Mécanismes d’altération du combustible MOx dans des eaux d’environnement

La gestion des déchets nucléaires est un sujet important, tant pour le défi technologique et scientifique qu’elle représente que pour sa portée sociétale. En France comme partout ailleurs, la majeure partie de ces déchets radioactifs est générée par l’industrie électronucléaire, bien que d’autres secteurs soient concernés (médical, recherche, militaire…).

Cycle du combustible 

L’industrie électronucléaire française est l’une des plus importantes au monde avec 56 réacteurs déployés sur le territoire représentant jusqu’à 70% de la production d’électricité annuelle. Ces réacteurs sont du type REP (Réacteur à Eau Pressurisée), dit de 2ème génération. Ils peuvent accueillir en leur sein le dioxyde d’uranium UO2 faiblement enrichi en 235U, appelé combustible UOx (pour Uranium Oxide), constituant actuellement la majorité du combustible nucléaire employé dans le monde. Sa préparation nécessite plusieurs étapes sollicitant d’autres secteurs (extraction minière, purification, enrichissement, fabrication), regroupées sous le terme d’amont du cycle du combustible nucléaire. Tout ce qui advient après l’irradiation du combustible en réacteur (= combustible irradié) est qualifié d’aval du cycle .

Exutoires du combustible usé

Après son irradiation en réacteur, le combustible UOx irradié est entreposé en piscine de refroidissement durant plusieurs années. Le combustible irradié peut alors emprunter deux exutoires bien distincts : le retraitement ou le stockage direct en situation géologique profonde. Afin de recycler les matières valorisables, telles que l’uranium et le plutonium, la France a fait le choix de la première option. Le recyclage du combustible irradié permet également la séparation des autres composantes du combustible dans la perspective d’une gestion adaptée selon leurs activités, durées de vies et natures chimiques (gaines Zircaloy, produits de fission, actinides mineurs…). En France, le retraitement est mis en œuvre via le procédé PUREX (pour Plutonium Uranium Reduction Extraction) à l’usine Orano de La Hague où plus de 36.000 tonnes de combustible irradié ont été retraitées depuis 1976 [1]. Le combustible est dissous en tête de procédé dans l’acide nitrique à chaud puis l’uranium et le plutonium sont extraits séparément de la solution tandis que les produits de fission et actinides mineurs sont vitrifiés puis entreposés. L’uranium et le plutonium extraits lors des opérations de retraitement permettent la fabrication du combustible MOx (pour mélange d’oxydes), de formule générale (U,Pu)O2 et dont l’exploitation est autorisée pour une partie des réacteurs français. Le combustible MOx permet ainsi l’économie de matière fissile primaire.

Si le retraitement du combustible irradié est aujourd’hui la voie de référence considérée en France, le stockage direct du combustible irradié en couche géologique profonde est le choix de plusieurs pays, tels que la Suède ou la Finlande. Cela reste également une option étudiée par l’Agence Nationale de gestion des Déchets Radioactifs (Andra) dans le cadre du Plan National de Gestion des Matières et Déchets Radioactifs (PNGMDR). L’Andra doit en effet s’assurer que le site de stockage retenu pour le projet de stockage Cigéo (Centre Industriel de Stockage Géologique Profond) reste compatible avec le combustible irradié, qu’il s’agisse des combustibles UOx ou MOx, dans le cas où une décision future conduirait à l’arrêt du retraitement et à considérer les combustibles irradiés comme un déchet. Ce travail de thèse s’inscrit dans le cadre de l’étude du comportement à long terme du combustible MOx dans l’éventualité d’un stockage direct en couche géologique profonde.

Stockage en couche géologique profonde

Critères de sélection du site de stockage 

Le stockage géologique profond est considéré comme la solution de référence pour la gestion définitive des déchets nucléaires de haute activité et à vie longue (e.g. combustible irradié et/ou déchets vitrifiés issus du retraitement). La conception d’un stockage géologique profond doit dans un premier temps isoler les déchets de l’homme et de la biosphère, puis limiter le transfert des radionucléides et des toxiques chimiques contenus dans les déchets jusqu’à la biosphère. Le choix du milieu géologique dans lequel est implanté le stockage géologique profond tient compte par conséquent de différents critères tels que la stabilité géodynamique à long terme, la très faible perméabilité de la barrière environnementale et ses propriétés de rétention des radionucléides, la faisabilité géotechnique d’un réseau de galeries souterraines, l’absence de ressources rares exploitables à proximité. Pouvant être en adéquation avec ces critères, les couches géologiques les plus étudiées sont l’argile (cas du projet Cigéo dans la Meuse/Haute-Marne, de la Belgique à Mol et de la Suisse dans la région des Lägern) et le granite (cas Finlandais à Onkalo, Suédois à Forsmark, Japonais…).

Stockage du combustible irradié à l’international

Parmi les pays ayant fait le choix du stockage direct du combustible irradié, deux sont particulièrement en avance sur leurs projets respectifs de stockage des déchets; la Suède et la Finlande. La Finlande est le premier pays producteur à avoir déposé une demande d’exploitation d’un site de conditionnement et de stockage définitif des combustibles irradiés, en fin d’année 2021. La construction du site de stockage souterrain est en cours. Si l’exploitation est autorisée par les autorités, l’objectif est une mise en service du site vers 2025. La Suède, quant à elle, après plus de trois décennies de recherche, a décidé en 2009 de la localisation du site d’enfouissement et d’encapsulation des combustibles irradiés. La demande d’autorisation de construction du site d’enfouissement a été transmise au gouvernement en 2011. C’est au début de l’année 2022 que celui-ci a autorisé la construction et la mise en service du site de stockage par l’agence suédoise SKB (Société suédoise de gestion du combustible et des déchets nucléaires, une entreprise privée).

