MECANISMES ELECTROPHYSIOLOGIQUES DES MACROREENTREES ATRIALES DROITES IMPLIQUANT L’ISTHME CAVOTRICUSPIDE

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Classification du Flutter atrial

Au fil des années, les termes utilisés pour décrire les différents types de FA ont été ambigus et ont créé beaucoup de confusion. Ils comprennent : le FA commun, rare, typique, atypique, rapide, lent, de type I, type II, gauche et droit. Grâce aux nouvelles connaissances sur les différents mécanismes de cette arythmie, la terminologie du FA a évolué. En 2001, une commission de la Société Européenne de Cardiologie et de la Société Nord-Américaine de stimulation et d’électrophysiologie a publié un traité sur la nomenclature du FA [85] .Plus récemment, Scheinman et al [88] ont fourni une mise à jour de la classification et de la nomenclature du FA.

Ancienne classification

Classification initiale de Wells et al qui a été largement acceptée cliniquement et qui a été beaucoup utilisée dans la littérature.
• Type I : Egalement connu sous le nom de flutter auriculaire commun ou flutter auriculaire typique, il correspond à un rythme auriculaire de 240 à 340 battements / minute avec la possibilité d’être entraîné par stimulation atriale rapide. Ce type de flutter est divisé en deux sous-types connus :
– Flutter Antihoraire : est le plus fréquemment rencontré. Les grandes ondes F de flutter sont négatives dans les dérivations inférieures à l’ECG de surface (II, III et AVF).
– Flutter horaire : Les grandes ondes F de flutter sont positives en inférieur.
• Type II: Fréquence > 350 et jusqu’à 440 battements/minute; résultant d’un circuit intra-auriculaire qui est beaucoup plus court qu’avec le type I sans avoir la possibilité d’être entraîné ou arrêté par la stimulation atriale rapide.
III.2 Classification de la commission de la Société Européenne de Cardiologie et de la Société Nord-Américaine de stimulation et d’électrophysiologie
Elle se base sur les caractéristiques à l’ECG, mais aussi sur les mécanismes électrophysiologiques de cette arythmie. Deux types de tachycardie auriculaire sont relativement bien connus et peuvent être clairement définis sur la base de leurs mécanismes électrophysiologiques [85]:
• Tachycardie auriculaire focale :
(Avec un mécanisme soit automatique, soit déclenché, soit par micro-réentrée.)
• Tachycardie auriculaire macro-réentrante :
– Flutter auriculaire typique
– Flutters non typiques : Autres macro-réentrées bien caractérisées dans l’oreillette droite et gauche.
• Divers : autres tachycardies décrites dans la littérature et qui ne peuvent pas toujours être bien classées en raison de la mauvaise compréhension de leur(s)mécanisme (s):
– Type II de flutter auriculaire ;
– Tachycardie sinusale inappropriée ;
– Tachycardie sinusale réentrante ;
– Flutter atypique ;
– Fibrillo-flutter.

Classification de Scheinman et al

Elle se base uniquement sur les mécanismes électrophysiologiques. Ils distinguent trois types de FA [88]:
• Flutter auriculaire droit :
– Isthme cavo-tricuspide dépendant : Flutter antihoraire, flutter horaire réentrée ‹‹double-wave››, réentrée ‹‹lower loop››, réentrée intra-isthmique.
– Non isthme cavo-tricuspide dépendant : Flutter cicatriciel, ‹‹Upper loop›› flutter
• Flutter auriculaire gauche : Flutter de l’anneau mitral, flutter cicatriciel et flutter lié aux veines pulmonaires, flutter du sinus coronaire, flutter septal gauche.

Anatomie et histologie

Le cœur est un organe musculaire d’environ 250 grammes, ayant la forme d’une pyramide  triangulaire. Il est creux, composé de quatre cavités : deux ventricules, droit et gauche et deux oreillettes, droite et gauche.
Cette masse musculaire ou myocarde est constituée de fibres auriculaires et ventriculaires qui s’insèrent sur une solide charpente de tissu fibreux. Le squelette fibreux du cœur est formé par les quatre anneaux fibreux valvulaires : l’atrio-ventriculaire gauche (mitral) situé à gauche et légèrement en arrière de l’atrio-ventriculaire droit (tricuspide); l’aortique et le pulmonaire [52]. L’innervation cardiaque est double:
– Extrinsèque : système sympathique et parasympathique ;
– Intrinsèque : c’est le système électrique du cœur qui est constitué par un réseau de nœuds et de fibres (figure 3). C’est le tissu cardionecteur.

