Les manœuvres de disjoncteurs dans les réseaux à haute tension sont sources de perturbations en fonction de la charge commutée (réactance, condensateur, transformateur, ligne de transmission). Ces phénomènes physiques biens connus (surtensions, courants d’appels) se compliquent toutefois du fait de la complexité des réseaux de transport d’énergie et de leur interconnexion. Les perturbations engendrées ne restent en aucun cas localisées, mais contraignent souvent l’exploitant à dimensionner un réseau complet, ce qui induit un coût important. Ainsi, dans le cas des réseaux à très haute tension, au delà de 362kV, l’isolation des lignes et des postes est déterminée par la tenue en surtension de manœuvres et non plus par le choc de foudre.
Il existe plusieurs solutions pour contrôler les transitoires de manœuvres, comme les résistances et les inductances de pré-insertion à l’ouverture et la fermeture, qui permettent de limiter les courants et les tensions, les parafoudres qui limitent les surtensions, et enfin la solution dite « contrôlée » qui permet de choisir l’instant optimal en fonction de la tension réseau pour ouvrir ou fermer le disjoncteur. Cette dernière méthode a fait l’objet des développements techniques d’Alstom Grid depuis quelques années, car elle est plus économique que les autres méthodes. Alstom a conçu les dispositifs dénommés RPH2 et RPH3 pour répondre au besoin de manœuvres contrôlées de tous les types de charges comme réactance, condensateur, ligne de transmission et le transformateur de puissance sans flux rémanent .
Les manœuvres d’enclenchement et de déclenchement via les disjoncteurs HT
Appareillage électrique à haute tension
L’appareillage électrique à haute tension est l’ensemble des appareils électriques qui permettent la mise sous ou hors tension de portions d’un réseau électrique à haute tension (y compris pour des opérations de délestage). C’est un élément essentiel qui permet d’obtenir la protection et une exploitation sûre et sans interruption d’un réseau à haute tension. Ce type de matériel est très important dans la mesure où de multiples activités nécessitent de disposer d’une alimentation en électricité qui soit permanente et de qualité.
L’appellation « haute tension » regroupe l’ancienne moyenne tension (HTA) et l’ancienne haute tension (HTB), elle concerne donc les appareils de tension assignée supérieure à 1 000 V, en courant alternatif, et supérieure à 1 500 V dans le cas de courants continus. Selon la classification par fonction, ces appareils sont composés de : sectionneurs, interrupteurs, contacteurs, coupe-circuit à fusibles et disjoncteurs. Parmi eux, le disjoncteur est seul capable d’interrompre un courant de court-circuit et donc d’éviter que le matériel connecté sur le réseau soit endommagé. Il est destiné à établir, supporter et interrompre des courants sous sa tension assignée (la tension maximale du réseau électrique qu’il protège), selon la définition donnée par la Commission électrotechnique internationale. La coupure d’un courant électrique par un disjoncteur à haute tension est obtenue en séparant des contacts dans un gaz (air, SF6..) ou dans un milieu isolant (par exemple l’huile ou le vide). A l’heure actuelle, le disjoncteur SF6 est le plus répandu dans les applications industrielles.
Dans leur configuration actuelle, les disjoncteurs peuvent être équipés d’appareils électroniques permettant à tout moment de connaître leur état (usure, pression de gaz pour la coupure, etc.) et éventuellement de détecter des défauts par des dérives de caractéristiques, ce qui permet à l’exploitant de programmer les opérations de maintenance et de prévenir les risques de défaillance [14-15].
Pour la manœuvre des lignes longues, les disjoncteurs sont généralement équipés de résistances de fermeture pour la limitation des surtensions [16-17]. La résistance est située à l’extrémité de la chambre de coupure du disjoncteur, à l’intérieur d’une enveloppe métallique mais isolée de celle-ci par le SF6 contenu dans le pôle. Mais en pratique, cette technique nécessite des conceptions particulières de dimensionnement suivant les types de disjoncteurs donc rend ceux-ci plus coûteux.
Les disjoncteurs peuvent aussi être équipés de dispositifs de synchronisation à la fermeture et/ou à l’ouverture pour limiter les surtensions ou les courants d’appels à la manœuvre de lignes, de transformateurs à vide, de réactances shunt et de batteries de condensateurs. Ceci fait donc l’objet de notre étude.
Phénomènes généraux liés aux établissements et coupures de courants par un disjoncteur à haute tension
La coupure par un disjoncteur à haute tension est obtenue en séparant des contacts dans un gaz comme SF6 ou dans un milieu isolant. Après la séparation des contacts, le courant transite dans un arc électrique. Par exemple, le SF6 est porté à haute température et décomposé par le passage du courant. Il cesse d’être conducteur lorsque sa température est inférieure à 2000°C. Dans un disjoncteur à gaz, le courant est donc coupé en effectuant un soufflage intense sur l’arc pour le refroidir et l’interrompre. L’interruption du courant se fait généralement à un passage par zéro du courant alternatif. A cet instant, la puissance fournie par le réseau est nulle, la coupure est donc plus facile à réaliser. De manière réciproque, l’établissement du courant par disjoncteur à haute tension est obtenu en rétablissant les contacts. La vitesse de fermeture et le champ électrique du milieu sont des éléments clés pour définir une initialisation du courant dans le disjoncteur. La notion de préarc est introduite car le courant peut être pré-allumé avant le toucher physique des contacts.
