La lutte contre la maladie infectieuse a toujours été un challenge pour l’Homme, animée par l’instinct de survie, ou utopie à la recherche de l’éternité, elle est passée par plusieurs étapes au fil de l’histoire. Aujourd’hui plus que jamais, ce défi que l’on a cru gagné semblerait être perdu et le champ d’action face aux microbes régresse : d’un côté, l’adaptabilité des germes et l’évolution de ces derniers, mais aussi des erreurs dans l’action humaine face à ces germes. Actuellement, les maladies infectieuses sont un élément à prendre sérieusement dans les politiques de la santé publique. Le risque d’apparition de nouvelles épidémies et de leur propagation à l’échelle planétaire dans un monde connecté n’a jamais été aussi accru. (Dali,2015).
Toutefois le tracas le plus épineux demeure la résistance acquise des germes aux molécules utilisées dans la chimiothérapie antimicrobienne. Il faut noter que les traitements des maladies infectieuses représentent une classe particulière de médicament et ce, est dû essentiellement au fait que leur mauvaise utilisation n’engendre pas uniquement des effets non souhaitables au plan individuel mais aussi des effets délétères pour la communauté (Walsh et Wanbcezwicz, 2003). La vitesse avec laquelle la résistance microbienne se développe pèse lourdement, et accable, au moment où la marge de manœuvre se voit réduire. Quelle alternative alors peut-on faire face à cette évolution qui échappe à notre contrôle ? Deux visions qui ne sont pas totalement opposés, elles peuvent même être complémentaires. La première tend à faire prolonger la durée de vie des molécules existantes sur le marché, essentiellement par une meilleure compréhension des mécanismes physiopathologiques des germes en cause, mais aussi, des mécanismes d’action des antibiotiques à l’échelle moléculaire, tout cela accompagné d’une rationalisation de la prescription et l’utilisation de ces médicaments (Meridith et al., 2015). Une autre pensée penche plutôt vers la recherche de nouvelles molécules. Il est à noter que l’évolution de cette branche de thérapie était historiquement portée par deux courants distincts et parallèles, celui de la recherche de molécules dans la nature et de l’autre coté la synthèse de molécules nouvelles par des procédés purement chimiques (Walsh et Wencewikc, 2003).
Maladies émergentes ou ré-émergentes
Une maladie émergente est définie comme « une infection dont l’incidence chez les humains a augmenté au cours des deux dernières décennies ou dont le risque d’augmentation de l’incidence est vraisemblable dans un futur proche » (Thomas et al,.2003). Les émergences des maladies infectieuses transmissibles sont en 2018 une préoccupation majeure pour les responsables de santé publique humaine ou animale. Pour la plupart, les maladies infectieuses émergentes trouvent leur origine dans le monde animal, et en voici quelques exemples :
Maladies anciennes ré-émergentes
– Peste : épidémie en Inde en 1994, pays indemne depuis 1956; épidémie à Madagascar dans la ville de Mahajanga en 1991, dernier cas en 1928; épidémie à Oran (Algérie) en 2003, 50 ans après le dernier cas; épidémie au Kirghizistan en 2013, 30 ans après le dernier cas dépisté.
– Trypanosomiase humaine africaine: réémergence en Afrique centrale (Angola, RDC, Soudan, RCA, Congo, pays ayant été ou étant en guerre déclarée ou larvée) d’une maladie oubliée 1970- 1980.
Maladies anciennes
Connues avant 1980, émergentes dans d’autres pays ou dans d’autres régions d’un même pays :
– Infection à virus Monkey-pox: le virus Monkey-pox isolé chez des macaques en 1958 a causé une première épidémie humaine en 1970 en RDC. Des cas ont été rapportés en 2003 aux États-Unis.
– Infection à virus Chikungunya: Connue en Afrique depuis 1952, puis en Asie, l’infection à virus Chikungunya(CHIK) a atteint l’océan Indien en 2004-2005, puis les Caraïbes et le continent américain en 2013 où la maladie s’est propagée dans 33 pays et territoires. Puis, le virus Chikungunya CHIKV a atteint l’Océanie en 2014.
