Matière granulaire et lien possible avec les systèmes vitreux

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Le phénomène de vieillissement

Un système à l’équilibre est invariant par translation dans le temps. Ainsi, par exemple, une fonction de corrélation quelconque sera la même calculée à partir de t = 0 ou à partir d’un autre instant t = tw . Dans le cas de la partie self du facteur de structure, cela donne : Fs(q, t) = 1 Σeiq.[rj (t)−rj (0)] = 1 Σeiq.[rj (tw +t)−rj (tw )] Fs(q, tw , t) (1.4)
Mais dans le cas d’un système hors équilibre, cela n’est plus vrai. Sur la figure 1.7, on peut voir des courbes de Fs(q, tw, t) pour différents tw, dans le cas d’une simulation par dynamique moléculaire d’un liquide de Lennard-Jones proche de la transition vitreuse. tw est le temps écoulé depuis la préparation du système, c’est à dire ici l’entrée dans la phase basse tempéra-ture. On l’appelle donc « âge » du système. On constate clairement une dépendance en tw : le système est de plus en plus lent à relaxer. C’est ce qu’on appelle le vieillissement.
Matière granulaire et lien possible avec les systèmes vitreux
Les matériaux granulaires secs et non cohésifs
Un matériau granulaire est a priori extrêmement simple : il s’agit d’un système constitué d’un grand nombre de particules macroscopiques. S’il est non cohésif, les interactions entre particules sont uniquement des interactions de contact, répulsives. S’il est sec, il n’y a pas de fluide interstitiel (si le fluide interstitiel est de l’air, il peut être négligé dans la majorité des cas et le matériau est donc « sec »).

Contexte et Motivation

« Mais alors, s’exclameront mes amis quantroniciens, il ne doit rien y avoir de bien com-pliqué à expliquer là-dedans ! ». Eh bien, que néni : la matière granulaire a de nombreuses propriétés étonnantes, comme sa capacité à se comporter comme un solide (e.g. un tas de sable) ou comme un liquide (e.g. une avalanche à la surface d’un tas de sable). Aujourd’hui, une grande part de ces propriétés échappe encore à la sagacité du physicien.
Deux aspects fondamentaux contribuent à cette particularité de la matière en grains : elle est athermique et les interactions entre particules sont dissipatives (par friction dans le cas dense, collisions inélastiques dans le cas dilué). L’aspect athermique peut être appréhendé de la manière suivante : considérons le travail à fournir pour soulever un grain de taille d et de masse volumique ρ sur une distance de l’ordre de sa taille dans le champ de gravité terrestre g. Cela donne W = mgd ρgd4. Pour du sable, par exemple, on a W > 1012kB T à température ambiante. On comprend donc que le couplage d’un matériau granulaire à l’agi-tation thermique extérieur est complètement négligeable. Or, le rôle de la température dans un système thermique est de lui permettre d’explorer son espace des configurations. Un ma-tériau granulaire peut donc, en l’absence de perturbation extérieure, être piégé indéfiniment dans un état métastable unique, ce qui rend difficile son étude par les méthodes de la phy-sique statistique. Pour qu’il se passe des choses, il faut donc forcer le système, en général mécaniquement (vibration, cisaillement, etc…). En ajoutant à cela le caractère dissipatif des interactions, on comprend qu’il faut injecter de l’énergie en permanence par forçage, énergie qui est continuellement dissipée : ainsi, un matériau granulaire qui n’est pas à l’arrêt est donc fondamentalement un système hors équilibre.

