Mécanismes d’action de ”Polymer Processing Aids” fluorés durant l’extrusion d’un polyéthylène basse densité linéaire

Le marché des polyéthylènes représente plus de la moitié de la production mondiale de matières plastiques (60 millions de tonnes en 2008). Les principales applications des polyéthylènes (PE) sont les films fabriqués par le procédé de soufflage de gaine (environ 80 %). Du fait de leurs bonnes propriétés mécaniques et optiques, les polyéthylènes linéaires tels que le polyéthylène basse densité linéaire (PEBDL) et le polyéthylène haute densité (PEHD) sont des polymères privilégiés pour la fabrication de films. Or, l’apparition de défauts lors de la mise en forme de ces matériaux est le principal frein à l’augmentation des vitesses de production. Notamment, le défaut de surface appelé « peau de requin » est le premier apparaissant à la surface des extrudats.

De manière à éliminer ce défaut de surface, des « Polymer Processing Aids » (PPAs) à base de fluoropolymères sont utilisés industriellement depuis plus de 20 ans (Fig. 1). Quelques centaines de ppm de ces additifs suffisent à repousser à plus fort débit la peau de requin. Ils permettent aussi de diminuer la perte de charge et abaissent le gonflement en sortie de filière. Du fait de ces multiples effets, les PPAs fluorés sont très intéressants pour de nombreuses applications industrielles. Cependant, il n’y a pas réellement d’optimisation dans leurs utilisations car peu d’études se sont réellement penchées sur le mécanisme d’action des PPAs.

Les défauts de surface en extrusion 

Dans la pratique industrielle, les déformations de surface sont perçues comme le problème le plus important parce qu’elles apparaissent en premier, et qu’elles limitent le débit de production. L’étude des défauts de surface des polymères linéaires a toujours été connexe à l’étude de leur élimination, que ce soit pour des intérêts académiques ou industriels. Comprendre l’origine des défauts de surface revient à comprendre les conditions dans lesquelles ils apparaissent et disparaissent.

Les instabilités d’extrusion des polymères linéaires 

Les défauts de surface se rencontrent fréquemment pour les polymères linéaires flexibles, comme par exemple les polyéthylènes basse densité linaires (PEBDL), les polyéthylènes haute densité (PEHD), les polydiméthylsiloxanes (PDMS), les polytétrafluoréthylènes (PTFE), les polybutadiènes (PB). Ces polymères ont des chaînes macromoléculaires peu branchées ou à ramifications courtes.

Une classification des polymères suivant leurs types de défaut et courbe d’écoulement a été amorcée dès les années 70 par Den Otter (1971). De manière courante, mais parfois un peu rapide, on distingue les polymères linéaires des polymères branchés qui présentent des courbes d’écoulement avec instabilités d’extrusion différentes. Classiquement, la courbe d’écoulement des polymères linéaires, caractérisée par rhéométrie capillaire à débit imposé, est discontinue et présente trois zones avec différents défauts :
– la branche I aux faibles débits. Le jonc extrudé, à débit croissant, est d’abord lisse puis présente des défauts surfaciques.
– la zone oscillante à des débits intermédiaires. Elle est caractérisée, à débit imposé, par des oscillations de pression ainsi que par l’apparition simultanée du défaut oscillant (stick-slip en anglais), encore appelé défaut bouchon.
– la branche II aux forts débits. L’écoulement peut redevenir stable sur une petite gamme de débit : c’est la zone de super-extrusion. Puis le jonc lisse laisse place à des défauts volumiques : apparaîssent successivement à débit croissant le défaut hélicoïdal, puis le défaut chaotique.

Les polymères branchés, tels que le polyéthylène basse densité (PEBD) ou d’autres polymères comme le polystyrène (PS) présentent une courbe d’écoulement continue, avec l’apparition de défauts volumiques. Cependant, les paramètres des procédés (température, débit), la géométrie de la filière, ou encore les caractéristiques moléculaires des polymères (poids moléculaire, polymolécularité, taux de branchement), peuvent influer sur le comportement en écoulement des matériaux et les instabilités pouvant se développer. La classification polymères linéaires/polymères branchés reste donc limitée, mais permet de distinguer les deux types de comportement des polymères en écoulement.

