Anatomie descriptive et topographique
Le cou se retrouve entre le rebord inférieur de la mandibule et les épaules. La mandibule est un os en forme de fer à cheval dont la jonction du corps et de la branche montante forme l’angle de la mandibule. De chaque côté du cou, nous retrouvons une artère carotide commune qui se divisera en carotide externe et en carotide interne. Le retour veineux de la tête et du cou est assuré par le réseau veineux de chaque côté formé par des veines jugulaires internes, externes et antérieures. Le cou possède un riche réseau lymphatique composé principalement de multiples ganglions responsables du drainage lymphatique de la tête et du cou. Antérieurement à la colonne cervicale se trouvent l’œsophage, le pharynx, le larynx, la glande thyroïde, les glandes parathyroïdes et la trachée [9]. Le système musculaire comprend les muscles vertébraux autour de la colonne cervicale, les scalènes, les trapèzes, les sterno-cléido-mastoïdiens, les muscles infra hyoïdiens (les Omo hyoïdiens, les sternohyoïdiens, les sternothyroïdiens et les thyrohyoïdiens), les muscles supra-hyoïdiens (le mylohyoïdien, les digastriques, le stylo hyoïdien et les géniohyoïdiens) et le platysma superficiellement (photo 1). De nombreuses structures nerveuses se retrouvent également dans le cou dont certaines possèdent une importance chirurgicale cruciale notamment les plexus cervical et branchial, les paires crâniennes VII (branches marginale et cervicale), IX, X, XI et XII.
Les types de tuméfactions cervicales
Intérêt Deux questions se posent lorsqu’une tuméfaction ou masse cervicale survient [1]:
-dans un contexte infectieux ou non
-au cours des ganglions lymphatiques
Rappel du diagnostic La région cervicale est subdivisée en deux parties [1,2]:
-la région postérieure qui comprend la colonne vertébrale et les muscles de la nuque
-la région antérieure qui comprend les vaisseaux, les nerfs, les viscères, les ganglions lymphatiques
Diagnostic positif Il est basé sur l’interrogatoire, les circonstances de survenue (brutale, progressive, douloureuse ou avec présence de fièvre), les caractères évolutifs (augmente de volume, régression spontanée ou sous traitement) et l’examen du cou associé à l’examen locorégional [2]. Certains signes peuvent être associés : la dyspnée, la dysphonie, la dysphagie, l’amaigrissement, l’asthénie ou l’anorexie [2].
Diagnostic différentiel Se fait avec des particularités anatomiques (piège anatomique) qui sont [2,3] :
-saillie de la grande corne de l’os hyoïde
-cartilage thyroïde saillant surtout chez la femme
-apophyse transverse de l’atlas hypertrophié
-saillie du tubercule de Chassaignac (C6)
-bulbe carotidien athéromateux
-ptose de la glande sous mandibulaire
Diagnostic étiologique L’étiologie des tuméfactions ou masses cervicales est basée sur deux types à savoir : les masses cervicales latérales et les masses cervicales médianes [2,3]
Les masses cervicales médianes :
-Les KTT : sont des malformations cervicales congénitales dues à un défaut de résorption du tractus reliant la base de la langue à l’isthme thyroïdien, ou à la pyramide de Lalouette [1]. C’est une pathologie fréquente en ORL pédiatrique. Elle représente 40% des malformations cervicales congénitales et est aussi la deuxième cause des tuméfactions cervicales chez l’enfant après les adénites [2,3]. Le diagnostic est surtout clinique mais peut avoir recours à l’échographie qui reste l’examen de référence [7]. Le traitement est basé sur la chirurgie selon la technique de SISTRUNK, seul garant d’un traitement efficace sans récidive [9].
-Les pathologies de la thyroïde : le goitre simple se définit comme une augmentation du volume de la glande thyroïde, non accompagné de signes d’hyperthyroïdie, de signes d’hypothyroïdie et de nature non histologiquement maligne [2]. La définition exhaustive du goϊtre bénin est histologique, il s’agit de tout goϊtre ne présentant aucun signe histologique de malignité [2]. Le Mali est et demeure dans la ceinture mondiale du goitre endémique, ou le goitre est un véritable problème de santé publique avec des zones qui ont une prévalence de plus de 50% de cas, telles que les zones de Koutiala, Ségou, Bandiagara, San, Bougouni [9,10]. Le souci de prophylaxie et du traitement du cancer thyroïdien conduit aujourd’hui certains à opérer tout nodule ou un nombre croissant de dystrophies nodulaires thyroïdiennes qui peuvent ou non évoluer vers la malignité après des années d’apparence de bénignité [2]. D’autres masses peuvent survenir à savoir : les kystes dermoïdes (reliquats embryonnaires ectodermiques), les grenouillettes (kystes salivaires mucoïdes du plancher buccal), les tumeurs sus sternales et les fistules mento-sternales [2,3].
