Le monde médical a été marqué à la fin du XX ème siècle par la découverte d’une infection virale irrémédiablement mortelle. ‘Gay Syndrome’, ‘la maladie du siècle’, ‘Syndrome Inventé pour Décourager les Amoureux’, ‘la maladie de la maigreur’ ou encore ‘la maladie’ tout court ; Autant de dénominations pour désigner la terrible maladie du SIDA qui mine le monde actuel.
Nommée « Syndrome de l’Immuno Déficience Acquise » par les scientifiques, cette maladie n’a de cesse de faire parler d’elle. En 1999, l’OMS classe le SIDA au rang des pandémies. Elle est considérée comme l’une des maladies les plus dévastatrices et les plus meurtrières que le monde n’ait jamais connu. Le VIH / SIDA est la première cause de décès en Afrique subsaharienne et est à l’échelle mondiale, la quatrième cause de mortalité. En effet, depuis vingt ans que le SIDA a été découvert, soixante millions de personnes ont été infectées. En 2002, le monde comptait quarante deux (42) millions de personnes vivant avec le VIH, dont 29,4 millions en Afrique subsaharienne.
Le SIDA est causé par le VIH (Virus de l’Immunodéficience Humaine). Ce virus une fois dans l’organisme humain, attaque ses défenses naturelles, l’exposant ainsi à une série d’affections causées par des germes habituellement inoffensifs chez une personne saine. Pour l’instant, le VIH se contracte pour la vie ; de plus, chez les personnes atteintes, surtout dans les pays pauvres, le déclenchement de la maladie a une issue rapidement fatale.
Ce virus a créé la panique dans le monde de la recherche médicale. En effet, tous les efforts consentis dans le sens de trouver des molécules capables de détruire le VIH sont restés vains. La recherche sur le vaccin contre le VIH est toujours en étude. Néanmoins, les chercheurs ont pu mettre sur le marché, des antirétroviraux, produits capables de ralentir la prolifération du virus dans l’organisme, améliorant ainsi la qualité de vie des malades qui les prennent. Vu la subtilité du VIH à déjouer tous les scénarios médicaux dirigés contre lui, la nécessité de cibler les domaines de l’information et de la prévention est de mise. Aussi, l’étude d’autres apports telle que la pharmacopée et la médecine traditionnelles dans la prise en charge des personnes vivant avec le VIH, s’impose à nous pays africains, où les prix des antirétroviraux restent malgré les multiples subventions, inaccessibles à la plupart de nos populations affectées par ce fléau.
HISTORIQUE – DEFINITION – CLASSIFICATION DE L’INFECTION A VIH
HISTORIQUE
Le début des années 80 a créé des remous dans le monde médico-scientifique avec l’apparition d’une affection nouvelle. C’est en 1980 que fut isolé et caractérisé le premier rétrovirus humain par l’équipe du chercheur Robert Gallo. On le nomma HTLV I pour Human T-cell Leukemia lymphomavirus ; en français, il s’agit du virus lymphotrope des lymphocytes T humains. Ce virus infecte les globules blancs qui jouent un rôle important dans la défense de l’organisme et engendre chez l’homme un cancer rare et extrêmement malin appelé ‘leucémie à lymphocytes T de l’adulte’ (22). Durant la même année de 1980 en Californie, deux docteurs, Joël Weisman et Michael Gottlieb se trouvent confrontés à plusieurs patients homosexuels souffrant d’altérations profondes de l’état général, avec polyadénopathie, fièvre, pneumopathie à Pneumocystis carinii et lymphopénie ; l’évolution clinique de leur affection est rapidement mortelle (24). Le 5 juin 1981, les CDC d’Atlanta, puissante agence américaine de recherche épidémiologique annonce dans leur bulletin hebdomadaire le ‘MMWR’ que des médecins de Los Angeles, San Francisco, New York lui ont signalé l’accroissement récent du nombre de pneumonies à Pneumocystis carinii et de sarcomes de Kaposi , affections auparavant très rares (9), (24). Les personnes atteintes sont là encore des hommes jeunes, homosexuels, des toxicomanes par injections intraveineuses d’héroïne, des haïtiens et des hémophiles. Toutes les victimes souffraient d’un effondrement de l’immunité cellulaire traduit par l’appauvrissement d’un groupe spécifique de lymphocytes T, les lymphocytes T4. Robert Gallo émet l’hypothèse que l’agent causal a des relations avec HTLV I. Des travaux prouvèrent le contraire. Il découvre en 1982 un deuxième virus le HTLV II responsable d’une maladie appelée ‘leucémie à cellules chevelues’, de leucémies à lymphocytes T et de lymphomes chroniques (22). D’autres virus furent incriminés comme étant responsables de cette maladie. Il s’agit du cytomégalovirus (CMV), du virus d’Epstein Barr (VEB), du virus de l’hépatite B (VHB). Très vite, on s’aperçoit que ces virus sont plutôt responsables de maladies opportunistes qui sont la conséquence et non la cause de l’immunodéficience.