– Maladie à virus Ebola : connue en Afrique centrale depuis 1976, la maladie à virus Ebola (MVE) a «explosé» durant l’été 2014 en Afrique de l’Ouest dans 3 pays : la Guinée, le Libéria et la Sierra Léone. L’incidence des cas a ensuite commencé à diminuer grâce à l’intensification rapide des capacités de traitement, d’isolement et d’inhumation sûre dans les 3 pays. La fin de l’épidémie a été déclarée la fin mars 2016.
– Maladie à virus Zika: la première épidémie est survenue dans le Pacifique (île de Yap en Micronésie) en 2007. La deuxième épidémie a touché la Polynésie en 2013. L’épidémie actuelle a atteint l’Amérique du Sud et l’Amérique centrale en 2015. Le virus Zika a été détecté en 2015 en Afrique au Cap Vert. Puis, en décembre 2015 dans les départements français d’Amérique. La menace plane sur les États-Unis et l’Europe : un premier cas de virus Zika a été dépisté au Texas après un voyage au Salvador ; cinq cas importés ont été confirmés fin janvier 2016 en France métropolitaine chez des touristes de retour en métropole. L’OMS a estimé, dans son rapport du 01/02/2016, que nous étions face à une « urgence de santé publique de portée mondiale ».
Maladies nouvelles émergentes
Dans le monde depuis 1980. L’infection à VIH/Sida signait le renouveau des maladies infectieuses, marqué par l’émergence de nouvelles maladies transmissibles, mais aussi par la réémergence de maladies anciennes.
Epidémiologie des maladies infectieuses
Avec une mortalité de près de 15 millions par année, les maladies infectieuses et parasitaires sont responsables de 26,3 % des décès causés par l’ensemble des maladies et des traumas survenant sur la planète (OMS, 2002). Les principaux types d’infections responsables de décès sont les infections respiratoires aigües (3,9 millions par an), le sida (2,9 millions par an), les maladies diarrhéiques (2 millions par an), la tuberculose (1,6 million par an) et le paludisme (1,1 million par an). La rougeole cause encore 745 000 décès en dépit de l’existence d’un vaccin efficace, bien toléré et abordable (Sansonetti et Orth, 2006).
Plus de 90 % des maladies infectieuses humaines surviennent dans les pays en voie de développement, particulièrement chez les enfants, dans les régions les plus déshéritées, où l’hygiène générale et individuelle est insuffisante et où les politiques de prévention sont quasi inexistantes, inadaptées ou insuffisamment financées (McMichael, 2004). Cependant, le développement industriel génère aussi dans les pays industrialisés de nouvelles conditions d’émergence infectieuse, comme les infections alimentaires via la chaîne du froid ou de l’industrialisation de la chaine alimentaire, les infections nosocomiales, et les infections opportunistes chez les patients immunodéprimés et les infections des voyageurs (McMichael et Butler, 2004). Bien que de moindres prévalences dans les pays industrialisés, les maladies infectieuses y sont encore responsables d’une mortalité non négligeable. Il est également important de signaler qu’un pourcentage important de cancers (de 15 à 20 %) sont probablement causé par un agent infectieux viral ou bactérien (Sansonetti et Orth, 2006). Les cancers du foie, du col utérin, du cavum et de l’estomac pourraient être quasi éradiqués par la mise au point ou l’utilisation (lorsque disponibles) de vaccins, respectivement contre les virus des hépatites B (vaccin disponible) et C, certains papillomavirus (vaccins en partie disponibles), Epstein barr virus et Helicobacter pylori. Il est par ailleurs probable que des infections constituent un facteur de risque dans l’étiologie de maladies touchant une large fraction de la population du globe, telles que l’athérosclérose avec Chlamydia pneumoniae (Yamashita et al., 1998) et le diabète avec Helicobacter pylori (Jeon et al., 2012). Les décès et la morbidité liés aux maladies infectieuses ont un coût économique et social considérable. Ce poids porte essentiellement sur les populations les plus défavorisées de la planète (McMichael et Butler, 2004). Grâce à l’index Daly (Disability adjusted life years) qui intègre le nombre annuel de vies perdues à cause d’une maladie donnée, multiplié par un coefficient de ressources par individu, les pertes économiques subies peuvent être évaluées. Avec un Daly de 30 %, les maladies infectieuses représentent la fraction la plus élevée du poids socio économique total des maladies. Ce taux est plus élevé comparativement aux maladies neuropsychiatriques (12,9 %), la traumatologie (12,2 %), la pathologie maternelle périnatale (11 %), les maladies cardio-vasculaires (9,9 %) et le cancer (5,1 %) (Sansonetti et Orth, 2006). Les simulations montrent, particulièrement dans le cas de la tuberculose, du sida et du paludisme, que la prévention et le contrôle des maladies infectieuses dans les régions endémiques représentent une approche socio-économique rentable et humaniste (Sansonetti et Orth, 2006; OMS, 2002).
