue Durée (ALD). Elles concernent les patients atteints d’une forme grave d’une maladie, ou d’une forme évolutive ou invalidante d’une maladie grave, qui demandent un traitement d’une durée prévisible supérieure à 6 mois avec une thérapeutique particulièrement coûteuse. Ces pathologies donnent lieu à une prise en charge financière particulière par la sécurité sociale, elles sont dites « exonérantes », c’est-à-dire que les patients atteints par ces pathologies n’ont pas à avancer le coût des soins en rapport avec leur pathologie reconnue, ces derniers étant pris en charge à 100% par la Sécurité Sociale (63).
Le nombre de patients rejoignant le dispositif est en constante augmentation. Pour la seule année 2018, 1,5 million de nouveaux patients ont rejoint le dispositif d’ALD. Parmi ces malades, certains souffrent de plusieurs affections ; c’est pourquoi, on compte une moyenne de 1,3 ALD par bénéficiaire. Et un tiers des patients vivent sous ce régime depuis dix ans et plus (64).
En 2004, le remboursement annuel moyen par personne en ALD était de 7 068 € (65)
Ces pathologies chroniques peuvent également représenter un coût, par rapport aux arrêts maladie qu’elles engendrent. Une étude en Allemagne a été menée sur des patients atteints de pathologie chronique qui ont pu bénéficier de thérapies alternatives et complémentaires. On constate qu’une baisse du nombre de jours moyen d’arrêt de travail a pu être enregistrée à la suite de cette intervention, passant de 31 à 24 jours par an (66).
Selon les résultats de notre étude et les données de la littérature, les MAC améliorent la qualité de vie des patients, permettent une amélioration des symptômes et même la diminution de prise de certains médicaments. Cela peut aboutir à une sollicitation moins importante des soins conventionnels, parfois onéreux, et présentant des effets secondaires, engendrant de surcroît de nouveaux frais. Face à ce constat, il nous parait opportun de mener une réflexion sur le remboursement de certains de ces soins favorisant par conséquent la diminution du coût social de ces pathologies longue durée et garantissant une prise en charge globale pour les patients ne pouvant y avoir accès pour raison financière.

MAC et médecine générale : les attentes des patients a. Difficultés de dialogues avec leur médecin traitant

En France, la place du médecin généraliste a une place très particulière. En plus d’être le médecin de proximité, il est aujourd’hui au cœur de la prise en charge des patients. Notre système de santé a adopté en 2004 la réforme du « médecin traitant » qui coordonne le parcours de soins des patients. Les patients ont le libre choix de son médecin traitant. Ils désignent dans 99,5% des cas leur médecin généraliste. Celui-ci devient alors le chef d’orchestre de la prise en charge globale de ses patients et cela est d’autant plus le cas pour les patients atteints de maladie chronique, qui nécessitent les soins de différents spécialistes. Pour avoir accès à ces spécialistes, le passage chez le médecin traitant est, le plus souvent, nécessaire. Les patients ne passant pas au préalable chez leur médecin traitant ont une pénalité de remboursement des soins. Ce système de « médecin traitant » a permis de réelles améliorations sur différents plans : la prévention de la iatrogénie médicamenteuse, la couverture vaccinale et le dépistage des cancers (67).
Mais l’accès aux MAC échappe totalement au contrôle du médecin traitant. Une très grande partie des patients montre même une réticence à évoquer l’usage de ses thérapies avec leur médecin généraliste ; on estime que cela concerne plus d’un patient sur deux en moyenne (47, 51, 68, 69). De plus, les patients se sentiraient moins à l’aise à parler de ces pratiques lorsqu’ils souffrent de pathologie chronique (70).
Même si beaucoup de patients ne communiquent pas à leur médecin l’utilisation des MAC, la moitié des patients attend des conseils de la part de leur médecin traitant (56). Mais pour que cela soit possible, il faut que les médecins connaissent ces pratiques alors que plusieurs d’entre elles sont controversée en France, telle que l’homéopathie qui a connu une vaste polémique de remboursement ces dernières années. Le cursus médical en France n’inclut que très peu de formation sur les différentes pratiques existantes.

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Table des matières

Introduction
1. Médecines Alternatives et Complémentaires
a. Définition
b. Situation Actuelle
c. Rôle dans les Maladies Chroniques
2. Les maladies chroniques
Matériel et Méthode
1. Stratégie de recherche
2. Critères d’inclusion et d’exclusion
3. Extraction des données et évaluation de la qualité
Résultats
1. Sélection des articles
2. Description des études incluses
3. Méta-synthèse
Discussion
1. Motivations des patients
2. Les bénéfices retenus
a. Amélioration des symptômes par une autre approche
b. Contrôle de soi et de sa maladie
3. Inconvénients
a. Les effets secondaires
b. Les difficultés d’observance
4. MAC et médecine générale : les attentes des patients
a. Difficultés de dialogues avec leur médecin traitant
b. Le paradoxe des compétences du médecin généraliste vs. les attentes du patient
5. Forces et limites de l’étude
a. Les limites
b. Les forces
Conclusion
Bibliographie

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