Les hydrocarbures Aromatiques Polycycliques (HAP)
Propriétés physico–chimiques des HAP
Les Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques (HAP) sont des composés organiques constitués d’atomes d’hydrogène et de carbone formant deux ou plus de noyaux aromatiques condensés. Les molécules sont planes, rigides, non polaires. Les noyaux aromatiques rendent les HAP très hydrophobes. Leurs propriétés physiques varient selon leur masse et leur structure. Celles-ci dépendent en effet du nombre d’atomes de carbone centraux et de la topologie des systèmes (enchaînement des atomes). Les HAP angulaires (fluoranthène) sont ainsi plus stables que ceux présentant un arrangement linéaire (anthracène). D’une façon générale, lorsque le poids moléculaire des HAP augmente, leur solubilité dans l’eau et leur volatilité diminuent. Inversement, la solubilité dans les corps gras ainsi que les points de fusion et d’ébullition augmentent avec le poids des molécules (Palayer, 1997).
Les caractéristiques physico chimiques sont liées au coefficient octanol-eau (Kow), au coefficient de partage carbone organique/eau (Koc) et à la masse molaire (M) rassemblés dans le tableau ci-dessous. Le coefficient Kow indique l’hydrophobicité d’une substance, et estime la migration des HAP vers des lipides. Tandis que le coefficient Koc indique sa préférence pour la matière organique. Plus ces coefficients de partage sont élevés, plus la molécule aura tendance à s’adsorber sur des matrices solides (Le bihanic 2014). La solubilité donne une idée de la capacité d’une molécule organique à se dissoudre dans l’eau. On regroupe les HAP suivant leur poids moléculaire (ATSDR 1995) :
– les HAP légers avec une masse molaire comprise entre 151 et 178 g.mol-1 comme le naphtalène, l’acénaphtylène, l’acénaphtène, le fluorène et le phénanthrène ;
– les HAP mediums avec une masse molaire d’environ 202 g.mol-1 comme par exemple le fluoranthène et le pyrène;
– et les HAP lourds avec une masse moléculaire au-delà de 228 g.mol-1 comme par exemple le benzo[a]anthracène, le benzofluoranthène, le benzo[e]pyrène, le benzo[a]pyrène et le benzo[ghi]pérylène.
Sources
On distingue trois origines différentes de HAP : pyrolytiques, pétrogéniques, et diagénétiques. Les HAP pyrolytiques sont à majorité d’origine anthropique. Ils sont issus de l’industrie chimique, de la sidérurgie, des moteurs à combustion incomplète à haute température (1500- 2000°C) de matière organique comme les pétroles, la biomasse fossile ou les incinérateurs de déchets urbains et également des incendies (Hansen et al., 2003). Ces mélanges de HAP présentent une majorité de molécules de hauts poids moléculaires. Les HAP substitués sont généralement retrouvés en faibles quantités dans les mélanges d’origine pyrolytique. Les HAP pétrogéniques sont issus de processus de diagénèse. Ils sont formés à basse température (150 °C), sur des longues périodes de temps. Ils résultent d’une exposition de la matière organique à des conditions adéquates de température et de pression (Hansen et al., 2003). Bien que les HAP pyrolytiques et pétrogéniques représentent les catégories majeures de HAP dans l’environnement, des HAP diagénétiques, aussi appelés biogéniques, peuvent être formés naturellement par les organismes vivants. Le rétène, et des dérivés du phénanthrène et du chrysène sont des exemples de HAP produits par certaines plantes (Hansen et al., 2003).
Contamination
Le transfert des HAP vers les zones côtières se fait par l’intermédiaire du compartiment atmosphérique et des eaux de surface. Une grande majorité des HAP se retrouvent dans les milieux aquatiques suite à des fuites accidentelles d’hydrocarbures, à des rejets d’effluents industriels et domestiques, à des ruissellements, aux émissions des véhicules et aux incendies de forêts. Les propriétés sédimentologiques affectent également l’accumulation de HAP (Baumard et al. 1999; Maioli et al. 2010).
Le bleu illustre la proportion de HAP issus de la combustion fossile, le rose de la déforestation et des feux de forêts, le jaune du transport, le vert de l’agriculture, et le blanc de l’industrie. En raison de leur forte capacité à adsorber et à stocker les contaminants, les sédiments sont un réservoir majeur pour les polluants tels que certains HAP. Les sédiments représentent de ce fait une source de contamination secondaire pour les écosystèmes aquatiques (Harris et al. 1996). Les HAP s’accumulent sur les particules solides et sont retrouvés en grande quantité dans les lacs, les rivières, les estuaires et les eaux côtières. Ils sont piégés dans la structure complexe et flexible de la matière organique du sédiment, ce qui réduit leur potentiel de désorption (Depree, 2008). L’affinité des HAP pour la matière organique varie suivant leur poids moléculaire. Les HAP de hauts poids moléculaire (HMW) vont être préférentiellement adsorbés aux particules contrairement aux HAP légers, comme le naphtalène, présents en majorité dans la colonne d’eau (Cailleaud et al. 2007). Une fois fixés aux particules en suspension, les HAP peuvent être transportés sur de longues distances et s’accumuler dans les sédiment.
