La drépanocytose est une hémoglobinopathie qui résulte de la mutation de la chaine béta-globine induisant le remplacement de l’acide glutamique en position 6 par la valine. Cette mutation conduit à la production d’une hémoglobine anormale (HbS). Elle constitue un véritable fléau et reste la plus fréquente des hémoglobinopathies affectant plus de 4% de la population mondiale (81). Sa prévalence sur le continent Africain atteint 5% à 7% de la population et sa fréquence est maximale au sud du Sahara (25) où elle constitue un véritable problème de santé publique. Au Sénégal, Les études épidémiologiques effectuées en milieu scolaire ont retrouvé une prévalence de 10% de porteur de l’hémoglobine S (24). Aussi bien pour l’OMS, l’UNESCO que pour l’ONU, la drépanocytose occupe le quatrième rang dans leur priorité de santé publique mondiale, derrière le cancer, le VIH SIDA et le paludisme (80). La pathogenèse de la drépanocytose est liée à la polymérisation de la désoxy HbS. Cette formation de polymère modifie la forme normale de disque biconcave du globule rouge en une forme irrégulière, instable et rigide(67). Ce qui provoque une hémolyse intravasculaire avec libération de l’hémoglobine dans le plasma (9). Cette polymérisation à répétition a un caractère cyclique et peut conduire à l’adhésion des globules rouges avec l’endothélium vasculaire, à la vasoocclusion et à des lésions ischémiques de perfusion. Ces manifestations peuvent modifier les niveaux de production des espèces réactives dérivées de l’oxygène (ROS) et des antioxydants. La combinaison de ces actions est associée à des réponses inflammatoires dans de nombreux organes et peuvent produire des états pathologiques secondaires telles que le syndrome thoracique aigu (SCA), l’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP), et, indirectement, un accident vasculaire cérébral.
GENERALITES SUR LE STRESS OXYDATIF
Définition
Le stress oxydatif est le résultat d’une agression chimique de notre organisme. Le mot stress vient du latin « stringére » et « stressus » qui signifie serré. Il peut être assimilé à un ensemble de réactions physiologiques et psychologiques induites par un organisme soumis à un changement de situation. Ces réactions vont engendrer une réponse de l’organisme afin de rétablir ses conditions de base de vie équilibrée. Le stress oxydatif est différent du stress psychique ou psychosocial.
Mécanisme de production du stress oxydatif
Le stress oxydatif est le résultat d’une oxydation des constituants de notre organisme par un excès de molécules particulièrement nocives appelées radicaux libres produits par l’oxygène que nous respirons pour vivre. Les radicaux libres sont essentiellement des particules réactives issues du métabolisme de certaines molécules, ou de la conversion de l’oxygène en énergie. Ce sont des résidus nuisibles, provoqués par une mauvaise transformation de l’oxygène ou par une réaction chimique incomplète impliquant l’oxygène. Les radicaux libres se répandent dans les fluides et les graisses de l’organisme et réagissent avec tout ce qu’ils rencontrent. Ils provoquent une réaction « oxydante » ou « oxydative » sur les cellules qui entrainent leur destruction. Les particules réactives de l’oxygène, sont dotées d’une capacité individuelle à attaquer une grande quantité de cellules saines ou de molécules utiles et à initier d’autres réactions en chaine et donc à créer d’autres radicaux libres. Lorsque le nombre de ces particules dépassent le potentiel antioxydant du corps, cela conduit à ce que l’on appelle le « stress oxydatif ».
La production des espèces réactives de l’oxygène (Reactiv Oxygen Species en anglais ROS) est un processus normal dans l’organisme. Dans les conditions physiologiques normales, il existe une balance entre les ROS et les défenses antioxydantes qui existent dans notre corps (77). Le stress oxydatif est, en résumé, la conséquence d’un déséquilibre entre radicaux libres et la capacité de notre corps à les maitriser. Cet état de déséquilibre étant lié soit à :
➤ Un déficit en antioxydant ;
➤ Une surproduction de radicaux libres ;
➤ Ou les deux phénomènes combinés .
Ces radicaux libres sont essentiellement :
➨ O2 : anion superoxyde
➨ H2O2 : peroxyde d’hydrogène
➨ ClO- : ion hypochlorite
➨ HO- : radical hydroxyle
➨ ROO- : RO- , R : chaine carbonée
➨ Les radicaux dérivant d’acides gras insaturés
➨ ONOO- : peroxynitrite
➨ NO- : monoxyde de diazole
➨ O2. : dioxygène singulet.