Anatomie et rapport de l’isthme cavo- tricuspide (ICT)

La région que l’on est convenu d’appeler l’isthme cavo-tricuspide est l’endroit électif d’ablation du circuit du flutter atrial commun, il s’agit dans la plupart des cas d’une voie de passage obligée de la dépolarisation du flutter et l’établissement d’un bloc de conduction bidirectionnel entre la veine cave inférieure et la valve tricuspide qui prévient avec beaucoup d’efficacité les récurrences de l’arythmie.
L’ICT est une région de l’oreillette droite limitée en arrière par la veine cave inférieure et en avant par l’anneau tricuspide, mesurant quelques centimètres de large, et de structure très irrégulière [13]. Il est constitué de trabéculations issues du muscle pectiné limitées en arrière par le bourrelet d’Eustachi, et en avant par un bourrelet musculaire, plus ou moins épais, qui court le long de l’insertion de la valve tricuspide. Cette architecture complexe avec croisement de faisceaux de fibres myocardiques est responsable d’une épaisseur très hétérogène.
L’ICT mesure de 15 à plus de 35mm de long, et son épaisseur très variable peut atteindre 10mm pour le bourrelet antérieur. Sa partie postérieure se termine souvent par une valve, la valve d’Eustachi, parfois très développée, au pied de laquelle chemine toujours un faisceau musculaire [13].

Mécanismes électrophysiologiques des macro-réentrées atriales droites impliquant l’isthme cavotricuspide :

Le flutter atrial typique ou commun antihoraire

C’est le plus fréquent type de macroréentrée atriale, même pour les patients qui ont des antécédents de chirurgie cardiaque avec une atriotomie droite [10]. La barrière antérieure du circuit est représentée par l’anneau tricuspidien et la frontière postérieure par une combinaison d’obstacles anatomiques (les orifices des veines caves supérieure et inférieure et la valve d’Eustachi) et fonctionnelles (Crista terminalis) (CT) [80,75, 65, 19,18] (Cf. figure 12). Le bloc transversal peut être fixe chez certains patients ou de nature fonctionnelle chez les autres [92,99] Des doubles potentiels sont enregistrés sur la crista terminalis [75,18]. Le plus souvent, l’activation électrique est descendante sur la paroi antérieure et latérale et ascendante sur la paroi septale et postérieure (90% des cas cliniques). C’est l’activation péri-tricuspidienne antihoraire en vue oblique antérieur gauche sur la fluoroscopie.
La partie supérieure du circuit n’est pas très bien définie. Les données actuelles suggèrent que pour la plupart des cas, il s’agit du toit de l’oreillette droite antérieure, de l’orifice de la veine cave supérieure, incluant la partie initiale du faisceau de Bachmann [48, 101,4]. Il y a des études qui montrent que, dans certains cas, l’activation pourrait traverser la partie supérieure de la CT [94,15] ou même la partie inferieure [20].
La partie inférieure du circuit est mieux délimitée : la partie inférieure de l’anneau tricuspide pour le versant antérieur et l’orifice de la veine cave inférieure en continuité avec la Crête d’Eustachi pour le versant postérieur. Des doubles potentiels peuvent être enregistrés au long de la Crête d’Eustachi [65].
Cette zone a été nommée l’isthme cavo-tricuspide, l’isthme inférieur ou simplement l’isthme du flutter commun.

Histoire naturelle-symptomatologie

Histoire naturelle

Typiquement, l’accès de FA dure de plusieurs heures à quelques jours. Les épisodes isolés de courte durée (de quelques secondes à quelques minutes) sont rares, de même que le FA chronique persistant des mois voire des années, le FA survenant en général à long terme [22].

Signes

Tableau clinique

Il existe une grande variabilité clinique. Le FA est rarement asymptomatique, découvert à l’occasion d’un ECG de surface. Il peut avoir des manifestations cliniques variables. L’accès de FA est surtout responsable de dyspnée et de palpitations dans respectivement 61% et 56% des cas. Les Lipothymies ou l’angor sont plus rares (13 à 25%). Seuls 4 à 10% des patients resteraient asymptomatiques [2,38].

