MECANIQUE OBSTETRICALE DANS LA PRESENTATION DU SIEGE
Accouchement eutocique
L’accouchement du siège est celui d’un mobile évoluant comme une tour, cette unicité est capitale, car il est important que le mobile fœtal constitue « un bloc homogène » avec solidarisation de la tête en flexion, du tronc et des membres, permettant ainsi de parcourir la filière pelvi-génitale avec ses plus petits diamètres. L’accouchement se déroule comme un processus continu, sans arrêt ni retour en arrière. Ses différentes étapes sont intriquées, se commandent les unes les autres, et se font presque simultanément. Chacune des étapes comprend un engagement, une descente et rotation et un dégagement.
Accouchement du siège
❖ Engagement
C’est le diamètre bitrochantérien qui s’oriente suivant un diamètre oblique du bassin. Il est suffisamment petit pour n’avoir pas besoin de s’amoindrir. Le siège franchit de façon synclite le plan du détroit supérieur (figure 6). L’engagement est toujours facile et précoce dans le siège décomplété, il est plus laborieux dans le siège complet où il est précédé d’un tassement sacro tibial.
❖ Descente et rotation
La rotation du siège, qu’elle s’effectue en spirale en même temps que la descente ou seulement après elle sur le périnée, n’est jamais que d’un huitième de cercle. En effet, la rotation amène le diamètre bitrochantérien dans le diamètre antéropostérieur du détroit inférieur (figure 7). S’il s’agit d’une variété sacroiliaque antérieure, la rotation se fait en arrière; s’il s’agit d’une variété sacro-iliaque postérieure, la rotation se fait en avant. De toute façon, le sacrum se trouve sur le diamètre transverse du bassin.
❖ Dégagement
La hanche antérieure se dégage la première et se cale sous la symphyse. Puis la hanche postérieure se dégage à son tour en parcourant la concavité sacro coccygienne, puis toute la longueur du périnée postérieur, jusqu’à ce qu’elle ait franchi la commissure vulvaire. Ce mouvement est facile dans le siège complet grâce à l’incurvation latérale du tronc du fœtus. Il est particulièrement spectaculaire dans le siège décomplété, où il est plus difficile. Les membres inférieurs relevés «en attelles» le long du tronc en empêchent l’incurvation latérale. Le siège décomplété se dégage, en pointant vers le haut comme un monolithe (figure 8). Parfois, le siège continue sa descente selon l’axe ombilico-coccygien, bute contre le périnée postérieur et n’arrive à se dégager qu’au prix d’une épisiotomie .
Accouchement des épaules
L’accouchement obéit à la même mécanique que celle de l’accouchement du sommet.
❖ Engagement
Le diamètre d’engagement est différent selon les variétés. Dans les variétés antérieures, il est le même que celui utilisé par le diamètre bitrochantérien. Ceci s’explique par le mouvement de restitution que fait le bitrochantérien hors de la vulve après le dégagement des deux membres inférieurs (figure 9). Dans les variétés postérieures, l’accouchement des épaules est précédé d’une rotation d’arrière en avant qui place le diamètre biacromial dans le diamètre oblique perpendiculaire .
Descente et rotation
Elles sont simultanées ou successives. La rotation, pour les classiques, amène le diamètre biacromial dans le diamètre longitudinal du détroit inférieur. En fait, les épaules s’orientent souvent sur son diamètre transverse .
❖ Dégagement
Les épaules se dégagent en transverse, comme l’a montré l’école de Nancy avec Vermelin et Ribon [98]. Successivement, comme par une sorte d’asynclitisme, les bras tombent l’un après l’autre hors de la vulve pendant que le dos est orienté en avant.
Accouchement de la tête dernière
❖ Engagement
Il est contemporain à la descente et au dégagement des épaules. La tête s’oriente sur un diamètre oblique du bassin, perpendiculaire à celui que vient d’emprunter le diamètre biacromial, occiput en avant ; elle s’engage fléchie, abordant le détroit supérieur suivant le diamètre sous occipito- frontal (11cm).
❖ Descente et rotation
La tête descend en tournant d’un huitième (1/8) de cercle ; l’occiput doit tourner en avant pour arriver médian au détroit inférieur (figure 10).
❖ Dégagement
Le sous-occiput prend point d’appui sous la symphyse. La tête se fléchit progressivement ; la face, le front, le crâne se dégagent successivement de la commissure postérieure.
Accouchement dystocique
Au cours de l’évolution du travail et de l’accouchement en présentation du siège, différents types de dystocies peuvent survenir.
Dystocies communes
➤ Dystocies mécaniques [88]
● Défaut d’engagement
Dans le siège complet, il arrive que l’engagement ne se produise pas, l’amoindrissement des diamètres étant insuffisant. Ce défaut d’engagement peut aussi témoigner d’une disproportion foetopelvienne par macrosomie fœtale ou par rétrécissement du bassin.
● Défaut de progression
La progression peut être ralentie ou interrompue dans l’excavation surtout en cas de siège décomplété à cause des membres inférieurs relevés en attelle le long du tronc empêchant l’incurvation latérale.