La première observation de défauts de surface fut réalisée en 1942 par Garvey et al., sur des caoutchoucs synthétiques. A l’époque, toutes les instabilités d’écoulement étaient confondues et étaient désignées par le terme de « melt fracture ». Ce n’est qu’en 1963 qu’une distinction réelle entre défauts surfaciques et volumiques est faite [Benbow et Lamb, 1963].

Le défaut de surface ou défaut de « peau de requin »

Les défauts de surface ont été la plupart du temps étudiés par rhéométrie capillaire. Les rhéomètres capillaires permettent de reproduire des écoulements stables, en balayant plusieurs taux de cisaillement en un essai, à une température de consigne donnée. Ce sont donc les outils de prédilection pour étudier l’influence de différentes conditions thermomécaniques sur le défaut de peau de requin.

Description du défaut de surface

Le défaut de surface est, comme son nom l’indique, causé par des instabilités d’écoulement proches de la surface. Il se présente d’abord, à faible débit, comme une rugosité non organisée, induisant une perte de brillance et de transparence de l’extrudat. La matification qui recouvre le jonc est signe d’une rugosité de l’ordre des longueurs d’onde du spectre visible, soit donc de 0,4 à 0,8 µm. Puis on observe, à débit croissant, l’organisation de ces irrégularités de surface perpendiculairement à la direction de l’écoulement (Fig. 1.2). Il s’agit de fissures périodiques pouvant parfois apparaître sous forme de filets de vis. C’est à ces défauts surfaciques réguliers et organisés que fait référence, au départ, le terme de défaut en peau de requin, (sharkskin en anglais) [El Kissi et Piau, 1994].

Abusivement, on appelle défaut de peau de requin les deux types de rugosité de surface ; or, on ne sait pas bien si le défaut de surface non organisé est aussi de même nature. Cependant, de nombreux auteurs considèrent qu’il s’agit bien du même défaut, étant donné que le premier, de faible amplitude et non organisé, laisse place au second, d’amplitude plus grande, sans discontinuité notable de la courbe d’écoulement [Yamaguchi et al., 2002, Hatzikiriakos et Migler, 2005]. Très peu d’études ont d’ailleurs fait la distinctioni , et encore moins ont étudié le défaut inorganisé de faible amplitude, étant donné la difficile caractérisation des rugosités inférieures au micromètre. Il faut noter qu’un défaut de surface devient gênant en industrie si sa rugosité dépasse environ les 30 µm car il devient alors visible à l’œil nu. Ce n’est habituellement pas le cas du défaut de surface non organisé, même si la surface perd alors sa brillance et sa transparence.