Aspects électrocardiographiques du FA

 Flutter typique ou commun
Il est encore appelé flutter de type I. C’est le plus fréquent puisqu’il est rencontré dans plus des deux tiers des cas de flutters. Contrairement au flutter atypique, il est, comme nous le verrons plus loin, modifié voire interrompu par la stimulation auriculaire [12].
– Activité auriculaire
L’électrocardiogramme de surface est des plus caractéristiques. L’activité auriculaire se lit électivement dans les dérivations frontales DII, DIII et VF où le diagnostic est affirmé. Les dérivations V1 et surtout V6 sont souvent utiles pour mieux préciser le type du flutter. Les ondes de flutter, appelées ondes F, sont diphasiques, sans retour à la ligne isoélectrique dans les gammes de fréquence habituelles, et remarquablement uniformes dans leur aspect. Cet aspect a d’ailleurs pu faire évoquer des  » dents de scie  » ou encore des  » toits d’usines « . On observe une prédominance de la phase négative, immédiatement suivie d’une phase ascendante positive assez abrupte qui se termine par un ressaut arrondi. S’amorce alors une redescente qui se termine par une nouvelle négativité profonde, précédée d’une sorte de plateau plus ou moins bref, bien marquée et toujours présent. Les ondes F sont peu visibles en DI ; un segment isoélectrique les sépare constamment en V1 où elles sont le plus souvent positives ou diphasiques ; elles sont négatives en V6 et synchrones de la phase négative des ondes F en DII, DIII et VF.
L’activité auriculaire est généralement autour de 300/min, mais on observe des flutters communs dont les fréquences, toujours fixes, vont de 250 à 340/min. On rencontre aussi, bien que beaucoup plus rarement, des fréquences soit plus lentes (entre 200 et 250/min, essentiellement lorsqu’il existe une oreillette droite dilatée ou imprégnée d’anti-arythmique s) soit beaucoup plus rapides (au-delà de 350/min et jusqu’à 400/min chez le nouveau-né et le nourrisson
– Conduction auriculo-ventriculaire
Il est exceptionnel que l’activité auriculaire soit transmise en 1/1 aux ventricules, car la période réfractaire du nœud auriculo-ventriculaire est plus longue que la longueur du cycle du flutter. Très fréquemment, la liaison auriculo-ventriculaire s’effectue sur un mode 2/1, se traduisant par un rythme fixe cliniquement perçu autour de 150/min et tout à fait caractéristique. Des liaisons 3/1 voire 4/1 peuvent se voir en fonction de l’état de perméabilité du nœud auriculo-ventriculaire (figure 14). Le mode 5/1 est beaucoup plus rarement observé.

Tachycardies par réentrée intra-auriculaire localisée

Ce type de tachycardie est plus souvent paroxystique qu’incessant. C’est dans les formes permanentes et donc rares que ces tachycardies ont été appelées tachysystolies. Les fréquences auriculaires se situent dans une gamme très large qui va de 100 à 200/min. Les ondes P’ de surface diffèrent d’autant plus des ondes P sinusales que la dépolarisation auriculaire commence à distance de la région sinusale. Les ondes P’ sont positives dans les dérivations inférieures ; lorsqu’elle prend naissance dans la partie basse de l’oreillette droite, les ondes P’ sont négatives dans ces mêmes dérivations. Un aspect de tachysystolie en V1 avec retour à la ligne isoélectrique.

Tachycardies atriales automatiques ectopiques

Elles sont communément appelées tachycardies atriales. L’activité auriculaire se situe généralement entre 100 et 150 /min, plus rarement autour de 200/min.

Tachycardies atriales polymorphes ou multifocales

Ce sont des formes rares de tachycardies atriales qui sont encore appelées tachycardies atriales chaotiques. Elles surviennent dans un contexte bien particulier : sujets généralement âgés (plus de 70 ans) en poussée d’insuffisance respiratoire aiguë sur bronchopathie chronique. L’électrocardiogramme enregistre des salves plus ou moins prolongées de systoles auriculaires ectopiques, présentant au moins trois morphologies d’ondes P’ différentes, réalisant un rythme irrégulier, entre 100 et 250/min, parfois difficile à différencier d’une fibrillation atriale.

La fibrillation atriale

Caractérisée par des auriculogrammes anarchiques, de fréquences irrégulières autours de 500/min avec trémulation de la ligne isoélectrique dans les dérivations périphériques.

Diagnostic étiologique

Les causes du flutter atrial sont surtout les pathologies qui affectent le cœur droit et notamment bien sûr l’oreillette droite. On le décrit dans l’évolution d’une atteinte tricuspidienne, d’une pneumopathie chronique obstructive, des affections compliquées d’une importante dilatation auriculaire droite (maladie d’Ebstein).
L’hyperthyroïdie provoque rarement la survenue d’un flutter.
On observe très fréquemment des flutters après corrections chirurgicales de cardiopathies congénitales, celles surtout qui obligent à de larges ouvertures auriculaires droites (opérations de Fontan et de Mustard). Parfois il est impossible de déceler une cause et l’on parle alors de flutter idiopathique.

Pronostic.