Cette nouvelle affection qu’on nommait GRID pour Gay Related Immunodeficiency Syndrom, car on la rencontrait le plus souvent chez des homosexuels, se voit rebaptisée en 1982 en SIDA : Syndrome de l’Immunodéficience Acquise. En janvier 1983, le professeur Luc Montagnier et ses collèges de l’Institut Pasteur, Françoise Barré-Sinoussi et Jean-Claude Chermann spécialisés dans la recherche sur le cancer et dans les cultures de lymphocytes T reçurent un échantillon de ganglion lymphatique d’un jeune homosexuel de l’hôpital de la Pitié Salpêtrière atteint de lymphadénopathie. Ils mettent en évidence un virus qu’ils nomment LAV (Lymphadenopathy Associeted Virus). Ce virus détruit les lymphocytes T et les macrophages. Des recherches montrèrent la présence du même virus chez la plupart des patients atteints de lymphadénopathie. Luc Montagnier est convaincu que le LAV est responsable du SIDA (22).
En octobre 1983, les premiers cas africains sont observés chez des patients atteints de cryptococcose méningée au Mama Yamo Hospital de Kinshasa au Zaïre. La même année, des cas sévères de sarcome de Kaposi sont observés en Zambie et dans le Sud de l’Ouganda. Ils sont associés à des diarrhées chroniques avec une perte importante de poids. D’autres patients sont identifiés au Congo, au Burundi, au Rwanda, en Tanzanie. Il s’est avéré que la plupart des patients sont atteints du SIDA (24).
Les recherches poussées du professeur Robert Gallo le mènent à la découverte d’un autre virus qu’il nomme HTLV III. Il se trouve que ce virus est le même que le LAV. L’origine virale du SIDA est une réalité (22). En 1985 en Afrique de l’Ouest, le professeur Souleymane Mboup et son équipe, en collaboration avec le professeur Luc Montagnier de l’Institut Pasteur, identifièrent au laboratoire de Bactériologie-Virologie de l’hôpital Aristide Le Dantec de Dakar au Sénégal, dans des prélèvements de prostituées de Guinée-Bissau, du Cap-Vert et de Gambie, un nouveau rétrovirus responsable du SIDA. On le nomme HTLV IV ou LAV II (22), (16),(58). En Mai 1986 le comité international de nomenclature dans le soucis d’éviter des confusions propose la dénomination de HIV (Human Immunodeficiency Virus) qui a été acceptée par tous. Le premier virus de l’immunodéficience acquise est le VIH-1 et le second est le VIH-2 .
DEFINITION DU SIDA
Le SIDA est un sigle qui se décompose ainsi qu’il suit :
S : Syndrome qui est un ensemble de signes caractéristiques d’une maladie.
ID : Immuno Déficience ; ce terme définit une dépression de l’immunité de l’organisme.
A : Acquise pour signifier que l’affection n’est pas héréditaire et qu’elle peut se contracter à tout moment au cours de la vie.
L’agent pathogène du SIDA est un virus nommé VIH (Virus de l’Immunodéficience Humaine).
C’est un rétrovirus humain qui s’attaque aux défenses immunitaires de l’homme, en particulier les lymphocytes T et les macrophages. Le virus détruit ces derniers et crée un état de déficit immunitaire chronique chez la personne infectée, qui se retrouve exposée à toutes sortes d’infections causées par des virus, des champignons, des bactéries, des parasites et autres agents pathogènes qui sont en général combattus avec succès chez un homme sain. Plusieurs définitions ont été données pour le SIDA. La première définition du SIDA est celle établie par les CDC en septembre 1982. Elle a été révisée en juin 1985, puis en août 1987. La dernière révision est valable depuis le premier janvier 1993 et est depuis, celle adoptée par l’OMS. Selon l’OMS, le SIDA est défini comme « une maladie caractérisée par une ou plusieurs pathologies indicatives, listées en fonction de l’état sérologique de l’infection par le VIH » .