Le stockage des combustibles irradiés se déroulera sur la base du concept développé par la Finlande, appelé « KBS-3 » . Selon ce concept, les combustibles irradiés sont insérés dans des étuis en fonte avant d’être introduits dans un conteneur en cuivre résistant à la corrosion. Les colis sont ensuite enrobés d’argile gonflante à l’intérieur de puits verticaux situés à une profondeur maximale de 500 mètres. Ce mode de gestion est estimé pouvoir garantir la sûreté du site pour une durée de 100.000 ans.

Concept français de stockage direct des combustibles irradiés

Le concept français de stockage du combustible irradié, initialement décrit dans le dossier Argile 2005 [3], est en cours d’actualisation dans le cadre des études dites d’adaptabilité, menées en cohérence avec le projet de stockage Cigéo . Le projet de stockage Cigéo est prévu d’être implanté dans l’argilite du Callovo-Oxfordien (Cox) formée il y a 155 millions d’années. Cette couche géologique d’intérêt est localisée entre 400 et 600 mètres de profondeur, épaisse d’environ 150 mètres et présente un pendage faible [3]. Cette roche est principalement constituée de minéraux argileux (40 à 50 %mass.), de calcite (20 à 30%mass.), de quartz (20 à 30%mass.) et de quelques phases accessoires (pyrite, matière organique …) ne représentant pas plus de 5 % de la roche totale. L’eau porale des argilites du Callovo-Oxfordien (dite eau du COx) est une eau de pH neutre, modérément minéralisée de type Na-Cl-SO4. Des mesures in-situ réalisées par Vinsot et al. au sein du laboratoire souterrain de Meuse/Haute-Marne [4] rapportent des valeurs de potentiel rédox comprises entre -200 et -65 mV/ESH, résultats appuyés par d’autres études en couche profonde argileuse .

Le concept de stockage étudié pour les combustibles découle directement de celui développé pour les déchets vitrifiés de haute activité à vie longue . Les assemblages combustibles seraient en effet placés dans un conteneur de stockage en acier avant d’être stockés dans des tunnels horizontaux (appelés alvéoles) creusés dans la roche hôte [8]. Un coulis cimentaire (MREA) est prévu d’être injecté à l’extrados du chemisage des alvéoles, au contact de la roche hôte. Le MREA a notamment pour but de neutraliser les éventuels effets liés à l’oxydation de l’argilite, ce qui peut entraîner une phase transitoire acide défavorable vis à vis des processus de corrosion de l’acier du chemisage [9]. L’eau porale du MREA présente donc un pH élevé : ces conditions alcalines ont été peu étudiées dans le cadre du stockage direct du combustible. L’acquisition de données complémentaires est par conséquent nécessaire.

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Table des matières

Introduction générale
Contexte de la thèse
Cycle du combustible
Exutoires du combustible usé
Stockage en couche géologique profonde
Critères de sélection du site de stockage
Stockage du combustible irradié à l’international
Concept français de stockage direct des combustibles irradiés
Evolution du stockage à long terme
Objectifs de la thèse
Etat de l’art
Combustible MOx
Fabrication et propriétés physico-chimiques
Matériaux modèles au combustible MOx irradié
Altération du combustible en conditions de stockage géologique profond
Mécanismes de dissolution en conditions oxydantes
Chimie des actinides dans une eau d’environnement
Influence des matériaux d’environnement sur l’altération du combustible
Influence de l’eau porale du COx sur la dissolution du MOx
Influence des conditions alcalines imposées par le MREA
Conclusion
Préparation des matériaux et méthodes expérimentales
Matériaux analogues au combustible MOx irradié
Elaboration des matériaux simulants (U,Ce)O2
Préparation des pastilles denses (U,Ce)O2
Caractérisations initiales des pastilles frittées (U,Ce)O2
MOx MIMAS 7% non irradié
Expériences d’altération des matériaux (U,Ce)O2 et MOx MIMAS non irradié
Dissolution oxydante en conditions dynamiques
Altération des matériaux (U,Ce)O2 en conditions environnementales
Altération du MOx MIMAS en conditions environnementales
Conclusion
Dissolution des matériaux (U,Ce)O2 en présence de H2O2
Comparabilité des expériences
Propriétés des matériaux étudiés
Propriétés des solutions et lixiviats
Dissolution oxydante en présence de H2O2 : Résultats
Caractérisations des surfaces solides (U,Ce)O2 après l’altération
Relâchements en uranium et en cérium
Test des hypothèses mécanistiques
Rôle du cérium lors de la dissolution oxydante
Analogie avec le MOx
Conclusion
Altération des matériaux (U,Ce)O2 en conditions environnementales
Altération des matériaux modèles en conditions aérées
Description des milieux étudiés
Evolution des concentrations en uranium et en cérium
Calculs de spéciation
Caractérisation des surfaces altérées en conditions aérées
Conclusion des expériences en conditions aérées
Altération en conditions anoxiques
Description des milieux étudiés
Evolution des concentrations de l’uranium et du cérium
Calculs de spéciation
Conclusion
Altération du MOx MIMAS en conditions environnementales
Description des systèmes étudiés
Etat initial des pastilles de MOx MIMAS non irradié
Mesures de pH et potentiel redox
Espèces présentes dans les systèmes
Résultats des expériences d’altération au sein des milieux Ca, Ca + Si et Si
Caractérisations des lixiviats
Caractérisations des surfaces altérées
Conclusion des expériences d’altération du MOx MIMAS non irradié au sein des milieux Ca, Ca + Si et Si
Résultats de l’expérience d’altération en milieu alcalin
Caractérisations des lixiviats
Caractérisations des surfaces altérées
Discussion sur le milieu pH = 12
Conclusion
Conclusion générale

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