Mécanisme de croissance et dissolution de cristaux de KCl sous charge

Reproduction des expériences de Correns et Steinorn

L’altération des matériaux sous l’action de sels solubles (ci-après désigné par sel) est un phénomène connu depuis l’antiquité. Herodotes parlant de la Vallée du Nil disait « les sels exsudent du sol en telle quantité qu’ils affectent même les pyramides» (traduction de Selincourt, 1972). Cependant, ce n’est qu’au XIXème siècle que ce type d’altération devint un sujet d’études et d’investigations scientifiques. Elles vont se développer à partir du début du XXème siècle et aboutir à une série d’hypothèses et de modèles quant aux probables mécanismes mis en jeu.

Depuis quelques décennies, de nombreux travaux ont montré que la cristallisation des sels dans l’eau est un important facteur d’altération des matériaux poreux (pierres, mortiers, bétons etc). Elle est considérée comme la principale cause de dégradation des monuments et du mobilier en pierre (Evans, 1970, Winckler & Singer, 1972, Price, 1996). Cette altération n’est pas propre à la pierre dans l’architecture. En effet, les sels semblent aussi jouer un rôle dans le développement de phénomènes géomorphologiques tels que l’alvéolisation (Mustoe, 1982) et les tafonis (Bradley et al, 1978). Ils contribueraient à la production de débris de roches surtout dans les régions désertiques (Goudies, 1997 ) et les régions côtières (Mottershead, 1982). Le mécanisme par lequel la dégradation intervient fait encore débat (des synthèses bibliographiques ont été réalisées par Duttlinger & Knöfel, 1993, Charola, 2000, Doehne, 2002 et Price, 1996), même si on attribue la dégradation à la capacité de ces phases minérales à développer une pression de cristallisation. Cette pression pourrait atteindre plusieurs mégapascals (Winckler & Singer, 1972) et dépasser la résistance mécanique des pierres (Muttoni & Croset, 2004). Ce concept de pression de cristallisation est né d’études expérimentales réalisées entre la fin de XIXème et le milieu du XXème siècle qui sont développées ci-après. Ces notions se concilient difficilement avec les principes de la croissance cristalline tels qu’ils sont connus actuellement et que nous allons rappeler brièvement au préalable.

Propriétés et forme de croissance et d’équilibre d’un cristal 

Un cristal est une phase solide ordonnée construite à partir d’une maille élémentaire reproduite de façon identique à elle-même dans les trois directions de l’espace. En d’autres termes, les atomes constituant un cristal sont parfaitement localisés dans des sites cristallographiques. Le matériau est donc caractérisé par un ordre à la fois à courte distance (configuration reproductible aux premiers voisins) et à longue distance (translations périodiques du motif atomique) et par une anisotropie de certaines de ses propriétés. Cela signifie que dans un cristal, il existe au moins une propriété qui dépend de la direction dans laquelle elle est mesurée . Le motif atomique répété constitue l’unité de croissance ou un multiple entier de celle-ci. Dans tous les cas, l’unité de croissance est stœchiométrique et électriquement neutre.

Le cristal est limité par un ensemble de faces, par exemple, des faces de cube et d’octaèdre dans le système cubique. L’ensemble des faces qui se déduisent les unes des autres grâce aux éléments de symétrie du cristal constitue une forme. L’empilement des unités de croissance à la surface des cristaux permet leur croissance. En effet, la croissance cristalline correspond à l’augmentation du volume cristallin par apport de matière à sa surface. Elle s’effectue à partir des faces par leur avancement parallèlement à elles-mêmes. Il en résulte un polyèdre de croissance qui constitue le faciès cristallin.