La transition de Jamming

L’effet de jamming (ou blocage) est assez courant dans la vie quotidienne : par exemple, il arrive que des grains se bloquent dans une conduite ou un silo (figure 1.10). En fait la transition de jamming apparaît lorsqu’un matériau granulaire soumis à certaines contraintes (par exemple celles imposées par les bords de la conduite) arrête de couler. Si on modifie l’état de contrainte, le système peut se remettre à couler et donc faire la transition en sens inverse.
Le paramètre important est donc la contrainte que l’on applique pour essayer de faire couler le matériau. Le phénomène de jamming se traduit par l’existence d’une contrainte seuil : en dessous de ce seuil, le système est bloqué, au dessus, il coule.
Manifestations « macroscopiques » d’un comportement vi-treux dans les granulaires
Cette partie fait écho à la partie 1.1.1 à laquelle elle doit être comparée : elle recense les ma-nifestations déjà connues d’un comportement de type vitreux dans les matériaux granulaires, et répond partiellement aux questions soulevées par Liu et Nagel.
Relaxation lente
Dans les matériaux granulaires, un processus lent bien connu est le phénomène de compac-tion. En 1994, lorsque le groupe de Chicago entame une activité expérimentale pour l’étude de la compaction sous tapping dans un tube vertical à grand rapport d’aspect hauteur/diamètre, ils sont persuadés que cette étude sera simple et rapide. Pourtant, leur empilement continuait à évoluer vers des états de compaction de plus en plus grande, même après 10 000 taps ([17] et figure 1.12). Finalement, 10 ans plus tard, il s’agit encore d’un problème largement étudié.
Dynamique vers l’état bloqué
Une des interrogations cruciales soulevée par la proposition de Liu et Nagel, est de savoir si la dynamique de la vaste classe de systèmes qu’ils considèrent à l’approche de l’état bloqué est similaire. Autrement dit, l’apparente universalité thermodynamique que suppose le diagramme ?? se traduit-elle par des dynamiques similaires ? D’Anna et Grémaud ont apporté un élément de réponse en étudiant la dynamique d’un système granulaire à l’approche de la transition de jamming. Pour cela, ils utilisent un empilement de billes vibré verticalement dans lequel ils immergent un cylindre suspendu à un fil de torsion (voir figure 1.18). Ils mesurent le bruit dans la position angulaire du cylindre, dû au mouvement des grains, grâce à la réflexion d’un faisceau laser sur un miroir fixé au fil.
Ils observent un bruit en 1/f 2, ce qui leur permet de dire que l’intensité du bruit à une fréquence donnée est proportionnelle au coefficient de diffusion8. Dans la figure 1.18, est donc représentée l’intensité du bruit à f = 1Hz, | θ(1) |2 en fonction de l’intensité de vibration Γ.
Dispositif expérimental
Dans ce chapitre, nous allons présenter les différents dispositifs expérimentaux qui ont été construits et utilisés lors de cette thèse.
Ils sont au nombre de trois : prototype 1, « manip de coin de table » destinée à dimensionner le futur dispositif et à faire quelques observations qualitatives ; prototype 2 qui a permis d’ob-tenir les premiers résultats pendant le développement du dispositif définitif et dans lequel on ne suivait que certains grains marqués ; Granulotopia qui offre le plus de possibilités (suivi de tous les grains, taille supérieure, meilleur contrôle des conditions de l’expérience, plus solide, plus robuste).
Dans ce qui suit, nous allons expliquer le principe de cette expérience puis nous décri-rons le matériau utilisé. Ensuite, nous passerons en revue les trois dispositifs et enfin nous présenterons la méthode utilisée pour traiter les images obtenues.
Principe
On souhaite réaliser l’étude la plus précise possible de la dynamique des particules au sein d’un matériau granulaire dense au voisinage de la transition de jamming. Ainsi, nous voulons d’une part avoir accès à toute la trajectoire, ce qui suppose qu’il n’y ait pas de mouvement dans la direction de la prise de vue et d’autre part suivre toutes les particules qui ne doivent donc pas être cachées par d’autres. Ces conditions imposent toutes deux l’utilisation d’un empilement bidimensionnel. De plus, convaincus que l’effet de cage est le reflet de l’analo-gie profonde entre la matière granulaire et les systèmes vitreux et non un phénomène lié à la compaction, nous avons choisi de simplifier au maximum les conditions de l’expérience : le dispositif envisagé est donc horizontal (donc sans effet de gravité) et à volume constant (aucune compaction). Evidemment, les matériaux granulaires étant athermiques, pour qu’il y ait tout de même une dynamique, un forçage extérieur reste nécessaire et le principe du cisaillement cyclique a été conservé.
Ainsi, l’expérience décrite dans cette thèse consiste à cisailler à volume constant et de manière cyclique un système granulaire bidimensionnel horizontal. Le fait que le cisaillement soit uniquement imposé pour suppléer l’agitation thermique, c’est-à-dire faire en sorte que le système explore l’espace de ses configurations, amène deux remarques importantes : d’une part, le cisaillement doit être quasi-statique afin d’éviter tout effet d’inertie pouvant entraîner un mouvement global, étant donné le caractère global de l’excitation ; d’autre part, la trajec-toire qui va nous intéresser n’est pas la trajectoire réelle du grain au cours du temps mais la trajectoire composée de la suite de ses positions entre chaque cycle de cisaillement quand le système est revenu à sa situation initiale du point de vue du déplacement global imposé de l’extérieur. Ainsi, le temps sera discret et compté en nombre de cycle 1.
Nous allons à présent, avant de décrire les différents dispositifs, présenter la vedette de cette thèse : le matériau utilisé.