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Table des matières

Introduction
Chapitre I. Synthèse bibliographique
I Les défauts de surface en extrusion
I.1 Les instabilités d’extrusion des polymères linéaires
I.2 Le défaut de surface ou défaut de « peau de requin »
I.3 Origine du défaut de peau de requin
I.4 Conclusion
II Les « polymer processing aids » (PPAs) fluorés
II.1 Présentation
II.2 Principales actions des PPAs fluorés en extrusion
II.3 Paramètres influençant l’action des PPAs
II.4 Tentatives d’explications proposées dans la littérature
II.5 Conclusion
III Notion de glissement en écoulement de polymères
III.1 Introduction
III.2 Les mécanismes de perte de cohésion
III.3 Les mécanismes de perte d’adhésion
III.4 Mécanisme mixte
III.5 Conclusion
IV Rappels sur la physique des mélanges de polymères
IV.1 Contexte
IV.2 Modèles de déformation et rupture des gouttes
IV.3 Modèles de coalescence
IV.4 Taille des gouttes en régime établi
IV.5 Relaxation des inclusions déformées
IV.6 Conclusion
Chapitre II. Caractérisation des polymères et mélanges de l’étude
I Caractéristiques moléculaires et chimiques
I.1 Caractéristiques moléculaires
I.2 Liaisons chimiques intra et intermoléculaires
II Comportement rhéologique en cisaillement
II.1 Méthodes de mesure
II.2 Le PEBDL
II.3 Les copolymères fluorés
II.4 Le PEG
III Caractérisation des énergies de surface
III.1 Rappels bibliographiques
III.2 Caractérisation des énergies de surface
III.3 Tensions interfaciales et travail d’adhésion entre les polymères de l’étude
IV Caractérisation des mélanges-maîtres
IV.1 Mise en forme des mélanges-maîtres
IV.2 Morphologie et composition
IV.3 Granulométrie
Chapitre III. Etude du défaut de peau de requin
I Etude du défaut de surface en rhéométrie capillaire
I.1 Courbes d’écoulement et instabilités
I.2 Caractérisation du défaut de peau de requin
II Etude du défaut de surface en extrusion
II.1 Description du montage expérimental
II.2 Courbes d’écoulement et stabilité des défauts de surface
II.3 Caractérisation du défaut de surface en extrusion
II.4 Influence de l’état de surface de la filière
III Bilan
Chapitre IV. Mécanismes d’action des PPAs en extrusion
I Principe des techniques développées en filière plate
I.1 Mesures des vitesses à la paroi par vélocimétrie laser Doppler
I.2 Observation et quantification des dépôts à la paroi
I.3 Mode opératoire
I.4 Conclusion
II Etude cinétique de l’action du PPA FP-2 en extrusion
II.1 Actions macroscopiques
II.2 Actions mésoscopiques
II.3 Actions microscopiques
II.4 Comparaison des actions multi-échelles du FP-2
II.5 Conclusion
Chapitre V. Etude des paramètres influençant l’action des PPA en extrusion
I Evolution des paramètres macroscopiques d’extrusion
I.1 Introduction
I.2 Influence de la concentration en PPA
I.3 Influence du débit d’extrusion
I.4 Influence de l’état de surface de la filière
I.5 Influence de la nature métallique de la filière
I.6 Influence de la nature du PPA
I.7 Influence de la dispersion du PPA
I.8 Bilan
II Evolution de l’écoulement en filière
II.1 Introduction
II.2 Influence de la concentration en PPA
II.3 Influence de l’état de surface de la filière
II.4 Influence de la nature du PPA
II.5 Bilan
III Evolution du dépôt de PPA à la paroi
III.1 Introduction
III.2 Influence de la concentration
III.3 Influence du débit d’extrusion
III.4 Influence de la rugosité de la filière
III.5 Influence de la nature métallique de la filière
III.6 Influence de la nature du PPA
III.7 Influence de la dispersion du PPA
III.8 Bilan
IV Conclusions
Chapitre VI. Interprétation des mécanismes d’action des PPAs
I Comparaison des actions multi-échelles des PPAs
I.1 Origine de la chute de pression en filière
I.2 Origine du glissement à la paroi de la filière
I.3 Corrélation des phénomènes macroscopiques et microscopiques
I.4 Bilan
II Quel est le moteur du dépôt en filière ?
II.1 Un dépôt préférentiellement en filière ?
II.2 Un dépôt par transport convectif ?
III D’où vient l’adhésion des PPAs à la filière ?
III.1 Mouillage statique et travail d’adhésion des polymères sur des surfaces métalliques
III.2 Types d’adhésion entre le dépôt et la filière
III.3 La question de l’adhésion sur l’or
III.4 Bilan
IV Comment se développe le dépôt ?
IV.1 Les particules de PPA avant dépôt
IV.2 Formation du dépôt dans le régime transitoire
IV.3 La répartition du dépôt sur la filière
IV.4 Bilan sur les mécanismes de dépôt
V Comparaison avec le modèle de transport convectif
V.1 Etude des hypothèses du modèle
V.2 Comparaison du modèle avec nos expériences
V.3 Bilan
VI Conclusions
Conclusion  
ANNEXES

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