A travers l’histoire, par la découverte, de traces de l’utilisation des plantes 5000 ans avant Jésus christ (JC) en Chine, de tablettes cunéiformes et papyrus en Mésopotamie et en Egypte, à travers les travaux de recherche d’Hippocrate (considéré comme le père de la médecine), ou encore de Galien (qui est considéré comme le fondateur de la pharmacie), on a observé qu’en effet, les hommes ont toujours apprécié les vertus thérapeutiques des plantes. Et à travers les siècles, les traditions humaines ont su développer la connaissance et l’utilisation de ces plantes médicinales. Si certaines pratiques médicinales paraissent étranges et relèvent de la magie, d’autres au contraire semblent plus fondées, plus efficaces [1]. Pourtant, toutes ces pratiques ont pour objectif de vaincre la souffrance et d’améliorer la santé des hommes. Malgré les énormes progrès réalisés par la médecine moderne, la thérapie par les plantes ou encore appelée phytothérapie, inspirée du grec « phytos» qui signifie « plantes » et « therapeia » qui signifie «traitement», offre de multiples avantages.
Aujourd’hui, la recherche de nouvelles molécules médicamenteuses d’origine naturelle est basée sur la répartition des plantes médicinales par des études ethnobotaniques qui permettent de réaliser des inventaires de plantes d’une zone ou d’un pays, puis par des études phytochimiques et pharmacologiques. Ainsi, on peut citer le cas de la prostatine extraite d’une Euphorbiacea qui pourrait devenir une molécule importante contre le Syndrome de l’Immuno Déficient Acquise (SIDA) ou encore l’artémisine d’Artemisia annua utilisée actuellement contre les formes rebelles du Plasmodium etc. [2]. De ce fait la valorisation des ressources naturelles est une préoccupation qui devient de plus en plus importante dans de nombreux pays africains, asiatiques et même euro-américains. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), l’art de guérir par les plantes est le traitement médical le plus utilisé au monde. La phytothérapie propose des remèdes naturels et bien acceptés par l’organisme, elle est souvent associée aux traitements classiques dans les pays occidentaux où, elle connait, aujourd’hui, un renouveau exceptionnel.
Au Sénégal, comme dans le reste du continent africain, 80% de la population sont tributaires de la médecine traditionnelle, et ont recours principalement aux extraits des plantes pour satisfaire leurs besoins de soins de santé primaire [3]. Elles exploitent des savoirs transmis oralement de génération en génération à certaines catégories d’individus initiés que sont les tradipraticiens de santé et les herboristes. Cette tendance à recourir aux plantes médicinales est due d’une part, au fait que la population sénégalaise est en majeure partie agricole et rurale, avec un seuil de pauvreté et d’analphabétisme assez élevé. D’autre part, peu de gens peuvent accéder aux services sanitaires de base à cause de l’inexistence de centres de santé dans les zones les plus reculées. Il faut également noter que dans la culture sénégalaise, arbre (garab en Wolof) signifie littéralement remède.
GENERALITES SUR LES PLANTES MEDICINALES AU SENEGAL
Le Sénégal possède une importante biodiversité avec 2500 espèces connues, dont 600 espèces de plantes médicinales utilisées dans la médecine traditionnelle par rapport aux 20 000 espèces recensées par l’OMS [5]. Le vocable « plante médicinale» fait référence aux plantes, aux lianes, aux graminées utilisées en pharmacopée et comprend : les racines, les écorces, les fleurs, les fibres, les feuilles, les fruits, les graines, les gommes, les huiles essentielles, etc. Au Sénégal, comme un peu partout en Afrique, personne n’hésite à avoir recours à ces plantes médicinales pour se soigner, souvent en même temps que les traitements de la médecine moderne. Ainsi nous trouvons de nombreuses plantes médicinales de la pharmacopée, chez les herboristes dans les marchés, dans les rues, ou encore à la source (dans les villages). Elles sont utilisées entières ou en partie dans les préparations galéniques diverses et variées. Cultivées dans un champ, cueillies dans la brousse ou dans la forêt, fraîches, réduites en poudre, transformées en pilules mises en bottes ou dissoutes dans des potions, les plantes médicinales occupent une place très importante dans la médecine traditionnelle du Sénégal et elles sont de plus en plus demandées sur le marché mondial .