Les masses cervicales latérales
-Les tumeurs parotidiennes : la pathologie tumorale des glandes salivaires demeure relativement rare représentant 3% à 4% de l’ensemble des tumeurs de la tête et du cou. Leur localisation parotidienne est prédominante [3]. Ces tumeurs sont caractérisées par une grande diversité histologique, mais ce sont les formes bénignes qui prédominent avec un chef de file l’adénome pléomorphe ou tumeur mixte [3]. Toutefois, seule une parotidectomie couplée à un examen anatomopathologique permet d’affirmer la nature histologique exacte de la lésion de la parotide [3]. Les masses sous maxillites (masse sous le bord inferieur de la mandibule), les masses cervicales jugulo carotidiennes (en général les adénopathies) et les lymphangiomes kystiques (dysembryoplasie bénigne portant sur le système lymphatique) peuvent entrainées une compression, une dyspnée, une dysphagie et une douleur au niveau cervico-brachial [3]. Dans la littérature les tumeurs très vascularisées appelées para gangliomes, localisées au niveau de la tête ou du cou, généralement bénignes, et dont l’évolution se fait lentement peuvent entrainées une compression et/ou une dyspnée [3,5]. Parmi les tumeurs vasculaires : les tumeurs bénignes, les hémangiomes de l’enfant sont les plus fréquents. Ce groupe est en cours de démembrement et on distingue l’hémangiome infantile, d’évolution phasique, qui est le plus commun, les hémangiomes congénitaux et l’hémangiome congénital non involutif
Historique
L’ancien dispensaire central de Bamako a été érigé en hôpital le 17 janvier 1959,il sera baptisé « Hôpital Gabriel Touré » en hommage au sacrifice d’un jeune étudiant en médecine originaire du Soudan français (actuel Mali) mort lors d’une épidémie de peste, maladie qu’il contracta au cours de son stage en 1934. L’Hôpital Gabriel Touré a évolué en Etablissement Public à caractère Administratif (EPA) en 1992, doté de la personnalité morale et de l’autonomie de gestion. L’hôpital Gabriel Touré était l’un des quatre (04) établissements publics (hôpitaux nationaux) à caractère administratif (EPA) institués, par la loi n°94- 009 AN-RM du 22 mars 1994 ; avant de devenir par la loi n°02-048 AN-RM du 12 juillet 2002, Centre Hospitalier Universitaire (CHU). L’hôpital a quatre (04) missions :
Assurer le diagnostic, le traitement des malades, des blessés et des femmes enceintes ;
Assurer la prise en charge des urgences et des cas référés ;
Participer à la formation initiale et continue des professionnels de la santé et des étudiants.
Conduire les travaux de recherche dans le domaine médical.
Aspects selon les données sociodémographiques
Pendant notre période d’étude, nous avons enregistré 51 hospitalisations dans le service. La prévalence hospitalière était de 1,9 % de l’ensemble des hospitalisations ORL. Ce chiffre parait légèrement supérieur à celui de Schlumberger M et al qui ont trouvé 1,2 % de prévalence de masses cervicales dans leur série de 53 patients dans un intervalle de 3ans et celle de Shekar. D et al qui ont trouvé 1,6 % de masses cervicales suite à une étude de 58 patients dans un intervalle de 5ans, [11, 12].
– Selon le sexe :Dans notre étude le sexe féminin était prédominant soit 72,5 %, avec une sexratio de 0,37. Ces données corroborent avec celles de Schlumberger M et al qui ont trouvé une prédominance féminine [11]. Nous avons trouvé une prédominance féminine pour les KTT soit 3,92% dans notre étude. Dans les séries de Hoffman et al, ils ont rapporté une nette prédominance masculine soit 9,2% [28]. Nous avons noté une prédominance féminine de nodule thyroïdien soit 52,94%, par contre une étude réalisée par Boundy M et al au CHU du Point G à Bamakosur l’étude de la pathologie thyroïdienne en milieu hospitalier étaient de 54,2 % à prédominance féminine [13]. Nous avons noté une nette prédominance féminine soit 15,68% pour les lymphangiomes kystiques cervicaux contre 45,45% dans l’étude d’Osifo OD et al [6]. Dans les pathologies de la glande salivaire, le sexe féminin était le plus dominant dans notre étude soit 8/11 cas, par contre le sexe masculin prédominait dans l’étude de Diop KM et al à Dakar soient 12/18 cas [14].