Mécanismes de croissance des faces d’un cristal 

Lors de la croissance des faces d’un cristal, il peut y avoir des variations par rapport à la morphologie d’équilibre du cristal. Il y a possibilité de relâchement des distances centrales hi des faces sous l’influence de différents facteurs internes (défauts cristallins) et/ou externes (flux nutritifs) au cristal, soit de tout facteur modifiant la symétrie de cristallisation par rapport à la symétrie cristalline. La structure interne d’un cristal va déterminer une large part de la vitesse de croissance des faces car elle impose à chaque face une structure superficielle précise. Comme les faces ont des orientations différentes par rapport au réseau cristallin il est évident que non seulement les structures superficielles, mais aussi les liaisons qu’elles contiennent, vont être différentes.

Classification structurale des faces cristallines

La théorie des PBC («Periodic Bond Chains»), permet de retrouver les structures superficielles des faces à partir de la recherche des chaînes de liaisons fortes dans les cristaux (Hartman, 1963 et Hartman, 1973). Elle permet aussi de classer les faces cristallines en trois grands groupes :

Les faces F (flat), qui contiennent au moins deux chaînes de liaisons fortes non parallèles. Il y a nécessité de formation de couches cristallines nouvelles pour la croissance normale à ces faces. Les mécanismes de croissance possibles appartiennent aux mécanismes dits couche par couche (croissance par germination bidimensionnelle par îlots ou croissance spirale). Ces faces planes (pauvres en sites de croissance) ont les vitesses de croissance les plus lentes. Elles sont ainsi souvent les seules à délimiter le faciès et donc à conditionner la croissance cristalline.

Les faces S (stepped) elles contiennent une chaîne de liaisons fortes. Elles sont appelées faces à marches. Elles ont davantage de sites de croissance que les faces F et croissent donc plus rapidement, rangée par rangée.

Les faces K (Kinked) sont rugueuses, et très riches en sites de croissance. Elles ont des vitesses de croissance très grandes et croissent de manière anarchique.

Ainsi, RK > RS >>RF est l’ordre des vitesses de croissance décroissantes des faces K, S, F, liées elles- mêmes à l’abondance décroissante des crans d’intégration des unités de croissance sur chaque type de face.

Les faces F étant les plus lentes de toutes, ce sont elles qui apparaissent normalement sur la forme de croissance du cristal. Leur mécanisme de croissance est donc important à détailler.

Cinétiques de croissance des faces 

La croissance couche par couche se fait par addition et extension de couches successives, grâce aux unités de croissance qui viennent « nourrir » les gradins. Les unités de croissance, lorsqu’elles arrivent sur la face du cristal, ne sont pas directement intégrées mais peuvent diffuser en surface Il y aurait donc une couche permettant l’intégration des unités de croissance à l’interface cristal/solution, et un équilibre est établi entre cette couche et la solution environnementale (bulk). Cette couche d’adsorption d’une épaisseur maximale de 10 nm (Mullin, 1972) joue donc un rôle important dans la croissance des faces d’un cristal.