Les radicaux libres notamment les espèces réactives de l’oxygène proviennent de l’oxygène que nous respirons. Cet oxygène sous l’action de sources externes (fumée de cigarette, radiations ultraviolets, produits carcinogènes, drogue……) et internes (inflammation cellulaire, chaine respiratoire xanthine, NADPHoxydase……) donne le peroxyde d’hydrogène. Ce dernier est à l’origine de l’initialisation d’une réaction en chaine qui aboutit à la formation d’autres radicaux libres (OH- , ONOO-…..) qui vont créer un dommage au niveau cellulaire .
Cependant, lorsque le peroxyde d’hydrogéne est pris en charge par les enzymes antioxydantes telles que les superoxydes dismutases (Cu, Zn SOD, Mn SOD), la catalase ou le glutathion peroxydase, il est transformé en eau.
Origine interne des radicaux libres
Les réactions d’oxydation dans les cellules sont des phénomènes habituels de l’organisme et conditionnent leur bonne marche. Le métabolisme cellulaire normal produit en permanence des espèces oxygénées réactives.
Production interne de ROS à partir de la chaine respiratoire
Au cours de la respiration, chacune de nos cellules réduit l’oxygène en eau. Une partie de cet oxygène échappe à la transformation complète et donne une forme d’oxygène très réactive, l’anion superoxyde qui est caractéristique des radicaux libres.
Mécanisme cellulaire de production des radicaux libres
L’origine des radicaux libres est principalement intracellulaire, y compris lorsqu’ils proviennent du catabolisme des xénobiotiques par le cytochrome P450, les rayonnements etc. Leur production résulte d’un processus physiologique commun à toutes les cellules aérobies au sein desquelles une partie des molécules d’oxygène (jusqu’à 5 %) peut subir une réduction monovalente et séquentielle.
Production de l’ion superoxyde O2⁻
Le premier radical formé est l’anion superoxyde O2-. Il est produit essentiellement par plusieurs voies dont :
➤ La réduction monovalente de l’oxygène dans les mitochondries ;
➤ La voie de la xanthine déshydrogénase (formation d’acide urique aux dépens de l’hypoxanthine). Cette voie est particulièrement importante dans l’endothélium vasculaire ;
➤ L’oxydation des catécholamines ;
➤ La stimulation de la NADPH oxydase des polynucléaires neutrophiles.
Actions biologiques des Radicaux Libres
Dans les conditions physiologiques normales
Les radicaux libres interviennent dans les lignes de défense de l’organisme contre l’infection par les virus et les bactéries. Leur production est permanente. Cette production est régulée par leur destruction au fur et à mesure de leur fabrication. En effet les formes réactives de l’oxygène constituent un élément déterminant de la phagocytose. Les polynucléaires neutrophiles possèdent un complexe NADPHoxydase membranaire susceptible de former l’anion superoxyde O2. à partir de l’oxygène lorsqu’ils sont stimulés. Cet anion superoxyde et les produits dérivés (eau oxygénée, hypochlorite) sont utilisés dans les mécanismes de la bactériolyse. Aussi les radicaux libres sont impliqués dans l’élimination des cellules anciennes ou défectueuses que notre organisme remplace en permanence.
Dans les conditions pathologiques
En l’absence de quantité suffisante d’antioxydants, endogènes ou externes, le stress oxydant augmente et s’accélère. Ce conflit interne affecte alors toutes les parties du corps, les tissus musculaires, les artères, les cellules nerveuses et cérébrales. Lorsqu’il y a atteinte du noyau des cellules, cela aboutit à une altération du code génétique et à une mutation des cellules en tumeurs cancéreuses.