Toxicité/Ecotoxicité
L’aspect génotoxique (mutagène) et cancérigène des HAP est au premier plan de leurs propriétés toxiques. Les effets toxiques des HAP sur le système de reproduction des organismes marins ont été démontrés en laboratoire et en milieu naturel, en particulier sur les poissons benthiques (poissons du bord de mer). Le benzo[a]pyrène, substance qui se trouve dans un bon nombre de mélanges de HAP en proportion relativement constante (environ 10%), est un cancérogène avéré (IARC, 2010). En raison de leur caractère lipophile, les HAP s’accumulent dans les organismes vivants, préférentiellement dans les tissus lipidiques. La plupart des organismes ont la capacité de métaboliser les HAP par action de l’enzyme cytochrome P450 (Varanasi, 1989). Lorsqu’un organisme est exposé à un contaminant, des réactions enzymatiques s’opèrent dans le but d’essayer de l’éliminer. Le mécanisme de biotransformation a pour but de transformer les HAP parents en métabolites plus polaires favorisant leur excrétion par la bile ou l’urine. Le processus de biotransformation augmente la solubilité de la substance en transformant le HAP initialement hydrophobe en métabolite plus polaire donc plus hydrosoluble. Le métabolite formé est ainsi stocké dans la bile jusqu’à son excrétion (Van der Oost et al., 2003). Les HAP sont reconnus comme ayant un impact toxique pour les organismes aquatiques. C’est la raison pour laquelle plusieurs institutions ont développé des critères de qualité des sédiments pour les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) (Persaud et al., 1993; Swartz, 1999 ; USEPA, 2003) .
Les HAP une fois dans les organismes aquatiques subissent deux phases biotransformations dans le but de les rendre hydrosolubles les molécules lipophiles afin de favoriser leur élimination par l’organiser. Le métabolisme de la phase I: réactions de fonctionnalisation Le métabolisme hépatique par réaction de phase I est dû à des réactions de fonctionnalisation, consistant à modifier ou adjoindre des groupements fonctionnels par des réactions d’oxydation de réduction et d’hydrolyse. Le métabolisme de la phase II : réactions de conjugaison Les biotransformations par réaction de conjugaison permettent d’obtenir des métabolites hydrosolubles, donc éliminables par voie rénales. La molécule peut aboutir à la formation d’un intermédiaire qui peut être plus toxique que le composé parent. C’est le cas du benzo[a]pyrène dont la biotransformation intensément décrite dans la littérature, conduit à la formation de dérivés époxydes qui se lient à l’ADN (Schlenk et al., 2008). De la même manière, les HAP alkylés forment des métabolites oxygénés toxiques pour les poissons (Fallahtafti et al., 2012, Turcotte et al., 2011).
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Table des matières
Introduction
Chapitre 1 : Synthèse bibliographique
I.1 Les sédiments marins
I.1.1 Origine
I.1.2 Compositions
I.1.3 Granulométrie
I.2 Les hydrocarbures Aromatiques Polycycliques (HAP)
I.2.1 Propriétés physico–chimiques des HAP
I.2.2 Sources
I.2.3 Contamination
I.2.4 Toxicité/Ecotoxicité
I.2.5 Réglementation HAP
I.2.5.1 Directive cadre de l’eau de l’UE
I.2.5.2 Règlementation des HAP au Sénégal
I.2.5.3 Normes qualité sanitaire pour les HAP
I.2.6 Identification des sources de pollutions
I.2.7 Evaluation du risque écotoxicologique
Chapitre 2 : Matériels et méthodes
II.1 Matériels
II.1.1 Sites de l’étude
II.1.2 Matériel biologique
II.1.2.1 Position systématique
II.1.2.2 Biologie et écologie de la moule
II.1.3 Matériels d’échantillonnages
II.1.4 Matériels d’extractions
II.1.5 Matériels d’Analyse des Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques
II.2 Méthode
II.1 Méthode d’échantillonnage
II.1.1 Echantillonnage de l’eau
II.1.2 Echantillonnage du sédiment
II.1.3 Echantillonnage des moules
II.2 Méthodes de conservations des échantillons
II.3 Méthode d’analyse des échantillons
II.3.1 Analyse des paramètres physico-chimiques de l’eau
II.3.2 Analyse de la granulométrie des sédiments
II.3.3 Méthode d’extraction des HAP : la méthode QuEChERS
II.3.5 Analyse statistique
Chapitre 3 :Résultats et Discussion
III.1 Résultats
III.1.1 Les paramètres physico-chimiques
III.1.2 La granulométrie des sédiments
III.1.3 Détermination de la concentration en HAP
II.1.2.1 Concentration en HAP au niveau de la Baie de Hann
II.1.2.2 Concentration moyenne en HAP au niveau du littoral de Ngor
II.1.2.3 Analyse statistiques avec les composantes principales
II.1.2.4 Analyse avec ANOVA
III.2 Discussion
III.2.1 Origine de la contamination
III.2.2 Ecotoxicité des sédiments
III.2.3 Evaluation du risque écotoxicologique
II.3.1 Evaluation du risque écotoxicologique des sédiments
II.3.2 Evaluation du risque écotoxicologique des moules
III.2.4 Evaluation du risque toxicologique lié à la consommation des moules
Conclusion
Références
Annexes