➤ Dystocie dynamique [88]
C’est la plus fréquente et la plus facile à résoudre pour un praticien expérimenté, car sa persistance est une indication impérative de voie haute. Cette dystocie dynamique peut être d’origine utérine (contractions utérines inefficientes, de mauvaise qualité) et/ou d’origine cervicale (anomalies de la dilatation : stagnation ou lenteur). Ces deux causes sont interdépendantes. Ceci est corroboré par la thèse de Misson: « la qualité de la contraction utérine qui assure le tassement, la cohésion du mobile fœtal, le pousse dans le segment inférieur, efface et dilate le col » [88].
➤ Procidence du cordon
Elle est beaucoup plus fréquente dans les sièges complets, et chez la primipare en cas d’accouchement prématuré. Elle serait d’un meilleur pronostic que dans les présentations céphaliques. Cette notion classique de moindre nocivité, du fait de la rareté de la compression funiculaire est actuellement contestée par deux remarques
– le siège décomplété mode de fesse est aussi dangereux que le sommet ;
– et même dans le siège complet la bénignité n’est que relative puisque le pronostic est inversement proportionnel au temps écoulé entre sa survenue et la fin du travail. Quoiqu’il en soit, la procidence du cordon exige une solution rapide et le fait qu’elle soit un peu mieux tolérée permet au praticien d’apporter un traitement adéquat [12].
Dystocies propres
Ce sont essentiellement des dystocies d’expulsion, pouvant être le résultat d’une dystocie dynamique ou d’une erreur thérapeutique. Les principales sont les suivantes:
✦ Relèvement des bras [93, 107]
Il est souvent dû à une erreur technique telle qu’une traction intempestive sur les membres inférieurs, ou expression abdominale ou à des efforts expulsifs prématurés à travers un col insuffisamment dilaté (figure 11). Cette dystocie peut survenir spontanément et de nombreux auteurs proposent de la prévenir par des manœuvres dites « préventives du relèvement des bras » [93,107].
✦ Rétention de tête dernière
Elle crée une situation dramatique survenant après l’expulsion du siège et du tronc. La rétention peut se situer à plusieurs niveaux :
au-dessus du détroit supérieur : signant une disproportion foetopelvienne, une rotation en arrière du dos avec un accrochage du menton au bord supérieur de la symphyse, ou la déflexion de la tête ;
au niveau du détroit moyen ou du détroit inférieur. Au-dessus du col elle est le résultat de l’expulsion du corps fœtal à travers un col insuffisamment dilaté, d’autant plus fréquente que la tête est anormalement volumineuse par rapport au corps ; la rétention dans un vagin atrésique ou au niveau d’un périnée résistant ou trop court est possible (figure 12). Elle est la plus facile à vaincre par une large épisiotomie et la moins dramatique de ces situations. Les conséquences traumatiques fœtales sont évidemment bien différentes selon le niveau et la cause de la rétention. Toute disproportion céphalo-pelvienne peut entraîner des lésions du crâne et la lenteur de l’extraction conditionnera le degré d’anoxie.
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Table des matières
INTRODUCTION
I. DEFINITION
II. HISTORIQUE
III. PARTICULARITES DE LA PRESENTATION DU SIEGE
III.1. Fréquence
III.2. Modes de siège
III.2.1. Présentation du siège complet
III.2.2. Présentation du siège décomplété
III.3. Repère
III.4. Diamètres
III.5. Étiologies
III.5.1. Causes maternelles
III.5.2. Causes ovulaires
III.5.3. Causes fœtales
IV. DIAGNOSTIC DE LA PRESENTATION DU SIEGE
IV.1. Examen
IV.3. Examen paraclinique
IV.2.1. Échographie obstétricale
IV.2.2. Radiographie du contenu utérin
V. MECANIQUE OBSTETRICALE DANS LA PRESENTATION DU SIEGE
V.1. Accouchement eutocique
V.1.1. Accouchement du siège
V.1.2. Accouchement des épaules
V.1.3. Accouchement de la tête dernière
V.2. Accouchement dystocique
V.2.1. Dystocies communes
V.2.2. Dystocies propres
VI. Pronostic maternel
VI.1.1 Morbidité
VI.1.2 Mortalité
VI.2. Pronostic Fœtal
VI.2.1 Mortalité
VI.2.2 Morbidité
VI.2.2.1. Accidents immédiats
VI.2.2.2. Devenir à long terme des enfants
VII. CONDUITE A TENIR EN CAS DE PRESENTATION DU SIEGE
VII.1. Pendant la grossesse
VII.1.1. Bilan pronostique
VII.I.2. Recommandations internationales sur la conduite à tenir devant une présentation de siège à 36 SA
VII.1.3. Critères d’exclusion de la voie basse
VII.1.4. La version par manœuvre externe (VME)
VII.1.4.1. But
VII.1.4.2. Indications
VII.1.4.3. Technique
VII.1.4.4. Facteurs prédictifs du succès de la VME
VII.1.5. Facteurs prédictifs de césarienne
VII.2. Conduite à tenir pendant l’accouchement
VII.2.1. Conduite pendant la phase de dilatation
VII.2 2. Conduite à tenir au cours de la phase d’expulsive
VII.2.2.1. Attitude abstentionniste
VII.2.2.2. Attitude interventionniste ou aide à l’expulsion
VII.2.3. Conduite pendant la phase de délivrance
CONCLUSION