Il y a lieu de dire que selon les scientifiques en matière de SIDA, la définition et la classification sont quelque peu confondues.
CLASSIFICATION DE L’INFECTION A VIH
Il y a quatre principales classifications utilisées pour décrire l’infection à VIH chez l’adulte.
Classification du Walter Reed Hospital, 1988
Cette classification est très peu utilisée dans le milieu médical classique. Elle est surtout utilisée par l’armée américaine. La classification du Walter Reed Hospital est basée sur des critères cliniques et immunologiques. Elle comprend 6 stades (WR1 à WR6) qui s’excluent mutuellement.
Les stades sont les suivants :
• La sérologie du VIH.
• La lymphocytémie CD4.
• L’hypersensibilité retardée à 4 antigènes (anatoxine tétanique, trichophyton, virus ourlien, candida).
• Le syndrome de lymphadénopathie généralisée.
• La candidose orale.
• Les infections opportunistes.
Classification des Centers for Diseases Control d’Atlanta, 1986
La classification des CDC de 1986 est une classification strictement clinique en 4 groupes de manifestations cliniques rapportées à l’infection par le VIH. Les 4 groupes s’excluent mutuellement. Ce qui signifie qu’un patient ne peut appartenir à deux groupes au même moment. La classification est la suivante :
➤ groupe I : PRIMO-INFECTION.
➤ groupe II : INFECTION ASYMPTOMATIQUE.
• sous-groupe IIA : bilan biologique normal.
• sous-groupe IIB : bilan biologique anormal.
➤ Groupe III : LYMPHADENOPATHIE PERSISTANTE GENERALISEE.
• sous-groupe IIIA : bilan biologique normal.
• sous-groupe IIIB : bilan biologique anormal.
➤ Groupe IV : INFECTION SYMPTOMATIQUE avec ou sans syndrome de lymphadénopathie chronique.
• sous-groupe IVA : SYMPTOMES CONSTITUTIONNELS.
– amaigrissement > 10% du poids corporel.
– diarrhée > 1 mois.
– fièvre >1 mois.
• sous-groupe IVB : MALADIES NEUROLOGIQUES.
∗ sous-groupe IVB1 : atteinte neurologique centrale.
∗ sous-groupe IVB2 : neuropathie périphérique .
• sous-groupe IVC : INFECTIONS SECONDAIRES.
∗ sous-groupe IVC1 : infections opportunistes majeures comprenant 12 affections.
∗ sous-groupe IVC2 : infections opportunistes mineures comprenant 6 affections.
•sous-groupe IVD : CANCERS SECONDAIRES comprenant 3 types de cancers.
•sous-groupe IVE : AUTRES PATHOLOGIES comprenant 2 pathologies.
Classification de l’Organisation Mondiale de la Santé, 1990
Cette classification regroupe les malades en quatre stades de gravité croissante. Le critère de gravité utilisé est la durée de survie en association avec des paramètres immunologiques lorsqu’ils sont disponibles.
Cette classification est surtout utilisée pour la recherche clinique et thérapeutique.