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Table des matières

Introduction
1 Contexte et Motivation 
1.1 Quelques éléments de la phénoménologie des verres
1.1.1 Une lenteur spectaculaire
1.1.2 Relaxation lente
1.1.3 Le phénomène de vieillissement
1.1.4 L’effet mémoire
1.1.5 Température effective
1.2 Matière granulaire et lien possible avec les systèmes vitreux
1.2.1 Les matériaux granulaires secs et non cohésifs
1.2.2 La transition de Jamming
1.2.3 « Jamming is not just cool anymore »
1.3 Manifestations « macroscopiques » d’un comportement vitreux dans les granulaires
1.3.1 Relaxation lente
1.3.2 Vieillissement
1.3.3 Mémoire
1.3.4 Dynamique vers l’état bloqué
1.3.5 Température effective
1.4 Vers le comportement microscopique
2 Dispositif expérimental 
2.1 Principe
2.2 Matériau
2.3 Prototype 1
2.4 Prototype 2
2.4.1 Cellule de cisaillement
2.4.2 Entraînement
2.4.3 Prises de vue
2.5 Granulotopia
2.5.1 Cellule de cisaillement
2.5.2 Entraînement
2.5.3 Prises de vue
2.5.4 Gestion informatique
2.5.5 Capteurs de force
2.6 Suivi des particules
2.6.1 Méthode de repérage
2.6.2 Méthode de suivi
2.7 Conditions expérimentales
3 Propriétés de diffusion 
3.1 Observation directe des trajectoires
3.2 Sous-diffusion
3.2.1 Statistique des déplacements
3.2.2 Courbe de diffusion
3.2.3 Interprétation des observations en terme d’effet de cage
3.3 Distributions de probabilité conditionnelle
3.3.1 Présentation des quantités étudiées
3.3.2 Présentation générale des distributions
3.3.3 Etude des valeurs moyennes
3.3.4 Etude des largeurs des distributions
3.4 Comparaison avec d’autres systèmes
3.4.1 Observations dans les colloïdes au voisinage de la transition vitreuse
3.4.2 Observations dans les simulations numériques
3.5 Conclusion
3.5.1 Sur l’effet de cage
3.5.2 Sur la comparaison avec d’autres systèmes vitreux
4 Hétérogénéités dynamiques 
4.1 Relaxation non exponentielle
4.2 Mise en évidence d’une dynamique hétérogène
4.2.1 Observation des trajectoires
4.2.2 Détermination du type de relaxation
4.3 Caractérisation spatio-temporelle
4.3.1 Temps de vie des hétérogénéités
4.3.2 Distribution des temps de relaxation et coopération
4.3.3 Fonctions de corrélation à 4 points et longueur de corrélation dynamique
4.4 Conclusion
5 Structure 
5.1 Ordre et désordre
5.1.1 Facteur de structure
5.1.2 Ordre translationnel/orientationnel
5.2 Défauts
5.2.1 Définitions
5.2.2 Structure spatiale des défauts
5.2.3 Lien avec l’ordre orientationnel
5.3 Dynamique des défauts
5.3.1 Création, annihilation et déplacement
5.3.2 Sites visités
5.4 Lien avec les hétérogénéités dynamiques
5.4.1 Première approche
5.4.2 Effet moyen
5.4.3 Quelques pistes explorées
5.5 Conclusion
6 Perspectives 
6.1 Mesurer une température effective
6.2 Propriétés et échelles de longueur en fonction de l’excitation
6.3 Forces et hétérogénéités
6.4 Evolution des propriétés au cours du temps : vieillissement ?
6.5 Etude sous compaction
6.6 Conclusion
Conclusion 
Bibliographie 

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