Phénomènes d’enclenchement du transformateur de puissance
Courant d’appel du transformateur
Le transformateur de puissance est un élément indispensable des réseaux électriques. Il peut être opéré de façon occasionnelle (1 fois par an) ou de façon répétitive (1 fois par jour). La mise hors tension du transformateur génère peu de transitoires. Les transitoires se produisent surtout lors de l’enclenchement. L’enclenchement aléatoire des transformateurs peut produire des courants de formes asymétriques, de très grandes amplitudes, appelés « courants d’appel » . Ces courants sont riches en harmoniques et possèdent une composante apériodique. Pour mieux comprendre ce phénomène électrique, il est nécessaire de tout d’abord étudier un phénomène magnétique, le flux rémanent.
Champ magnétique rémanent
Il est connu que si l’on fait circuler un courant I dans une bobine entourant un tore magnétique, la densité de flux B dans le circuit magnétique augmente avec le champ magnétique H.
Si, maintenant, on fait décroître le courant I, et donc le champ H jusqu’à l’évanouissement, la densité de flux ne suit plus la même courbe, mais une courbe située au dessus de (b). En effet, quand on réduit le champ à zéro, les domaines que l’on vient d’orienter sous l’influence du champ Hm tendent à conserver cette orientation: c’est le phénomène d’hystérésis. Donc, lorsque le champ H devient nul, une densité de flux subsiste et conserve une valeur Br que l’on appelle densité de flux rémanent.
Revenons maintenant au transformateur de puissance, la mise hors tension de celui-ci laisse son noyau avec un état magnétique rémanent. Si le transformateur n’est pas complètement démagnétisé après la mise hors tension, cet état magnétique persiste jusqu’à l’instant d’enclenchement et peut donc produire des phénomènes transitoires.
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Table des matières
Introduction Générale
1 Manœuvres de transformateurs dans un réseau à haute tension
1.1 Manœuvres d’enclenchement et de déclenchement via les disjoncteurs HT
1.1.1 Appareillage électrique à haute tension
1.1.2 Phénomènes généraux liés aux établissements et coupures de courants par un disjoncteur à haute tension
1.2 Phénomènes d’enclenchement du transformateur de puissance
1.2.1 Courant d’appel du transformateur
1.2.2 Champ magnétique rémanent
1.2.3 Courant d’appel vs. Flux rémanent
1.3 Etat de l’art des manœuvres contrôlées
1.3.1 Généralités
1.3.2 Manœuvres contrôlées des bancs de condensateurs, réactances, lignes de transport de haute tension
1.3.3 Etudes des manœuvres de transformateurs de puissance
2 Modélisation générale d’un transformateur de puissance
2.1 Transformateur monophasé à basse fréquence
2.1.1 Transformateur monophasé linéaire sans saturation
2.1.2 Transformateur monophasé avec saturation
2.2 Arrachement du faible courant magnétisant d’un transformateur à vide
2.2.1 Généralités
2.2.2 Capacité d’un transformateur
2.2.3 Rendement magnétique du transformateur
2.2.4 Coupure d’un courant en régime établi
2.2.5 Relation flux rémanent vs. Courant d’arrachement
2.3 Modélisation d’un cycle d’hystérésis
2.3.1 Décomposition des pertes
2.3.2 Circuit équivalent du cycle d’hystérésis
2.4 Réalisation du circuit du transformateur sous EMTP-RV
2.4.1 Modèle global du transformateur monophasé
2.4.2 Contraintes logiciel avec solutions proposées
2.5 Extensions au transformateur triphasé
2.5.1 Couplages d’enroulements des transformateurs triphasés
2.5.2 Formes des noyaux triphasés et le couplage entre phases
2.5.3 Modélisation des transformateurs triphasés à flux libres ou avec l’enroulement triangle
2.5.4 Cas spécial du transformateur à flux forcés étoile-étoile – modèle BCTRAN
2.5.5 Influence du couplage entre phases/magnétique sur les flux rémanents dans les colonnes du transformateur
3 Décharges capacitives du transformateur de puissance et techniques de manœuvres associées
3.1 Modèle équivalent de la ligne
3.2 Phénomènes de décharges capacitives
3.3 Stratégie de manœuvres associée au processus de décharge
3.4 Méthode basée sur le modèle de prony
3.4.1 Modèle de Prony généralisé
3.4.2 Approche Matrix Pencil (MP)
3.4.3 Mise en œuvre de l’algorithme MP
3.4.4 Exemples d’application de l’algorithme MP
4 Applications des algorithmes de la manœuvre contrôlée du transformateur de puissance à vide
4.1 Influences du temps mécanique et préarc
4.1.1 Disjoncteur idéal
4.1.2 Définition de la dispersion mécanique
4.1.3 Comportement au réamorçage des disjoncteurs
4.1.4 Caractéristiques des pré-arcs
4.1.5 Effet combiné du temps mécanique et préarc
4.1.6 Modélisation du disjoncteur dans un circuit
4.2 Algorithmes pour différentes stratégies de manœuvre contrôlée
4.2.1 Refermeture contrôlée
4.2.2 Ouverture contrôlée
4.2.3 Stratégie optimale
4.2.4 Implantation des algorithmes sous EMTP
4.3 Simulations multiples de manouvres contrôlées du transformateur de puissance à vide et analyses statistiques
4.3.1 Modèle globale construit sous EMTP avec applications numériques
4.3.2 Résultats statistiques
5 Evaluation de flux rémanents
5.1 Modélisation du transformateur capacitif de tension (TCT)
5.1.1 Généralités des transformateurs de mesure
5.1.2 Modèle du TCT utilisé
5.1.3 Identification de la fonction de transfert
5.2 Mesure et estimation du flux rémanent
5.2.1 Erreur introduite par le TCT vis-à-vis du flux rémanent
5.2.2 Calcul du flux rémanent par identification
5.2.3 Compensation dynamique
5.2.4 Méthode de reconstitution
Conclusion Générale
Annexes