Mécanisme de l’allergie alimentaire
Le mécanisme de la réaction allergique immédiate IgE dépendante de type I comporte la phase de sensibilisation et la réaction allergique proprement dite. La phase de sensibilisation se traduit par la production d’IgE spécifiques à la suite d’un premier contact avec l’antigène. Les IgE sont la dernière classe d’immunoglobulines synthétisées par les lymphocytes B et les plasmocytes. Elles sont constituées par l’assemblage de deux chaînes lourdes (H) comprenant un domaine variable et quatre domaines constants (Cε1, 2, 3, 4) (chaînes ε) et deux chaînes légères (L) du même type (κ ou λ) (Paupe et al., 1994). Elles ont une masse moléculaire relative (Mr) de 188 kDa. Elles comportent une proportion importante de résidus glucidiques (12%). Les chaînes de type κ représentant les deux tiers des molécules d’IgE ont un P.M de l’ordre de 190 000. Elles sont thermolabiles et détruites par chauffage à 56°C (Letonturier, 2001). Il y a les récepteurs de haute affinité FcεRI et de basse affinité FcεRII (CD23) (Bach et Chatenoud, 2002). Elles se répartissent dans l’ensemble de l’organisme via la circulation sanguine. Elles se fixent sur des « cellules cibles » de la peau et des muqueuses (mastocytes) ainsi que sur des « cellules cibles » circulantes (granulocytes basophiles) par leur fragment Fc ce qui permet une prolongation de la demi-vie des IgE qui peut aller jusqu’à 12 semaines. Le site de liaison des IgE à leur récepteur (FcεRI) se situe dans le domaine Cε3 et à la jonction Cε2-Cε3. La figure № 3 est une représentation schématique du FcεRI (Blank et al., 2003). La production des IgE spécifiques dépend directement de l’interaction entre les cellules B et T et notamment de la production d’IL-4 (interleukine 4), IL5 (interleukine 5) et d’IL-13 (interleukine 13) par les cellules T auxiliaires de type 2 (TH2). La figure № 4 révèle la phase de sensibilisation de l’allergie dépendante des IgE (Chum, 2015). Les cytokines sont responsables de la commutation isotypique vers les IgE. L’induction d’une réponse TH2 dépend de nombreux facteurs comme la prédisposition génétique, l’environnement et l’hygiène. Cette première étape dite phase de sensibilisation muette cliniquement prépare l’organisme à réagir de façon immédiate lors d’un second contact avec l’allergène (Genetet, 2002; Dubuisson et al., 2002 ; Mondoulet, 2005). Par rapport à la réaction allergique proprement dite, l’allergène est reconnu par les IgE fixées sur les récepteurs membranaires RFcεI des mastocytes et des basophiles. Il se fixe par deux épitopes distincts sur deux IgE présentes à la surface membranaire créant ainsi un pontage des IgE.
Le pontage des IgE spécifiques entraîne l’agrégation des FcεRI et provoque la phosphorylation des résidus de tyrosines présents dans les motifs ITAM du récepteur. Il en résulte l’engagement d’autres effecteurs intracellulaires et la mise en place de multiples cascades de signalisation aboutissant finalement à la dégranulation membranaire des cellules entraînant la libération de médiateurs chimiques. La figure № 6 résume la signalisation intracellulaire via le FcεRI aboutissant à la dégranulation des mastocytes et des basophiles (Blank et Rivera, 2004). Des médiateurs chimiques résultent de l’exocytose du contenu granulaire. Il s’agit des médiateurs préformés en particulier l’histamine, des protéases et des médiateurs néoformés (prostaglandine D2, leucotriène C4 et facteur d’activation des plaquettes) ayant comme précurseur l’acide arachidonique. Ces médiateurs attirent les granulocytes éosinophiles dans le tissu lésé et favorisent les réponses allergiques (Mondoulet, 2005; Dubuisson et al., 2002).