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
Chapitre I : les maladies infectieuses
1. Définition
2. Généralités
3 . Maladies émergentes ou ré-émergentes
3. 1 – Maladies anciennes ré-émergentes
3. 2 – Maladies anciennes
3. 3 – Maladies nouvelles émergentes
4 – Epidémiologie des maladies infectieuses
5. Les agents infectieux
5.1. Les virus
5.2. Les bactéries
5.3. Les champignons parasites
5.4. Les protozoaires
6. Les biofilms
6.1. Définition
6.2. Les biofilms dans les divers environnements
6.3. La formation d’un biofilm
6.4. Le biofilm dans la résistance bactérienne aux traitements antimicrobiens
Chapitre II : Les traitements anti infections
1. Les antibiotiques
1.1 Généralités
1.2 . Le mode d’action des antibiotiques
1.3. Toxicité des Antibiotiques
1.4. La résistance aux antibiotiques
1-5 Epidémiologie de la résistance aux antibiotiques
2. Les antifongiques
2.1. Généralités
2.2. Mode d’action des antifongiques
2.3. Toxicité des antifongiques
2.4. La résistance aux antifongiques
2.5. Epidémiologie de la résistance aux antifongiques
3. Les molécules utilisées en chimiothérapie virale
3.1 .Généralités
3.2. Mode d’action des antiviraux
3.3. Toxicité des antiviraux
3.4. Résistance aux antiviraux
3.5. Epidémiologie de la résistance aux antiviraux
4. Autres molécules
5. Les nouveaux traitements
5.1 . Les bactériophages
5.1-1 Les propriétés et mécanismes d’action des bactériophages
5.1-2- L’avenir de la phagothérapie
5.1-3- Inconvénients de la phagothérapie
5. 2 Les peptides antimicrobiens
5.2-1 Les peptides cationiques antimicrobiens (PCAs)
5. 2-1-1 Aspects structuraux
5. 2-1-2 Mode d’action
5. 2-2 Les peptides anioniques antimicrobiens
5. 2-3 Les applications des peptides antimicrobiens
5. 2.4. Les inconvénients des PAM
6. Les plantes
7- Les Huiles essentielles
7.1. Définition et répartition dans le règne végétal
7.2. Aperçu historique
7.3. Propriétés physiques
7.4.Propriétés chimiques
7.4.1. La composition chimique des huiles essentielles
7-4-2- Constituants et structures
7.5.Les activités biologiques des huiles essentielles
7.6. Les activités antimicrobiennes des huiles essentielles
7.7. Activité anti biofilms des huiles essentielles
7.8. Mécanisme d’action des huiles essentielle
7.9. Activité antioxydante des huiles essentielles
7.9.1. Le stress oxydatif
7.9.2. Les antioxydants
7.10. La toxicité des huiles essentielles
Chapitre III : Description des plantes utilisées
1. La menthe poivrée (Menthax piperita)
1.1. Présentation
1.1.1 Origine et culture
1.1.2. Bref historique sur l’utilisation de la plante
1.1.3. Description botanique
1.1.4. Position systématique
1.1.5. Appellations
1. 2. L’huile essentielle de la menthe poivrée
1.2.1. Composition chimique
1. 3. Utilisations et propriétés biologiques
1.4. Effets thérapeutiques – aromathérapie
1. 5. Toxicité
2. Le Bigaradier ( Citrusaurantium)
2.1. Présentation
2.1.1. Origine et culture
2.1.2. Bref historique sur l’utilisation de la plante
2. 1.3. Description botanique
2.1.4. Position systématique
2.1.5. Appellations
2.2. L’huile essentielle du bigaradier
2. 3. Composition chimique
2.4. Utilisations et propriétés biologiques
2.5. Effets thérapeutiques – aromathérapie
2.6. Toxicité
CONCLUSION GENERALE