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Table des matières

Introduction générale
I.Le concept de force linéaire de cristallisation
I.1 Principes de la croissance cristalline
I.1.1 La sursaturation, force motrice de la cristallisation en solution
I.1.2 Propriétés et forme de croissance et d’équilibre d’un cristal
I.1.3 Mécanismes de croissance des faces d’un cristal
I.1.4 Les paramètres influençant la croissance cristalline
I.2 Mise en évidence expérimentale de la force de cristallisation : les expériences anciennes
I.2.1 Croissance d’un cristal non contraint par une charge : Lavalle (1853) et Taber
I.2.2 Croissance d’un cristal contraint par une charge
I.2.3 Les expériences contradictoires : Absence de toute force de cristallisation lors de la croissance d’un cristal.
I.2.4 Synthèses des expériences
I-3 Les modèles et les développements théoriques récents
I-4 Conclusion : Force de cristallisation, pression de cristallisation
II.Matériel et Méthodologie
II.1 Matériels
II.1.1 Choix du cristal de KCl
II.1.2 Propriétés du chlorure de potassium
II.1.3 Les cristaux de KCl utilisés
II.1.4 Etat de surface des cristaux utilisés
II.1.5 La photoélasticimétrie
II.2 Caractérisation des cristaux : mesures physiques globales
II.2.1 Variation de dimension et mesure
II.2.2 Variation de poids
II.3 Caractérisation des cristaux : Observation des états de surface
II.3.1 Observation qualitative des états de surface par microscopie
II.3.2 Etude quantitative de la variation des états de surface : la microscopie à force atomique
II.4 Mode opératoire et mise en place du dispositif expérimental de croissance du cristal contraint
II.4.1 Obtention de la sursaturation de la solution par évaporation
II.4.2 Expériences de croissance de cristaux en solution
III Reproduction des expériences de Correns avec du Chlorure de potassium : Croissance en solution d’un cristal de KCl contraint
III.1 Expérience de croissance en solution des cristaux grossièrement clivés sous charge .
III.1.1 Variation du poids des cristaux
III.1.2……. Variation de la dimension horizontale des cristaux selon [100] et [010]
III.1.3 Comportement du cristal dans la direction verticale [001]
III.1.4 Variation de hauteur d’un cristal sous charge : généralisation à l’ensemble des cristaux grossièrement clivés.
III.2 Rôle de l’état de surface
III.2.1 Variation du poids des cristaux
II.2.2 Comportement du cristal dans les directions [100] et [010] non contraintes
III.2.3 Comportement des cristaux dans la direction [001]
III.3 Discussion des expériences de croissance de cristaux sous charges
III.3.1 Comportement des faces latérales des cristaux sous charge
III.3.2 Comportement du cristal dans la direction de la charge
III.3.3 Résultats expérimentaux et équation de Correns
IV Effet de la sursaturation de la solution
IV.1 Gain de poids des cristaux sous différentes conditions de sursaturation
IV.2 Comportement des cristaux selon la direction horizontale [100]
IV.3 Comportement des cristaux dans la direction
IV.3.1Variation de la hauteur des cristaux
IV.3.2 Etat de surface de la face sommitale (001)
IV.3.3 Variation de l’état de surface de la face basale (001)
IV.3.4 Variation de hauteur d’un cristal sous charge : généralisation à l’ensemble des cristaux
IV.4 Bilan de l’influence de la variation de sursaturation de la solution sur le comportement d’un cristal sous charge
IV.4.1 Influence de la vitesse d’évaporation sur la sursaturation relative finale
IV.4.2 Influence de la sursaturation sur le gain de poids des cristaux.
IV.4.3 Comportement des faces latérales des cristaux en fonction de la sursaturation des solutions
V.4.4 Comportement des cristaux dans la direction [001] de la charge en fonction de la sursaturation
V. Croissance et dissolution d’un cristal contraint verticalement à 20°C et 80% d’humidité relative : Effet de la charge imposée et des vibrations de l’environnement
V.1 Expérience de croissance de cristaux non contraints mécaniquement
V.1.1 Variation de poids des cristaux
V.1.2 Variation des dimensions du cristal suivant les trois directions,
V.2 Expérience de croissance de cristaux soumis à de faibles charges
V.2.1 Force imposée sur la face basale de chaque cristal
V.2.2 Variation du poids des cristaux
V.2.3 Variation des dimensions des cristaux.
V 2.4 Etat de surface de la face sommitale (001) et basale (001)
V.2.5 Influence de la force imposée sur la croissance des cristaux.
V.3 Un cristal est-il capable de se mettre lui-même sous contrainte ?
V.3.1 Un cristal est-il capable de se mettre sous contrainte par l’approche d’une de ces faces ?
V.3.2 Un cristal est-il capable de se mettre sous contrainte par l’approche d’une de ces arêtes?
V.4 Situation de non équilibre et Vibrations
V.4.1 Situation de non équilibre : Variation de la hauteur du cristal
V.4.2 Effet de la présence de vibrations sur le comportement du cristal dans la direction de la charge
V.5 Discussion
Conclusion générale

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