– Selon l’âge :Dans notre étude, la tranche d’âge [60-74ans] a été la plus représentée soit 47,1% de l’effectif et des extrêmes allant de 6 ans à 85ans. L’âge moyen de découverte était 48,5 ans. Par contre dans l’étude de Kisra M réalisée à Rabat chez 53 patients, la tanche d’âge [10-15 ans] était la plus représentée soit 49,1 % de l’effectif avec un âge moyen de découverte de 5,86 ans [4]. L’âge de découverte des masses cervicales chez nos patients est variable d’une pathologie à une autre. Ainsi : Dans notre série 4 patients soit 33,33% des cas avaient moins de 10 ans au moment du diagnostic du kyste du tractus thyréoglosse. Ces kystes du tractus thyréoglosse sont principalement retrouvés chez le jeune enfant majoritairement avant l’âge de 10 ans dans la littérature [15, 16]. Dans notre étude, 33 patients présentant un nodule thyroïdien dont l’âge de découverte était supérieur à 40 ans avec une tranche d’âge [60-74 ans] soit : 35,2% des cas. Ce résultat concorde avec celui de Mccall et al [18]. Le lymphangiome kystique cervical s’exprimait dans 3,92% des cas avant 14 ans et l’âge moyen était de 13 ans dans notre étude nettement inférieure à celui trouvé par Chafik W et al qui avaient trouvé un âge moyen de 23 ans. Par contre Nguema et al ont retrouvé dans leur série un âge moyen inférieur à celui de notre étude qui était de 12 ans [19,20]. L’âge moyen des patients au diagnostic des glandes salivaires était de 45 ans dans notre étude, celle de Fontanel J et al rapportait un âge de 50 ans [21].
Signes associés
La tuméfaction, qui était le principal motif de consultation dans notre étude était douloureuse dans 23,5%, les signes associés étaient les palpitations soient 54,9% tous des patients présentant un nodule thyroïdien. Une mobilité à la déglutition était de 627% des cas. Les signes de compression des voies aérodigestives supérieures étaient présents dans notre étude sans mettre en jeu le pronostic vital, soient 11 cas tous présentant un nodule thyroïdien. Ces signes de compression des voies aéro-digestives supérieures (dyspnée, dysphagie, dysphonie) sans douleur ont été décrits au moment du diagnostic sans mettre en jeu le pronostic vital dans les 05 cas de Lymphangiome kystique cervical dans la littérature [17]. L’aspect clinique de la masse est un facteur pronostique, Il permet de guider le chirurgien par sa mobilité, illustrant son non adhérence aux organes de voisinage. Ces signes de compressions doivent être recherchés devant toute masse cervicale systématiquement. Ils peuvent témoigner d’une compression des voies aérodigestives supérieures, d’une infiltration nerveuse ou d’une localisation secondaire d’une tumeur maligne
Echographie cervicale a été réalisée chez tous les patients
Dans notre série devant les nodules thyroïdiens l’échographie cervicale a mis en évidence des nodules multilobés avec ou sans calcifications et avec des marges irrégulières respectivement dans les carcinomes papillaires de la thyroïde, dans les adénomes vésiculaires thyroïdiens. Ce qui concorde avec l’étude de Boundy M et al en 1995 à l’hôpital du Point G dont l’échographie a apporté des aspects hypo-échogènes avec ou sans présence de micro-calcifications dans les carcinomes papillaires et les adénomes de la thyroïde [13]. Elle a été réalisée chez 02 patients qui ont présenté les lymphangiomes kystiques cervicaux, et a mis en évidence une masse kystique latérale compressible, multilobée, à cloisons fines. Le même constat a été fait pour d’autres auteurs Chafik W et al à l’université de Mohamed V de Rabat [19]. Devant les masses parotidiennes, elle a mis en évidence dans le cylindrome de la parotide un aspect hétérogène avec limites régulières infiltrées du nerf facial, et un aspect hypoéchogène avec plus ou moins un contingent kystique dans les adénomes pléomorphes de la parotide. Elle n’a pas pu préciser le siège profond ou superficiel de la masse. Le même constat a été partagé avec la littérature [14]. L’échographie a montré une masse sous-cutanée kystique, bien limitée, médiane et anéchogène chez les 05 malades présentant un kyste du tractus thyréoglosse dans notre étude. Par contre une structure ovalaire médiane entre la base de la langue et l’isthme de la thyroïde dont le contenu était liquidien a été rapportée dans l’étude de Patin D et al et de Bonafos et al [25, 26]. L’échographie est l’examen à réaliser en première intention. Elle analyse de manière non invasive le caractère tissulaire ou liquidien de la masse et sa vascularisation. Elle détermine la taille de la lésion, ses rapports avec les vaisseaux et l’axe aéro-digestif ainsi que l’atteinte de la graisse [25].
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Table des matières
Dédicace
Remerciements
Liste des abréviations
I. Introduction
II. Objectifs
2.1. Objectif général
2.2. Objectifs spécifiques
III. Généralités
3.1. Rappels anatomiques
3.2. Les types de tuméfactions cervicales
4.1. Cadre et lieu d’étude
4.2. Patients et méthode
V. Résultats
5.1. Les caractéristiques sociodémographiques
5.2. Données cliniques
5.3. Données para-cliniques
5.4. Traitement
5.5. Evolution
VI. Commentaires et discussion
6.1. Aspects selon les données sociodémographiques
6.2. Signes associés
6.3. Etude para clinique
6.4. Aspects thérapeutiques
6.5. Les incidents opératoires
VII. Conclusion
VIII. Recommandations
IX. References
X. Annexes
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