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Table des matières
NTRODUCTION
A– GENERALITES SUR LE SIDA
CHAPITRE I : HISTORIQUE – DEFINITION – CLASSIFICATION DE L’INFECTION A VIH
I – HISTORIQUE
II – DEFINITION DU SIDA
III – CLASSIFICATION DE L’INFECTION A VIH
3 – 1 Classification du Walter Reed Hospital, 1985
3 – 2 Classification des Centers for Diseases Control d’Atlanta, USA, 1986
3 – 3 Classification de l’Organisation Mondiale de la Santé, 1990
3 – 4 Révision de la classification des CDC, 1993
CHAPITRE II : EPIDEMIOLOGIE ET TRANSMISSION DE L’INFECTION A VIH
I – DONNEES EPIDEMIOLOGIQUES DE L’INFECTION A VIH
1 – 1 Le SIDA dans le monde : considérations générales
1 – 2 Situation et impact de l’épidémie du SIDAen Afrique subsaharienne
1 – 3 Le SIDA en Afrique du Nord et au Moyen-Orient
1 – 4 Le SIDA en Europe Orientale et en Asie Centrale
1 – 5 Le SIDA en Asie et dans le Pacifique
1 – 6 Le SIDA dans les pays nantis : Amérique du Nord et Europe Occidentale
1 – 7 Le SIDA en Amérique Latine et aux Caraïbes
1 – 8 Le SIDA EN Australie et en Nouvelle-Zélande
II – MODES DE TRANSMISSION DU VIH/SIDA
2 – 1 Transmission par voie sexuelle ou transmission horizontale
2 – 1-1 La transmission homosexuelle
2 – 1-2 La transmission hétérosexuelle
2 – 2 Transmission par voie sanguine
2 – 2-1 Transmission par transfusion sanguine
2 – 2-2 Transmission en milieu de soins ou transmission nosocomiale
2 – 2-3 Toxicomanie par voie intraveineuse
2 – 2-4 Transmission par d’autres objets piquants
2 – 3 Transmission par transplantation d’organes
2 – 4 Transmission périnatale ou transmission verticale
2 – 5 Voies de transmission discutées
CHAPITRE III : LE VIRUS DE L’IMMUNODEFICIENCE HUMAINE
I – SYSTEMATIQUE
II – MORPHOLOGIE ET ORGANISATION GENOMIQUE DU VIH
III – CELLULES CYBLES ET CYCLE DE REPLICATION DU VIH
2 – 1 Cellules cibles du VIH
2 – 2 Cycle de réplication du VIH
IV – VARIABILITE GENETIQUE DU VIH
V – HISTOIRE NATURELLE DE L’INFECTION A VIH
5 – 1 La phase d’invasion ou primo-infection
5 – 2 La phase chronique ou phase asymptomatique
5 – 3 La phase de PRE-SIDA et SIDA
CHAPITRE IV : MANIFESTATIONS DU VIH/SIDA
I – LA PRIMO-INFECTION
II – LA PHASE CHRONIQUE ASYMPTOMATIQUE
III- LA PHASE DE PRE-SIDA ET SIDA
3 – 1 La phase de PRE-SIDA
3 – 2 La phase de SIDA
CHAPITRE V : DIAGNOSTIC DE L’INFECTION A VIH
I – CIRCONSTANCES DU DEPISTAGE SEROLOGIQUE DU VIH
II – LE DEROULEMENT PRATIQUE DU DEPISTAGE
III – LES DIFFERENTS TYPES DE TESTS
3 – 1 Le diagnostic sérologique ou diagnostic indirect
3 – 1-1 Les tests de dépistage
3 – 1-1-1 Les tests ELISA
3 – 1-1-2 Les tests simples et rapides
3 – 1-2 Les tests de confirmation
3 – 1-2-1 Le Western Blot
3 – 1-2-2 La radio-immunoprécipitation assay « RIPA »
3 – 1-2-3 Les tests de confirmation de 2ème génération : Line immunoassay « LIA»
3 – 2 Le diagnostic direct
3 – 2-1 L’antigénemie p24
3 – 2-2 La co-culture lymphocytaire du VIH
3 – 2-3 La détection des antigènes nucléiques viraux
3 – 3 Les tests de dépistage à domicile
3 – 3-1 La trousse de prélèvement à domicile
3 – 3-2 Le test à domicile à faire soi-même
CHAPITRE VI : TRAITEMENT DE L’INFECTION A VIH
I – HISTORIQUE
II – LES DIFFERENTS TYPES D’ANTIRETROVIRAUX
2 – 1 Les inhibiteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse
2 – 2 Les inhibiteurs non nucléosidiques de la transcriptase inverse
2 – 3 Les inhibiteurs de la protéase virale
III – MISE EN ROUTE DU TRAITEMENT ANTIRETROVIRAL
3 – 1 Quand débuter le traitement antirétroviral ?
3 – 2 Quel traitement proposer ?
3 – 3 Observance et suivi du traitement
3 – 4 Problème liés au traitement antirétroviral
IV – TRAITEMENT DES MALADIES OPPORTUNISTES
V – MESURES HYGIENO-DIETETIQUES
5 – 1 L’alimentation de la personne vivant avec le VIH
5 – 2 L’hygiène de la personne vivant avec le VIH
VI – LE FUTURE DU TRAITEMENT ANTIRETROVIRAL
CONCLUSION