La médecine traditionnelle sénégalaise
Selon l’OMS, la médecine traditionnelle est « la somme totale des connaissances, compétences et pratiques qui reposent, rationnellement ou non, sur les théories, croyances et expériences propres à une culture et qui sont utilisées pour maintenir les êtres humains en bonne santé ainsi que pour prévenir, diagnostiquer, traiter et guérir des maladies physiques et mentales. Dans certains pays, les appellations médecine parallèle, alternative ou douce sont synonymes de médecine traditionnelle». La médecine traditionnelle sénégalaise se situe dans un contexte sociologique où elle est étroitement liée aux concepts religieux des deux parties (guérisseurs et malades) et à l’importance du facteur magico-religieux. Néanmoins il ne faut pas sous-estimer l’importance des différentes préparations de plantes médicinales aboutissant à des formulations complexes en vue d’instaurer de véritables traitements [1]. Le thérapeute traditionnel ou tradipraticien est « une personne qui est reconnue par la collectivité dans laquelle elle vit, comme compétente pour dispenser les soins de santé, grâce à l’emploi de substances végétales, animales et minérales, et d’autres méthodes, basées sur le fondement socioculturel et religieux, aussi bien que sur les connaissances, comportements et croyances». Au Sénégal, leur appellation diffère en fonction des ethnies et des religions : marabout, guérisseur, fétichiste, thierno, Sérigne, etc. Les tradipraticiens du Sénégal utilisent souvent des savoirs qui leur ont été transmis, enseignés, donnés, ou légués par un tiers, pour guérir ou soigner certaines maladies, pour prévenir ou lutter contre certaines envenimations par morsures de serpents et autres espèces animales surtout dans les zones où les structures de santé n’existent pas ou sont obsolètes. Les secrets thérapeutiques des tradipraticiens sont toujours secrètement bien gardés, dans la mesure où il est communément admis que « chaque arbre possède ses génies, ses remèdes et ses sorts ». La connaissance précise des vertus de la pharmacopée, ses modalités de récolte, de préparation et d’administration, restent secrètement gardées.
Les tradipraticiens du Sénégal entretiennent une relation très étroite avec le Ministère de la Santé. D’ailleurs il existe une cellule dédiée à la médecine traditionnelle au sein du Ministère de la Santé et les tradipraticiens ont joué un rôle très important dans le projet de loi visant la règlementation de la médecine traditionnelle.
Les méthodes traditionnelles de préparation
Certaines plantes contenant de multiples métabolites bioactifs peuvent avoir des actions très différentes suivant leur mode préparation.
La décoction
La décoction consiste à faire bouillir dans de l’eau les plantes pendant 5 à 20 minutes après ébullition. Si les drogues sont finement coupées, 5 minutes peuvent suffire ; si elles sont dures ou ligneuses, 20 minutes seront peut être nécessaires pour faire une bonne extraction. Ensuite on laisse reposer et on filtre après environ 15 minutes pour récupérer le décocté (solution aqueuse buvable).
L’infusion
L’infusion consiste à verser de l’eau bouillante sur une quantité donnée de matière végétale puis on laisse reposer pendant environ 15 minutes puis on le filtre.
La macération
La macération consiste à placer la matière végétale et le liquide d’extraction dans un récipient fermé, on laisse le tout reposer, à température ambiante pendant des heures voire des jours, en agitant éventuellement. Ensuite on filtre et on presse le marc de la plante. On mélange les deux extraits liquides. On peut clarifier la préparation par décantation ou filtration.
La pulvérisation
Les plantes séchées à l’ombre sont finement coupées puis pulvérisées dans un mortier. Ces plantes simples ou en mélange sont vendues en sachets pour faire des tisanes. Certains malades prennent la poudre de plantes directement sur la langue, ou la mélangent à leurs aliments.
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Table des matières
Introduction générale
Chapitre I : GENERALITES SUR LES PLANTES MEDICINALES AU SENEGAL
Introduction
I-1 Médecine traditionnelle au Sénégal
I-2 Les méthodes traditionnelles de préparation
I-2-1 La décoction
I-2-2 L’infusion
I-2-3 La macération
I.2.4 La pulvérisation
I-3 Quelques familles de plantes médicinales au Sénégal
I-3-1 Les Bombacaceae/ Exemple de l’Adansonia digitata L
I-3-1-1 Description botanique
I-3-1-2 Composition chimique
I-3-1-3 Utilisations
I-3-2 Les Combrataceae/ Exemple du Combretum micranthum G. Don
I-3-2-1 Description botanique
I-3-2-2 Composition chimique
I-3-2-3 Utilisations
I-3-3 Les Annonaceae/ Exemple de l’Annona muricata L
I-3-3-1 Description botanique
I-3-3-2 Composition chimique
I-3-3-3- Utilisations
Conclusion
Chapitre II : MATERIELS ET METHODES DE L’ENQUETE ETHNOBOTHANIQUE
Introduction
II-1 Matériels et méthodes
II-1-1 Présentation de la zone d’étude
II-1-2 Matériel végétal : Annona senegalensis
II-1-2-1 Description botanique
II-1-2-2 Système et nom vernaculaire
II-1-2-3 Répartition géographique
II-1-2-4 Constituants chimiques
II-2 Méthode : enquête ethnobotanique quantitative
Chapitre III : RESULTATS ET DISCUSSIONS DE L’ENQUETE ETHNOBOTANIQUE
III -1 Résultats
III-1-1 Connaissance sociale de l’Annona senegalensis
III-1-2 Consommation et autres usages de la plante
III-2 Discussion
III-2-1 Connaissance d’Annona Senegalensis
III-2-2 Consommation et différents usages de l’Annona Senegalensis
III-2-3 Maladies traitées par Annona Senegalensis
Conclusion
CONCLUSION GENERALE
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
Annexe
RESUME