Allergènes alimentaires
Les allergènes alimentaires dits trophallergènes sont une variété d’antigènes capables de provoquer une réponse immunitaire particulière dite « allergique » liée à la synthèse d’IgE spécifiques (Moneret-Vautrin, 1997; Manfred et Moll, 2000). Il est distingué dans les aliments des milliers de protéines dont quelques-unes sont allergéniques (Dubuisson et al., 2002). Un allergène majeur est un antigène purifié contre lequel au moins 50% des patients testés présentent des IgE spécifiques. Dans le cas des tests cutanés, à concentration très faible, il donne une réponse immédiatement positifs chez au moins 90% des sujets malades (Dubuisson et al., 2002). Un allergène est dit mineur s’il donne des réponses positives qu’avec 10 % des allergiques. L’allergène intermédiaire se situe entre ces deux types d’allergènes (Mondoulet, 2005). Les isoallergènes sont des molécules de même masse moléculaire et de fonctions biologiques identiques. Ils présentent une homologie d’identité des séquences d’acides aminés d’au moins 67%. Ils se différencient par leur p.I (Dubuisson et al., 2002). La nomenclature officiellement adoptée en 1986 par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’Union internationale des sociétés d’immunologie (IUIS) pour dénommer les trophallergènes est la suivante : les trois premières lettres du genre, espace, la première lettre de l’espèce, espace, un numéro (Jacquenet et Moneret-Vautrin, 2007). Ces numéros sont choisis selon l’ordre d’identification et leurs cDNAs indépendamment de leurs propriétés physicochimiques (Hoffman et al., 1994; Moneret-Vautrin, 1997). Une convention adoptée par l’Union internationale des sociétés d’immunologie (IUIS) consiste à rajouter devant les noms un «n » lorsque l’allergène est d’origine naturelle et un «r » quand celui-ci est recombinant, issu d’une transgénèse (Malandain, 2008).
Caractéristiques générales des trophallergènes
La plupart des trophallergènes sont des glycoprotéines de pHi acides. Ils ont en moyenne une masse moléculaire relative (Mr) comprise entre 10 et 70 kDa. Ils appartiennent à la famille des albumines solubles dans l’eau ou des globulines solubles dans les solutions salines. Plus rarement, ils sont solubles dans l’alcool (Dubuisson et al., 2002; Parent-Massin, 2005). L’immnunoréactivité est la propriété d’induire une réponse immunitaire caractérisée par la synthèse d’IgE spécifiques. Cela est dû à la présence de portions limitées dites épitopes situés généralement à la surface de la molécule dans des zones de forte flexibilité et de forte hydrophilie. Les variants antigéniques peuvent se répartir tout le long de la molécule et se localiser dans une zone particulière (Moneret-Vautrin, 1997; Peltre, 2002; Sanchez et Frémont, 2003). Les épitopes T réagissent avec les lymphocytes T. Ceux appelées B se lient aux IgE et réagissent avec les lymphocytes B. Les séquences des épitopes T et B sont constituées de 8 à 9 et de 8 à 16 acides aminés respectivement. Il existe des épitopes séquentiels et conformationnels (Dubuisson et al., 2002). La figure № 8 représente un schéma simplifié des deux types d’épitopes (Lifrani, 2006). Il est à souligné l’importance des épitopes linéaires dans les phénomènes d’allergie alimentaire puisque le système immunitaire peut les rencontrer même après dénaturation partielle et digestion dans le tractus gastro-intestinal (Mondoulet, 2005). Les trophallergènes sont caractérisés par la stabilité à la chaleur et la résistance à la protéolyse grâce à leur structure tridimensionnelle compacte, leur ponts disulfures, leur glycolysation, leur capacité d’être liés à certains ions métalliques, des molécules lipidiques et stéroïdiques et à l’acidité modérée (Moneret-Vautrin, 1997). Certains possèdent des domaines répétitifs, capables de former des oligomères et une tendance à s’agréger (Breiteneder et Mills, 2005). Les plus fréquents chez l’enfant sont ceux d’origine animale existant dans le lait, les œufs et les poissons. Les seuls trophallergènes d’origine végétale rencontrés chez le jeune enfant sont particulièrement ceux de l’arachide. Chez l’adulte, il s’agit de ceux des aliments qui croisent avec les pollens, la pomme, la pêche, la noisette, le céleri, le fenouil, le tournesol, le latex, le kiwi, l’avocat, la châtaigne, la banane, etc.… (Manfred et Moll, 2000). La Figure № 9 indique la fréquence des aliments allergéniques chez l’enfant et chez l’adulte (CICBAA, février 2005). Selon les données, il est distingué des catégories d’aliments allergisants dont la prévalence augmente ou diminue avec l’âge. L’aliment et l’âge apparaissent comme des facteurs de risques associés au développement de la réaction allergique. L’allergénicité d’une protéine est une activité immunobiologique qui se définit par rapport à la population d’individus sensibilisés à la molécule. Ce n’est pas une propriété inhérente à ce composé et qui permettrait de le caractériser (Lifrani, 2006). Il existe plusieurs procédés biotechnologiques, mécaniques et thermiques permettant de réduire l’allergénicité des protéines alimentaires et fabriquer des formules hypoallergéniques (Manfred et Moll, 2000). L’hypoallergenicité est fondée sur l’absence ou la diminution de liaisons des IgE spécifiques avec des trophallergènes. Elle peut être le résultat de la dénaturation globale des allergènes ou de la diminution de la quantité d’allergènes majeurs d’un aliment (Moneret-Vautrin et Kanny, 2007).