Le pronostic du FA dépend de 3 paramètres: la cardiopathie sous- jacente, les conséquences de la tachycardie et le risque thrombo-embolique [22].

La cardiopathie.

Le risque vital intrinsèque du FA est faible, que le cœur soit normal, ou en présence de myocardiopathie, de cardiopathie congénitale. Le pronostic vital est surtout dépendant de la cardiopathie [22].

Les conséquences de la tachycardie

La sévérité des symptômes est corrélée à l’intensité de la tachycardie et à sa durée. Une conduction atrio-ventriculaire sur le mode 1/1 peut être responsable d’ischémie myocardique, de syncope ou de collapsus hémodynamique. Si en cas de fréquence cardiaque comprise entre 75 et 100/min les patients sont fréquemment asymptomatiques, une conduction atrio-ventriculaire 2/1 avec cadence ventriculaire à 150/min est souvent source de palpitations, dyspnée, insuffisance cardiaque, angor.
La persistance d’une tachycardie, typiquement pour des fréquences entre 120 et 180/min, pendant plusieurs mois peut s’accompagner d’une cardiopathie rythmique avec altération de la fonction systolique et dilatation ventriculaire. Ce phénomène, plus fréquent pour la fA, a également été décrit dans le cas de FA chronique [51,59].

Le risque thrombo-embolique

Initialement, le risque attribuable au FA était considéré comme faible du fait de la régularité atriale et d’une vitesse élevée du flux de vidange de l’auricule gauche [90]. Depuis une dizaine d’année, son caractère emboligène est clairement démontré.
Actuellement, les sociétés savantes (ACC/AHA/ESC) recommandent d’estimer le risque embolique en utilisant les mêmes critères que pour la fA.
L’estimation du risque embolique peut également se baser sur l’index CHA2DS2VASC (Cardiac Failure, Hypertension, Age, Diabetes, Stroke [double], Vascular) [33]. Ce score, coté 0 à 10, a été évalué dans la fA non valvulaire, chez des patients de 65 à 95 ans sans traitement anticoagulant. Chacun des items vaut 1 point, sauf un antécédent d’AVC ou AIT et l’âge ≥75 ans qui en valent 2. Un score > 1 est corrélé à un risque embolique annuel ≥ 4% et doit conduire à instaurer un traitement anticoagulant.

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Table des matières

PREMIERE PARTIE : RAPPELS SUR LE FLUTTER ATRIAL 
I. HISTORIQUE
II. EPIDEMIOLOGIE ET FACTEURS DE RISQUE
III. CLASSIFICATION DU FLUTTER ATRIAL
III.1 Ancienne classification
III.2 Classification de la commission de la Société Européenne de Cardiologie et de la Société Nord-Américaine de stimulation et d’électrophysiologie
III.3 Classification de Scheinman et al
IV. ANATOMIE ET HISTOLOGIE
IV.1 Anatomie de l’oreillette droite [14]
IV.2 Anatomie et rapport de l’isthme cavo- tricuspide (ICT)
V. MECANISMES ELECTROPHYSIOLOGIQUES DES MACROREENTREES ATRIALES DROITES IMPLIQUANT L’ISTHME CAVOTRICUSPIDE
V-1 Le flutter atrial typique ou commun antihoraire
V-2 Le flutter atrial typique horaire
VI. PHYSIOPATHOLOGIE :
VI-1 Le substrat :
VI-2 La gâchette
VII. HISTOIRE NATURELLE-SYMPTOMATOLOGIE
VII.1 Histoire naturelle
VII.2 Signes
VII.3 Etude électrophysiologique du FA
VIII. DIAGNOSTIC
VIII.1 Diagnostic positif
VIII.2 Diagnostic différentiel
VIII.3 Diagnostic étiologique
IX. PRONOSTIC
IX.1 La cardiopathie
IX.2 Les conséquences de la tachycardie
IX.3 Le risque thrombo-embolique
X. TRAITEMENT
X.1 Traitement médical
X.2 Ablation de l’isthme cavo-tricuspidien
DEUXIEME PARTIE : NOTRE TRAVAIL
I. METHODOLOGIE
I.1 Cadre de l’étude
I.2 Population étudiée
I.3 Méthode d’étude
II. RESULTATS
II.1 Synthèse
II.2 Exemple de la procédure chez l’un des patients
III. COMMENTAIRES ET DISCUSSION
III-1 Les limites de l’étude
III-2 Données épidémiologiques
III-3 Données cliniques
III-4 Données paracliniques
III-5 Aspects thérapeutiques
III-6 Evolution
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
CONCLUSION
RECOMMANDATIONS
REFERENCES

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