Le stress oxydatif surcharge le système immunitaire de l’organisme et serait ainsi à l’origine de la plupart des maladies dégénératives et auto-immunes. Ce phénomène peut être de faible ampleur ou au contraire être très intense provoquant une détérioration rapide de la santé. Les radicaux libres peuvent être considérés comme des déchets du métabolisme cellulaire. Ce sont des atomes et des molécules dotés d’une forte énergie et qui, avant d’être neutralisés détruisent généralement tout ce qu’ils rencontrent. Ils sont produits dans toutes les cellules de l’organisme tout à fait normalement et en faible quantité dans les mitochondries. Il s’agit des ions oxygène, hydroxyde et de l’eau oxygénée qui sont libérés lors des réactions biochimiques. Avant d’être neutralisés, ils peuvent provoquer des lésions sur tous les éléments qu’ils côtoient. L’organisme sait cependant se défendre contre eux,grâce aux enzymes antioxydantes contenues dans nos cellules. Ces enzymes sont aidées dans leur action anti-radicalaire par la vitamine E, la vitamine C, la provitamine A, le zinc et le sélénium. Si ces systèmes de défense sont débordés ou insuffisants, les radicaux libres ont tout le loisir d’être nuisibles. Ils s’attaquent alors aux membranes cellulaires dont les acides gras insaturés qui peuvent être dénaturés (leur structure est modifiée). Ils agressent également les protéines, les microfibrilles de collagène, l’acide hyaluronique, les acides nucléiques des chromosomes et l’ADN lui-même est transformé entrainant l’apparition d’une série d’anomalies d’où le risque de cancérisation. Lorsque les radicaux libres lèsent les acides gras insaturés on parle de lipo-peroxydation des membranes cellulaires. Cela déclenche alors une réaction en chaîne sur les divers acides gras du voisinage jusqu’à ce qu’ils (les acides gras) soient neutralisés.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : Revue bibliographique
Chapitre I. : Généralités sur le Stress oxydatif
I. Définition
II. Mécanisme de production du stress oxydatif
II.1. Origine interne des radicaux libres
II.1.1. Production interne de ROS à partir de la chaine respiratoire
II.1.2. Mécanisme cellulaire de production des radicaux libres
II.1.2.1. Production de l’ion superoxyde O2
II.1.2.2. Production du peroxyde d’hydrogène
II.2. Actions biologiques des radicaux libres
II.2.1. Dans les conditions physiologiques normales
II.2.2. Dans les conditions pathologiques
II.2.3. La lipoperoxydation des acides gras polyinsaturés (AGPI) par le radical 0H-
II.3.Origine externe des radicaux libres
III. Système de détoxification des espèces réactives dérivées de l’oxygène
Chapitre II. : Rôle du Stress oxydatif dans la pathogenèse de la drépanocytose
I. Généralités sur la drépanocytose
II. Production d’espèces réactives dérivées de l’oxygène au cours de la drépanocytose
II.1. Auto-oxydation des globules rouges
II.2. Falciformation et hémolyse
II.3. Sort du NO
II.4. Adhérence et vaso-occlusion des globules rouges
II.5. Hypoxie et perfusion
III. Stratégies thérapeutiques anti-oxydantes
Chapitre III. Méthodes d’étude de l’activité anti-oxydante
I. Principe général
II. Les différentes méthodes
II.1 .Test ABTS (2,2’-azinobis{acide 3-éthylbenzothiazoline-6- sulfonique})
II.2. Test ORAC (Oxygen Radical Absorbance Capacity)
II.3.Test DPPH (1, 1 Diphényl-2-picryl-hydrazyl)
Chapitre IV. Rappels bibliographiques sur Terminalia avicennioides
I. Classification scientifique
II. Etudes botaniques
II.1. Répartition géographique et habitat
II.2. Description de la plante
II.2.1 Le Port
II.2.2 Les Feuilles
II.2.3 Les Fleurs
II.2.4 Les Fruits
III. Etudes chimiques
IV. Etudes ethnopharmacologiques et pharmacologiques
IV.1. Ethnopharmacologie
IV.2. Pharmacologie
DEUXIEME PARTIE : Etude expérimentale
Chapitre I. : Méthodologie générale
I. Cadre d’étude et objectifs
I.1. Cadre d’étude
I.2. Objectifs de l’étude
II. Matériels et réactifs
II.1. Matériel végétal
II.2. Matériel expérimental
II.3. Les prélèvements sanguins
II.4. Les réactifs utilisés
III. Méthodes d’étude
III.1. Extraction
III.2. Mode opératoire
III.3. Etude de l’activité anti-oxydante
III-3-1- Protocole expérimentale du test au DPPH
III-3-2- Expressions des résultats et analyse statistique
III.4. Etude de l’activité anti-falciformante
Chapitre II. Résultats
I. Activités antioxydantes de l’extrait de racines de Terminalia avicennioides
II. Activité antifalciformante de l’extrait de Terminalia avicennioides
Chapitre III. Discussions
CONCLUSION
Références bibliographiques