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Table des matières
Introduction
I-Recherche bibliographique
I-1- Allergie alimentaire
I-2- Mécanisme de l’allergie alimentaire
I-3- Allergènes alimentaires
I-4- Caractéristiques générales des trophallergènes
I-5- Procédés pour la réduction de l’allergénicité de protéines alimentaires
I-5-1- Procédés thermiques
I-5-2- Procédés enzymatiques
I-6- Facteurs non thermiques modifiant l’allergènicité des protéines : germination, pH, irradiation aux rayons γ et fermentation
I-7-Légumineuses sources d’allergénicité consommées dans l’alimentation humaine
I-8- Allergie à l’arachide
I-9- Allergènes de l’arachide
I-10- Identification des isoallergènes
II-Matériel et méthodes d’analyses
II-1- Matériel biologique
II-2- Méthodes d’analyses
II-2-1- Délipidation de la farine d’arachide et préparation de l’échantillon
II-2-2- Détermination du taux de protéines totales de la farine délipidée de l’arachide
II-2-3- Extraction des protéines hydrosolubles de la farine délipidée d’arachide
II-2-4- Détermination du taux de protéines hydrosolubles de la farine délipidée d’arachide
II-2-5- Détermination du taux de protéines non hydrosolubles de la farine délipidée d’arachide
II-2-6- Séparation des protéines hydrosolubles de la farine délipidée d’arachide crue par électrophorèse bidimensionnelle (2D) sur gel de polyacrylamide en sodium dodécylsulfate (SDS-PAGE)
II-2-7- Séparation des protéines hydrosolubles de la farine délipidée d’arachide crue par électrophorèse monodimensionnelle (1D) sur gel de polyacrylamide en sodium dodécylsulfate (SDS-PAGE)
II-2-8- Extraction et séparation des protéines hydrosolubles de l’arachide grillée à 140°C pendant 40 minutes par électrophorèse monodimensionnelle sur gel de polyacrylamide en sodium dodécylsulfate (SDS-PAGE)
II-2-9- Immunoempreintes des composés protéiques hydrosolubles de la farine délipidée d’arachide crue
II-2-10-Identification des protéines séparées par électrophorèse bi et monodimensionnelle sur gel de polyacrylamide en sodium dodécylsulfate et des composés protéiques immunoréactifs de la farine délipidée d’arachide
II-2-10-1- Digestion trypsique des protéines
II-2-10-2- Identification des protéines par chromatographie liquide couplée à la spectrométrie de masse (LC-MS/MS)
II-2-10-3- Recherche des protéines allergènes dans la base de données Uni-Prot
II-2-11- Purification de la fraction protéique hydrosoluble de la farine délipidée d’arachide crue
II-2-11-1- Chromatographie de filtration sur gel de Sephadex G-75
II-2-11-2-Détermination des masses moléculaires relatives des fractions collectées par chromatographie de filtration sur gel de Sephadex G-75
II-2-12- Fractionnement des protéines de la fraction hydrosoluble purifiée par chromatographie échangeuse d’anions sur gel de DEAE-Cellulose
III- Résultats et discussion
III-1- Analyse des taux de protéines de la farine délipidée d’arachide
III-2- Analyse protéomique pour déterminer les protéines de pHi acides à neutres de la fraction hydrosoluble da la farine délipidée d’arachide crue
III-3- Analyse des protéines hydrosolubles de la farine délipidée d’arachide crue séparées par électrophorèse monodimensionnelle sur gel de polyacrylamide en sodium dodécylsulfate (SDS-PAGE)
III-4- Effet du grillage sur la résistance ou la sensibilité des protéines hydrosolubles d’arachide
III-5- Détermination des protéines allergènes hydrosolubles de la farine délipidée d’arachide crue
III-6- Prédiction des épitopes de l’isoforme P41B et la conarachine reconnus par les IgE spécifiques
III-7-Purification des protéines hydrosolubles d’arachide crue par chromatographie de filtration sur gel de Sephadex G-75
III-8-Fractionnement des protéines d’albumines 2S purifiées par chromatographie sur résine échangeuse d’anions sur gel de DEAE-Cellulose
Conclusion